2016/2017 M. NASSER FORMATION DES ENSEIGNANTS PEDAGOGIE GENERALE | Module 1 PREMIERE FORMATION Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden Les théories d’apprentissage Ce cours est dispensé gratuitement via le site internet de l’association. Les auteurs autorisent l'utilisation à but non lucratif sous l’acceptation et la transmission d’une demande écrite. Objectifs d’apprentissage : Distinguer les principales théories d'apprentissage. Introduction : Apprendre fut une des préoccupations majeure de l’homme qui essaie non seulement d’apprendre mais de comprendre et d’apprendre comment apprendre, d’où la naissance des théories d’apprentissage. Ce terme « théorie d’apprentissage » désigne habituellement un ensemble de lois ou de principes qui décrivent et expliquent la manière dont l'apprentissage se déroule. Au début du XXème siècle le béhaviorisme ou comportementalisme fut la pensée dominante de l’époque. Issu des travaux des chercheurs américains Watson et Thorndike et du chercheur soviétique Pavlov, ce courant se développe au néo-béhaviorisme sous l’impulsion de Skinner. En même temps, à peu près et en s'opposant à quelques-uns des principes de base du béhaviorisme, est né le gestaltisme en se basant sur les travaux des chercheurs allemands (Wertheimer, Kohler, Kofka). Ce courant va également poser les premiers jalons des modèles cognitiviste et constructiviste qui se développeront à partir de la fin des années 60 avec les études de Piaget et autres auteurs. On s'appuyant sur le modèle constructiviste et quelques principes de Skinner (influence de l’environnement sur l’apprentissage de l’homme), d’autres auteurs comme Vygotski ont crée la théorie du socioconstructivisme. La connaissance de ces théories d'apprentissage ne nous aide pas seulement à comprendre comment se déroule l'apprentissage à l’intérieur de la boite noire mais elle nous permet également de concevoir des cours, des ressources pédagogiques et des modules de formation plus cohérents et plus efficaces. I. Le béhaviorisme et néo-béhaviorisme Le béhaviorisme est une théorie de l'apprentissage qui a fortement marqué les domaines de l'enseignement, de l'éducation et de la formation. Le terme « béhaviorisme » vient du mot anglais « behavior » qui signifie « comportement ». Ce comportement est marqué par une manifestation observable de la maîtrise d'une connaissance qui permet de s'assurer l'atteinte des objectifs visés. Le béhaviorisme (ou comportementalisme) définit l'apprentissage comme un processus de modification du comportement par l’établissement et le renforcement de nouvelles associations entre des stimuli et des réponses (apprendre à répondre de telle ou telle manière en présence de tels facteurs déclenchant) ou l’extinction d’associations existantes (apprendre à ne plus réagir de telle ou telle manière en présence de tels stimuli). Il est donc individualisé par stimulation, entraînement, renforcement des réponses positives, motivation, pratiques répétées pour augmenter la performance, renforcement des réponses positives… eaed 2 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden La finalité du behaviorisme est d'orienter, de modifier le comportement des hommes pour qu'ils puissent réorganiser leur existence et surtout l'éducation de leurs enfants. Pour réaliser cet ambitieux projet, les psychologues behavioristes doivent parvenir à prédire et contrôler les comportements. En d'autres termes, ils doivent établir les lois des comportements. Plus précisément, cela signifie que pour pouvoir contrôler ou produire une réponse (R) souhaitée, les behavioristes doivent connaître ce qui a déclenché cette réponse, c'est à dire le stimulus (S) déclencheur. Schématiquement: S? ---->R souhaitée Et inversement: en connaissant le stimulus, les psychologues behavioristes doivent pouvoir prédire la réponse. Schématiquement: S connu ----> R? Pour ce faire, les behavioristes vont étendre la méthode appliquée en psychologie animale à l'étude des comportements humains. John Watson, Ivan Pavlov, Edward Thorndike, Burrhus F. Skinner, Clark Hull, Carroll et Edward Tolman, sont les principaux fondateurs de ce courant, chacun a contribué à l’enrichissement de ce courant et leurs études ont constitué le soubassement de la vision actuelle de la pédagogie active. 