Le défi de la liquidité sur les marchés obligataires

Insights – Septembre 2015
Détérioration des conditions de liquidité :
enjeux et opportunités pour les
investisseurs
Le défi de la liquidité sur les marchés obligataires
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services
d’investissement et autres professionnels du secteur financier.
2Le défi de la liquidité sur les marchés obligataires | Septembre 2015
Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et
autres professionnels du secteur financier.
© Alexandre Guirkinger
Cette année, les conditions de liquidité sur les marchés obligataires
se sont détériorées et la volatilité s’est accrue. Certains investisseurs
craignent que les fonds obligataires peinent à honorer leurs rachats
en cas de vente massive sur les marchés. Néanmoins, le problème
semble à ce jour encore limité.
En tant que gestionnaire obligataire de premier plan, Amundi
comprend bien les risques liés à ce contexte de marché. Le présent
rapport décrit les tendances à l’œuvre sur les marchés, ainsi que les
mesures prises pour garantir la pérennité de notre service en cas
de liquidité restreinte. Ces mesures se traduisent notamment par la
mise en place d’un processus de contrôle et de gestion du risque de
liquidité à travers toutes nos stratégies d’investissement.
Bien souvent, le risque s’accompagne d’opportunités. Nous proposons
diverses solutions pour tirer profit des accès de volatilité engendrés par
le manque de liquidité. Il peut s’agir par exemple d’une stratégie liquidity
market neutral, conçue pour exploiter temporairement les anomalies
de valorisation liées à une liquidité limitée. Notre stragie globale sur
la volatilité est aussi un moyen efficace pour créer de la performance
dans des conditions de marché tendues.
Avant-propos
Pascal Blanqué
Directeur Général adjoint
et Directeur des Investissements
Économiste et historien de la finance,
Pascal Blanqué est l’auteur de recherches
et de travaux universitaires consacrés aux
thématiques monétaires, au fonctionnement
des marchés financiers et aux fondements
philosophiques de l’économie. Il a
notamment publié Money, Memory and
Asset Prices, L’économie sociale de la
liberté, Philosophy in Economics et Essays
in Positive Investment Management. Ancien
chercheur et enseignant à l’École Normale
Supérieure, à l’École Polytechnique et à
l’Université Paris-Dauphine, il est membre
de la Société d’Économie Politique.
Eric Brard
Responsable mondial des gestions Taux
Éric Brard est responsable mondial des
gestions Taux d’Amundi depuis janvier
2011. Il a débuté sa carrière en 1985
comme négociateur obligataire sur le
marché primaire pour L’Européenne de
Banque, avant d’intégrer Indosuez en
1990, où il devient Directeur de la gestion
obligataire en 1997. Il intègre ensuite Société
Générale Asset Management en 2000. Il
était Directeur de la gestion obligataire au
moment de la fusion de SGAM et CAAM à
l’origine de la création d’Amundi. Diplômé
en économie, Éric Brard est aussi titulaire
d’un diplôme de troisième cycle en finance
obtenu à l’Université de la Sorbonne.
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Amundi
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Nombre d’événements font craindre des problèmes de liquidité sur
les marchés obligataires. Pour apaiser ces inquiétudes, nous avons
mis en place des mesures pour protéger les investisseurs et créé des
stratégies qui peuvent tirer profit de la hausse de la volatilité.
La notion de « liquidité » désigne la
possibilité d’acheter ou de vendre un
actif rapidement et facilement, à un coût
raisonnable et sans impact majeur sur
son prix. Or, depuis quelques années,
on assiste à une baisse de la liquidité sur
les marchés obligataires mondiaux pour
deux raisons principales. Premièrement,
les banques centrales monopolisent
d’importants volumes d’obligations à
travers leurs dispositifs d’assouplissement
quantitatif (quantitative easing ou QE) et
contribuent ainsi à réduire l’offre globale.
Parallèlement, de nombreuses grandes
banques d’investissement ont cessé leurs
activités de tenue de marché pour faire face
à des exigences de capital accrues et à
de nouvelles restrictions concernant leurs
transactions pour compte propre. Les teneurs
de marché, qui jouent un rôle majeur sur les
segments de la dette souveraine et du crédit
en absorbant provisoirement les déséquilibres
apparaissant sur le marché, n’interviennent
donc plus aussi efficacement aujourd’hui.
