Méningites
Objectifs :
¤ Diagnostiquer une méningite ou une méningoencéphalite.
¤ Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.
¤ Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
Sommaire
MENINGITES BACTERIENNES DE L'ENFANT
Introduction
Faq 1 - Enumérer les bactéries les plus fréquemment en cause selon l’âge
Faq 2 - Décrire les signes et symptômes d’une méningite en fonction de l’âge
Faq 3 - Décrire les signes de gravité immédiate et exposer les mesures à prendre d’urgence
Faq 4 - Exposer et argumenter l’indication d’une ponction lombaire. Interpréter l’analyse du
LCR
Faq 5 - Pronostic
Faq 6 - Citer les principes du traitement curatif selon les situations (âge, germe)
Faq 7 - Enumérer les principales complications, préciser les facteurs favorisants et la
surveillance
Faq 8 - Exposer les mesures préventives et leurs indications, et les expliquer aux familles
Conclusion
MENINGITES A LIQUIDE CLAIR (ET MENINGOE CEPHALITES) D'ORIGINE INFECTIEUSE CHEZ
LE NOURRISON ET L'ENFANT
Introduction
Faq 9 - Diagnostic des méningites à liquide clair
Faq 10 - Situation d’urgence ou signes de gravité
Faq 11 - Argumentation de l’attitude thérapeutique
Faq 12 - Planification du suivi
I. MENINGITES BACTERIENNES DE L’ENFANT
Introduction
Les méningites bactériennes sont liées à l’envahissement du liquide céphalo-rachidien (LCR) par une
bactérie qui s’y développe.
Le nombre de cas de ces méningites bactériennes est estimé à plus d’un million par an dans le
monde. Elles sont à l’origine d’une mortalité élevée dans les pays en voie de développement. Elles
sont aussi redoutables dans les pays industrialisés, et ce malgré les progrès des politiques vaccinales
et le développement de nouvelles stratégies antibiotiques.
Les méningites bactériennes de l’enfant sont dans tous les cas, une urgence thérapeutique,
impliquant la suspicion précoce d’un diagnostic qui doit être confirmé par l’examen du LCR.
Faq 1 - Enumérer les bactéries les plus fréquemment en cause selon l’âge
Les trois germes responsables de la majorité des méningites bactériennes de l’enfant (nourrisson et
grand enfant) sont des germes de portage du rhinopharynx : Streptococcus pneumoniae
(pneumocoque) et Neisseria meningitidis (méningocoque), et exceptionnellement depuis la
généralisation des campagnes de vaccination contre ce germe, Haemophilus influenzae b.
La pénétration des germes dans le LCR se fait essentiellement par voie hématogène (septicémie ou
bactériémie) avec franchissement secondaire de la barrière hématoméningée notamment au niveau
des plexus choroïdes.
Physiopathologie
DIAGNOSTIC
Le diagnostic d’une méningite bactérienne est urgent et repose exclusivement sur l’examen du LCR
obtenu après ponction lombaire. Il faut donc savoir réunir les signes qui doivent conduire le plus
rapidement possible à cet examen.
Faq 2 - Décrire les signes et symptômes d’une méningite en fonction de l’âge
Chez le grand enfant, le diagnostic est en règle « facile » devant :
- Des signes infectieux, avec une fièvre à début le plus souvent
brutal survenant parfois au décours d’un épisode infectieux des voies
aériennes supérieures (rhinopharyngite ou otite)
- Des signes évocateurs d’une atteinte méningée : céphalées,
vomissements et/ou refus alimentaire, photophobie.
L’examen recherche les deux maîtres signes de la contracture d’origine méningée :
- la raideur de la nuque (flexion de la nuque douloureuse et limitée
alors que les mouvements de latéralité restent possibles),
- le signe de Kernig (flexion sur le tronc des membres inférieurs
maintenus en extension, entraînant une flexion invincible des jambes
sur les cuisses).
Chez le nourrisson, le diagnostic est beaucoup plus difficile. Il est évoqué devant :
- un enfant grognon, geignard, ayant des cris à la mobilisation
(hyperesthésie cutanée) ou des modifications du comportement
habituel ;
- une somnolence inhabituelle entrecoupée de périodes d’agitation
insolite, non calmées dans les bras de la mère ;
- un refus répété du biberon ;
- des convulsions fébriles même brèves et apparemment isolées.
