ARTICLE Progrès en Urologie (1999), 9, 112-117 ORIGINAL Urétroplastie par greffe cutanée Nicolas GASCHIGNARD, Denis PRUNET, Nicolas VASSE, Jean-Marie BUZELIN, Olivier BOUCHOT Clinique Urologique, Hôtel-Dieu, Nantes, France RESUME Buts : Evaluer les résultats de l'urétroplastie par greffe cutanée (UGC) dans la prise en charge des sténoses de l'urètre. Matériel et Méthodes : Vingt huit patients, d'âge moyen de 54 ans, traités par UGC ont été revus avec un recul moyen de 24,5 mois (extrêmes : 1-66). Le matériel utilisé pour la greffe a été le prépuce de première intention; en son absence, la peau pénienne ou du bras a été utilisée. Résultats : Cette étude a montré un résultat satisfaisant (absence de signes cliniques, débit maximum ≥ 15 ml/s, absence de chirurgie de rattrapage) dans 67,9% des cas. Si les complications précoces ont été faibles, 8 sténoses ont été observées au cours de la surveillance, dont 3 ont nécessité une réintervention chirurgicale ouverte. Les autres récidives ont été traitées par une urétrotomie interne ou par hétéro ou autodilatations. Cette étude a montré que la stérilité des urines au moment de la chirurgie était déterminante. Conclusion : L'indication préférentielle de ce type d'urétroplastie reste la sténose de l'urètre bulbaire à urines stériles. Par contre l'étiologie et la longueur de la sténose ne sont pas des facteurs discriminants. Mots clés : Urètre, sténose, urétroplastie, greffe cutanée. La sténose de l’urètre est une pathologie fréquente chez l’homme, dont l’incidence augmente avec la multiplicité des gestes endoscopiques. Elle pose toujours un problème de choix thérapeutique. beaux. L’urétroplastie par greffe, décrite par PRESMAN et G REENFIELD en 1953 [21] et popularisée par D EVINE [11] est une option thérapeutique. Le but de cette étude est de présenter notre expérience de l’urétroplastie par greffe. L’urétrotomie optique, technique endoscopique de première intention, en dehors des cas de dilatation des sténoses rétro-méatiques précoces après résection transurétrale, présente un taux d’échec à distance supérieur à 50%. Sa répétition pourrait, de plus, être préjudiciable aux résultats des urétroplasties proposées de deuxième intention [7]. PATIENTS ET METHODES Depuis 1986, 28 patients, d’âge moyen initial de 54,5 ans (compris entre 9 et 86 ans), présentant une sténose de l’urètre, ont été traités par une urétroplastie avec greffe cutanée (UGC). Les urétroplasties sur hypospadias ou épispadi as ont été exclues de l’étude. L’étiologie de la sténose a été traumatique dans 7 cas, infectieuse dans 2 cas, iatrogène dans 9 cas, et non connue dans 10 cas. Le risque de récidive d’une sténose de l’urètre est essentiellement lié à l’importance du cal fibreux péristénotique. Ainsi, ce cal est responsable des échecs après traitement endoscopique, mais également après urétrorraphie termino-terminale, proposée en cas de sténose courte en urétrographie. Les traitements antérieurs ont été multiples chez 26 Les urétroplasties trouvent ainsi leurs indications en cas d’échec des traitements endoscopiques, de sténoses supérieures à 2 cm, ou en cas de cal fibreux important. Les techniques d’urétroplasties sont nombreuses, en un ou deux temps, avec utilisation de greffes ou de lam- Manuscrit reçu : mai 1998, accepté : octobre 1998. Adresse pour correspondance : Dr. N. Gaschignard, Clinique Urologique, HôtelDieu, BP 1005, 44093 Nantes Cedex. 112 N. Gaschignard et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 112-117 Ch. Le drainage urinaire a été maintenu 18 jours en moyenne (compris entre 10 et 28). A l’ablation de la sonde urétrale, une urétrographie mictionnelle a été réalisée afin de vérifier l’absence d’extravasation du produit de contraste. Tableau 1. Traitements antérieurs de la sténose (26 patients). Gestes effectués Nombre de gestes 0 1 2-3 >3 Uréthrotomie endoscopique 6 10 7 5 Dilatation 14 4 1 9 Urétroplastie/urétrorraphie 20 7 1 Les résultats à distance ont été interprétés par la clinique et la débitmétrie. Aucune endoscopie ou urétrographie n'o nt été réalisées de principe si le débit maximum a été supérieur ou égal à 15 ml/sec pour un volume uriné