La Lettre du Neurologue - n° 1 - vol. VII - janvier 2003 27
Découvertes
Découvertes
es cellules possèdent une machinerie complexe leur
permettant de repérer et réparer ou éliminer les pro-
téines défectueuses, qu’elles soient mal traduites, mal
repliées, mal assemblées ou tout simplement endommagées (1).
Les premiers éléments de ce système de contrôle qualité, les
molécules chaperonnes, sont chargés notamment de conformer
correctement les protéines en cours de synthèse et d’identifier la
forte proportion (estimée au maximum à 30 % de la synthèse pro-
téique totale) de protéines nouvellement synthétisées défec-
tueuses, les DRiPs (Defective Ribosomal Products) (2). Les pro-
téines non conformes sont, par l’intermédiaire d’un système de
couplage à des molécules d’ubiquitine, adressées au protéasome,
le principal complexe protéolytique de la cellule, chargé de les
dégrader. L’ensemble du système ubiquitine-protéasome est donc
indispensable au bon fonctionnement et au maintien de l’intégrité
de la cellule (1).
Provoquer un dysfonctionnement de ce système (inhibition du
protéasome, augmentation de la quantité de protéines défec-
tueuses par expression de protéines mutantes) conduit dans les
modèles de cellules en culture à la formation d’agrégats appelés
“agrésomes” (3). Les agrésomes paraissent être un moyen de
défense de ces cellules face à une accumulation de déchets poten-
tiellement cytotoxiques. Il s’agit, en effet, d’un processus actif
dépendant du complexe moteur dynéine/dynactine et des micro-
tubules. Il consiste en un transport rétrograde des protéines
s’agrégeant vers les centrioles où l’agrésome se forme. Celui-ci
est isolé du reste de la cellule par une cage de vimentine qui
assure probablement le maintien de la structure compacte. Ainsi,
des déchets potentiellement toxiques que la cellule n’arrive pas
à éliminer sont stockés et isolés du reste de la cellule. Si la pré-
sence de protéines ubiquitinylées dans les agrégats paraît tout à
fait normale en tant que substrats de dégradation indésirables
pour la cellule, celle du protéasome et de certaines molécules
chaperonnes pose la question de l’innocuité de ces agrégats pour
la cellule. En effet, protéasomes et molécules chaperonnes pour-
raient être engagés par ces protéines qu’ils ne peuvent réparer ou
dégrader et devenir ainsi indisponibles pour leurs autres substrats
habituels. À cet égard, il a été récemment montré que la présence
d’agrégats dans les cellules conduisait effectivement à une inhi-
bition de l’activité protéasomale (4, 5). Une diminution de l’ac-
tivité protéolytique pourrait donc conduire à une accumulation
des protéines ubiquitinylées, en particulier dans des agrégats,
cette agrégation provoquant à son tour une inhibition plus forte
encore de l’activité du système ubiquitine-protéasome.
Ces observations revêtent une importance particulière si on
considère les maladies neurodégénératives (1). En effet, une
caractéristique commune à la plupart de ces maladies est l’ac-
cumulation anormale dans les neurones de protéines mutantes ou
défectueuses dans des agrégats ou corps d’inclusion (6). Ces
agrégats diffèrent dans leur contenu protéique mais contiennent
systématiquement des protéines conjuguées à l’ubiquitine, sub-
strats potentiels du protéasome. Par ailleurs, des sous-unités du
protéasome et diverses molécules chaperonnes sont souvent pré-
sentes. Ces observations suggèrent une implication du système
ubiquitine-protéasome dans la mort cellulaire neuronale et la
progression de la maladie pour l’ensemble des désordres neuro-
logiques. Cette implication est directe dans le cas de la maladie
de Parkinson, où des mutations dans deux protéines reliées au
cycle de l’ubiquitination des protéines, une ubiquitine ligase et
une enzyme de déubiquitination ont été mises en évidence (6).
