TOPOLOGIE

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UNIVERSITÉ DE PROVENCE
L2-S3- 2005-2006
TOPOLOGIE
1
Suites de nombres réels et complexes.
Théorème de Bolzano-Weierstrass.
1.1
1.1.1
Suites de Cauchy.
Ensemble des nombres réels
Structure de corps
On va partir de l’idée ”intuitive” des nombres réels. (R, +, .) est un corps commutatif. On rappelle que l’ensemble des entiers naturels N, est stable pour les lois d’addition et de multiplication,
que l’ensemble des entiers relatifs Z est un sous-anneau, que l’ensemble des nombres rationnels
Q := { pq ; p ∈ Z, q ∈ N ∗ } est un sous-corps. On peut également définir D := { 10an ; a ∈ Z, n∈ N }
ensemble des nombres décimaux; ce sont les nombres réels dont la partie décimale ne comporte
que des zéros à partir d’un certain rang; c’est aussi un sous-anneau. On peut démontrer que Q
est l’ensemble des nombres réels dont le développement décimal illimité est périodique.
1.1.2
R est ordonné
Relation d’ordre On peut définir sur R une relation ≤, vérifiant les axiomes suivants:
O1 − ∀x ∈ R, x ≤ x, (réflexivité)
O2 − ∀x, y ∈ R, (x ≤ y et y ≤ x) ⇒ x = y, (antisymétrie)
O3 − ∀x, y, z ∈ R, (x ≤ y, y ≤ z) ⇒ x ≤ z, (transitivité).
≤ est donc une relation d’ordre. De plus, elle vérifie
∀x, y, z∈R , x ≤ y ⇒ x + z ≤ y + z (compatibilité par rapport à l’addition),
∀x, y ∈ R, (0 ≤ x, 0 ≤ y) ⇒ 0 ≤ x.y,
∀x, y ∈ R, on a soit x ≤ y soit y ≤ x (tous les éléments de R sont comparables).
R est donc un corps totalement ordonné.
Intervalles de R On définit la notion d’intervalle:
Soit a, b ∈ R tels que a ≤ b. On pose:
[a, b] = {x ∈ R; a ≤ x ≤ b} : intervalle fermé, borné, appelé aussi segment.
[a, +∞[= {x ∈ R; a < x } : intervalle fermé, non borné,
] − ∞, b] = {x ∈ R; x ≤ b } : intervalle fermé, non borné,
]a, b[= {x ∈ R; a < x < b} : intervalle ouvert,
]a, +∞[= {x ∈ R; a < x } : intervalle ouvert, non borné,
] − ∞, b[= {x ∈ R; x < b } : intervalle ouvert, non borné,
]a, b] = {x ∈ R; a < x ≤ b} : intervalle semi ouvert,
[a, b[= {x ∈ R; a ≤ x < b} : intervalle semi ouvert,
] − ∞, +∞[= {x ∈ R } = R. : intervalle ouvert et fermé, non borné.
On signale quelques notations:
∗ =]0, +∞[.
R∗ = R\{0}, R+ = [0, +∞[, R+
1.1.3
Majorant, minorant, borne sup et borne inf d’un sous-ensemble de R.
Définition 1 Soit A ⊂ R une partie non vide. A est dite majorée s’il existe M ∈ R tel que
∀x ∈ A, x ≤ M.
Un tel M est appelé majorant de A.
1
Soit A ⊂ R une partie non vide. A est dite minorée s’il existe m ∈ R tel que:
∀x ∈ A, x ≥ m.
Un tel m est appelé minorant de A.
Exemples 1 1)-A =]a, b], est majoré et l’ensemble des majorants est [b, +∞[. A est aussi minoré et l’ensemble de ses minorants est ] − ∞, a].
2)- N est minoré et l’ensemble de ses minorants est ] − ∞, 0].
3)-Par contre, N est un sous-ensemble non vide R qui n’est pas majoré: pour tout x ∈ R, il
existe n ∈ N tel que n > x.
4)-Z n’est ni minoré ni majoré.
Définition 2 Soit K un corps ordonné contenant Q. On dit que K est archimédien si pour tout
x ∈ K, il existe n ∈ N tel que x < n.
Exemple : R est archimédien.
Théorème 1 (Admis) Propriété de la borne supérieure
Toute partie A de R non vide et majorée admet un plus petit majorant. On l’appelle borne
supérieure de A, sup A.
Corollaire 1 Toute partie A de R non vide et minorée admet un plus grand minorant. On
l’appelle borne inférieure de A, inf A.
Démonstration: Soit A ⊂ R, A 6= ∅ et minorée. Soit m un minorant de A. On a ∀x ∈
A, m ≤ x . Définissons l’ensemble (−A) := {−x ∈ R;x ∈ A}.
Cet ensemble est non vide et (−m) est un de ses majorants. De même si M est un majorant
de A, alors (−M ) est un minorant de (−A). Ainsi
Lemme 1 m minore (−A) si et ssi (−m) majore A.
Donc (−A) admet une borne supérieure. Montrons que
inf A = − sup(−A).
sup(−A) est un majorant de (−A) et donc, de ce qui précède, on déduit que ( − sup(−A)) est
un minorant de A. Par définition, sup(−A) est le plus petit des majorants de (−A). Donc, pour
tout ε > 0, (sup(−A) − ε) n’est plus un majorant de (−A) et ainsi il existe aε ∈ (−A) tel que
sup(−A) − ε < aε .
Ceci est équivalent à
− sup(−A) + ε > −aε .
Mais aε ∈ (−A) ⇔ −aε ∈ A. Ainsi on vient de montrer que pour tout ε > 0, (− sup(−A) + ε)
n’est plus un minorant de (−A). Comme on a déjà vérifié que (− sup(−A)) est un minorant,
c’est donc le plus grand d’entre eux, c’est-à-dire la borne inf de A :
inf(A) = − sup(−A).