supérieur à 150 ml, et en l’absence d’infection urinaire (absence de signes irritatifs et bandelette négative). patients (Tableau 1) : urétrotomie endoscopique (1 à 3 gestes) dans 78% des cas, dilatation par bougie gomme dans 50% des cas, et urétrorraphie termino-terminale ou urétroplastie par lambeau pédiculé dans 28,5% des cas. Le délai moyen entre le premier geste et l’ UGC a été de 9 ans. Une UGC a été réalisée de première intention chez 2 patients du fait de la longueur radiographique de la sténose. Le résultat a été jugé : • satisfaisant en l’absence de signes cliniques irritatifs et obstructifs, avec un débit maximum supérieur ou égal à 15 ml/sec, et en l’absence de chirurgie de rattrapage; • moyen en présence de signes cliniques d’obstruction et/ou un débit maximum inférieur à 15 ml/sec ou nécessité d’une urétrotomie ou plusieurs dilatations pour obtenir une résultat satisfaisant à distance; L’indication de l’UGC a été posée devant la présence d’une dysurie (n=20), d’une ou plusieurs infections urinaires (n=3), d’une rétention aiguë (n=5) nécessitant la pause d'un cathéter sus-pubien. Pour les patients (n=17) ayant une débitmétrie interprétable (volume uriné supérieur à 150 ml), le débit maximum moyen a été de 6,1 ml/s (compris entre 2 et 10). • mauvais en cas d’infection urinaire liée à la récidive de la sténose, de réintervention chirurgicale ou nécessité de plusieurs urétrotomies endoscopiques pour obtenir une résultat satisfaisant, voire en cas de réalisation d’un autre mode de dérivation urinaire. La réalisation d’une urétrographie mictionnelle et rétrograde a permis, outre de confirmer la sténose urétrale, d’en visualiser son siège et sa longueur. Le siège de la sténose a été l’urèthre membraneux dans 8 cas, bulbaire dans 16 cas, et pénien dans 3 cas. Dans 1 cas, la sténose s’étendait de l’urètre membraneux jusqu’à l’urètre pénien. La longueur moyenne a été de 2,4 cm (compris entre 1 et 13). La sténose a été unique dans 25 cas, multiple dans 3 cas. Les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel Stat View 4.5, par les tests de Fisher et ANOVA pour les critères qualitatifs, à partir des moyennes pour les critères quantitatifs, selon la méthode de KaplanMeier pour la survie sans récidive. L’intervention chirurgicale a été menée sous antibioprophylaxie systématique (céphalosporines de première génération) en cas d’examen cytobactériologique négatif. En cas d’infection urinaire prouvée, une antibiothérapie adaptée et efficace a été instituée pendant plusieurs jours avant l’intervention. Les complications précoces L’incision, fonction du siège de la sténose, a été : péricoronale en cas de sténose de l’urètre pénien, périnéale en cas de sténose bulbo-membraneuse, associant les 2 voies d’abord en cas de sténose étendue de l’urètre antérieur. - 2 fistules, visualisées lors de la cystographie mictionnelle. Si le sondage prolongé (40 jours) a permis la cicatrisation dans un cas, un deuxième geste chirurgicale a été nécessaire chez le 2ème patient. Secondairement, ces 2 patients ont récidivé leur sténose. RESULTATS Elles ont été au nombre de 9, survenant durant les 30 premiers jours post-opératoires: - six complications infectieuses : 2 épididymites, une prostatite, et 3 infections urinaires asymptomatiques. Le greffon utilisé a été prélevé au niveau du prépuce (n = 25), du fourreau pénien (n=l) et de la face interne du bras (n=2). La graisse sous-cutanée et l’hypoderme ont été enlevés, afin de permettre une revascularisation précoce du greffon. L’urétrotomie chirurgicale a été faite au niveau de la sténose, la débordant en amont et en aval d’au moins un centimètre. Les sutures ont été réalisées par des surjets de fils à résorption lente (PDS dec 0,7), sous couvert d’une sonde urétrale souple 18 - une incontinence urinaire pré-existante après résection trans-urétrale de la prostate a été aggravée par l’UGC. Résultats à distance Avec un recul moyen de 24,5 mois (extrêmes : 1-66, médiane : 23,9), les résultats ont été: 113 N. Gaschignard et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 112-117 dans un délai moyen de 15 mois (compris entre 1 et 55). Le greffon a