Comme les transactions des négociateurs
sont en net recul, les spreads acheteur-
vendeur s’écartent et les volumes moyens
négociés quotidiennement ont plongé.
Ainsi, le montant total de bons du Trésor
américain disponibles est passé de
2 700 milliards USD en 2007 à 1 700
milliards USD en septembre 2015. La taille
des transactions est elle aussi en repli,
même si la tendance s’explique peut-être
également par le développement des dark
pools.
Dans le même temps, les marchés du
crédit ont connu une très forte expansion,
avec un volume d’émissions aujourd’hui 2,4
fois supérieur à celui qu’il était il y a 10 ans
(en septembre 2015).
De plus, les actifs des fonds proposant une
liquidité journalière ont progressé de 10 %
par an et sont en hausse de 76 % par
rapport à 2008.
Le défi de la liquidité sur les marchés obligataires
Schéma 1 : Taper tantrum et flash krach
La volatilité des marchés obligataires s’est accentuée en 2013, lorsque la Fed a fait allusion à un ralentissement de ses achats mensuels
d’actifs, puis le 15 octobre 2014 à l’occasion du flash krach.
Remarque : La volatilité normalisée correspond à la volatilité
implicite des options à trois mois sur les swaps de taux d’intérêt
10 ans américains. Celle-ci est un indicateur des anticipations de
fluctuation des taux des swaps.
Source : Amundi, 31 décembre 2014.
40
60
80
100
120
140
Déc. 14Sept. 14Jun 14iMars 14Déc. 13Sept. 13Juin 13Mars 13
%
Taper tantrum
Flash crash
Volatilité normalisée option 3 mois sur swaps taux
10 ans américains
Le taper tantrum américain. En mai
2013, la Fed a fait allusion à une possible
réduction de ses achats d’obligations,
qui représentaient à l’époque 85 milliards
USD par mois. Le rendement à 10 ans
des bons du Trésor américain a grimpé
de 140 pb entre mai et septembre et les
ventes d’obligations américaines sont
devenues négatives (voir schéma 1).
Le flash krach. Pendant la majeure partie
de l’année 2014, les investisseurs ont
cru que les taux aux Etats-Unis allaient
monter. Quand ils ont changé d’avis,
les négociateurs qui avaient adopté des
positions vendeuses ont acheté autant
de bons du Trésor américain qu’ils le
pouvaient pour limiter leurs pertes. Le
15 octobre, les rendements à 10 ans
ont reculé de 34 pb en seulement quatre
heures (voir schéma 2 page 4).
Le tantrum du Bund. La politique
monétaire chinoise a entraîné un rebond
des prix des matières premières en avril
2015, accompagné d’une baisse de la
menace de déflation. Entre avril et début
mai, les rendements sur le Bund sont
passés de 0,05 % à 0,8 % (voir schéma
3 page 5.)
Épisodes de volatilité
Source : Amundi, septembre 2015.
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Hausse de la volatilité
Les comportements grégaires des
investisseurs et les faibles niveaux de liquidité
structurelle ont tendance à amplifier les
fluctuations de prix des marchés obligataires.
Nous nous sommes penchés sur de
nombreux évènements survenus ces deux
dernières années sur les marchés obligataires
les plus liquides et les plus standardisés.
Les épisodes les plus marquants ont été le
taper tantrum des bons du Trésor américain
et du Bund allemand, ainsi que le flash
krach d’octobre 2014 (voir l’encadré
« Épisodes de volatilité »).
Jusqu’à présent, les épisodes de forte
volatilité se sont révélés sans grandes
conséquences, mais on peut craindre
l’impact et les effets d’un choc de liquidité
mondial. En effet, une hausse de la volatilité
pourrait déclencher des ventes massives
sur les marchés obligataires. Face à ce
risque, de nombreuses sociétés de gestion
d’actifs prennent des mesures pour maîtriser
les flux d’investissement obligataires dans
un contexte de liquidité tendu. Dans le
même temps, nous pensons qu’une
hausse de la volatilité peut aussi être source
d’opportunités pour les investisseurs.