Au passage, on a utilisé une caractérisation très pratique de la borne sup (ou inf):
2
Théorème 2 Soit A une partie non vide, majorée de R. Soit M un majorant de A. Les
propositions suivantes sont équivalentes:
i)-M = sup A.
ii)-∀ε > 0, ∃aε ∈ A;
M − ε < aε ≤ M.
iii)-∀z ∈ R,z < M ⇒ ∃a ∈ A; z < a ≤ M.
Soit A une partie non vide, minorée de R. Soit m un minorant de A. Les propositions
suivantes sont équivalentes:
i)-m = inf A.
ii)-∀ε > 0, ∃aε ∈ A;
m ≤ aε < m + ε.
iii)-∀z ∈ R,z > m ⇒ ∃a ∈ A; m ≤ a < z.
Ainsi la borne supérieure d’une partie A non vide, majorée de R est l’unique majorant de
A qui pour tout ε > 0 peut être approché à ε près par un élément de A. Idem pour la borne
inférieure.
En choisissant ε= n1 , n ∈ N ∗ , on assure l’existence d’une suite (an ) d’éléments de A qui
vérifie que pour tout n ∈ N ∗
1
sup A − < an ≤ sup A.
n
Ainsi il existe une suite (an ) d’éléments de A qui converge vers sup A.
(b−a)
∗
Exemples 2 1)-A =]a, b], sup A = b, inf A = a, et an = a + (b−a)
n , n ∈ N et bn = b − n , n ≥
2, sont des suites de A qui convergent respectivement vers inf A et sup A.
2)-inf N = 0.
On remarquera que inf A ∈
/ A, par contre sup A ∈ A et de même inf N ∈ N.
Définition 3 Si sup A ∈ A, on le note max A, c’est l’élément maximal de A. De même si
inf A ∈ A on le note min A, c’est l’élément minimal de A. En particulier, si A admet un
majorant M ∈ A, c’est sa borne sup (et donc son maximum). Idem, si A admet un minorant
m ∈ A, c’est sa borne inf (et donc son minimum).
Proposition 1 Toute partie non vide majorée (respectivement minorée) de Z admet un
élément maximal (respectivement un plus petit élément, élément minimal).
Démonstration: Soit A ⊂ Z, A 6= ∅ et A majorée. Alors A admet une borne supérieure,
sup A ∈ R. En choisissant ε = 1 dans le Théorème 2, on assure l’existence d’un élément a1 ∈ A
tel que sup A − 1 < a1 . Alors pour tout a ∈ A, on a a ≤ a1 , car a > a1 entraine a ≥ a1 + 1, et
donc a > sup A, ce qui est impossible. Donc a1 est un majorant de A qui appartient à A. Donc
a1 = max A.
Corollaire 2 Toute partie non vide de N admet un plus petit élément (un élément minimal).
1.1.4
Valeur absolue
Définition 4 L’application de R dans R+ définie par


R → R+ (


x → |x| := max{x, −x} =



x si x ≥ 0
−x si x < 0
,
est appelée valeur absolue. Elle vérifie les trois propriétés suivantes: Soit x, y des nombres réels
quelconques:
3
P1 |x| = 0 ⇔ x = 0.
P2 |x + y| ≤ |x| + |y| .
P3 |x.y| = |x| . |y| .
De plus elle vérifie :
Proposition 2 Pour tout x, y ∈ R et tout a ∈ R+ , on a:
i)-|x| ≤ a ⇔ −a ≤ x ≤ a.
ii)-|x|
≥ a ⇔ a ≤ x ou x ≤ −a.
iii)-|x| − |y| ≤ |x − y|. On a de même |x| − |y| ≤ |x + y| .
Démonstration : en exercice à partir de la définition de la valeur absolue.
1.1.5
Partie entière d’un nombre réel
Théorème 3 Etant donné un nombre réel x, il existe n ∈ Z, unique tel que
n ≤ x < n + 1.
Ce nombre s’appelle partie entière de x. On le note E(x) ou [x]. On définit ainsi une application
de R dans Z appelée partie entière. Par construction, elle est croissante.
Démonstration: L’ensemble ] − ∞, x] ∩ Z est non vide (par la propriété d’Archimède),
majoré et inclus dans Z. Il admet donc un élément maximal, n, qui est unique. Donc E(x) =
max{n ∈ Z, n ≤ x}.
Exercices
1)-Soient x, y ∈ R, montrer que:
0 ≤ E(x + y) − E(x) − E(y) ≤ 1.
Correction:
∀x, y ∈ R, on a:
E(x) ≤ x, E(y) ≤ y.
Donc, en sommant membre à membre:
E(x) + E(y) ≤ x + y.
Comme le fonction E est croissante, on en déduit:
E(E(x) + E(y)) ≤ E(x + y).
Mais, pour tout p ∈ Z, on a E(p) = p. Donc, E(E(x) + E(y)) = E(x) + E(y). D’où l’inégalité
de gauche.
Par ailleurs, on a
x < E(x) + 1 ⇒ x + y < E(x) + y + 1 ⇒ E(x + y) ≤ E(E(x) + y + 1) ≤ E(x) + y + 1.
D’où:
E(x + y) − E(x) − 1 ≤ y.
Et donc,
E(E(x + y) − E(x) − 1) ≤ E(y).
Mais, E(E(x + y) − E(x) − 1) = E(x + y) − E(x) − 1. D’où la deuxième inégalité.