été d'origine préputiale dans tous les cas. L’ECBU pré-opératoire avait été positif chez 1 patient. Le traitement de ces récidives a été : Tableau 2. Distribution des résultats en fonction du type de greffon. Greffon Résultat satisfaisant Résultat moyen Résultat mauvais Prépuce 17 2 6 Peau pénienne 0 1 0 Bras 2 0 0 - endoscopique par urétrotomie pour des sténoses courtes en amont de l’urétroplastie dans 3 cas; - chirurgical dans 3 cas : 2 urétrorraphies termino-terminales au niveau de l’urètre bulbaire, 1 urétroplastie par lambeau suivie d'une urétrostomie définitive; - une dilatation pour sténose rétroméatique, dans un cas, avec un bon résultat final; Tableau 3. Répartition des résultats en fonction du siège de la lésion. Résultat satisfaisant Résultat moyen ou mauvais Membraneux 7 1 Bulbaire 9 7 Pénien 2 1 Etendue à l’urètre antérieur 1 0 Siège de la sténose - une auto-dilatation pour récidive pénienne dans un cas. La probabilité de retraitement d’une UGC dans le temps a été étudiée selon la méthode de Kaplan-Meier. Par définition, la survie du greffon cutané correspondait au temps pendant lequel aucun traitement complémentaire n'a été nécessaire. A 50 mois, la survie cumulée des greffons était de 60% avec un taux d'erreur standard de ± 11% (Figure 1). Le test ANOVA a été utilisé pour comparer 2 groupes : les bons résultats d'un côté et les moyens et mauvais résultats de l'autre. Il n'existait pas de différence significative entre ces 2 groupes en ce qui concerne l'âge (p=0,37), le délai par rapport au premier traitement (p=0,32). De même, le test de Fisher, utilisé pour comparer le résultat en fonction de l'étiologie traumatique ou non, était non significatif (p=0,8). DISCUSSION Avec un recul moyen de 24 mois, 67,9 % de résultats satisfaisants ont été obtenus de première intention par l'UGC. Comparés à la littérature, ces résultats apparaissent modestes (Tableau 4). Plusieurs points méritent d’être discutés pour comprendre les différences. Figure 1. Probabilité de retraitement des greffons (n=28). Tableau 4. Résultats de l’urétroplastie par greffe libre dans la littérature. - Satisfaisants dans 67,9% des cas, soit 19 patients; Auteurs Nombre de patients Succès (%) Recul (années) Brannan [5] 66 80 >1 Devine [10] 60 87 >1 Blum [3] 11 80 >5 Boccon-Gibod [4] 29 72 >1 Webster [23] 34 85 ? Les 3 résultats moyens ont concerné un patient nécessitant des autodilatations urétrales périodiques, un patient ayant une récidive traitée par une urétrotomie endoscopique, et un patient ayant un débit maximum à 9 ml /s mais sans sténose radiographique. L’Hermite [16] 18 77 >5 Roehrborn [22] 49 63 ? Barbagli [1] 12 66 >1 Wessels [26] 35 86 > 3 mois Huit sténoses récidivantes (28,5%) ont été observées Notre série 28 67,9 2 - Moyens dans 10,7% des cas, soit 3 patients; - Mauvais dans 21,4% des cas, soit 6 patients. Parmi les 20 patients ayant une débitmétrie interprétable, le débit maximum moyen a été de 15,5 ml/s. Aucune urétrocèle n'a été retrouvée. Les résultats en fonction du type de greffon et du site de la sténose sont résumés dans les Tableaux 2 et 3. 114 N. Gaschignard et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 112-117 Les antécédents des patients Aussi de nombreux auteurs préfèrent utiliser une urétroplastie par lambeau au niveau de l’urètre pénien, de type Orandi pour l'urètre pénien antérieur ou Quartey pour l’urètre pénien postérieur [4,15,25]. Dans notre série, chez 26 des 28 patients, les traitements antérieurs ont été nombreux, variables, parfois multiples. Ces antériorités diminuent le pourcentage de bons résultats; ainsi, BARBAGLI a rapporté 66% de succès à 12 mois chez 12 patients traités antérieurement par chirurgie ouverte [1]. ROEHRBORN a observé un pourcentage de succès significativement différent en comparant les patients ayant eu une UGC de première intention (85,7%) et les patients ayant déjà eu des dilatations (72,4%) ou une chirurgie (68,4%) [22]. Par contre, WEBSTER a obtenu 85% de bons résultats chez des patients n’ayant jamais eu de chirurgie ouverte (urétrorraphie ou urétroplastie) [23]. L’analyse des résultats Les éléments de surveillance et d’appréciation