Évaluer le risque de liquidité dans nos
portefeuilles
Amundi gère 650 milliards EUR d’encours
sur des stratégies fixed income (à fin
juin 2015). Nous sommes très attentifs
au contrôle de la liquidité sur tous les
segments de marché, en particulier sur
le crédit investment grade et high yield,
la dette souveraine périphérique, la dette
émergente et les obligations convertibles.
Le risque de liquidité de nos fonds
ne peut se mesurer à l’aide d’un seul
indicateur. Nous mesurons la liquidité de
nos portefeuilles à travers notre aptitude
à rembourser les investisseurs sans subir
d’impact important sur la valeur et la
structure du portefeuille. Cette aptitude
dépend d’un certain nombre d’éléments :
¡  Notre scénario de rachat au niveau du
portefeuille, de la stratégie, de la classe
d’actifs et du groupe.
¡ Les conditions de marché, les spreads
acheteur/vendeur et la possibilité de
négocier différents volumes.
¡  La stratégie de liquidation, qui implique
la vente d’actifs de manière à laisser
inchangée la structure du portefeuille.
Les fonds les plus concernés par le risque
de liquidité sont les fonds de type UCIT,
notamment diversifiés. Tous nos processus
d’investissement respectent des règles
internes destinées à atténuer le risque
de liquidité. Celles-ci sont notamment
relatives à la classe d’actifs, la taille des
émissions, les volumes moyens négociés
quotidiennement (ou positions ouvertes sur
options cotées), la notation des émetteurs,
Schéma 2 : Anatomie d’un effondrement de marché
Le 15 octobre 2014, les emprunts d’État américains ont subi un Flash Krach qui a nui à leur réputation d’actifs négociés de manière
ordonnée.
Sources : Bloomberg, FT Research.
Rendement à 10 ans des bons du Trésor
15 oct 04h00 2,20 %
La nuit précédant la
séance a été marquée
par des inquiétudes
concernant la faiblesse
de la croissance
mondiale et le virus
Ebola. Dès l’ouverture
du marché de New York,
les négociateurs ont fait
pression sur le taux à
10 ans, dont le
rendement est passé
en-dessous des 2,2 %
avant la publication
des statistiques
attendue pour 08h30.
09h39 1,86 %
En quelques minutes,
le rendement du taux
à 10 ans passe de
plus de 2,00 % à un
plus bas de 1,86 %.
Finalement, après un
recul de 33 bp du taux
de référence, des
vendeurs réapparaissent
et les rendements
repartent à la hausse.
17h00 2,14 %
Après une journée
marquée par des
volumes record et des
prix en dents de scie,
le rendement à 10 ans
clôture autour de
2,14 % à New York
après avoir atteint un
plus haut de 2,23 %.
08h29 2,16 %
Les ventes au détail
américaines sont
inférieures aux
anticipations provoquant
ainsi une réaction du
marché. La dégradation
de la liquidité amplifie le
net repli du taux à 10
ans dont le rendement
se rapproche des
2,00 %.
11h11 2,06 %
En fin de matinée, le marché
est toujours perturbé et le
rendement du taux 10 ans
s'établit à environ 2,06 %.
S'ensuit une nouvelle pression
sur les rendements car les
investisseurs se positionnent
à l'achat sur les bons du
Trésor à 10 ans en vue de
couvrir les pertes des
obligations d'entreprises
et des crédits
hypothécaires.
La liquidité joue un rôle important pour
les fonds à deux égards. Premièrement,
quand la liquidité est restreinte,
l’investissement sur les marchés peut
diluer la performance d’un fonds et affecter
les actionnaires qui ne vendent pas.
Deuxièmement, les gérants sont
confrontés au risque de remboursement et
peuvent ne pas être en mesure d’honorer
des demandes de rachat en temps voulu.
Amundi se doit d’agir dans l’intérêt
de ses clients et de leur assurer un
traitement équitable quelles que soient
les conditions de liquidité sous-jacentes.
Nos politiques de gestion de la liquidité
visent à faire face aux deux situations
suivantes :
¡  Décollectes massives simultanées, qui
ne posent problème que lorsque le
marché est en condition de stress.
¡  Environnement de stress prolongé,
dans lequel les gérants sont souvent
tentés de (1) se rapprocher de leur
indice de référence et réduire les
surpondérations ; et/ou (2) vendre
d’abord la plupart de leurs actifs
liquides, déformant ainsi l’exposition
des portefeuilles.