1. John Watson Le behaviorisme est né aux Etats-Unis et a dominé les recherches en psychologie durant la première moitié du XXème siècle. C'est J. B. Watson qui incarne le premier ce courant, avec un texte fondateur qu'il publie en 1913 et dans lequel il signifie que d'un point de vue behavioriste, la psychologie est une branche expérimentale purement objective des sciences naturelles. Il ajoute que le but théorique du behaviorisme est la prédiction et le contrôle du comportement. La psychologie introspective, désormais considérée comme non objective, est alors rejetée par le behaviorisme. En effet, Watson considère que pour être objectifs, les psychologues doivent étudier des faits observables que l'on puisse mesurer et quantifier, c'est à dire les comportements. Cette conception l’entraîna à formuler la théorie psychologique du stimulus-réponse (ou conditionnement classique). Comme Pavlov, il a d’abord travaillé avec des animaux, mais plus tard s’est intéressé au comportement humain. Il croit que les humains naissent avec des réflexes ainsi qu’avec les réactions émotionnelles de l’amour et de la rage. Pour lui, tout autre comportement est le résultat des associations stimulusréponse créées par le conditionnement. 2. Ebbinghaus: la mémorisation et l’association Ebbinghaus s’est intéressé à l’étude de la mémorisation et l’oubli des syllabes sans signification. Pour interpréter ses résultats, il fait appel à la notion d’association. Le réapprentissage des syllabes est plus facile quand elles sont dans un même ordre. Le temps consacré au réapprentissage est moins que le temps consacré à l’apprentissage initial (sans ordre). eaed 3 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden En 1885, grâce aux premiers résultats fournis Ebbinghaus dans son ouvrage fondateur de la psychologie expérimentale de la mémoire, on a pu construire la courbe d’oubli (rappelons que l'on ne trouve pas dans l'ouvrage d’Ebbinghaus une telle courbe.). Ebbinghaus a mémorisé des séries de syllabes sans signification et a expérimenté sa mémoire à différents intervalles de temps (de quelques minutes à 1 mois) en calculant l'économie du réapprentissage. L’oubli est d'abord rapide puis ralenti. 3. Thorndike : L’apprentissage par essai et erreur Quant à Thorndike et à partir de ses expériences sur les animaux, il formule ces deux principales lois et sa théorie sur l’apprentissage. La loi de l’exercice : Les connexions entre la situation et la réponse sont renforcées par l'exercice et affaiblies lorsque l'exercice est arrêté La loi de l’effet : Une connexion est renforcée ou affaiblie par l'effet de ses conséquences. Et selon lui l’apprentissage se fait par l’essai et l’erreur (des essais infructueux pour aboutir à la solution). Thorndike pense que l'exercice est inefficace s'il ne s'accompagne pas d'une sanction. Il formule la célèbre loi de l'effet, selon laquelle, pour que la liaison entre une situation et un comportement soit renforcée (c'est-à-dire pour que ce comportement ait plus de chances de se produire dans cette situation), il faut que l'émission de ce comportement dans cette situation s'accompagne d'un état plus satisfaisant pour l'organisme. Cette conception qui lie l'apprentissage à la motivation a influé considérablement sur la manière d'envisager l'apprentissage. C'est ainsi que les travaux sur l'apprentissage chez l'animal vont entrer en scène dans l'étude des comportements humains. Dans un premier temps, ce sont les travaux de E.L. Thordinke qui vont retenir l'attention des behavioristes. En effet, ce chercheur en psychologie animale a observé au cours de ses nombreuses expériences deux phénomènes principaux: d'une part, l'apprentissage s'effectue par essaiserreurs et d'autre part, la réduction progressive des comportements inappropriés s'effectue de façon similaire chez toutes les espèces animales. En effet, Thorndike retrouve à chaque fois la même courbe d'apprentissage (voir la figure ci-dessus), quelque soit l'animal étudié. 