Université François-Rabelais de Tours
Licence de Mathématiques
Chapitre 2 : Petits rappels d’algèbre linéaire
UE 6-3 Algèbre Semestre 6
Dans ce chapitre, nous faisons un résumé succinct des notions à connaître. Il est impératif de connaître
et de savoir manipuler ces notions afin de pouvoir suivre la suite de ce cours.
Dans ce qui suit, Kdésigne un corps.
1 Théorie de la dimension
1.1 Espace vectoriel
Soient Kun corps et Eun ensemble muni d’une loi interne +et d’une loi externe ·, c’est-à-dire
de deux applications :
E×EE
(x, y)7−x+yet K×EE
(λ, x)7−λ·x
On dit que (E, +,·)est un K-espace vectoriel ou un espace vectoriel sur Ksi :
1) (E, +) est un groupe commutatif (dont l’élément neutre 0Eou 0est appelé le vecteur nul) ;
2) Pour tout x, y Eet λ, µ Kon a :
(a) λ·(x+y) = λ·x+λ·y
(b) (λ+µ)·x=λ·x+µ·y
(c) λ·(µ·x)=(λµ)·x
(d) 1·x=x
Définition 1.1.
Exemple 1.2. Exemples fondamentaux de K-espaces vectoriels :
1) Knmuni des lois :
(x1, . . . , xn)+(y1. . . . , yn) = (x1+y1, . . . , xn+yn)et λ·(x1, . . . , xn)=(λx1, . . . , λxn)
2) L’ensemble des polynômes à une indéterminée et à coefficients dans K;
3) L’ensemble des suites KNà valeurs dans K;
4) L’ensemble des fonctions de Kdans K;
5) L’ensemble des matrices Mn,p(K)ànlignes et pcolonnes à coefficients dans K.
Soit (E, +,·)un K-espace vectoriel. On dit que Fest un sous-espace vectoriel de Esi FEet
si Fest un K-espace vectoriel.
Définition 1.3.
On écrira quelque fois s.e.v à la place de sous-espace vectoriel.
Exemple 1.4. 1) Les ensembles {0E}et Esont des sous-espaces vectoriels de E.
2) L’ensemble Kn[X] = {PK[X],deg(P)n}est un sous-espace vectoriel de K[X].
Proposition 1.5. Soit (E, +,·)un K-espace vectoriel et soit FE. Alors (F, +,·)est un sous-espace
vectoriel de Esi et seulement si les deux conditions suivantes sont vérifiées :
1) F6=
2) x, y F, λK, x +λy F
1
1.2 Somme de sous-espaces vectoriels
(1). Soient Fet Gdeux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E. L’ensemble
F+G:= {xF+xG|xFF, xGG}
est un s.e.v de E. Il s’agit du plus petit sous-espace vectoriel de Econtenant FG.
(2). Plus généralement, si (Ei)iIest une famille finie de sous-espace vectoriel de E, alors
l’ensemble X
iI
Ei={X
iI
xi|xiEipour tout iI}
est un s.e.v de E. Il s’agit du plus petit sous-espace vectoriel de Econtenant iIEi.
Définition-Proposition 1.6.
Exemple 1.7. Soit E:= F(R,R)l’espace vectoriel des fonctions de Rdans R. On désigne par Ple
sous-espace vectoriel des fonctions paires, et Ile sous-espace vectoriel des fonctions impaires. On a alors
P+I=F. En effet, soit fF. On définit deux fonctions :
fp:RR
x7−f(x) + f(x)
2
et
fi:RR
x7−f(x)f(x)
2
.
On a alors f=fp+fid’où le résultat.
Soient Fet Gdeux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E. On dit que Fet Gsont
en somme directe lorsque FG={0}. La somme de Fet de Gse note alors FGet on parle
de somme directe de Fet de G.
Définition 1.8.
Proposition 1.9. Soient Fet Gdeux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E. Les assertions
suivantes sont équivalentes :
(1) Fet Gsont en somme directe
(2) tout élément de F+Gs’écrit de manière unique sous la forme xF+xGxFFet xGG.
Exemple 1.10. La somme dans l’exemple 1.7 est directe. En effet, une fonction à la fois paire et impaire
est nulle. On a donc PI={0}.