A l’examen, il convient d’apprécier en premier lieu l’existence :
- d’une tension de la fontanelle, au mieux identifiée en position assise
et en dehors des cris ;
- d’une hypotonie de la nuque ou une raideur anormale à la
mobilisation du rachis avec rejet de la tête en arrière ;
- des signes neurologiques de localisation.
Il faut aussi évaluer la coexistence de signes d’infections associées des voies aériennes respiratoires
hautes (otite moyenne aiguë) ou basses (foyer pulmonaire).
Faq 3 - Décrire les signes de gravité immédiate et exposer les mesures à
prendre d’urgence
Les signes de gravité sont :
® hémodynamiques (état de choc septique) : augmentation de la
fréquence cardiaque, du temps de recoloration, extrémités froides,
absence de diurèse, voire collapsus.
® cutanés : purpura rapidement extensif ou nécrotique associé à des
troubles hémodynamiques laissant craindre une méningococcémie
sévère ou un purpura fulminans
® neurologiques : troubles de la conscience avec parfois coma ou
convulsions susceptibles de témoigner d’une hypertension
intracrânienne ou d’une collection purulente cérébroméningée (abcès
ou empyème sous-dural).
La moindre suspicion de méningite infectieuse doit conduire à l’hospitalisation.
Faq 4 - Exposer et argumenter l’indication d’une ponction lombaire. Interpréter
l’analyse du LCR
La confirmation du diagnostic repose exclusivement sur l’examen du LCR qui est urgent.
Le diagnostic peut être suspecté dès l’examen macroscopique du liquide, si celui-ci est hypertendu ou
s’il a perdu sa limpidité habituelle.
Le nombre de cellules est anormal s’il est supérieur à 10/mm3 ; la formule met typiquement en
évidence une prédominance de polynucléaires altérés. Une réaction panachée (lymphocytaire) peut
cependant précéder l’apparition des polynucléaires. Une telle réaction peut être aussi liée à la
précocité de l’examen ou à une antibiothérapie préalable inadéquate ou insuffisante (méningite
décapitée).
L’examen biochimique du LCR met en évidence, en cas de méningite bactérienne, une protéinorachie
anormale (> 0,45 g/l) et un rapport du glucose LCR/sang < 0,40. Cette hypoglycorachie est, pour
certains, l’indice d’un mauvais pronostic.
L’examen direct (coloration de Gram sur culot de centrifugation) permet souvent le diagnostic
probabiliste du germe responsable avant même les résultats de la culture :
• Avant tout :
- cocci gram-positif : pneumocoque
- diplocoque gram-négatif : méningocoque
• Exceptionnellement, actuellement :
- bacille gram-négatif polymorphe évoquant un haemophilus
influenzae (b)
La culture doit être systématique. Elle permet la confirmation de l’identification du germe et
l’évaluation de la concentration minimale inhibitrice (CMI) de la pénicilline G et des céphalosporines
de 3ème génération.
La recherche des antigènes solubles (sang et urines) permet souvent, avec une faible sensibilité, un
diagnostic rapide (antigènes bactériens) des principaux germes (méningocoques, pneumocoques et
Haemophilus influenzae b, chez les enfants de plus de trois mois).
Les autres examens biologiques ont un intérêt :
- d’orientation vers une infection bactérienne :
• hyperleucocytose à polynucléaires ;
• élévation dans le sang de la
protéine réactive C
• le dosage de la procalcitonine
apparaît actuellement comme le
meilleure paramètre susceptible de
distinguer une méningite virale d’une
méningite bactérienne (sensibilité et
spécificité proche de 100%)
- de confirmation du germe bactérien responsable : si identification à
l’hémoculture (systématique), positive dans près de 3/4 cas.
- de recherche d’une complication :
• sécrétion inappropriée d’hormone
antidiurétique (ionogramme sanguin)
chez un enfant ayant eu une prise
récente anormale de poids ;
• voire d’une complication abcédée
précoce (échographie
transfontanellaire chez le jeune
nourrisson à fontanelle perméable ;
scanner ou imagerie par résonance
magnétique cérébrale chez les
enfants plus âgés).