2)- Soit x ∈ R et soit p ∈ N ∗ , montrer que:
1
p−1
E(x) + E(x + ) + ... + E(x +
) = E(px).
p
p
4
Correction:
Pour tout k ∈ {0, ..., p − 1}, on a:
x≤x+
k
≤ x + 1.
p
Donc il existe m ∈ {0, ..., p − 1} tel que:
k
k
< E(x) + 1 ⇒ E(x + ) = E(x),
p
p
k
k
k > m ⇒ x + ≥ E(x) + 1 ⇒ E(x + ) = E(x) + 1.
p
p
k ≤ m⇒x+
Donc:
1
p−1
E(x) + E(x + ) + ... + E(x +
) = (m + 1)E(x) + (p − m − 1)(E(x) + 1)
p
p
= pE(x) + (p − m − 1).
Mais, par la définition de m, on a:
px + m < pE(x) + p,
px + m + 1 ≥ pE(x) + p.
Et donc:
pE(x) + p − m − 1 ≤ px < pE(x) + p − m.
Et donc
E(px) = pE(x) + (p − m − 1).
Et donc:
1
p−1
E(x) + E(x + ) + ... + E(x +
) = E(px).
p
p
3)-Soit x ∈ R et p ∈ N ∗ , montrer que:
E(
1.1.6
E(px)
) = E(x).
p
Approximation des nombres réels par des nombres rationnels
Densité de Q dans R.
Théorème 4 Tout nombre réel peut être approché à ε près par un nombre rationnel.
Démonstration: Soit x ∈ R et ε > 0, quelconques. Soit n ∈ N, comme nx ∈ R, on a
E(nx) ≤ nx < E(nx) + 1.
Et donc, en divisant par n :
Et donc en choisissant n tel
1
n
E(nx)
E(nx) 1
≤ x<
+ .
n
n
n
≤ ε (donc par exemple n = E( 1ε ) + 1), on obtient:
E(nx)
E(nx)
≤ x<
+ ε.
n
n
Comme E(nx) ∈ N et n ∈ N ∗ , E(nx)
∈ Q.
n
Corollaire 3 Entre deux nombres réels distincts existe toujours un nombre rationnel.
5
1.2
1.2.1
Une digression vers la dénombrabilité et la puissance du continu...
Dénombrabilité de Q et non dénombrabilité de R.
Définition 5 Un ensemble est dit dénombrable s’il est en bijection avec N.
Proposition 3 1)-Q est dénombrable.
2)-R n’est pas dénombrable.
Démonstration:
1)-On utilise le lemme suivant:
Lemme 2 Tout nombre rationnel peut s’écrire de façon unique sous la forme
premiers entre eux et q > 0.
p
q
avec (p, q)
On classe alors les nombres rationnels en fonction de s = |p| + q. s s’appelle la ”hauteur” du
nombre rationnel pq . Comme q > 0, il n’existe qu’un nombre fini de nombres rationnels tels que
|p| + q ait une valeur donnée s. Par exemple s = 1 correspond à 01 , s = 2 correspond à 11 , −1
1 et
1 −1
s = 3 correspond à 12 , −2
,
,
.
On
obtient
donc:
1 2 2
0 1 −1 1 −1 2 −2 1 −1 3 −3 1 −1 2 −2 3 −3 4 −4
, ,
; ,
, ,
; ,
, ,
; ,
, ,
, ,
, ,
; ...
1 1 1 2 2 1 1 3 3 1 1 4 4 3 3 2 2 1 1
−1
2
3
−3
−s+1
1
, s−1
, s−2
, s−3
, s−3
, ..., s−1
en supprimant les fractions nonLe terme général est s−1
1 , 1
irréductibles.
On peut donc définir une application de Q dans N qui, à chaque fraction irréductible x = pq ,
associe son rang f (x) = n dans la séquence ci-dessus. On convient d’attribuer à 0 le rang 0. Par
3
exemple, f ( −1
1 ) = 2, f ( 1 ) = 9. On définit ainsi une bijection de Q dans N.
2)-On va montrer que [0, 1] est non dénombrable et en déduire ainsi la même propriété
pour R. On peut montrer que tout nombre réel x de [0, 1] peut s’écrire de manière unique en
numérotation décimale 0, x1 x2 ... , avec des décimales comprises entre 0 et 9. Cette écriture est
unique si, pour tout n ∈ N, on impose que le nombre 0, x1 x2 ..xn soit strictement inférieur à
x. Considérons une application f de N dans [0, 1]. Pour tout n ∈ N, notons an la n-ième
décimale du nombre réel f (n). Choisissons un nombre bn entier entre 1 et 9 et différent de an .
Soit b = 0, b1 b2 ...bn .... C’est un nombre réel de [0, 1], mais on va montrer qu’il ne peut pas
appartenir à f (N ). On démontrera ainsi que toute application de N dans [0, 1] ne peut être
surjective et que, donc, N ne peut être équipotent à [0, 1]. Ainsi [0, 1] n’est pas dénombrable.
Puisque le développement décimal de b ne contient pas de décimales nulles, il ne peut se
terminer par une suite illimitée de zéros. Ainsi 0, b1 b2 ...bk < b pour tout k ∈ N ∗ , et donc
c’est une écriture décimale d’un nombre réel de [0, 1]. Faisons un raisonnement par l’absurde et
supposons qu’il existe n ∈ N tel que b = f (n). Comme par construction bn 6= an où an est la
n-ième décimale de b qui est ici bn , on aboutit à la contradiction bn 6= bn
On verra plus loin une autre démonstration de la non-dénombrabilité de R basée sur le
théorème des intervalles emboités.
Exercice:
Montrer que Z est dénombrable.
Correction: On considère l’application qui à n ≥ 0 associe f (n) = 2n + 1 et à n < 0, associe
f (n) = 2 |n|. Mais on peut aussi démontrer, et utiliser, le résultat suivant: Tout sous-ensemble
d’un ensemble dénombrable est dénombrable. (Z ⊂ Q).