des résultats après UGC ont été variables selon les études. Pour notre part, seuls des critères cliniques et débitmétriques ont été utilisés de première intention. Une exploration radiologique ou endoscopique de l’urètre n’a été réalisée qu’en cas d’anomalie d’un de ces 2 éléments. DEVINE, sur des critères identiques, a rapporté 87% de succès chez 60 patients avec un recul supérieur à 12 mois [10]. Ainsi, D EVINE, en 1996, conseille l’urétroplastie par greffon cutané pour des patients dont la sténose atteint uniquement l’urètre ou lorsque la fibrose reste superficielle au niveau du tissu érectile du corps spongieux. Par contre, les patients avec une sténose épaisse, ayant eu de nombreuses dilatations, urétrotomies internes, ou des antécédents de chirurgie ouverte, ne sont pas de bons candidats à l’UGC [8]. L’addition d’une urétrographie mictionnelle, indispensable pour certains, ne semble pas diminuer les pourcentages de succès, allant de 66 à 85% dans différentes séries [1, 4, 16, 23]. G RISE a proposé de classer les images d’urétrographie en urètre normal, sténose modérée, et sténose serrée [14]. DEVINE a proposé récemment de remplacer l’urétrographie mictionnelle par une fibroscopie urétrale, réalisée à 6 et 12 mois [8]. A ce terme, en l’absence de récidive, cet auteur considère que le risque de récidive est très faible, et une surveillance ultérieure n’est pas nécessaire. Cette attitude reste discutable, même si dans notre série, le délai moyen d’apparition de la récidive a été de 15 mois, car trois patients ont eu une récidive au delà de la 2ème année, dont un 55 mois après la chirurgie. Le siège de la sténose L’urètre bulbaire est le siège de choix pour l’UGC. La présence du bulbe spongieux permet la couverture du greffon, lui assurant une revascularisation précoce, initialement par imbibition puis par néo-angiogénèse [15, 23]. Au niveau de l’urètre membraneux, en cas de sténoses post-traumatiques, l’urétrorraphie termino-terminale doit être envisagée de première intention, car les sténoses sont courtes, et les résultats excellents (95% de succès) [24]. Mais en cas de mobilisation insuffisante de l’urètre membraneux, l’UGC peut être utile. Dans cette indication, nous avons obtenu 87% de résultats satisfaisants. Sa limite est liée à la présence d’une fibrose trop importante compromettant la revascularisation, qui risque d’être tardive et insuffisante. La crainte de cette fibrose fait préférer, pour la plupart des auteurs, l’urétroplastie par lambeau scrotal ou périnéal [15,23]. Ce type d’urétroplastie par lambeau expose, néanmoins, à certains problèmes : mauvaise tolérance à l'urine, repousse des poils [25]. D’autres facteurs sont plus consensuels dans la littérature : - L’absence d’infection urinaire au moment de la chi rurgie La stérilité des urines, en pré, per et post-opératoire, est un facteur essentiel du succès de cette chirurgie. Dans notre série, 50 % des patients ayant présenté une sténose récidivante ont eu une infection urinaire à un moment donné. Pour BOCCON-G IBOD, il s’agit du facteur essentiel du choix du type d’urétroplastie; en effet, il semble que le lambeau présente une meilleure résistance à l’infection [4]. - Les résultats fonction de l’étiologie de la sténose L’urètre pénien est plus rarement en cause dans les sténoses de l’urètre [23]. La technique utilisée pour l’urétroplastie doit tenir compte de l’allongement de l'urètre pénien lors des érections. Sa longueur et son élasticité doivent donc être conservées. C'est la raison pour laquelle une urétrorraphie termino-terminale ne peut que très rarement être employée sous peine de voir apparaître une corde ventrale lors des érections. Ce phénomène a aussi été constaté après réalisation d'une UGC [23]. La perte d'élasticité des greffons au cours de la cicatrisation permet d'expliquer ce phénomène. Dans notre série, les sténoses post-traumatiques n’ont pas eu de résultats significativement différents des autres étiologies (infectieuse, iatrogène). Seules la qualité du lit receveur et la fibrose péri-sténotique sont importantes. Il apparaît essentiel de préparer le site de la greffe en excisant au maximum la