4. Pavlov : Le conditionnement répondant En travaillant sur les animaux et la réaction stimulus-réponse, Pavlov fonde son approche à la fois sur le modèle associationniste et sur l'étude des réflexes. Par la procédure stimulusréponse, l’animal acquiert une nouvelle conduite, ou plus exactement il manifeste un comportement, un réflexe, en présence du stimulus. C’est ainsi que La loi du conditionnement répondant a été découverte au cours d’une étude expérimentale sur le chien. Chaque fois que l’on présente au chien un morceau de viande, il salive. On va associer à la nourriture un son ou un signal lumineux et ce à plusieurs reprises. Au bout d’un certain eaed 4 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden temps, le son ou le signal lumineux suffira seul à provoquer la salivation. A noter ici que Le sujet n’est pas actif dans son apprentissage. 5. Skinner et le néo-béhaviorisme Skinner n'a pas été d'accord avec les théories de Watson et Pavlov qui prétendent que toute réponse dépend d'un stimulus, même si ce dernier n'est pas identifiable. Burrhus .F. Skinner a développé alors le concept de « conditionnement opérant ». Sa thèse est que « le comportement peut être structuré par l'utilisation appropriée des conditionnements appropriés » d’où l’apparition du néo-béhaviorisme (développé par Skinner, Hull, Tolman, ...) Skinner définit l'apprentissage comme une modification du comportement provoquée par les stimuli venant de l'environnement et influencée par le vécu. Il affirme que l'apprentissage peut être obtenu par l'utilisation de récompenses appelées « renforcements positifs » et de punitions appelées « renforcements négatifs ». Ainsi, l'individu adopte un comportement lui permettant d'éviter les renforcements négatifs et d'augmenter la chance d'obtenir les renforcements positifs. Pour développer sa théorie, Skinner utilise les rats et le lien stimulus-réponse en ajoutant l’agent de renforcement (cage de Skinner); et il constate qu’une nouvelle conduite s’acquiert vite en présence d’un agent de renforcement. C’est le conditionnement opérant. En 1971, il a critiqué sérieusement l'enseignement traditionnel fondé essentiellement sur des renforcements négatifs et a proposé de remplacer ceux-ci par des renforcements positifs. Il recommande également d'organiser l'enseignement en vue de minimiser l'apparition des erreurs dans le cadre d'une méthode qu'il appelle l'apprentissage sans erreur. Pour lui, tout comportement, qu'il soit psychomoteur ou cognitif, peut être acquis de manière efficace en évitant à l'élève de commettre des erreurs. Les travaux de Skinner sont adaptés aux situations d'apprentissage et le modèle qui en résulte est celui de l'enseignement programmé. D’autres auteurs comme Hull et Guthrie ont essayé de promouvoir ce béhaviorisme en introduisant d’autres variables intermédiaires liés à l’individu et à ses motivations internes d’apprentissage. Contrairement au béhaviorisme qui se base sur l’idée que le comportement est placé sous le contrôle exclusif des stimuli extérieurs. 6. Le modèle de Carroll Carroll entreprend, au début des années 1960, de produire « un modèle conceptuel des facteurs affectant la réussite dans l’apprentissage scolaire et de la manière dont ils interagissent » (Carroll, 1963, p. 723). La particularité de son modèle tient à sa formulation en termes de temps. Selon le psychologue, un « apprenant réussira son apprentissage d’une tâche donnée dans la mesure où il passe la quantité de temps dont il a besoin pour apprendre la tâche » (Carroll, 1963, p. 724). Carroll appuie ainsi son modèle sur deux notions : le temps nécessaire à l’apprentissage (basé sur la qualité de l’instruction, la capacité de l’élève à comprendre l’instruction et l’aptitude de l’élève) ; le temps passé à l’apprentissage (défini par le temps alloué par le professeur pour l’enseignement et la persévérance de l’élève). Le modèle de Carroll est ainsi présenté par « une formule exprimant le degré d’apprentissage pour un individu i et une tâche t, sous la forme d’une fonction du rapport de eaed 5 M. Nasser Ahmed Aden Pédagogie générale la quantité de temps que l’apprenant consacre réellement à la tâche sur la quantité totale dont il a besoin » (Carroll, 1963, p. 730, voir figure 2).1 Formulation du modèle de Carroll (Carroll, 1963, p. 730) Degré d’apprentissage = f [ Temps passé {à l’apprentissage} Temps