
projet soumis à son examen était de 3 234 000 francs, alors qu’en réalité le projet pouvait
être estimé à un coût de 10 265 000 francs. De sorte que le document en question «ne
permettait pas de connaître le coût total du projet tel qu'il pouvait raisonnablement être
apprécié» au moment de l'enquête.
Mais en dehors des erreurs aussi grossières, la jurisprudence est plus nuancée.
Progressivement, le juge a accepté de mesurer l'incidence concrète qu’a pu avoir
l’insuffisance dénoncée par les requérants sur la qualité de l’information délivrée au public;
en d'autres termes, les lacunes invoquées par un requérant ont-elles été susceptibles de
«nuire à la bonne information du public»? La jurisprudence, d'inspiration commune avec
l’arrêt Danthony, est désormais bien fixée en ce sens et s’applique même en matière
d'étude d'impact, qui constitue désormais la pièce centrale du dossier. Le principe est que
«les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles
de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette
étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population
ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité
administrative » (V6).
17 - La question de la communication du dossier d’enquête aux tiers
171 - Règle générale
Aux termes de l’article L. 123-11 du Code de l'environnement, le dossier d'enquête
publique est désormais communicable à toute personne, à sa demande et à ses frais, et
non plus aux seules associations agréées. La différence par rapport à l’ancien régime est
donc de taille.
Plus encore, l'article R. 123-9 du Code de l’environnement précise qu’une telle demande
de communication est recevable à compter de la publication de l’arrêté d'ouverture de
l’enquête, qui lui-même intervient souvent un mois avant l’enquête elle-même.
Concrètement, cela signifie, au moins en théorie, qu'il sera possible de disposer du
dossier avant même l’ouverture de l’enquête.
Sont également communicables aux frais de la personne en faisant la demande, pendant
toute la durée de l’enquête, les observations émises par le public.
En termes de transparence, il s’agit bien évidemment d’une avancée importante. Au
demeurant, le nouveau principe posé n'est pas sans inconvénient. Les modalités de
communication du dossier ne sont en effet pas précisées dans le Code de
l'environnement. Ainsi, en l’absence de toute référence explicite à la loi de 1978 sur
l'accès aux documents administratifs, on peut s’interroger sur le délai dans lequel les
documents dont la communication est demandée doivent être transmis. Le délai de droit
commun d’un mois imparti à l'Administration est-il applicable ? Si tel est le cas, le dossier
sera souvent communiqué, en pratique, après l'achèvement de l'enquête. Au reste, il sera
parfois difficile pour certaines collectivités dépourvues de services de reprographie de
répondre dans un délai aussi bref, eu égard au volume habituel des dossiers d’enquête
publique.
On attend donc avec impatience les premières solutions jurisprudentielles précisant les
sanctions encourues par l'autorité responsable en cas de refus de faire droit à une telle
demande de communication. On pourrait concevoir que la solution jurisprudentielle soit
assez radicale. En son temps, la reconnaissance du droit à communication « général »,
issu de la loi de 1978, a été assez énergique : c’est à ce prix seulement que l’on peut faire
respecter la garantie de procédure accordée aux administrés...
Reste donc, au-delà de la première impression, toujours favorable à la transparence, à
s'interroger sur la portée pratique et même théorique de cette évolution. L'enquête n'est
plus seulement l'occasion d’une présentation un peu superficielle du projet au public, qui
ne pouvait, à vrai dire, s'en imprégner véritablement. Le contraste était souvent saisissant