1.2.2
Cardinal-Puissance du continu.
Théorème 5 Shröder-Bernstein (1896-1898)
Si X et Y sont deux ensembles, alors il existe une injection de X dans Y (i.e. X est
équipotent à une partie de Y ) ou il existe une injection de Y dans X, et si les deux éventualités
ont lieu, X et Y sont équipotents.
6
Une conséquence de ce résultat est qu’on peut associer à un ensemble X un symbole noté
card(X) , cardinal de l’ensemble X, avec la convention que card(X) = card(Y ) signifie que X
est Y sont équipotents et que card(X) < card(Y ) signifie que X est équipotent à une partie
de Y (il existe une injection de X dans Y ). Parfois on réserve la dénomination de cardinal aux
ensembles finis et on appelle ce symbole puissance d’un ensemble. On désigne la puissance de
tout ensemble dénombrable par le symbole ℵ0 (se lit ”aleph zéro”) et on dit que les ensembles
équipotents à [0, 1] ont la puissance du continu que l’on note par ℵ.
Proposition 4 X et P (X) ne sont jamais équipotents. Et on a : card(X) < card(P (X)).
Démonstration: L’application qui à x ∈ X associe {x} est une injection de X dans P (X).
Ainsi X est équipotent à une partie de P (X). Supposons qu’il existe une bijection de X sur
P (X). Soit M (x) l’image de x par cette bijection. Montrons que la surjection est impossible.
Soit A = {x ∈ X; x ∈
/ M (x)}. Supposons qu’il existe a ∈ X tel que A = M (a). Supposons que
a ∈ A, dans ce cas a ∈ M (A) et c’est impossible par définition de A. Donc a ∈
/ A, mais dans ce
cas a ∈
/ M (a) et donc a ∈ A.
Proposition 5 1)-R est équipotent à [0, 1].
2)-P (N ) est équipotent à [0, 1].
Et donc R et P (N ) ont la puissance du continu.
1.2.3
Axiome du choix
Définition 6 Une fonction de choix sur un ensemble X, est une fonction qui associe à tout
sous-ensemble non vide A de X, un élément de A : f (A) ∈ A.
f ”choisit” un élément dans chaque sous-ensemble.
Axiome du choix: Pour tout ensemble, il existe une fonction de choix.
1.3
Suites de nombres dans un des corps K
On notera K l’un des corps suivants: Q, R. Chacun des corps K est considéré comme espace
vectoriel sur lui-même. Si un résultat n’est valable que pour certains choix de K, on le précisera
dans l’énoncé.
Définition 7 On appelle suite dans K, toute application de N dans K :
(
N →K
x:
.
n → xn
On notera ces suites indifféremment x, {xn }n∈N , (xn ).
1.3.1
Rappels sur la convergence de suites
Définition 8 Une suite (xn ) de K est dite convergente s’il existe l ∈ K tel que :
∗
∀ε ∈ R+
∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ |xn − l| ≤ ε.
On le note limn→+∞ xn = l et l est appelé limite de la suite (xn ).
Proposition 6 L’ensembles des suites de K convergentes est un sous-espace vectoriel de l’espace
vectoriel des suites de K. L’application qui à une suite convergente associe sa limite est
linéaire. Si (xn ) et (yn ) sont deux suites convergentes vers respectivement x, y, la suite produit (zn ) = (xn .yn ) est convergente et sa limite vaut x.y. De plus si (xn ) et (yn ) sont deux
suites convergentes vers respectivement x, y et si y 6= 0, la suite quotient (wn ) = ( xynn ) est
convergente et sa limite vaut xy .
7
1.3.2
Intervalles fermés emboités dans Q, R.
Théorème 6 Intervalles emboités
Soient (an )n ⊂ K, (bn )n ⊂ K tels que an < bn . Posons In = [an , bn ]. On suppose que pour
tout n ∈ N, In+1 ⊂ In et que
(H) : limn→+∞ l( In ) := limn→+∞ (bn − an ) = 0.
Alors, les propositions suivantes sont équivalentes
(i)-L’ensemble {an } possède une borne supérieure dans K.
(ii)-Il existe un unique c ∈ K tel que ∩n∈N In = {c}. Plus précisément, c = supn∈N an =
inf n∈N bn .
Démonstration:
On peut noter que les hypothèses impliquent que la suite (an ) est croissante et la suite (bn )
décroissante.
(i)⇒(ii).
Soit A = {an , n ∈ N }. Notons c = sup A ∈ K. Comme les intervalles sont emboités, on a
pour tout n, m ∈ N :
an ≤ bm .
Ainsi pour tout m ∈ N , bm est un majorant de A et donc c ≤ bm . Ainsi pour tout n ∈ N
on a: an ≤ c ≤ bn et donc c ∈ ∩n∈N [an , bn ]. Il reste à montrer l’unicité d’un tel c. Supposons
qu’il
existe
c0 ∈ ∩n∈N [an , bn ]. On a donc pour tout n : an ≤ c0 ≤ bn . Donc pour tout n ∈ N ,
c − c0 ≤ (bn − an ). Mais limn→+∞ (bn − an ) = 0, donc pour tout ε > 0, il existe nε ∈ N tel que
|bn − an | < ε. Donc pour tout ε > 0, c − c0 ≤ ε et donc c = c0 . Par ailleurs on vient de montrer
que pour tout ε > 0, il existe nε ∈ N tel que bnε − ε < anε ≤ c ≤ bnε < anε + ε. Ceci permet de
vérifier la deuxième partie de (ii).
(ii)⇒(i).
Soit c ∈ K tel {c} = ∩n∈N In . On va montrer que c = sup A. Il est clair que c’est un majorant
de A. Supposons qu’il existe c0 < c un autre majorant de A, on aurait 0 < c − c0 < bn −an pour
tout n et donc avec l’hypothèse (H), c = c0 .