Soient (Ei)iIune famille finie de sous-espace vectoriel de E. On dit que Eest la somme directe
des (Ei)iIsi les deux conditions suivantes sont vérifiées :
(1) E=PiIEi
(2) Si PiIxi= 0 avec xiEipour tout ialors xi= 0 pour tout i
La deuxième condition implique que tout élément de Es’écrit de manière unique sous la forme
x=Pλixiavec xiEipour tout i.
Définition 1.11.
1.3 Familles libres, familles génératrices, bases
Soit Eun K-espace vectoriel et soit Hune partie quelconque de E. Il existe un plus petit sous-
espace vectoriel contenant H. On le note Vect(H)et on l’appelle sous-espace vectoriel engendré
par H.
Définition 1.12.
Exemple 1.13. On vérifiera facilement que le plus petit sous-espace vectoriel de R3qui contient les
vecteurs
1
0
0
et
0
1
0
est {
x
y
0
|x, y R}.
2
Proposition 1.14. Soit Eun Kespace vectoriel et Hune partie de Ealors :
Vect(H) = (`
X
i=1
λixi|(λ1, ..., λ`)K`,(x1, ..., xl)H`, ` N)
Lorsque H={e1, . . . , en}on écrira parfois Vect(e1, . . . , en)au lieu de Vect({e1, . . . , en})pour alléger les
notations.
Soit Eun K-espace vectoriel et soient e1,e2, ..., endes vecteurs de E.
1) On dit que la famille (e1, ..., en)est une famille libre ou encore est linéairement indépen-
dante si pour tous λ1,...,λndans K, on a
n
X
i=1
λiei=0=λi= 0,i= 1, . . . , n
Si la famille n’est pas libre, on dit qu’elle est liée.
2) On dit que la famille (e1, ..., en)est une famille génératrice si
Vect(e1, ...., en) = E,
autrement dit : xE, (λ1, . . . , λn)Kn, x =λ1e1+... +λnen.
3) On dit que famille (e1, ..., en)est une base si c’est une famille libre et génératrice de E.
Définition 1.15.
Proposition 1.16. Soit Eun K-espace vectoriel et soit (e1, ..., en)une famille de vecteurs de E. Les
propriétés suivantes sont équivalentes :
1) (e1, ..., en)est une base.
2) Pour tout xE, il existe une unique famille (λ1, ..., λn)de scalaires tels que :
x=
n
X
i=1
λiei.
Les scalaires λis’appellent les coordonnées du vecteur xdans la base (e1, ..., en).
Notation. Soit B= (e1, . . . , en)une base d’un espace vectoriel E. On écrit :
[x]B=
λ1
λ2
.
.
.
λn
x=
n
X
i=1
λiei
L’ordre des éléments de la base est important !
Exemple 1.17. 1) On vérifiera facilement que la famille B= (v1, v2, v3)
v1=
1
1
1
, v2=
1
1
0
, v3=
1
0
1
forme une base de R3. De plus les coordonées de
1
1
1
dans la base Bsont (1/2,1/2,1/2). En
effet, on a
1
1
1
=1
2v1+1
2v2+1
2v3
2) On vérifiera facilement que la famille B= (1,1X, X X2, X2X3)forme une base de R3[X].
Le polynôme F= 8X3X2+ 3Xs’écrit sous la forme
F= 10 ·110 ·(1 X)7·(XX2)8·(X3X2)et donc [F]B=
10
10
7
8
.
3
On dit qu’un espace vectoriel Eest de dimension finie s’il existe une famille génératrice finie de E.
Soit Eun K-espace vectoriel de dimension finie. Soit Gune famille génératrice finie et soit L
une famille libre inclue dans G. Alors il existe une base Btel que LBG. En particulier :
Tout espace vectoriel de dimension finie possède une base.
Toute famille libre de Epeut-être completée en une base de E. (Théorème de la base
incomplète)
On peut extraire une base de toute famille génératrice.
Théorème 1.18.
1.4 Dimension
Soit Eun K-espace vectoriel. Toutes les bases de Eont le même cardinal n. Cet entier nest
appelé la dimension de E, on le note dim(E).
Théorème 1.19.
Exemple 1.20. On a dim Rn=n,dim Rn[X] = n+ 1,dim Mn(R) = n2, etc...
Proposition 1.21. Soit Eun K-espace vectoriel de dimension nN. Alors
1) Tout famille libre de nvecteurs est une base de E.
2) Toute famille génératrice de nvecteurs est une base de E.
