Depuis quelques années, des publications internationales dans des
domaines variés de la recherche en psychologie sont parues, dont l’objet
consistait à montrer l’intérêt de distinguer un modérateur d’un médiateur,
aussi bien au niveau conceptuel que méthodologique (Baron & Kenny,
1986 ; Shadish, 1996 ; Taylor & Aspinwall, 1996 ; Vollrath, Banholzer,
Caviezel, Fischki, & Jungo, 1994). Prenant appui sur l’utilisation de
méthodes statistiques « innovantes » (les pistes causales avec Lisrel ou la
régression hiérarchique), les auteurs démontrent que la distinction de ces
deux notions rend compte de l’évolution des modèles du comportement
humain. C’est également pour des raisons méthodologiques que, trop
longtemps sans doute, on s’est contenté de tester des modèles simples de
type « stimulus →réponse » (cf. Fig. 1a), où l’impact d’une variable mani-
pulée sur la variable à prédire est direct et unique. Dans ce cas, c’est
l’influence du contexte ou des caractéristiques individuelles qui prédisent
un comportement.
Nous sommes là dans une démarche béhavioriste ou déterministe.
L’évolution des modèles de psychologie a permis ensuite d’envisager
l’intervention d’une troisième variable : c’est la conception interaction-
niste de l’homme dans son contexte, où l’on envisage conjointement les
rôles respectifs du contexte et des caractéristiques environnementales
dans l’explication des comportements. Enfin, une troisième voie a permis
d’expliquer l’impact du contexte ou des caractéristiques individuelles sur
le comportement humain par l’intervention d’une variable psychologique
qui décrit plutôt le processus sous-jacent : c’est le modèle transactionnel
avec identification de la « boîte noire ».
Passant de modèles relativement simples à des modèles multifactoriels
très complexes, les chercheurs ont éprouvé le besoin de préciser le statut
de certaines variables psychologiques sans y parvenir de façon unanime
(Parkes, 1994). C’est ainsi que l’on voit encore utilisés indifféremment les
termes modérateur et médiateur pour une même variable psychologique
(Vollrath et al., 1994).
Afin d’atténuer ces confusions et d’éclaircir les notions de médiateur et
de modérateur, nous commencerons par souligner leurs différences. Puis
nous montrerons comment ces variables s’intègrent dans les modèles de la
psychologie de la santé et de la psychologie du travail. Enfin nous tente-
rons d’expliquer les méthodes d’analyse quantitative susceptibles de tester
leurs effets respectifs.
98 N. Rascle et S. Irachabal
Variable
indépendante
Variable
dépendante
Fig. 1a. — Effet direct d’une variable indépendante sur une variable dépendante
Main effect of the independent variable on the dependent variable