Un défaut dans l’une de ces deux activités enzymatiques pourrait
limiter l’efficacité du système ubiquitine-protéasome et donc
induire la formation d’agrégats similaires aux agrésomes. Dans
d’autres maladies neurodégénératives et, en particulier dans le cas
de la maladie d’Alzheimer, une forme mutante d’ubiquitine, inhi-
bitrice de l’activité protéasomale, est présente dans les neurones
malades (7). Les transcrits de cette forme mutante d’ubiquitine
sont détectables dans les cerveaux sains comme dans les cer-
veaux malades, mais la protéine, elle, est normalement dégradée
par le protéasome. Une insuffisance dans la protéolyse, due par
exemple à la présence de peptides β-amyloïdes, pourrait conduire
à l’apparition de cette protéine avec, pour conséquence, une forte
* Centre d’immunologie de Marseille-Luminy, CNRS-INSERM.
Les DALIS : un modèle cellulaire
non pathologique pour étudier les mécanismes
d’agrégation et de désagrégation des protéines
défectueuses
H. Lelouard*
L
DÉCOUVERTES
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DÉCOUVERTES
inhibition de l’activité protéasomale. Dans le cas des maladies
liées à des protéines à forte répétition de motifs polyglutami-
niques, telles que la maladie de Huntington, la vitesse de dégra-
dation de ces protéines paraît inversement proportionnelle à la
longueur des motifs répétés (4). L’accumulation de substrats,
consécutive à la présence de tels motifs, conduit à la formation
d’agrégats et à une indisponibilité du protéasome pour d’autres
substrats classiques tels que p53, ce qui pourrait finalement pro-
voquer la mort cellulaire. En fait, il apparaît de plus en plus clai-
rement qu’une diminution de l’efficacité de la protéolyse (muta-
tion des composants du système ubiquitine-protéasome) ou une
augmentation de la quantité de substrats (mutations ou modifi-
cations conformationnelles de certaines protéines les rendant
plus difficilement dégradables) peut entraîner la saturation du
système ubiquitine-protéasome conduisant à la formation d’agré-
gats contenant les déchets non détruits, de façon similaire à celle
des agrésomes observés in vitro. Si, dans un premier temps, il
peut s’agir d’un mécanisme de survie pour le neurone, à terme il
semblerait que la présence d’agrégats dans la cellule soit un fac-
teur inhibiteur supplémentaire du système ubiquitine-protéasome
conduisant à une amplification du phénomène et provoquant
finalement la mort cellulaire des neurones (4, 5, 7, 8).
Dans ce contexte, il paraît important de mieux comprendre les
mécanismes d’agrégation afin d’essayer de corriger le caractère
nocif des agrégats tout en préservant leurs propriétés protectrices
(6, 9). Si les agrésomes constituent un excellent modèle pour
recréer in vitro les conditions d’agrégation les plus proches de
celles observées in vivo dans les neurones, ils ne permettent pas,
pour le moment, de déterminer des conditions réversibles d’agré-
gation. À cet égard, nous avons récemment mis en évidence un
mécanisme d’agrégation transitoire de protéines polyubiquitiny-
lées dans les cellules dendritiques ; cela en réponse à un signal
de différenciation entraînant des modifications importantes des
caractéristiques de la cellule (maturation) (10). Ces agrégats
appelés “DALIS” (Dendritic cell Aggresome-Like Induced Struc-
tures) sont donc induits dans des conditions physiologiques en
réponse à la présence d’agents pathogènes. Ils se forment très
rapidement, dès 4 heures après l’induction de la maturation des
cellules dendritiques, et disparaissent 24 à 36 heures après
(figure). D’un point de vue biochimique, les DALIS diffèrent des
agrésomes classiques par l’absence de protéasome ou des molé-
cules chaperonnes associées telles que Hsc70 et Hsp90. Il est
important de noter qu’en conséquence la formation des DALIS
n’entraîne aucune inhibition de l’activité du protéasome mais
semble plutôt écarter momentanément une catégorie de substrats
pour en favoriser une autre. En effet, l’incorporation des substrats
du protéasome dans les DALIS est sélective : elle concerne
essentiellement les protéines nouvellement synthétisées défec-
tueuses, les DRiPs, mais elle ne concerne pas certains autres
substrats comme IkB-α. La caractérisation d’un tel modèle
d’agrégation peut donc fournir de précieux renseignements sur
la façon dont une cellule est capable de constituer un agrégat
à partir d’une population de substrats déterminés et ensuite
de l’éliminer sans altérer le système ubiquitine-protéasome et
la protéolyse générale. Connaître les facteurs cellulaires res-
ponsables de ce processus permettrait, en particulier, d’envisager
de nouveaux moyens de lutte contre le blocage du système
ubiquitine-protéasome par les protéines défectueuses mises en
cause dans les maladies neurodégénératives et d’autres maladies,
dites “conformationnelles”.