Pourquoi la liquidité est-elle
importante ?
Septembre 2015 | Le défi de la liquidité sur les marchés obligataires 5
Amundi
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autres professionnels du secteur financier.
Schéma 3 : Le tantrum du Bund allemand
Après avoir atteint des niveaux historiquement faibles début 2015, les rendements à 10 ans allemands ont grimpé en flèche lorsque les
prix des matières premières se sont redressés et ont apaisé les craintes de déflation.
Source : Amundi, 6 juillet 2015.
la zone géographique, la diversification et
les réserves minimales de liquidités.
Nous contrôlons la liquidité des portefeuilles
au moyen de plusieurs outils développés
en interne. Nous tenons compte pour cela
de scénarios de rachat dans des conditions
de stress définis à partir du comportement
passé des investisseurs par type d’actif et
typologie de client. De plus, nous mesurons
les coûts et les délais de liquidation, ainsi
que les impacts sur les portefeuilles (dans
des conditions de marché normales et de
stress). Nous définissons des seuils d’alerte
pour les gérants et les incitons à soumettre
leurs fonds à des simulations de rachat.
Contrôle du risque de liquidité
La liquidité est contrôlée de manière globale
au stade du processus d’investissement
de chaque fonds, ceux-ci étant soumis à
des limites strictes fixées par notre comité
des risques (lorsque c’est approprié).
D’autre part, la liquidité est aussi contrôlée
à l’échelle du groupe.
Le département des risques d’Amundi
déclare au comité d’investissement, pour
chaque équipe de gestion, les actifs en
portefeuille potentiellement illiquides et
distingue les fonds ouverts des mandats
et fonds dédiés. Il fournit également des
détails sur les positions croisées (des fonds
diversifiés ou des fonds de fonds) afin
d’évaluer l’impact en cas de décollecte ou
de réallocation des investissements.
Le contrôle du risque de liquidité est
également pris en compte dans les
décisions du comité d’investissement.
Sur demande, le département des risques
fournit au comité d’investissement des tests
de simulation de rachat.
Le département des risques contrôle
les règles d’investissement relatives à
la liquidité et communique les règles à
respecter au comité d’investissement.
Le contrôle de la liquidité se décline de
différentes manières :
¡  Tests de résistance des portefeuilles
basés sur des performances passées.
¡  Analyse de différents scénarios intégrant
des distorsions importantes des
marchés obligataires et des simulations
de remboursements dans nos fonds
flagships.
¡  Suivi d’indicateurs de marché à travers
un tableau de bord.
¡  Contrôle de la répartition de l’encours
par classe d’actifs au niveau de chaque
fonds et à l’échelle de la société.
Mesures de précaution
Nous avons pris un certain nombre de
mesures de précaution afin d’être prêts à
gérer les principales problématiques liées
à une liquidité restreinte sur les marchés
obligataires :
Rendement du taux 10 ans allemand
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
JuiletJuinMaiAvrilMarsFévrierJanvier
%
Garantir notre accès à la liquidité. Grâce
à sa taille et son niveau d’activité, Amundi
bénéficie d’un accès facilité aux marchés
financiers, à des prix compétitifs.
Réserves de liquidités. L’ensemble de
nos gérants est sensibilisé au risque
de liquidité et le « budget de liquidité »
constitue un facteur déterminant dans
toutes les décisions d’investissement. De
plus, nous avons élaboré un « système de
réserves » en trois étapes permettant de
gérer les tensions sur le marché, et défini
des objectifs de liquidité pour chaque
fonds. Notre solution passe notamment
par l’utilisation d’instruments dérivés,
dont des credit default swaps et des total
return swaps.
Politiques de valorisation. Nous
envisageons actuellement de mettre en
place un mécanisme de swing pricing
(valeur liquidative ajustée) qui permettrait
d’atténuer l’impact dilutif des coûts de
transaction, dans une limite qui serait
définie en pourcentage des souscriptions
ou remboursements nets enregistrés sur
une journée. Nous prévoyons la mise en
place progressive de ce mécanisme dans
nos fonds. À noter que nous n’avons
pas l’intention d’appliquer de dispositif
d’échelonnement des remboursements,
afin d’être en mesure de restituer leurs
avoirs aux investisseurs le plus vite possible
lorsqu’ils le demandent.
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