réalités Thérapeutiques en Dermato-Vénérologie # 229_Janvier 2014
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des molécules jugées les moins impu-
tables sera alors discutée au cas par cas,
éventuellement après la réalisation de
tests cutanés si l’activité de la tubercu-
lose autorise le délai de réalisation de
ces tests.
En cas de tuberculose active avec HS
aux traitements anti-BK, la substitution
dans les schémas thérapeutiques clas-
siques de l’éthambutol et de l’isoniazide
par une fluoroquinolone peut être une
solution, dont l’efficacité est cependant
encore en cours d’évaluation. Enfin,
des protocoles d’induction de tolérance
ont été proposés pour l’isoniazide et la
rifampicine, mais peu d’équipes les uti-
lisent en pratique [4].
[
Effets indésirables
pulmonaires des traitements
indiqués en dermatologie
1. Méthotrexate
La principale complication pulmonaire
du méthotrexate (MTX) est la pneumo-
pathie d’hypersensibilité (HS). Même
si cette complication n’est pas spéci-
fique de l’indication dermatologique
du MTX, elle doit être connue du der-
matologue qui a fréquemment recours à
cet immuno suppresseur pour traiter le
psoriasis et d’autres dermatoses inflam-
matoires. L’incidence de la pneumopa-
thie d’HS est estimée entre 1 et 3,9 %
patients traités par an [5]. Le risque de
survenue est indépendant de la dose et
de la durée du traitement par MTX, et
la majorité des cas surviennent dans la
première année de traitement. Plusieurs
facteurs de risque ont été identifiés : l’âge
élevé, le diabète, l’hypoalbuminémie,
une fonction pulmonaire altérée avant
mise en route du MTX et des antécédents
de pneumopathie d’HS lors d’un traite-
ment antérieur par MTX.
Le diagnostic de pneumopathie d’HS
repose sur un faisceau d’arguments qui
sont, outre la prise médicamenteuse :
avec certitude, les molécules anti-BK qui
semblent le plus souvent responsables
d’urticaire sont le pyrazinamide, l’iso-
niazide, la rifampicine et la streptomy-
cine. En présence de signes d’anaphy-
laxie pouvant mettre en jeu le pronostic
vital, une réaction immuno-allergique
vraie doit être suspectée et tout ou par-
tie du traitement anti-BK doit être arrêté.
L’imputabilité de la rifampicine est alors
souvent considérée comme probable en
première intention, et confirmée par la
régression rapide des symptômes d’HS
après son arrêt. Une réintroduction des
autres anti-BK sera ensuite discutée au
cas par cas, éventuellement après la réa-
lisation de tests cutanés.
En ce qui concerne les réactions d’HSR,
leurs manifestations cliniques peuvent
aller du simple exanthème maculopapu-
leux, relativement fréquent, à la nécro-
lyse épidermique toxique beaucoup plus
rare (syndromes de Stevens-Johnson et
de Lyell, principalement décrits avec la
rifampicine et la streptomycine). Sont
aussi rapportés des tableaux de DRESS
(drug reaction with eosinophilia and
systemic symptoms, principalement
avec la rifampicine) et de PEAG (pustu-
lose exanthématique aiguë généralisée).
En cas d’exanthème maculopapuleux
sans signe de gravité (pas d’atteinte
muqueuse, pas de décollement cutané,
pas de pseudo-cocarde, pas d’anomalie
biologique), il est possible d’arrêter un
par un les traitements suspects et de
discuter ensuite leur réintroduction ulté-
rieure prudente. En effet, comme c’est
le cas avec les antirétroviraux anti-VIH,
l’interaction des différentes molécules
anti-BK, lorsqu’elles sont instaurées
simultanément, peut expliquer la sur-
venue d’une réaction cutanée qui ne
se reproduira pas systématiquement
lorsque les molécules seront introduites
de façon séquentielle (mais rapprochée
pour éviter l’induction de résistance). En
cas de signe de gravité, l’ensemble des
anti-BK devra être arrêté, de même que
les autres traitements potentiellement
imputables. La réintroduction ultérieure
réactions d’HS sont imprévisibles et
indépendantes de la dose des anti-BK,
mais plusieurs cofacteurs potentialisent
leur survenue : une immunosuppres-
sion en particulier si celle-ci est liée à
une infection par le VIH, un alcoolisme
chronique, une maladie auto-immune
sous-jacente, une insuffisance rénale ou
hépatique préexistante, une polymédi-
camentation et un âge élevé. En outre,
la mauvaise observance thérapeutique
est responsable d’arrêts intempestifs
des anti-BK, ce qui augmente le risque
de développer une réaction d’HS lors de
la reprise du traitement.
Les réactions d’HS cutanées surviennent
classiquement au cours des deux pre-
miers mois de traitement. Il peut s’agir
de réactions de type HS immédiate (HSI)
ou HS retardée (HSR). Les réactions de
type HSI sont les plus fréquentes dans la
littérature et dans notre pratique. Elles
se manifestent par une urticaire super-
ficielle ou profonde (angiœdème) ou
par des signes systémiques d’anaphy-
laxie (signes de choc, troubles digestifs,
bronchospasme).
Dans la série de Fekih [2] portant sur
30 malades immunocompétents ayant
présenté une réaction d’HS parmi
2 279 malades traités pour une tubercu-
lose : 22 avaient présenté une urticaire et 3
une réaction anaphylactique avec fièvre,
tandis que 2 d’entre eux avaient déve-
loppé un exanthème maculopapuleux.
Dans notre pratique, il s’agit le plus sou-
vent d’une urticaire superficielle et pro-
fonde qui peut être diffuse mais dépour-
vue d’atteinte mettant en jeu le pronostic
vital. Il convient alors de tenter de pour-
suivre le traitement en lui associant un
antihistaminique, et il n’est pas rare
d’observer un amendement progressif de
l’urticaire. Dans le cas contraire, il sera
nécessaire d’arrêter de façon séquen-
tielle les traitements en cours (en ne
négligeant pas l’imputabilité potentielle
d’autres traitements associés). Même si
leur imputabilité a rarement été prouvée