Principes généraux de la chirurgie oncoplastique et de la

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La Lettre du Sénologue - n° 25 - juillet/août/septembre 2004
PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE ONCOPLASTIQUE
La chirurgie oncoplastique consiste à utiliser les techniques de
chirurgie plastique dans le traitement des cancers. En cancéro-
logie mammaire, elle a d’abord été utilisée dans le traitement
des séquelles fonctionnelles et esthétiques. Elle peut maintenant
être employée dès le primo traitement.
Elle permet également d’augmenter les indications du traitement
conservateur du cancer du sein.
Traitement conservateur du cancer du sein
D’un point de vue carcinologique, le traitement conservateur est
défini par lexérèse de la tumeur avec des marges de tissu sain
suffisantes. En cas de lésion infiltrante, la chirugie tumorale doit
être associée à une expertise ganglionnaire. Pour les petites
tumeurs, on peut utiliser la technique du ganglion sentinelle. Dans
les autres cas, on pratique un curage axillaire “classique” qui
enlève les ganglions des étages I et II de Berg. Quel que soit le
type de lésion (infiltrante ou in situ), le traitement adjuvant com-
prend toujours une irradiation de la glande mammaire, les chaînes
mammaires internes et susclaviculaires étant irradiées en fonction
de la localisation de la tumeur et/ou de l’atteinte ganglionnaire.
Les indications “standards” pour le traitement conservateur sont
les sions ( 1 ) : de moins de 30 mm de grand axe, unifocale,
située à distance de l’aréole, sans signe inflammatoire, et sans
composante intracanalaire étendue.
Résultats esthétiques du traitement conservateur
Le traitement conservateur, justifié sur le plan carcinologique,
doit répondre à un impératif esthétique tel qu’il est défini dans
les SOR ( 2 ).
On estime que dans 20 à 25 % des cas, le traitement conservateur
s’accompagne de quelles liées à la chirurgie et à l’irradiation (3, 4).
Les quelles postopératoires sont essentiellement :
une asymétrie de volume ;
une asymétrie de position de l’aréole ;
une déformation du sein par perte de substance glandulaire ou
par rétractation cutae ;
une cicatrice élargie, rétractile et inesthétique, voire une bride
c i c a t r i c i e l l e .
Ces mauvais sultats esthétiques peuvent être liés soit à la patiente,
soit aux caractéristiques tumorales, soit aux techniques de traite-
m e n t .
Pour la patiente, il peut s’agir d’une surcharge pondérale, d’une
intoxication tabagique ou d’un diabète.
Pour la tumeur, on sait que deux facteurs sont essentiels: le rapport
du volume tumoral par rapport au volume mammaire d’une part, et
la localisation tumorale d’autre part.
Le traitement chirugical peut aussi être responsable de mauvais sul-
tats. Les voies d’abords utilisées doivent être les plus disctes pos-
sibles. Il faut veiller à combler la perte de substance glandulaire : soit
par un simple capitonnage, soit en utilisant des lambeaux glandu-
l a i r e s . On sait que le mauvais comblement dans les segments infé-
rieurs entraîne une déformation avec invagination et bascule de
l’aole vers le bas alisant au pire un aspect en “bec d’aigle”. Dans
le quadrant supéro-externe, on a souvent une ascension de l’aréole
en dehors et en haut ( 5 - 7 ).
La radiothérapie peut entrner dautres séquelles qui lui sont propres,
comme les télangiectasies, les dyschromies, les scléroses et les
fibroses. Ces séquelles vont se surajouter aux quelles précédentes.
Dans tous les cas, les quelles du traitement conservateur sont dif-
ficiles à corriger secondairement.
Place de la chirurgie plastique dans le traitement
des séquelles esthétiques du traitement conservateur
(8)
La malposition de l’aole peut être isolée, sans déformation
importante du sein. Elle est alors traitée par exérèse et greffe de
la plaque aérolomamelonnaire (PAM). Replacer l’aréole est un
geste simple ; fermer la perte de substance créée par le prélève-
ment peut se révéler plus délicat.
