Nombres Premiers Dans cette partie, on appelle nombre tout entier naturel non nul. 1 Définition Définition 1 Soit p un nombre. On dit que p est un nombre premier si p ≥ 2 et si les seuls diviseurs de p sont 1, −1, p et −p. On note P l’ensemble des nombres premiers. Exemple 2 Les entiers 2, 3, 5, 7 et 11 sont des nombres premiers. Les entiers 1 et 4 ne le sont pas. Remarque 3 Il ne faut pas confondre ”premiers entre eux” et ”premier”, en effet 4 et 15 sont premiers entre eux mais 4 n’est pas un nombre premier (15 non plus). 2 Crible d’Eratosthène Recherchons tous les nombres premiers plus petits que 100 par exemple. Le nombre 1 n’est pas un nombre premier. On l’enlève. Le nombre 2 est premier. Tous les multiples de 2 autres que 2 ne sont pas premiers et sont donc otés. Le nombre 3 est premier. On enlève ensuite tous les multiples de 3 strictement supérieurs à 3 (ils ne sont pas premiers). Le plus petit nombre restant est 5, qui est donc premier. On enlève tous les multiples de 5 strictement supérieurs à 5. Cette méthode permet donc de proche en proche d’obtenir les nombres premiers plus petits que 100. 1 2 21 22 41 61 81 3 3 23 43 4 5 6 7 8 9 10 24 25 26 27 28 29 30 11 31 44 45 46 48 49 50 51 52 62 63 64 65 66 47 67 82 83 84 85 86 87 42 12 13 14 15 16 32 33 34 35 36 17 37 54 55 56 57 68 69 70 71 72 53 73 88 89 90 91 92 93 18 19 20 38 39 40 74 75 76 77 78 59 79 94 95 96 97 98 99 58 60 80 100 Nombres premiers et divisibilité Proposition 4 Soit p un nombre, p ≥ 2. Il y a équivalence entre : 1. l’entier p est un nombre premier. 2. les seuls entiers non premiers avec p sont les multiples de p. 3. le nombre p est premier avec 1, 2, . . . , p − 1. Démonstration. On va montrer 1 =⇒ 2 =⇒ 3 =⇒ 1 Supposons que p est un nombre premier. Soit a un entier non premier avec p. Soit d = pgcd(a, p), on a d 6= 1, or d divise p et d est positif donc d = p. Comme d divise aussi a, on en déduit que p divise a. Soit p un nombre tel que les seuls entiers non premiers avec p sont les multiples de p. Soit k ∈ {1, 2, . . . , p − 1} et d = pgcd(k, p). Comme d divise p, on a d = 1 ou d = p. Si d était égal à p alors p diviserait k et on aurait p ≤ k ce qui est exclu. Donc d = 1 donc p et k sont premiers entre eux. Supposons que le nombre p est premier avec 1, 2, . . . , p − 1. Soit d un diviseur positif de p. Alors d ≤ p et pgcd(d, p) = d. Si 1 < d < p alors pgcd(d, p) = 1 par hypothèse et l’on aurait d = 1. Donc d = 1 ou d = p. Donc p est un nombre premier. Corollaire 5 Soit p un nombre premier. Pour tout a ∈ Z, les entiers a et p sont premiers entre eux si et seulement si p ne divise pas a. Corollaire 6 Soit p et p0 deux nombres premiers. Alors p et p0 sont premiers entre eux si et seulement si p 6= p0 . Démonstration. Si pgcd(p, p0 ) = 1 alors p 6= p0 . Si p 6= p0 alors p0 ne divise pas p (sinon p ne serait pas un nombre premier) et par conséquent pgcd(p, p0 ) = 1. Lemme 7 Lemme d’Euclide. Soit a et b deux entiers relatifs et soit p un nombre premier. Si p divise ab alors p divise a ou p divise b. Démonstration. .On sait que p divise ab, si p ne divise pas a alors alors p est premier avec a, donc p divise b (théorème de Gauss). Corollaire 8 Dans Z/pZ avec p premier on a ȧ = 0̇ ou ȧ × ḃ = 0̇ =⇒ ḃ = 0̇ Donc il n’y a pas de diviseurs de zéros dans Z/pZ Remarque 9 On pouvait déduire ce résultat des deux faits connus suivants : tous les éléments non nuls de Z/pZ sont inversibles et un élément de Z/nZ ne peut pas être à la fois inversible et diviseur de zéro. 4 Décomposition en facteurs premiers Définition 10 Soit a ∈ N∗ . Un nombre premier p qui divise a s’appelle un facteur premier de a. Tout facteur premier p de a vérifie √ p≤ a Exemple 11 L’entier 3 est un facteur premier de 12. Les entiers 1 et −1 n’admettent pas de facteur premier. Démonstration. Soit D = {k ∈ N; 2 ≤ k et k | a}. L’ensemble D est fini et non vide (il contient