Faq 5 - Pronostic
A ce stade initial, les éléments de mauvais pronostic sont avant tout :
® le retard à la mise en route d’un traitement bactéricide, mais aussi :
® le jeune âge (nourrisson)
® le germe (pneumocoque)
® la gravité du tableau neurologique initial (notamment dans les
formes comateuses)
® l’existence d’un collapsus associé ou de signes d’hypertension
intracrânienne, traités tardivement ou de façon inadaptée.
Faq 6 - Citer les principes du traitement curatif selon les situations (âge,
germe)
Dans tous les cas, le traitement doit répondre à deux objectifs :
- permettre une bactéricidie rapide dans le LCR,
- lutter contre l’inflammation méningée et l’oedème cérébral.
— Epidémiologie : germes et résistances
Les principaux germes des méningites de l’enfant sont :
- à tout âge, le méningocoque prédominant cependant chez l’enfant
de plus de 1 ans (60%) (B dans deux tiers des cas ; A et surtout C
dans un tiers des cas) ;
- chez le nourrisson, les méningites bactériennes à pneumocoque
représentent 60 % des méningites purulentes avant l’âge de 1 an.
- Les méningites bactériennes à H.influenzae b ont, en France, à peu
près totalement disparu depuis la généralisation du vaccin contre ce
germe. Quelques cas de méningites à H.influenzae non b sont
actuellement décrits. H.influenzae b reste cependant l’un des
premiers germes responsables de méningites purulentes dans les
pays en voie de développement.
Les niveaux de résistance actuels de ces germes sont en France :
- N .meningitidis : 28 % Ampi R en 1998
- S. pneumoniae : 12 % Péni R en 1992 ; 36 % Péni R en 1994 ; 53
% Péni R en 1997
- H. influenzae b : 40 % Ampi R
L’incidence des autres bactéries est plus rare et sur terrain particulier :
- salmonelles : nourrisson malnutri ou enfant drépanocytaire
- staphylocoque coagulase négatif ou bacilles Gram négatif
(infections nosocomiales)
- germes opportunistes : enfants immunodéprimés
— Antibiothérapie
Nourrissons et enfants âgés de moins de 5 ans
En cas de germe identifié à l’examen direct ou suspecté sur la positivité des résultats des antigènes
solubles, l’antibiothérapie peut être immédiatement adaptée :
- méningocoque : céfotaxime 200 mg/kg/j en 4 perfusions ou
ceftriaxone 100 mg/kg/j en 1 ou 2 injections intraveineuse lente
- H.influenzae b (enfant non vacciné) : céfotaxime 200 mg/kg/j en 4
perfusions ou ceftriaxone 100 mg/kg/j en 2 injections intraveineuse
lente
- S.pneumoniae (pneumocoque) : (identification dans 75 % des cas
environ dès l’examen direct) : il convient dans la crainte d’un
pneumocoque résistant d’obtenir une bactéricidie rapide dans le LCR.
Afin d’assurer cet objectif, l’association céfotaxime 200 à 300 mg/kg/j
en quatre perfusions ou ceftriaxone 100 mg/kg/24 heures en 1 à 2
injections intraveineuse lente + Vancomycine (60 mg/kg/j en quatre
injections lente d’une heure) est généralement proposée.
Chez le jeune nourrisson, avant même identification du germe à l’examen direct ou à la culture, la
crainte de l’étiologie probabiliste pneumococcique de la méningite purulente conduit le plus souvent à
une telle association (céfotaxime + Vancomycine).
Dans cette éventualité, si le germe est ultérieurement reconnu (E test) de sensibilité normale au
céfotaxime (CMI céfotaxime < 0,5 mg/l), l’antibiothérapie se réduit à une monothérapie par céfotaxime
à dose habituelle (200 mg/kg/j) ou par ceftriaxone (75-100 mg/kg/j).
Enfants âgés de plus de 5 ans
L’accroissement actuel, en France, de la résistance du méningocoque à la pénicilline (plus de 25 % en
1998) conduit à la prescription initiale d’une céphalosporine de 3ème génération par voie
intraveineuse : céfotaxime (200 mg/kg/j) ou ceftriaxone à la dose de 100 mg/kg/j). Cette
antibiothérapie est également adaptée pour le traitement des méningites bactériennes à H.influenzae
b (enfants non vaccinés).
Un contexte évocateur de méningite à pneumocoque (antécédents de traumatisme crânien ou de
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