fibrose, favorisant ainsi une revascularisation précoce de la plastie. - La longueur de la sténose L'UGC peut être utilisée pour traiter des sténoses éten115 N. Gaschignard et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 112-117 dues. Dans notre série, la longueur maximale a été de 13 cm avec un greffon de la face interne du bras. Dans une série de 40 patients, WESSELS a utilisé des greffons de longueur maximale de 17 cm pour la muqueuse buccale (en 3 greffons), de 11 cm pour la muqueuse vésicale, de 9 cm pour la peau pénienne et de 8 cm pour le prépuce [26]. Pour DEVINE , il n'y a pas de limite pour la longueur d'un greffon [12]. DE SY a utilisé un greffon préputial spiralé permettant de traiter des sténoses de l’urètre de plus de 20 cm [6], confirmant l’affi rmat ion de D EVINE. Cependant , l’util isation de l’UGC pour des sténoses supérieures à 10 cm exposent à un pourcentage de récidive plus élevé [25]. puce (entre 15 et 25%) [9,25]. Notre série rapporte 2 bons résultats sur 2 utilisations. - La technique chirurgicale * la muqueuse buccale offre les mêmes avantages que la muqueuse vésicale. Une intervention en double équipe permet de diminuer le temps opératoire [19]. Le greffon doit être dégraissé comme le prépuce, préservé du dessèchement par une conservation dans du liquide physiologique auquel certains ajoutent un antibiotique [13, 18]. Les différentes séries donnent entre 90 et 100% de résultats excellents, mais les suivis restent courts (entre 11 et 18 mois) [13, 20, 26]. M OREY, depuis 1996, utilise de principe ce site de prélèvement pour les urétroplasties bulbaires [20]. * La muqueuse vésicale est utilisée régulièrement dans la prise en charge des hypospadias [18]. Elle offre l'avantage de pouvoir fournir une grande longueur et d'être naturellement destinée à être au contact de l'urine. Son indice de rétraction est similaire à celui du prépuce (5 à 15%) [9]. J ORDAN et DEVINE réservent ce type de greffon aux cas où un abord vésical est nécessaire pour une autre raison [15]. MONTFORT a rapporté une série de 8 sténoses de l’urètre de l'enfant avec 6 bons résultats à 19 mois [17]. L'UGC nécessite le respect de principes afin de ne pas compromettre le résultat à long terme. Lors de l'abord de l'urètre, la dissection doit se faire plan par plan afin de ménager l'intégrité des tissus de couverture qui seront à l'origine de la vascularisation du greffon [6]. L'incision de la sténose doit être prolongée au delà de la jonction muqueuse saine - muqueuse pathologique. Afin de préveni r les urétrocèles et les fistules, BARBAGLI préconise de placer le greffon sur la face dorsale de l'urètre, plaqué contre les corps caverneux [2]. Pour cela, ils mobilisent complètement le corps spongieux afin de le faire tourner de 180°. Le greffon est suturé sur les corps caverneux puis il est suturé par 2 hémi-surjets à l'urétrotomie. CONCLUSION La prise en charge des sténoses de l’urètre nécessite la connaissance des différentes techniques afin de pouvoir adapter le traitement aux caractéristiques de la lésion ainsi qu'aux différentes contraintes associées (antécédents, siège de la sténose). L’urétroplastie par greffe cutanée permet une réparation en un temps avec des résultats satisfaisants préférentiellement au niveau de l’urètre bulbaire. Le prépuce et la peau pénienne donnent les lambeaux permettant d'obtenir les meilleurs résultats du fait de leur qualité. Au vue de la littérature, la muqueuse buccale semble être une solution de rechange satisfaisante. Dans tous les cas, une surveillance prolongée est nécessaire afin de dépister une récidive. De même, la bonne couverture du greffon, outre ses effets bénéfiques sur la vascularisation, permet une bonne application du greffon sur la sonde urétrale et évite la survenue d'une urétrocèle. L'hémostase de ce plan de couverture doit être soigneuse [6]. En effet, la survenue d'un hématome peut compromettre la prise du greffon. Cela justifie la réalisation d'un pansement légèrement compressif en fin d'intervention. - Le matériel de greffe Parmi les différents greffons utilisables, le prépuce, tissu glabre, fin et souple, reste le plus simple, offrant des résultats superposables aux greffons de sites extragénitaux. Son faible coefficient de rétraction (< 15%) permet un ajustement simple sur le segment à ponter [9,25]. En cas d'antécédent de circoncision ou de fistule urétro-cutanée, il peut être nécessaire de se tourner vers un autre site de prélèvement : REFERENCES 1. BARBAGLI G., SELLI C., TOSTO A. Reoperative surgery for recurrent strictures of the penile and bulbous urethra. J. Urol., 1996, 156, 76-77. * La peau pénienne offre les mêmes avantages que le prépuce. Par contre, elle ne permet pas de fournir de grande longueur. 