Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2013
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Immunité
antitumorale
dossier thématique
Treg et celui des autres lymphocytes T intratumoraux
suggère qu’ils exercent leur fonction immunosuppres-
sive in situ. Ces cellules semblent exercer leur pouvoir
suppresseur via différents mécanismes d’immuno-
suppression tels que la sécrétion d’IL-10, l’expression
de GARP associée à la production de TGFβ, le transfert
d’AMPc ou l’expression de ligand de mort (FasL).
Dans le cancer du sein comme dans le cancer de l’ovaire,
il existe une corrélation positive entre l’infi ltration par
des Treg et des pDC. L’engagement du récepteur de
costimulation ICOS exprimé à la surface des Treg par
son ligand spécifi que (ICOS-L), lui-même exprimé par
les pDC, est indispensable pour induire la prolifération
des Treg de tumeurs de sein et d’ovaire in vitro en pré-
sence de pDC (18, 19). De plus, la prolifération des Treg
induite par les pDC est fortement potentialisée dans
l’environnement tumoral, où les pDC sont défi cientes
pour leur production d’IFNα (20). Ces observations
montrent l’existence d’une interaction in situ entre
Treg et les pDC qui renforce l’immunosuppression
intratumorale (fi gure).
Thérapies ciblant le microenvironnement
immunitaire intratumoral
La connaissance des mécanismes d’échappement
tumoral à l’immunosurveillance a permis de proposer
diff érentes approches permettant d’accroître l’activation
des cellules de l’immunité innée. L’utilisation d’anticorps
ciblant les cellules tumorales tels que le trastuzumab
(anti-HER2) permet le blocage de l’activité protumorale
de HER2 et l’opsonisation des cellules tumorales, favori-
sant ainsi la reconnaissance des cellules tumorales par
les cellules NK. Par ailleurs, des stratégies reposant sur
l’administration d’anticorps agonistes des récepteurs
activateurs des NK (anti-KIR) pourraient augmenter leur
activité antitumorale.
L’administration locale de ligands synthétiques des TLR
pourrait également permettre d’activer fortement les
DC intratumorales, conduisant à une meilleure présen-
tation des AgT et à la sécrétion de cytokines pro-infl am-
matoires (IL-1β, IL-12, IFNα) qui favorisent une réponse
T antitumorale. Des eff ets thérapeutiques notables ont
été observés avec un ligand de TLR-7 (imiquimod) dans
le traitement des tumeurs cutanées.
Enfi n, des progrès importants ont été réalisés dans le
traitement des tumeurs solides avec l’utilisation d’anti-
corps thérapeutiques bloquant CTLA4 (ipilimumab)
ou l’interaction PD1/PD-L1 (anti-PD1 ou anti-PD-L1)
[cf. articles de A. Marabelle et al., p. 32, et de A. Boespfl ug
et al., p. 17]. Ces stratégies permettent de lever les points
de contrôle négatifs de la réponse T, augmentant l’ac-
tivation de ces cellules et favorisant ainsi la réponse
adaptative antitumorale. Les résultats encourageants
observés avec l’ipilimumab dans le traitement du méla-
nome (21) ont été récemment renforcés par ceux plus
prometteurs obtenus avec les anticorps anti-PD1 et
anti-PD-L1, à la fois dans le mélanome, le cancer du
rein et le cancer du poumon non à petites cellules (22)
[cf. articles de A. Marabelle et al., p. 32, et de A. Boespfl ug
et al., p. 17]. L’identifi cation de biomarqueurs prédictifs
de réponse à ces immunothérapies représente le défi
majeur des prochaines années.
Conclusion
Les tumeurs du sein et des ovaires sont détectées par
les cellules immunes qui infi ltrent la masse tumorale.
Le développement tumoral est alors conditionné par
l’échappement des cellules transformées aux eff ecteurs
de l’immunité. Les cellules immunes infi ltrant la masse
tumorale présentent un état d’activation et/ou d’alté-
ration qui varie en fonction du microenvironnement,
pouvant aller de la réponse immune effi cace à la sub-
version. L’immunosubversion tumorale est un processus
actif impliquant les cellules de l’immunité innée (TAM,
NK, DC). L’altération de ces cellules favorise l’angioge-
nèse ainsi que le recrutement des Treg et l’amplifi cation
d’une réponse T immunosuppressive. De façon très
intéressante, le microenvironnement immunitaire intra-
tumoral présente de fortes similitudes dans le cancer
de l’ovaire et le cancer du sein en termes d’impact sur
la survie des patientes et d’altérations fonctionnelles.
La dissection des mécanismes de l’immunosubver-
sion tumorale a permis l’émergence de nouvelles cibles
(ICOS/ICOS-L, CCL22/CCR4, PD-1/PD-L1, CTLA4) impli-
quées dans le développement d’un environnement
immuno suppresseur, permettant le développement de
nouvelles stratégies d’immunothérapie dont certaines
semblent déjà très prometteuses. ■
Remerciements
Ce travail a été réalisé avec le soutien fi nancier de l’Association
pour la recherche sur le cancer (ARC n° 7896, ARC équipe-
ment lourd 2009), des comités départementaux de la Ligue
contre le cancer (CD-69, CD-71), de l’Association nationale de
la recherche (ANR11-EMMA-045 VICIT), de l’Institut national
du cancer (INCa) [2011-1-PL-Bio-12-IC-1 et LYRIC (INCa-4664)].
Julien Faget et Intidhar Labidi-Galy ont été soutenus fi nanciè-
rement par la Ligue nationale contre le cancer et l’INCa pour
la réalisation de leur thèse de sciences.
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Références
RÉSUMÉ