a). Soit p son plus petit élément. Alors p ≥ 2 et p | a. Soit d un diviseur positif de p différent de 1. Alors 2 ≤ d ≤ p et d divise a. Si d ≥ 2, d ∈ D. Comme p est le plus petit élément de D, p ≤ d donc d = p. Donc p est un nombre premier. Donc p est un facteur premier de a. Supposons que a n’est pas premier donc a = pq avec q 6= 1, donc q ∈ D, donc q ≥ p. D’où p2 ≤ pq = a. Exemple 12 Soit a = 491. On veut savoir si a est premier ou pas. On teste si a est divisible par 2, par 3, par 5, par 7, par 11, par 13, par 17, par 19. Le nombre premier suivant est 23. Comme 232 = 529 > 491, 491 est un nombre premier. Proposition 13 L’ensemble P des nombres premiers est infini. Démonstration. Soit P l’ensemble des nombres premiers. On sait que P est non vide (il contient les entiers 2, 3, 5, etc). Supposons qu’il est fini, de cardinal N , c’est à dire que P = {p1 , . . . , pN }. Posons alors a = 1 + p1 · · · pN . Comme a ≥ 2, il admet un facteur premier p donc p ∈ P donc il existe m tel que p = pm . Mais alors pm divise a − p1 · · · pN = 1, ce qui est impossible. Définition 14 Soit a ∈ Z∗ . Soit p un nombre premier. L’ensemble {m ∈ N, tels que pm | a} admet un plus grand élément, noté vp (a) et appelé p−valuation de a ou indice de multiplicité de p dans a ou exposant de p dans a. Exemple 15 12 = 22 × 3 donc v2 (12) = 2 et v3 (12) = 1. Si x = 3α × 5β alors v3 (x) = α et v5 (x) = β. Théorème 16 Décomposition en facteurs premiers. Soit a ∈ Z tel que |a| ≥ 2. Il existe ε ∈ {−1, 1}, s ∈ N∗ , des nombres premiers p1 < p2 < · · · < ps et des entiers naturels non nuls m1 , . . . , ms tels que ms 1 a = ε pm 1 · · · ps De plus, cette décomposition est unique et m1 = vp1 (a), . . . , ms = vps (a). Démonstration. Unicité de la décomposition. Avec des notations évidentes, supposons que ms 1 a = εpm = ε0 q1n1 · · · qrnr . Si a > 0 alors ε = ε0 = 1 et si a < 0 alors ε = ε0 = −1. 1 · · · ps Soit i, 1 ≤ i ≤ s. Supposons que pi soit différent de q1 , . . . , qr . Alors pi est séparément premier avec q1 , . . . , qr donc séparément premier avec q1n1 , . . . , qrnr donc premier avec q1n1 · · · qrnr = p. Mais ceci est en contradiction avec le fait que pi est un facteur premier de p. On montre ainsi que {p1 , . . . , ps } = {q1 , . . . , qr }. On en déduit alors que s = r puis que p1 = q1 , . . . , ps = qs . Existence de la décomposition. Soit a ≥ 2. On pose ε = 1. Considérons l’ensemble P des facteurs premiers de a. On sait qu’il est non vide, et qu’il est fini (tout facteur premier est inférieur à a). Soit p1 , . . . , ps ses éléments, avec p1 < p2 · · · < ps . Pour chacun de ces facteurs, soit Mi = {m ∈ m m N∗ ; p m i |a}. Ce sont des ensembles non vides (par définition des pi ) et finis (pi |a =⇒ pi ≤ a =⇒ m ≤ ln(a)/ ln(pi )). Soit mi le plus grand élément de Mi . Comme a est séparément divisible par ∗ ms 1 pm 1 , . . . , ps premiers entre eux deux à deux, a est divisible par leur produit. Il existe q ∈ N tel que m1 ms a = p1 · · · ps · q. Si q ≥ 2, q admet un facteur premier qui serait aussi un facteur premier de a. i +1 Il existe alors i avec 1 ≤ i ≤ s tel que q = pi . Mais alors pm divise a, ce qui est impossible par i définition de mi . Donc q = 1. Si a ≤ −2, on pose ε = −1 et on décompose |a|. Exemple 17 L’entier a = 84 admet pour décomposition en facteurs premiers a = 22 × 3 × 7. Proposition 18 Soit a et b deux entiers relatifs non nuls. Alors pour tout nombre premier p, vp (ab) = vp (a) + vp (b) L’entier a divise b si et seulement si pour tout nombre premier p, vp (a) ≤ vp (b) Proposition 19 Soit a1 , . . . , an des entiers relatifs non nuls. On a : pgcd (a1 , . . . , an ) = Y p∈P pαp et ppcm (a1 , . . . , an ) = Y p βp p∈P où αp = min(vp (a1 ), . . . , vp (an )) et βp = max(vp (a1 ), . . . , vp (an )) pour tout p ∈ P. Proposition 20 Soit a ∈ N∗ . Alors a est un carré parfait si et seulement si pour tout p ∈ P, vp (a) est pair.