2 JEAN–MARC DRÉZET
Les faisceaux semi-stables sur des courbes projectives réduites non lisses on été étudiés par
de nombreux auteurs, notamment par C.S. Seshadri dans [30], et U.N. Bhosle dans [4], [5] et
d’autres articles. Les faisceaux semi-stables sur des variétés non réduites semblables à celles
qui sont considérées ici sont le sujet de l’article [13] de M.-A. Inaba. L’article [14] du même
auteur traite des faisceaux stables sur une variété non irréductible ayant deux composantes
qui se coupent. Il est possible qu’on puisse obtenir par l’étude des faisceaux cohérents sur les
courbes non réduites des résultats sur la dégénération des fibrés vectoriels ou des variétés des
modules de fibrés semi-stables sur les courbes lisses. Certains résultats ont déjà été obtenus en
utilisant des courbes réduites mais singulières (cf. [33], [34]).
Les faisceaux cohérents sur les courbes non réduites interviennent aussi lorsqu’on veut étudier les
faisceaux de dimension 1 sur les surfaces. Les faisceaux sur des courbes non réduites apparaissent
(cf. [15], [16]) comme limites de fibrés vectoriels sur des courbes lisses. Leur rôle est sans
doute plus important si on cherche à obtenir d’autres variétés de modules fins de faisceaux de
dimension 1 que les classiques variétés de modules de faisceaux semi-stables (cf. [8]).
Le but du présent article est de donner les bases de l’étude des faisceaux cohérents sur une courbe
multiple primitive Yet de leurs variétés de modules. On introduit deux nouveaux invariants des
faisceaux cohérents : le rang et le degré généralisés, avec lesquels on peut énoncer un théorème
de Riemann-Roch sur les courbes primitives. On s’intéressera aux faisceaux génériques qui sont
ici les faisceaux quasi localement libres jouant le même rôle que les faisceaux localement libres
sur les variétés lisses. On étudiera ensuite les faisceaux d’idéaux de sous-schémas finis de la
courbe réduite associée C, qui sont les premiers exemples non triviaux de faisceaux sur Y. On
s’intéressera enfin aux courbes doubles. Dans ce cas on peut décrire précisément les faisceaux
sans torsion sur Yet prouver en particulier qu’ils sont réflexifs. Pour finir on s’intéressera aux
variétés de modules de faisceaux stables de rang généralisé 3 et de degré généralisé dsur une
courbe double et on mettra en évidence de multiples composantes. Une d’elles est une structure
multiple sur la variété de modules des fibrés vectoriels de rang 3 et de degré dsur C.
1.1. Faisceaux cohérents sur les courbes multiples primitives
Courbes multiples primitives - Soit Cune courbe algébrique projective irréductible lisse,
de genre gC, plongée dans une variété projective lisse Xde dimension 3 sur C. Soit Y⊂Xune
sous-variété fermée de Cohen-Macaulay dont la sous-variété réduite associée est C. On dit que
Yest primitive si elle peut localement être plongée dans une surface : pour tout point Pde
Cil existe une surface S⊂Xet un ouvert Ude Xcontenant Ptels que U∩Ssoit lisse et
Y∩U⊂S. Si tel est le cas il existe un entier n > 0tel que pour tout point P∈Con peut
choisir l’ouvert Uprécédent et des coordonnées locales en P,x,z,tde telle sorte que l’idéal
de Sdans Usoit (x)et celui de Y(x, zn). L’entier ns’appelle la multiplicité de Yet Cson
support.
Il existe une filtration canonique
C=C1⊂ · · · ⊂ Cn=Y ,
où Ciest l’intersection de Yet du ieme voisinage infinitésimal de Cdans X. Au voisinage de P
l’idéal de Cidans Uest donc (x, zi). On note, pour 1≤i≤n,Oile faisceau structural de Ci
(en particulier, O1=OCet On=OY), et ICle faisceau d’idéaux de Cdans Y.