Corollaire 4 Dans R, toute famille d’intervalles non vides, fermés, emboités, dont la longueur
tend vers zéro a une intersection réduite à un point.
Démonstration
C’est une conséquence de la propriété de la borne supérieure. En effet, la suite (an ) est
majorée ; elle admet donc une borne sup dans R.
Vous pourrez trouver des formulations différentes de ce résultat fondamental, du à Cantor.
En voci quelques unes:
Théorème 7 L’intersection de toute famille F d’intervalles non vides, fermés emboités de R,
est non vide. Plus précisément il existe
ξ = sup{a; [a, b] ∈ F }, η = inf{b; [a, b] ∈ F }
tels que
[ξ, η] =
∩ [a, b].
[a,b]∈F
Ce ”principe de Cantor” ou ”propriété des intervalles fermés emboités” nous permet de
démontrer, simplement la non-dénombrabilité de R.
Corollaire 5 Le corps R n’est pas dénombrable.
8
Démonstration: C’est encore un raisonnement par l’absurde. Supposons que R soit
dénombrable. Dans ce cas R = ∪n∈N an . On va montrer que pour tout choix de la suite (an ),
il existe x ∈ R\ ∪n∈N an . On construit un premier segment [x0 , y0 ] ne contenant pas a0 . On
divise ce segment en 3 parties égales, et l’un au moins des 3 segments ne contient pas a1 . On
le nomme [x1 , y1 ] et il est par construction contenu dans [x0 , y0 ]. On divise [x1 , y1 ] en 3 parties égales et l’un au moins des 3 segments ne contient pas a2 . On le nomme [x2 , y2 ] et on a
[x2 , y2 ] ⊂ [x1 , y1 ] ⊂ [x0 , y0 ]. On construit ainsi une suite In = [xn , yn ] de segments emboités
dont la longueur tend vers zéro, et qui ne contient pas an , et donc ak pour k = 0, ..., n. Le
théorème des intervalles emboités (qui ici sont des segments et vérifient donc (i)) nous dit alors
que l’intersection de ces segments est non vide et plus précisément réduite à un élément x qui
par construction des In est distinct de tous les an .
Remarque: La division des intervalles en deux parties égales ne permet pas de conclure car,
dans ce cas, on ne peut pas assurer que an n’appartient pas à au moins l’une des deux, puisque
an peut être l’extremité commune des deux.
1.3.3
Suites de Cauchy dans K.
Définition 9 On dit qu’une suite (xn ) est de Cauchy dans K si
∗
∀ε ∈ R+
∃nε ∈ N ; n ≥ nε , p ≥ nε ⇒ xn − xp ≤ ε.
Théorème 8 Toute suite de Cauchy est bornée.
Démonstration: Soit (xn ) une suite de Cauchy dans K . Elle vérifie donc
∗
∀ε ∈ R+
∃nε ∈ N ; n ≥ nε , p ≥ nε ⇒ xn − xp ≤ ε.
∗ , par exemple ε = 1. De ce qui précède on peut déduire qu’il existe
Fixons un choix de ε ∈ R+
un n1 ∈ N fixé tel que pour tout n ≥ n1 on a:
xn − xn ≤ 1.
1
Ceci est équivalent à ce que pour tout n ≥ n1 on a:
−1 + xn1 ≤ xn ≤ 1 + xn1 .
Posons alors M = max{x0 , x1 , ..., xn1 −1 , 1 + xn1 } et m = min{x0 , x1 , ..., xn1 −1 , 1 + xn1 }. Ainsi
on a pour tout n ∈ N
m ≤ xn ≤ M.
Ceci démontre que la suite est bornée.
Théorème 9 L’ensemble des suites de Cauchy dans K est un sous-espace vectoriel de l’ensemble
des suites dans K. De plus, le produit de deux suites de Cauchy est une suite de Cauchy.
Démonstration: Celà revient à montrer que toute combinaison linéaire à coefficients dans
K de suites de Cauchy est de Cauchy, ainsi que le produit de deux suites de Cauchy est de
Cauchy. La première propriété est laissée en exercice. Montrons la seconde.
Soit (xn ), (yn ), deux suites de Cauchy dans K. Soit (zn ) = (xn yn ) la suite produit. Montrons
qu’elle est de Cauchy.
De l’hypothèse on déduit que
∗
∀ε ∈ R+
∃nε ∈ N ; n ≥ nε , p ≥ nε ⇒ xn − xp ≤ ε,
∗
∀ε ∈ R+
∃n0ε ∈ N ; n ≥ n0ε , p ≥ n0ε ⇒ yn − yp ≤ ε.
9
∗ fixé et quelconque. On veut qu’à partir d’un certain rang on ait x y − x y ≤ ε.
Soit ε ∈ R+
n n
p p
On a:
xn yn − xp yp ≤ xn yn − xn yp + xn yp − xp yp ≤ |xn | yn − yp + yp xn − xp .
Mais on a montré que toute suite de Cauchy est bornée. Donc il existe L = max{Lx , Ly } tel
que pour tout n ∈ N on ait |xn | ≤ L et |yn | ≤ L. Ainsi, si on pose n00ε = max{nε , n0ε }, on a:
n ≥ n00ε , p ≥ n00ε ⇒ xn yn − xp yp ≤ 2Lε.
La démonstration est terminée car 2Lε tend vers 0 quand ε tend vers 0. Si on veut ”coller”
à la définition, on choisit le rang nε := n00ε .
2L
1.3.4
Suites convergentes et suites de Cauchy dans K = Q ou R. Corps complets.
Théorème 10 Toute suite de K convergente est de Cauchy.
Démonstration: Soit (xn ) une suite de K convergente. Il existe donc l ∈ K tel que:
∗
∀ε ∈ R+
∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ |xn − l| ≤ ε.
Mais on a toujours:
xn − xp ≤ |xn − l| + xp − l .
Et donc si n et p sont choisis tels que n ≥ nε et p ≥ nε , on aura:
xn − xp ≤ |xn − l| + xp − l ≤ 2ε.
En résumé,
∗
∀ε ∈ R+
∃n0ε = n 2ε ∈ N ; n ≥ n0ε , p ≥ n0ε ⇒ xn − xp ≤ ε.
Et la réciproque?? Elle est fausse si K est un corps quelconque: Il existe des
suites de nombres rationnels qui sont de Cauchy et non convergentes.
Dans K = Q, soit les suites:
xn =
k=n
X
k=0
1
1
, yn = xn +
.
k!
n.n!
La suite (xn ) est croissante et (yn ) décroissante. De plus xn ≤ yn et |xn − yn | =
∗ il existe n ∈ N tel que si
pour tout ε ∈ R+
ε
1
n.n! ,
et donc
n ≥ nε ⇒ |xn − yn | ≤ ε.
Ainsi, si n ≥ p ≥ nε , on a xp ≤ xn ≤ yn ≤ yp et donc
xn − xp = (xn − xp ) ≤ (yp − xp ) = xp − yp ≤ ε.
La suite (xn ) est donc de Cauchy. On va montrer qu’elle ne peut pas converger dans Q. Pour
celà faisons un raisonnement par l’absurde et supposons qu’il existe l ∈ Q tel que
∗
∀ε ∈ R+
∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ |xn − l| ≤ ε.
Comme la suite (xn ) est strictement croissante, on a pour tout n ∈ N , xn < l (en effet, s’il
existait n0 ∈ N tel que xn0 ≥ l, alors pour tout n > n0 on aurait xn > xn0 ≥ l . Et donc pour
ε = 2(xn0 +1 − l ), qui est bien un nombre réel positif, il en résulterait que pour tout n ∈ N il
10
existerait n = max{n0+1 , n} tel que xn ≥ xn0 +1 = 2ε + l > ε + l). Ceci contredirait la convergence
de la suite (xn ) vers l.
Plus précisément, on a pour tout n ∈ N , xn < l ≤ yn . En effet, s’il existait n0 ∈ N tel
que xn0 ≤ yn0 < l ,alors pour tout n ≥ n0 on aurait xn ≤ yn ≤ yn0 < l . Et donc pour
ε = 2(l − yn0 ), qui est bien un nombre réel positif, il en résulterait que pour tout n ∈ N il
existerait n = max{n0 , n} tel que xn ≤ yn0 = − 2ε + l < −ε + l). Ceci contredirait la convergence
de la suite (xn ) vers l.
Comme l ∈ Q+ (puisque xn > 0) il existe p ∈ N,q ∈ N ∗ tels que l = pq . Et donc
xq < l ≤ yq ⇔ q!xq < q!l ≤ q!yq .
P
Or q!xq = k=q
k=0
Par contre on a
q!
k!
∈ N, et q!xq < q!yq = q!xq +
1
q
< q!xq + 1. Ainsi, q!l ∈
/ N et donc l ∈
/ Q.
Théorème 11 Les deux propriétés suivantes sont équivalentes:
(i)-K vérifie la propriété de la borne supérieure;
(ii)-toute suite de Cauchy dans K est convergente.
Démonstration:
(i)⇒(ii).
Soit (xn ) une suite de Cauchy dans K. On a vu qu’en conséquence la suite (xn ) est bornée.
On peut alors définir les suites de K, puisque K vérifie la propriété de la borne supérieure (et
donc de la borne inférieure):
an =
inf xp ,
p≥n
bn = sup xp .
p≥n
Elles sont donc bornées et, par construction, la suite (an ) est croissante (A ⊂ B ⇒ inf A ≥ inf B),
et la suite (bn ) est décroissante (A ⊂ B ⇒ sup A ≤ sup B). De plus la suite (xn ) étant de Cauchy,
on a
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε , m ≥ nε ⇒ |xn − xm | ≤ ε.
On en déduit donc que limn→+∞ (bn − an ) = 0.
On vient donc de montrer le lemme suivant
le1
Lemme 3 Si (xn ) est une suite de Cauchy dans K qui possède la propriété de la borne supérieure,
alors les suites an = inf p≥n xp et bn = sup xp , sont bien définies et convergentes dans K, vers la
même limite.
En particulier si K = R, on a que si (xn ) est une suite de Cauchy dans R, alors les suites
(an ) et (bn ) sont convergentes vers la même limite.
Les hypothèses du théorème des intervalles fermés emboités sont donc satisfaites (car [an+1 , bn+1 ] ⊂
[an , bn ] . (an )n étant majorée dans K qui satisfait la propriété de la borne supérieure, supn∈N an ∈
K. Nous pouvons donc conclure à l’existence d’un élément c = supn∈N an ∈ K tel que
{c} = ∩n∈N [an , bn ] . On va montrer que la suite (xn ) converge vers c. Comme la suite (an )
est croissante, elle croı̂t vers sa borne supérieure c, et de même la suite décroissante (bn ) décroı̂t
vers sa borne inférieure c. Donc pour tout ε > 0, il existe nε ∈ N tel que pour tout n ≥ nε on a:
c − ε < an ≤ c ≤ bn < c + ε.
Par définition des suites (an ) et (bn ), il vient que
c − ε < an ≤ xn ≤ bn < c + ε.
Ce qui permet de conclure que la suite (xn ) est convergente vers c.
Et on vient de montrer le lemme suivant
11
le2
Lemme 4 Soit (xn ) une suite de K. Si les suites (an := inf p≥n xp ) et (bn := sup xp ) sont convergentes vers la même limite, alors la suite (xn ) est convergente vers cette limite commune.
(ii)⇒(i).
Soit A une partie non vide majorée de K. Pour tout n ∈ N , posons Bn := {p ∈ Z, p.2−n
majore A}. Bm est non vide puisque, si M est un majorant de A, la propriété que K est
archimédien assure l’existence de p ∈ Z tel que 2Mn ≤ p. De plus Bn est minoré par a2n pour tout
a ∈ A. Donc Bn admet un minimum. Notons yn := min Bn − 1 et définissons xn = yn 2−n . Par
définition, (yn + 1)2−n majore A et donc xn + 2−n majore A. Mais, par définition du minimum,
min Bn − 1 ∈
/ Bn et donc 2−n yn ∈
/ Bn et donc il existe a ∈ A tel que 2−n yn < a. Par conséquent
pour tout n ∈ N, il existe an ∈ A tel que xn < an . Ainsi pour tout n ∈ N , il existe an+1 ∈ A tel
que xn+1 < an+1 < xn + 2−n . Montrons que la suite (xn ) est croissante. Supposons qu’elle ne
l’est pas et qu’il existe n ∈ N tel que xn+1 < xn . Dans ce cas on aurait: yn+1 = 2n+1 xn+1 < 2yn ,
et donc yn+1 ≤ 2yn − 1, et donc
(yn+1 + 1)2−(n+1) ≤ yn 2−n = xn < an .
Ceci contredit que yn+1 + 1 = min Bn+1 ∈ Bn+1 . Donc la suite (xn ) est bien croissante et vérifie
xn ≤ xn+1 < xn + 2−n .
On en déduit, voir exercice (iii), que (xn ) est de Cauchy et donc convergente. Appelons c sa
limite et montrons que c = sup A. Montrons tout d’abord que c’est un majorant de A. Tout
élément a de A vérifie que a ≤ xn + 2−n pour tout n ∈ N. Donc en passant à la limite: a ≤ c.
Par ailleurs, si M est un majorant de A, M majore tous les xn (puisque pour chaque xn , il existe
an ∈ A tel que xn < an ) et donc leur limite c. Donc c est le plus petit des majorants de A.
Définition 10 Un corps K, qui vérifie la propriété que toute suite de Cauchy est convergente,
est dit complet.
Proposition 7 (i)-R est complet.
(ii)-Q n’est pas complet et donc ne vérifie pas la propriété de la borne supérieure.
Remarque:
On peut construire R à l’aide des suites de Cauchy dans Q. On note SC l’ensemble des
suites de Cauchy dans Q et par I, l’ensemble des suites de Q qui tendent vers 0. On construit
la relation d’équivalence dans SC : (xn ) ∼ (yn ) ⇔ limn→+∞ (xn − yn ) = 0.
R est alors définit comme l’anneau quotient SC/I. Bien entendu, il sagit alors de prouver
que l’ensemble ainsi construit est un corps totalement ordonné, archimédien et complet!
1.3.5
Limites supérieures et inférieures dans R.
Proposition 8 Dans R
(i)-toute suite (xn ) croissante majorée est convergente (vers supn∈N xn ).
(ii)-toute suite (xn ) décroissante minorée est convergente (vers inf n∈N xn ).
Démonstration: (i) et (ii) se montrent de la même façon. Montrons (i). Soit (xn ) une suite
croissante et majorée. La propriété de borne supérieure entraı̂ne l’existence de sup xn . Montrons
que la suite (xn ) converge vers sup xn . De la caractérisation de la borne sup, on déduit :
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; sup xn − ε < xnε ≤ sup xn .
Mais la croissance de la suite entraı̂ne que pour n ≥ nε , xn ≥ xnε et donc:
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; sup xn − ε < xnε ≤ xn ≤ sup xn .
Ce qui permet de conclure à la convergence de la suite (xn ) vers sup xn .
12
Corollaire 6 Deux suites (xn ), (yn ) réelles et adjacentes sont convergentes vers une même limite.
Démonstration: On rappelle que deux suites (xn ), (yn ) sont dites adjacentes si l’une est
croissante par exemple (xn ), l’autre décroissante, et leur différence tend vers zéro. On a donc,
du fait que limn→+∞ (xn − yn ) = 0,
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ xn ≤ ynε + ε,
et
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ −ε + xnε ≤ yn .
Les suites (xn ) et (yn ) sont donc respectivement majorées et minorées, donc convergentes, et de
nouveau, du fait que limn→+∞ (xn − yn ) = 0, ces deux suites ont la même limite.
Théorème 12 Pour tout suite (xn ) bornée de R, on peut définir les suites de terme général:
an := inf p≥n xp et bn := supP ≥n xp . Ces deux suites sont convergentes et on note lim supn→+∞ xn =
limn→+∞ bn = inf n∈N supp≥n xp , et lim inf n→+∞ xn = limn→+∞ an = supn∈N inf p≥n xp . On a:
lim inf xn ≤ lim sup xn .
n→+∞
n→+∞
Démonstration: La suite (xn ) étant bornée, les ensembles An = {xp , p ≥ n} sont aussi
bornés, et admettent donc une borne supérieure et une borne inférieure. On a déjà vu que la
suite (an ) est croissante et la suite (bn ) décroissante. La proposition ci-dessus permet donc de
conclure à leur convergence respectivementvers supn∈N an et inf n∈N bn .
Exemple: xn = (−1)n . lim supn→+∞ xn = 1, lim inf →+∞ xn = −1.
Remarque 1 Par extension lorsque la suite (xn ) n’est pas majorée, sa limite supérieure est +∞
et, dans le cas où elle est non minorée, sa limite inférieure est −∞. Ainsi on définit pour toute
suite réelle (xn ): lim supn→+∞ xn = inf n∈N supp≥n xp , lim inf n→+∞ xn = supn∈N inf p≥n xp .
