1 Un problème embarrassant

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C HAPITRE 8
D ÉCOUVERTE : L A RACINE CARRÉE DE 2
1 Un problème embarrassant...
Nous sommes au VIème siècle avant notre ère, dans une petite ville du sud de l’Italie appelée Crotone.
C’est la ville qu’a choisie un immense savant de l’époque (mathématicien, mais aussi musicologue, astronome et philosophe - c’est même lui qui aurait inventé ce mot !) pour créer son Ecole. Ce grand esprit
s’appelait Pythagore ; né dans l’île de Samos (une île grecque de la mer Egée) en −580, grand voyageur (il
est allé jusqu’en Egypte, et à Babylone), sportif accompli (il fut à 18 ans champion olympique de pugilat,
une forme de combat à mains nues), il a réuni autour de lui des disciples (appelés Pythagoriciens) dans
ce qui s’apparente à une secte aux règles et principes extrèmement stricts.
Leur philosophie, leur vision du monde, est basée sur l’aphorisme suivant : "Tout est Nombre" ; à savoir
que les nombres, pour eux, sont le principe même des choses, de l’harmonie universelle. Par "nombre"
les Pythagoriciens entendent nombre entier, voire nombre rationnel (c’est-à-dire rapport de deux nombres
entiers), et chaque nombre peut être représenté par la longueur d’un segment de droite.
Pythagore et ses disciples sont confrontés à un problème en apparence simple, mais qui leur cause un
grand tourment ; ce problème est le suivant :
Combien mesure la diagonale d’un carré de côté 1 ?
En effet, malgré leurs tentatives, aucun nombre rationnel ne semble convenir ! La longueur de cette diagonale serait-elle un nombre qui n’existe pas ? Voilà qui sape les fondations de leur philosophie, et remet
en question l’ensemble de leurs connaissances sur les nombres...
Pourtant, le théorème déjà bien connu des Babyloniens, mais qui porte aujourd’hui le nom de théorème de Pythagore, permet de mesurer, par exemple, la diagonale d’un rectangle de longueur 4 et de
largeur 3 : c’est le nombre dont le carré est égal à la somme des carrés de 3 et de 4, c’est à dire le nombre
d tel que d 2 = 32 + 42 = 9 + 16 = 25. Ce nombre est :
3
d = ...
4
Mais quel peut bien être le nombre d qui vérifie d 2 = 12 + 12 = 1 + 1 = 2 ? :
1
d =??
1
Ce nombre, que nous appellerons la racine carrée de 2, et que l’on notera pour l’instant r (comme
"racine"), est en effet très particulier.
3ème
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Activité de découverte
2 Quelques tentatives pour approcher r par des nombres rationnels
Ï Babylone, en -1800
Sur cette tablette d’argile, en écriture cunéiforme, on trouve une valeur rationnelle du nombre r (notez
que les Babyloniens utilisaient un système de numération en base 60, dit "sexagésimal") :
30
1 24 51 10
42 25 35
r = 1+
24 51
10
+ 2+ 3
60 60
60
r = .........
r 2 = .........
Ï Inde, en -800
Dans un document (un "Sulbasutra" : ensemble de règles utilisées pour construire un autel religieux
dans des proportions justes) datant de l’époque, écrit par un certain Baudhayana, on trouve la valeur
suivante :
1 1 1 1 1 1
r = .........
r 2 = .........
r = 1+ + × − × ×
3 3 4 3 4 34
Ï Grèce, en -200
Un algorithme de Théon de Smyrne permet d’avoir, entre autres, les valeurs suivantes :
17
577
665 857
r=
r 2 =. . . . . . . . . . . .
r=
r 2 =. . . . . . . . . . . .
r=
r 2 =. . . . . . . . . . . .
12
408
470 832
3 Irrationalité de la racine carrée de 2
Toutes ces tentatives firent vaines, car il est aujourd’hui démontré que ce nombre r , dont le carré est
égal à 2, ne peut pas être écrit sous la forme d’un nombre rationnel : on dit que ce nombre est. . . irrationnel ! ! (C’est aussi le cas d’un autre nombre célèbre : le nombre π). C’est ce résultat que Pythagore
(qui le découvrit lui-même) voulut cacher à tout prix, pour ne pas voir son système philosophique mis
à mal : la légende raconte même qu’un des disciples de Pythagore, nommé Hippase de Métaponte, fut
noyé par ses codisciples pour avoir révélé ce secret au grand public !. . .
En voici la démonstration (basée sur un procédé appelé démonstration par l’absurde) :
Supposons donc que r est un rationnel, et donc que l’on peut écrire r sous la forme d’un quotient : r = ba ,
avec a et b entiers naturels non nuls premiers entre eux (la fraction ba est donc supposée irréductible).
1. Montrer que l’on a a 2 = 2b 2 ; en déduire que a 2 est pair.
2. Compléter le tableau suivant :
Le nombre a se termine par. . . 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Le nombre a 2 se termine par. . .
3. Déduire des questions précédentes que a est nécessairement un nombre pair.
4. Posons donc a = 2p avec p entier naturel. Déduire de la question 1. que b 2 est nécessairement un
nombre pair, et donc que le nombre b l’est aussi.
5. En quoi ce dernier résultat est-il contradictoire avec notre supposition de départ ? Conclure..
Conclusion :
La seule façon
pour nous de noter
p de ce nombre irrationnel a été d’inventer un nouveaupsymp
bole : r = 2. Ainsi par définition 2 est le nombre dont le carré est
p égal à 2, et la notation 2 est
l’unique
moyen de noter sa valeur exacte. La valeur approchée de 2 donnée par la calculatrice est
p
2 ≃ ........................
3ème
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Activité de découverte
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