nécessaire {à l’apprentissage} ] La dimension provisionnelle du temps caractéristique des niveaux d’analyse supérieurs semble toujours présente dans le modèle de Carroll, mais sous une forme assouplie. En effet, si la formulation « mathématique » indique encore une sorte d’automaticité entre des variables d’entrée et de sortie, le modèle repose sur plusieurs variables d’action pour le professeur (la qualité de l’instruction et le temps passé à l’apprentissage), qui complexifient le processus et confèrent au professeur une responsabilité plus grande dans la gestion du temps. Les orientations pédagogiques esquissées dans le modèle de Carroll seront d’ailleurs reprises quelques années plus tard dans la pédagogie sur la base suivante : « S’il était possible de donner le temps et l’aide nécessaire et d’être en mesure de motiver l’élève pour utiliser le temps disponible, la plupart des élèves atteindraient le niveau de réussite attendu » (Bloom, 1974, p. 684). Ces apports de la psychologie de l’éducation confèrent à la variable temps une dimension beaucoup plus qualitative que jusqu’alors : le professeur peut agir sur la nature du temps dans son enseignement. Conclusion Pour ce qui est du comportement humain, les béhavioristes sont incapables d’expliquer certains comportements sociaux. Par exemple, les enfants ne reproduisent pas toujours tous les comportements qui ont été renforcés. De plus, ils peuvent modeler de nouveaux comportements plusieurs jours, voire plusieurs semaines après l’observation initiale sans y avoir été renforcé. Vers les années 1960, étant donné ces observations, des auteurs ont pris leurs distances de la théorie du conditionnement opérant, qui veut qu’un enfant doive performer et recevoir du renforcement avant d’apprendre. Ils proposent d’intégrer les conceptions et les processus mentaux au processus d’apprentissage, ce qui mènera à l’apparition des théories du cognitivisme et éventuellement du socioconstructivisme. Toutefois, il est nécessaire de rappeler qu’un autre courant théorique s’était développé au même moment que le béhaviorisme et qui aura aussi une influence sur les théories que nous venons de mentionner. Il s’agit du constructivisme, qui considère l’apprentissage comme un processus de construction des connaissances. II. Le Gestaltisme Au cours de la période 1930-1960, en s’opposant aux béhavioristes, l’école gestaltiste fut fondée par trois chercheurs allemands : Wertheimer, Koffka et Köhler. La Gestalt est un mot allemand signifiant «forme globale» ou «forme organisée», d’où est tiré le Gestaltisme qui 1 Voir Revue Pédagogique Française n° 170 (janvier-mars 2010) eaed 6 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden évoque les formes autant qu’éléments fondamentaux et indécomposables de l'activité humaine. Pour ce courant, l’apprentissage se définit comme un processus d’organisation des éléments d’une situation, c’est aussi pouvoir donner sens à ce qu’on perçoit. C’est le résultat de l’insight qui est la découverte soudaine d'une solution après une réorganisation des éléments du problème, c’est la pensée créative, basée sur des restructurations et des totalités. (Voir l’expérience faite par Köhler sur le singe Sultan) L’apprentissage ici passe par des opérations mentales observation, réflexion, compréhension, solution ... 1. Principes du Gestaltisme Lorsqu’on veut structurer une forme, notre perception obéit à des lois comme : La loi de la bonne forme : Un ensemble de parties informe tend à être perçu d'abord comme une forme. La loi de bonne continuité : des points rapprochés tendent à représenter des formes lorsqu'ils sont perçus comme des prolongements les uns par rapport aux autres. La loi de la proximité : veut dire que des choses qui sont plus proches seront vues comme appartenant à un même groupe. La loi de clôture : une forme fermée est plus facilement identifiée comme une figure qu'une forme ouverte. 