La rétraction cicatriciellecorrespond souvent de la cicatrice rétrac-
tile du quadrant suro-externe du sein qui se prolonge jusqu’au
creux axillaire pour permettre l’évidement ganglionnaire par la
me voie d’abord. Cette bride cicatricielle peut être corrigée par
plastie en Z unique ou multiple.
On est parfois conduit à réaliser la correction d’une a s y m é t r i e
majeure entre les deux seins.
* Service de chirurgie, CLCC René-Huguenin, Saint-Cloud.
Principes généraux de la chirurgie oncoplastique et
de la re c o n s t ruction mammaire imdiate et différée
General principles in oncologic plastic surgery and breast reconstruction
F. Rimareix*, I. Cothier-Savey*, C. Belichard*
responsables de brides rétractiles. II faut leur préférer des inci-
sions séparées ou en ligne brisée vers le creux axillaire, ou une
incision horizontale sur le quadrant supérieur et le creux axillaire.
L’exérèse de la tumeur ( 1 0 )
L’exérèse chirurgicale doit passer au large de la tumeur, macro-
scopiquement à plus de 1 cm des limites palpées.
L’importance de la tumorectomie doit être adaptée à la taille de la
tumeur et éventuellement complétée par des recoupes.
La quadrantectomie ( 1 1 ) consiste à aliser une chirurgie plus large,
avec 2 cm au minimum de marge macroscopique.
Le siège des tumeurs invasives doit être repéré par des clips, sur-
tout en cas de plastie associée, pour orienter la radiotrapie et faci-
liter la surveillance mammographique.
En cas de tumeur centrale, un traitement conservateur emportant en
monobloc la PAM et la tumeur est possible si la taille du sein per-
met un remodelage harmonieux.
Le remodelage glandulaire (figures 2, 3)
Dans les tumorectomies peu importantes, on peut s’abstenir de tout
remodelage glandulaire, mais il faut éviter le drainage de la loge de
tumorectomie. Pour les tumeurs plus importantes, le capitonnage, voire
le remodelage, est souvent nécessaire afin de ne pas laisser de fect,
car toute invagination sera majorée par la radiothérapie. L’importance
du remodelage dépend de la taille de la tumeur rapportée au volume
du sein ainsi que de la localisation tumorale. Le remodelage se conçoit
quand le volume de la tumorectomie ne dépasse pas un quadrant du
sein. Il est indispensable au niveau des quadrants inférieurs.
Cas particulier des tumorectomies centrales ( 1 2 )
Les tumeurs centrales se finissent comme rétroaréolaires, siégeant
à moins de 2 cm de l’aréole. L’envahissement fréquent de l’aole,
lieu de convergence des canaux galactophores,cessite son exé-
se de manière sysmatique, cant une perte de substance et une
déformation secondaire.
Plusieurs techniques de chirurgie plastique mammaire permettent le
comblement du fect central par un remodelage glandulaire per-
opératoire et l’obtention d’un aspect esttique du sein opéré satis-
faisant, avec une reconstruction ulrieure de l’aréole.
Trois techniques sont employées :
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Le sein irradié ne présente pas de malformation, mais il est plus petit
et placé plus haut. Il faut symétriser le sein controlatéral trop volu-
mineux en réalisant une plastie mammaire de duction, et corriger
ainsi la ptose (figure 7).
S’il existe une formation majeure du sein, le remodelage du sein
irrad est difficile. Les résultats esthétiques sont aatoires et les
complications fréquentes, à type de crose ou de retard de cicatri-
sation.
Combler la perte de substance par la mise en place partielle d’une
prothèse sous-cutanée expose à un taux important de coques et
d’échecs. Aussi est-il cessaire, le plus souvent, de réaliser un lam-
beau de grand dorsal. Cet apport de tissu vascularisé est bénéfique
pour la trophicité des tissus irrads ( 9 ). Le lambeau ne ne pas la
surveillance mammographique et échographique.