Figure. Agrégation transitoire de protéines polyubiquitinylées au cours de la maturation des cellules dendritiques.
a. Les cellules dendritiques immatures se distinguent par l’expression vésiculaire des molécules du complexe majeur d’histocompatibilité de classe II
(CMH-II) (en rouge) ; les protéines ubiquitinylées (en vert) sont réparties dans le cytoplasme.
b. 4 heures après induction de la maturation par du LPS, les molécules de CMH-II sont dirigées vers la membrane plasmique tandis que plusieurs agré-
gats de protéines polyubiquitinylées se forment par cellule.
c. 10 heures après l’induction de la maturation, les molécules de CMH-II sont majoritairement exprimées à la surface des cellules alors que les agrégats
se sont regroupés (1 à 3 par cellule seulement) et ont atteint leur taille maximale (jusqu’à 4
µ
m de diamètre).
d. 36 heures après induction de la maturation, les agrégats ont quasiment disparu des cellules.
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Découvertes
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Communiqué presse Janssen-Cilag
Parcours Alzheimer
Le vieillissement de la population oblige la
communauté médicale, et en premier lieu les
neurologues, les gériatres, et les psychiatres,
à faire face aux problèmes posés par les
500 000 personnes atteintes, en France, de
démence de l'adulte et de la personne âgée,
mais également à l’augmentation prévisible
de la prévalence de ces démences en raison
de l’accroissement de l’espérance de vie.
Les laboratoires Janssen-Cilag ont mis en place
les “Parcours Alzheimer”, programme d’ac-
tualisation des connaissances et d’ajustement
des pratiques face à la maladie d’Alzheimer
et aux autres démences de l’adulte.
Un comité scientifique et éthique, coordonné
par le Pr J. Perret, va, ainsi, élaborer un thé-
saurus des situations et des problèmes inté-
grant les données scientifiques et les pra-
tiques professionnelles dans ce domaine.
Sa réalisation doit se dérouler en trois phases :
A, B, C. La phase A, déjà réalisée, a abouti à
l’élaboration d’un registre des situations et
des problèmes, à partir duquel 19 “Parcours”
à traiter en priorité ont été sélectionnés. Au
cours de la phase B, qui se déroulera de
novembre 2002 à juin 2003, les laboratoires
Janssen-Cilag inviteront 600 praticiens à par-
ticiper aux Séminaires de rédaction afin de
rédiger les textes définitifs des “Parcours”
avec des commentaires, textes validés par le
comité scientifique et éthique permettant,
ainsi, de garantir l’indépendance rédaction-
nelle. La phase C sera celle de la mise à dis-
position du thésaurus auprès de l’ensemble des
spécialistes, des généralistes et des familles.
Deux formatages rédactionnels sont prévus :
l’un pour une aide individuelle à la pratique
en situation réelle, l’autre pour un usage
pédagogique de groupe.
Ces méthodes et concepts donnent au projet
“Parcours Alzheimer” une puissance et une
dimension éthique totalement originales, avec
comme but l’intégration des données nouvelles
à l’ajustement des pratiques quotidiennes.
Les praticiens souhaitant participer aux Sémi-
naires de rédaction des “Parcours Alzheimer”
peuvent appeler au 0 800 25 50 75.
NOUVELLES
DE L
INDUSTRIE
PHARMACEUTIQUE
Communiqués publicitaires des conférences
de presse, symposiums, manifestations,
organisés par l’industrie pharmaceutique
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