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- D'une part, dans le texte même, Nietzsche indique que ce que
les dogmatiques ont voulu faire, c'est d'élever des "édifices
philosophiques ( ou des constructions philosophiques ) sublimes et
inconditionnés", dont en fait la "pierre angulaire" était incapable de
rien fonder, parce qu'elle-même n'était qu'une superstition ou,
comme il va dire ensuite dans la Première partie du même ouvrage,
un préjugé : difficile de ne pas reconnaître là le projet de construire
des systèmes, c'est-à-dire le projet d'une fondation absolue du savoir
par son édification sur la base d'un premier principe inconditionné -
disons simplement que ce projet de fonder la totalité du savoir sur un
premier principe inconditionné, aussi vieux que la philosophie elle-
même, n'a fait expressément référence à la notion de système
qu'assez tardivement, à partir de Leibniz, mais que ( ce serait par
exemple le point de vue de Hegel, que Nietzsche ici partage, à ceci
près qu'il dénonce ce que Hegel valorisait ) toute la philosophie en
tant que recherche d'un principe inconditionné ( ce que Nietzsche
appelle la dogmatique ) est en chemin vers cette recherche du
système que les Modernes, à partir de Leibniz, idenfieront et
thématiseront comme telle. Ce pourquoi Nietzsche peut ici, dans
cette Préface, donner comme exemples de philosophie dogmatique la
doctrine du Védanta en Asie et le platonisme en Europe.
- De même, on constate tout aussi bien que, dans un des
fragments destinés à la Volonté de Puissance ( III, 379, in éd.
Bianquis, Gallimard, II, fragment d'ailleurs proche de Par-delà,
puisque daté de 1885 ), Nietzsche donne pour exemple des "esprits
dogmatiques" Platon, encore une fois, et Dante, à savoir des