Si les quelles post-thérapeutiques sont majeures, le traitement
est difficile et la correction peut nécessiter une mastectomie avec
reconstruction mammaire immédiate par un lambeau de grand dor-
sal ou de grand droit ( 1 0 ) .
Place de la chirurgie plastique dans la prévention
des séquelles esthétiques du traitement conservateur
Le traitement conservateur respecte les règles de la chirurgie onco-
logique, mais peut faire appel aux techniques de chirurgie plastique,
et cela dès le traitement initial.
Les incisions cutanées (figure 1)
Selon la localisation de la tumeur, l’incision est de préférence
radiaire dans les quadrants inrieurs et arciforme dans les qua-
drants surieurs.
Seules les tumeurs superficielles adhérentes à la peau ou avec
envahissement cutané nécessitent une résection cutanée. En cas
d’exérèse insuffisante ou de récidive locale, la cicatrice de tumo-
rectomie initiale doit être intégrée dans le tracé de mastectomie
horizontale le plus bas possible, d’ou l’intérêt des incisions péria-
olaires, ou périaréolaires avec prolongement radiaire. Les
longues cicatrices sont à l’origine de rétractions et de bascules
de la PAM. Les incisions radiaires du quadrant supéro-externe,
prolongées vers le creux axillaire pour le curage, sont également
Figure 1. Les incisions cutanées.
Figure 2. Lambeaux glandulaires.
– exérèse en ellipse avec fermeture après remodelage glandulaire
(figure 4) ;
– fermeture de la perte de substance cutanée centrale par la tech-
nique de r o u n d - b l o c k (figure 5) ;
– plastie mammaire de remodelage (figure 6).
La reconstruction de l’aréole et du mamelon est facilement réali-
sable suivant les procédés classiques : greffe, lambeau ou tatouage.
Plasties mammaires (8-11, 13, 14) (figures 7-11)
Pour certains cancers, l’exése carcinologique satisfaisante entrne
une déformation majeure du sein, incompatible avec un traitement
conservateur, lorsque :
– le volume tumoral par rapport au volume du sein est supérieur
à un quadrant ;
– les seins sont ptosés ;
– les tumeurs siègent dans les quadrants inférieurs.
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Figure 3.
Plastie mammaire/tumorectomie. Le pédicule vasculaire de la PAM et le lambeau varient en fonction de la localisation de la tumeur.
Figure 4.
Exérèse en ellipse.
Ces patientes peuvent bénéficier, après une très large tumorec-
tomie avec vérification histologique des berges, d’un remode-
lage par plastie mammaire, permettant ainsi la conservation du
sein. Une symétrisation du sein controlatéral est effectuée durant
le même temps opératoire, pour obtenir deux seins harmonieux.
La technique de plastie mammaire reprend les principes de
réduction mammaire, mais la tumorectomie est très large, cuta-
oglandulaire, monobloc, centrée sur la tumeur ou les quadrants
suspects. L’ablation du maximum de glande mammaire facilite
la surveillance ultérieure. Il convient de réaliser une mammo-
graphie de référence 6 mois après la fin du traitement.
Plusieurs équipes (12, 14) ont montré que la plastie mammaire de
duction élargissait les indications du traitement conservateur du
sein à des tumeurs supérieures à 3 cm, sans compromettre le résul-
tat esthétique et surtout sans augmenter le taux de cidives locales
(inférieur à 10 % à 5 ans).
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Figure 5.
Round-Block.
Figure 6.
Plastie mammaire de remodelage.
Figure 7. Plastie mammaire controlatérale au sein traitée pour corriger l’asymétrie.
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Figure 8. Plastie pour tumeurs des quadrants inrieurs (évite lesformations du sein).
Figure 9. Plastie pour tumeur supérieure à 3 cm. Vue de trois-quart.
Figure 10. Plastie pour tumeur supérieure à 3 cm. Vue de profil.
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