2. BARBAGLI G., SELLI C., TOSTO A., PALMINTERI E. Dorsal free graft urethroplasty. J. Urol., 1996, 155, 123-126. 3. BLUM J.A., FEENEY M.J., HOWE G.E., STEEL J.F. Skin patch urethroplasty : 5-year followup. J. Urol. 1982, 127, 909. * La peau de la face interne du bras permet des prélèvements de grande longueur sur une peau quasiment glabre. Son accès est simple et la cicatrisation du site de prélèvement rapide. Cependant, il s'agit d'une peau épaisse, d'un maniement moins aisé d'autant plus que l'indice de rétraction est supérieur par rapport au pré- 4. BOCCON-GIBOD L., LE PORTZ B. One-stage urethroplasty for urethral stricture. Eur. Urol., 1984, 10, 32-35. 5. BRANNAN W., OCHSNER M.G., FUSELIER H.A., GOODLET J.S. Free full thickness skin graft urethroplasty for urethral stricture: experience with 66 patients. J. Urol., 1976, 115, 677-680. 116 N. Gaschignard et coll., Progrès en Urologie (1999), 9, 112-117 6. De SY W.A., OOSTERLINCK W. Atlas de chirurgie reconstructive urétrale. Cadempino, Ed. Inpharzam, 1990, 31-38. 21. PRESMAN D., GREENFIELD D.L. 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EL-KASABY A.W., FATH-ALLA M., NOWEIR A.M., EL-HALABY M.R., ZAKARIA W., EL-BEIALY M.H. The use of buccal mucosal patch graft in the management of anterior urethral strictures. J. Urol., 1993, 149, 276-278. Skin graft urethroplasty. 14. GRISE P., SIBERT L., BONNET O. Rétrécissements scléro-inflammatoires de l'urètre. Ed. techniques . E.M.C. (Paris, France), Néphrologie-Urologie, 18370 A10, 1991. Material and Methods : Twenty eight patients, with a mean age of 54 years, treated by SGU were reviewed with a mean followup of 24.5 months (range : 1-66). The first-line material skin graft material was the foreskin or, in its absence, the penile skin or skin of the arm was used. Objectives : To evaluate the results of skin graft urethroplasty (SGU) in the management of urethral stricture. 15. JORDAN G.H., DEVINE P.C. Management of urethral stricture disease. Urol. Clin. North Am., 1988, 15, 277-289. 16. L'HERMITE J., CHOPIN G., HUBERT J ., GUILLEMIN P. L'urétroplastie selon Devine. Notre expérience à propos de 18 observations. Ann. Urol., 1990, 24, 147-151. Results : This study demonstrated a satisfactory result (no cli nical signs, maximum flow rate ≥ 15 ml/s, no need for salvage surgery) in 67.9% of cases. Although the early complication rate was low, 8 stenoses were observed during subsequent fol low-up; 3 of which required open surgical revision. The other relapses were treated by internal urethrotomy or hetero- or autodilatations. This study showed that urine sterility at the time of surgery was a decisive factor. 17. MONFORT G., BRETHEAU D., DI BENEDETTO V., BANKOLE R. Urethral stricture in children : treatment by urethroplasty with bladder mucosa graft. J. Urol., 1992, 148, 1504-1506. 18. MONFORT G., DI BENEDETTO V., MEYRAT B.J. Sténoses urétrales chez l'enfant : traitement par urétroplastie avec greffon de muqueuse vésicale ou buccale. Ann. Urol., 1993, 27, 237-242. Conclusion : The preferential indication for this type of ure throplasty remains a bulbar urethral stricture with sterile urine. However, the aetiology and length of the stricture are not dis criminant factors. 19. MOREY A.F., McANINCH J.W. Technique of harvesting buccal mucosa for urethral reconstruction. J. Urol., 1996, 155, 1696-1697. 20. MOREY A.F., McANINCH J.W. When and how to use buccal mucosal grafts in adult bulbar urethroplasty. Urology, 1996, 48, 194198. Key words : Urethra, stenosis, urethroplasty, skin graft. ____________________ 117