C. Jayle, P. Corbi
Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 967-82
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étant plus exposés en raison d’un certain degré d’immunodé-
pression. L’absence d’arrêt du tabagisme les semaines qui
précèdent la chirurgie est un facteur de risque majeur de
pneumopathie postopératoire. Elles entraînent une hypoxé-
mie qui, associée au sepsis, peut conduire à l’insuffisance res-
piratoire. Elles constituent une complication majeure de la
chirurgie thoracique avec un taux de mortalité pouvant
atteindre 25 % [15].
La spécificité infectieuse de ces infections distinguant les
pneumopathies communautaires et les pneumopathies noso-
comiales est liée à leur date d’apparition. Schématiquement,
les pneumopathies précoces sont des pneumopathies de type
communautaire associées donc au pneumocoque, à l’Haemo-
philus, et surviennent préférentiellement chez des patients
porteurs de BPCO colonisés par ces mêmes germes, ou par
contamination à partir de la cavité buccale et du pharynx
[16]. Les pneumopathies secondaires sont en revanche des
pneumopathies nosocomiales avec des germes plus résistants
(pyocyanique, autres Gram- et éventuellement Staphylocoque
Méti-R). Enfin, exceptionnellement, on peut observer des
pneumopathies tardives chez des patients ventilés liées à
des CMV. Enfin, après chimiothérapie néoadjuvante, la
fréquence de pneumopathies peut être plus élevée (20 %) et
on peut rencontrer des germes de l’immunodéficience :
levure, CMV [17].
Le diagnostic est basé sur l’association de signes clini-
ques, radiologiques et biologiques [18] : apparition d’infiltrats
ou d’épanchements à la radiographie, expectorations purulen-
tes ou changeant d’aspect, hémocultures positives, germe
pathogène isolé à la fibroscopie aspiration ou par lavage bron-
choalvéolaire. En pratique, les prélèvements bactériologiques
spécifiques sont systématiques chez un patient ventilé dont le
diagnostic est supposé devant l’aggravation d’infiltrats pulmo-
naires au cliché thoracique, l’hyperthermie, l’hyperleucocytose
et la survenue d’expectorations louches [19]. Ces prélève-
ments doivent être réalisés avant tout traitement antibiotique,
initialement probabiliste puis adapté [20]. La nécessité de réa-
liser des prélèvements est d’autant plus importante que l’on
suspecte une infection nosocomiale, source d’infection multi-
résistante. Ils sont réalisés par prélèvement distal protégé et
fibroaspiration quantitative, que le patient soit ventilé ou non.
Le schéma de prise en charge thérapeutique des pneumopa-
thies infectieuses précoces et donc communautaires n’est pas
différent des pneumopathies communautaires classiques.
En revanche, l’antibiothérapie est systématiquement intravei-
neuse et à large spectre si l’on suspecte des germes d’infection
nosocomiale, pneumopathies de survenue tardive, parfois sous
ventilation assistée, ou nécrosantes. Les mesures concernant
le traitement des atélectasies sont également mises en œuvre.
Les abcès et les empyèmes post-pneumopathies sont rares.
• Les pneumopathies sont également relativement
fréquentes, mais leur incidence augmente
après chimiothérapie néoadjuvante.
• Elles entraînent hypoxémie et parfois insuffisance
respiratoire.
• Leur tableau clinique et leur traitement n’ont rien
de particulier.
Lésions pulmonaires et insuffisance
respiratoire
Les détresses respiratoires précoces postopératoires cons-
tituent la complication la plus redoutable des résections
pulmonaires, souvent létales. Les facteurs de risque de décom-
pensation respiratoire : BPCO, insuffisance respiratoire préa-
lable, obésité, insuffisance ventriculaire gauche doivent être
recherchées afin de mettre en place des mesures préventives
chez ces patients : arrêt du tabac, préparation respiratoire,
hospitalisation postopératoire en unité de soins continus ou
en réanimation. Elles résultent d’une ou plusieurs complica-
tions décrites ici, qui peuvent se potentialiser et requièrent la
plupart du temps une ventilation assistée, source elle-même
de complications ou aggravant d’autres complications
associées : pneumopathies, fuites alvéolopleurales ou plus
grave encore fistule bronchique. De ce fait, l’analyse des cau-
ses de la détresse peut être difficile et leur prise en charge
pourrait faire l’objet d’un article spécifique.
L’insuffisance respiratoire aiguë entraîne une hypercap-
nie et des signes d’hypoventilation alvéolaire. Il faut recher-
cher dans un premier temps un surdosage en sédatifs ou une
BPCO évolutive plus ou moins associés à un spasme
bronchique : les épreuves respiratoires fonctionnelles pren-
nent alors un grand intérêt, surtout si un test aux ß2-miméti-
ques a été réalisé. L’hypoventilation alvéolaire peut être
majorée par une atteinte phrénique ou récurentielle. À ce
stade, la radiographie thoracique n’apporte parfois pas de
signe. L’existence d’une hypoxie doit faire rechercher une
atélectasie, une pneumopathie, une embolie pulmonaire, un
œdème pulmonaire associé ou non à une défaillance cardia-
que, un syndrome de détresse respiratoire aigu ou des lésions
pulmonaires en rapport avec une fistule bronchique. La ven-
tilation assistée non invasive (VNI), utilisant des masques
nasaux ou buccaux, semble être une solution intéressante
dans la prise en charge postopératoire des détresses respira-
toires postopératoires, susceptible de réduire la morbidité
[21], évitant les complications propres à la ventilation assis-
tée avec intubation ou trachéotomie. Elle doit être proposée
précocement en présence de signes tels qu’une polypnée
supérieure à 25 cycles/min, un tirage sus-sternal, un rapport
PaO2/FiO2 inférieur à 200 et une anomalie au cliché thora-
cique [22].
Après avoir éliminé un simple encombrement, une pneu-
mopathie débutante, une embolie pulmonaire, une défaillance
ventriculaire gauche ou la survenue d’une fistule bronchique,
deux atteintes pulmonaires suivantes sont dans ce contexte
redoutables : le SDRA et l’œdème post-pneumonectomie, qui
représentent finalement des diagnostics d’élimination.
© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 16/10/2012