Proposition 1.22. Soit Eun K-espace vectoriel de dimension nNet soient E1, . . . , Ekdes s.e.v de
E. Alors E=E1E2+. . . Eksi et seulement si E=E1+E2+. . . +Eket n=Pdim(Ei).
Démonstration. On note dila dimension de Ei. Soit B= (e1, . . . , en)une famille de vecteurs telle que
(e1, . . . , ed1
| {z }
base de E1
, ed1+1, . . . , ed1+d2
| {z }
Base de E2
, . . .
|{z}
...
, endk+1, . . . , en
| {z }
Base de Ek
).
Alors Bcontient nvecteurs et c’est une famille génératrice de E. Ainsi, puisque n= dim E,Best une
base de E. D’où le résultat.
Proposition 1.23. Soient Fet Gdeux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E. On a
dim(F+G) = dim(F) + dim(G)dim(FG)
Soit Eun K-espace vectoriel. Le rang d’une famille de vecteurs F= (e1, . . . , en)est défini par :
rang(F) = rang(e1, . . . , en) = dim(Vect(e1, . . . , en))
Définition 1.24.
2 Applications linéaires
2.1 Premières définitions
Soient Eet Fdeux K-espaces vectoriels. Une application f:EFest dite linéaire si elle
vérifie pour tout (x, y)E2et pour tout λK
f(x+y) = f(x) + f(y)et f(λx) = λf(x).
L’ensemble des applications de Edans Fest noté L(E, F ). C’est un K-espace vectoriel.
Définition 2.1.
4
Notons que les deux propriétés ci-dessus peuvent être reformulées de sorte que f:EFest linéaire si et
seulement si elle vérifie pour tout (x, y)E2et pour tout λK
f(x+λy) = f(x) + λf(y).
Soient Eet Fdeux K-espaces vectoriels.
1) Une application linéaire de Edans Eest appelée un endomorphisme. On note L(E) := L(E, E)
l’ensemble des endomorphismes de E.
2) Une application linéaire bijective est appelée un isomorphisme.
3) Une application linéaire bijective d’une espace vectoriel Edans lui-même est appelée un automor-
phisme. L’ensemble des automorphismes de Eest noté GL(E).
4) S’il existe un isomorphisme entre Eet F, on dit que Eet Fsont isomorphes.
Proposition 2.2. Soient Eet Fdeux K-espaces vectoriels et soit fL(E, F ). Alors l’image d’un
sous-espace vectoriel de Epar fest un sous-espace vectoriel de F.
Soient Eet Fdeux K-espaces vectoriels et soit fL(E, F ). On pose
ker f={xE|f(x)=0F}et Im f={f(x)|xE}
Alors
ker fest un sous-espace vectoriel de E.
Im fest un sous-espace vectoriel de F.
fest injective si et seulement si ker(f) = {0E}.
Définition-Proposition 2.3.
La dimension de Im fest appelée le rang de f.
Soient Eet Fdeux K-espaces vectoriels et soit fL(E, F ). On a
dim(E) = dim(ker f) + dim(Im f).
Théorème 2.4 (Théorème du rang).
2.2 Matrices
Soit uune application linéaire de Edans Fdeux K-espaces vectoriels de dimension finie. Soient B1=
(e1, ..., ep)une base de Eet soit B2= (f1, ...., fn)une base de F. Alors l’application uest entièrement
déterminée pas les vecteurs u(ej)exprimés dans la base (f1, ...., fn). Pour tout j∈ {1, ..., p}, il existe des
scalaires aij Kavec i∈ {1, ..., n}tel que :
u(ej) =
n
X
i=1
aij fi.
On obtient alors la matrice MMnp(K)en prenant pour vecteurs colonnes les coordonnées des u(ej)en
fonction des fi. Cette matrice est appelée la matrice de udans les bases B1et B2. On la note :
M=B2MatB1(u) =
a11 a12 .... a1p
a21 a22 ..... a2p
... ... ... ...
an1an2... anp
Notez bien que sous le symbole Mat, on écrit la base d’arrivée B2avant la base de départ B1. Cette
convention est utile pour présenter les formules de changement de base comme on le verra dans la suite de
ce chapitre.
Soit uune application linéaire de Edans Fdeux K-espaces vectoriels de dimension finie. Soient
B1une base de Eet B2une base de F. On a pour tout xE:
y=u(x)[y]B2=B2MatB1(u)·[x]B1
Théorème 2.5.
5
1 / 7 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !