DirectiondelaProspectiveetduDialoguePublic
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de l’observation dépendra des outils
(l’utilisation de la vidéo et du ralenti est un
moyen intéressant pour isoler des
observables normalement « invisibles ») et
des hypothèses que l’on formule au
préalable.
La méthode que vous avez employée
pour étudier ces comportements est
celle des trajets commentés. Pouvez-
vous nous en décrire le principe, les
avantages et les limites ?
Cette méthode permet d’accéder à un
jugement, un ressenti, une perception de
l’environnement. J’ai demandé aux
personnes non-voyantes de cheminer
dans l’espace public, sur le trajet
expérimental, et de verbaliser leur
ressenti. Cette méthode comporte
toutefois certaines limites. La formulation
verbale limite inéluctablement l’expression
d’un ressenti : les mots ne permettent pas
toujours de traduire fidèlement nos
ressentis internes. De même, le fait de
combiner déambulation-perception-
verbalisation est un effort cognitif
considérable, d’autant qu’il s’agissait de
personnes aveugles. Nous ne sommes
donc pas face à un comportement pur
comme c’est parfois le cas lors de
certaines observations non-participantes.
Le protocole de ma recherche s’est
articulé autour de trois phases. Dans la
première phase, il s’agissait
d’accompagner la personne sur le trajet
expérimental et de lui demander de
commenter ce qu’elle percevait en direct
(online) : émotions, sensations,
impressions… La personne faisait le trajet
à mon bras, je l’observais et enregistrais
son discours. La 2e phase consistait à faire
le même trajet en lui demandant de le
mémoriser. Elle était donc amenée à
construire une représentation mentale du
parcours, de l’espace et à prendre des
points de repère. Dans la 3e phase, j’ai
demandé à la personne de se déplacer
seule sur le trajet mémorisé, et j’ai filmé ce
déplacement. On se rapproche, dans cette
troisième phase de l’observation d’un
comportement pur, à ceci près que la
personne sait qu’elle est encadrée et
filmée donc pas complètement naturelle
dans son attitude. Pour des raisons de
sécurité,
deux personnes se chargeaient de
l’encadrement.
Quelles ont été les principales
conclusions de votre recherche ?
Nous nous sommes aperçus qu’un trajet
urbain contient un nombre incroyable de
dangers, lorsque l’on se déplace sans
voir ! L’environnement urbain est
généralement assez difficile pour les
personnes non-voyantes. Il y a des zones,
des secteurs urbains, qui sont
franchement très dangereux : ces « zones
noires » sont souvent contournées par les
personnes aveugles, ce qui engendre des
détours parfois importants. Cela pose
notamment question concernant le
concept de « chaine de déplacement »,
très utilisé dans l’urbanisme, je crois. Les
zones les plus perturbantes sont les
espaces les plus ouverts, les plus larges,
dans lesquels les informations auditives
sont soit absentes, ou très déficitaires
(manque de repères sonores), soit au
contraire d’un niveau sonore trop
important, saturé (impossible d’isoler des
repères sonores). Enfin, nous avons
constaté qu’en termes d’aménagement, il
n’y a rien de prévu pour les personnes