Exemple: xn = n, lim supn→+∞ n = +∞ et lim inf →+∞ n = 0.
Théorème 13 Une suite réelle (xn ) est convergente si et ssi lim supn→+∞ xn = lim inf →+∞ xn
∈ R, et dans ce cas lim n→+∞ xn = lim supn→+∞ xn = lim inf →+∞ xn .
Démonstration:
Il suffit d’appliquer les lemmes 3 et 4.
1.4
Théorème de Bolzano-Weierstrass dans R
1.4.1
Suites extraites-Valeurs d’adhérence d’une suite réelle
Dans ce qui suit K = R
Définition 11 Soit (xn ) une suite de R. 0n appelle suite extraite de (xn ), toute suite (xϕ(n) )
où ϕ est une application strictement croissante de N dans N.
Par exemple (x2n ), (x2n+1 ), (x3n ) sont des suites extraites de (xn ), correspondant respectivement aux applications ϕ(n) = 2n, ϕ(n) = 2n + 1, ϕ(n) = 3n.
Théorème 14 Si une suite (xn ) converge vers l, toutes ses suites extraites convergent vers l.
13
Démonstration:
On a:
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ −ε + l ≤ xn ≤ l + ε.
Mais ϕ étant strictement croissante de N dans N, elle vérifie pour tout n ∈ N : ϕ(n) ≥ n.
Ainsi, on a:
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ −ε + l ≤ xϕ(n) ≤ l + ε.
D’où la conclusion.
Proposition 9 Si les deux suites extraites (x2n ) et (x2n+1) convergent vers la même limite,
alors la suite (xn ) est convergente vers cette limite commune.
Démonstration: Il est facile de voir que la convergence des deux suites extraites ne suffit
pas en considérant la suite ((−1)n ). En revanche, si on impose de plus la convergence vers la
même limite, on obtient:
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ −ε + l ≤ x2n ≤ l + ε,
∀ε > 0, ∃n0ε ∈ N ; n ≥ n0ε ⇒ −ε + l ≤ x2n+1 ≤ l + ε.
Pour tout ε > 0, on pose nε = max{2nε , 2n0ε + 1}, et on a:
∀ε > 0, ∃nε ∈ N ; n ≥ nε ⇒ −ε + l ≤ xn ≤ l + ε.
Définition 12 Valeur d’adhérence d’une suite.
On appelle valeur d’adhérence d’une suite (xn ), tout réel a qui est limite d’une suite extraite
de (xn ).
Remarque 2 Si a = +∞ ou −∞ est limite d’une suite extraite de (xn ), on dit que c’est une
valeur d’adhérence généralisée.
Exemples: 1 est valeur d’adhérence de ((−1)n ), mais (n) n’admet qu’une valeur d’adhérence
généralisée: +∞.
1.4.2
Théroème de Bolzano-Weierstrass
Théorème 15 Bolzano-Weierstrass
Toute suite de R bornée admet une valeur d’adhérence.
Démonstration:
Lemme 5 Soit (xn ) une suite bornée de R. Alors:
lim inf xn = min{l ∈ R, l valeur d’adhérence de (xn )},
n→+∞
lim sup xn = max{l ∈ R, l valeur d’adhérence de (xn )}.
n→+∞
On a vu qu’on pouvait alors définir les suites an := inf p≥n xp et bn := supp≥n xp . Ces deux
suites sont convergentes. On va montrer qu’il existe une suite extraite de (xn ) qui converge vers
lim supn→+∞ xn (de même pour lim inf n→+∞ xn ). Posons β = limn→+∞ bn .
Par définition de la borne supérieure:
∀n ∈ N, ∀ε > 0, ∃pε,n ≥ n ⇒ bn − ε < xpε,n ≤ bn .
En particulier, en posant ε =
1
n
:
∀n ∈ N ∗ , ∃pn ≥ n; bn −
14
1
< xpn ≤ bn .
n
Posons An = {p ∈ N ; p ≥ n; bn − n1 < xp ≤ bn }. Cest un sous-ensemble de N non vide. Il
est donc minoré. Appelons pn = min An . On définit alors une application de N dans N qui
à n associe ψ(n) = pn . Commeψ(n) ≥ n , limn→+∞ ψ(n) = +∞. On va ”extraire” de cette
application une application strictement croissante. Posons ϕ(0) = ψ(0) et définissons ϕ par
récurrence. Soit
Bn+1 = {k ≥ n + 1; ψ(k) > ϕ(n) },
comme ψ(n) tends vers +∞ lorsque n tends vers +∞, Bn+1 est non vide et on peut donc définir
min Bn+1 comme élément de N. Posons
ϕ(n + 1) = ψ(min Bn+1 ).
Par construction ϕ est strictement croissante et la suite (xϕ(n) ) vérifie:
bmin Bn −
1
< xϕ(n) ≤ bmin Bn .
min Bn
Comme la suite (bn )est convergente vers β, et que limn→+∞ min Bn = +∞, le passage à la limite
conduit à:
lim xϕ(n) = β = lim sup xn .
n→+∞
n→+∞
Et donc β est bien une valeur d’adhérence de la suite (xn ).
Soit l une valeur d’adhérence quelconque de la suite (xn ). Il existe une application η de N
dans N strictement croissante telle que:
lim xη(n) = l.
n→+∞
On a bn = supp≥n xp ≥ supp≥n xη(p) . Et donc limn→+∞ bn ≥ limn→+∞ supp≥n xη(p) = l (car la
suite (xη(n) ) converge et donc sa limite supérieure est égale à sa limite). Donc β ≥ l.
Le lemme est démontré, et par voie de conséquence le théorème.
15
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