2. Les limites du Gestaltisme Il s’agit d’un type d'apprentissage par essais et erreurs. L’apprentissage est laissé au hasard. Les illusions influent sur la perception et la dirigent. . Apprendre n’est pas fondé sur des motifs scientifiques du fait que la présence de Köhler dans les situations pilotes y introduit des variables non désirés III. Le cognitivisme Le cognitivisme, dont l'appellation renvoie au terme cognition (connaissance dans le sens de processus et de produit), regroupe tous les modèles d’apprentissage construits en opposition plus ou moins radicale au béhaviorisme. Il « privilégie l'étude du fonctionnement de l'intelligence, de l'origine des connaissances ainsi que des stratégies employées pour assimiler, retenir et réinvestir les connaissances ; et s'intéresse essentiellement à la perception, le traitement en mémoire, le langage et ce, en regard du fonctionnement du cerveau. » (Legendre (1993), Gauthier et Tardif (2000)). Le courant cognitiviste se prolonge dans deux versions de la psychologie cognitive, donnant naissance à la théorie du traitement de l’information et à l’apprentissage stratégique. 1. Traitement de l’information Cette théorie se fonde sur la représentation des opérations qui se déroulent dans un ordinateur et assimile l’esprit humain à un système de traitement de l’information. Elle explique comment la mémoire recueille, traite et emmagasine les nouvelles informations et repère, par la suite, ces informations. Dans cette optique, on considère les processus eaed 7 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden mentaux comme responsables de cette succession d'étapes du traitement. Parmi les auteurs les plus influents ayant développé la théorie du traitement de l’information, on retrouve les travaux de Gagné ainsi que ceux de Ausubel. Ausubel va s'attacher à mettre en évidence les éléments qui vont faciliter chez l'apprenant "l'ancrage" entre ce qu'il connaît déjà et ce qu'il aura à apprendre. Pour réaliser cet ancrage et conduire à ce qu'il appelle un apprentissage significatif, Ausubel propose de recourir à divers éléments qui vont permettre de structurer le matériel d'apprentissage. Parmi ces éléments, Ausubel insiste beaucoup sur le rôle des "structurants antérieurs" (advanced organizers). Il s'agit de courts textes, de schémas ou de graphiques, généralement présentés en début d'apprentissage, qui vont faciliter la mise en relation des éléments qui feront l'objet de l'apprentissage ainsi que le lien avec les éléments déjà maîtrisés disponibles dans la structure cognitive de l'individu. A côté des structurants antérieurs, Ausubel souligne également le rôle d'une autre forme de structurants : les structurants comparatifs (comparative organizers). Ceux-ci ont pour fonction essentielle d'amener l'apprenant à établir des liens entre différentes parties du matériel d'apprentissage proposé en utilisant des tableaux croisés, des graphes en arbre… Un autre principe important pour l'apprentissage est celui de différentiation progressive. On présente d'abord les idées générales liées au contenu que l'on veut enseigner et l'on établit ensuite des différences plus précises. Par exemple, on définit la classe des insectes comme de petits animaux invertébrés. Par la suite, on les caractérisera plus précisément par le fait qu'ils comportent une tête indépendante du thorax ainsi que six pattes. Ensuite, on définira à l'intérieur de la classe des insectes des sous-classes… Pour Ausubel, l'efficacité d'une telle approche tient essentiellement au fait que la structure cognitive est elle-même organisée selon un principe hiérarchique basé sur la différentiation progressive. 2. Apprentissage stratégique Cette théorie est fondée sur l’importance de l’appropriation graduelle et effective des stratégies mentales cognitives et métacognitives (générales et spécifiques aux tâches proposées), jugées nécessaires à une démarche structurée d’apprentissage. Présenté par Tardif, ce modèle a pour objet général de susciter l'engagement cognitif et affectif (motivation scolaire), de montrer à l'apprenant comment traiter les informations d'une façon adéquate, d'amener l'élève à effectuer des transferts. On vise le développement d'une pensée efficace et autonome en se référant au concept de métacognition. IV. Le Constructivisme Le constructivisme est une théorie d’apprentissage développée par Piaget en 1923. Elle met en valeur les capacités mentales de l’apprenant dans la construction de sa connaissance, sur la base du milieu et l’environnement qui l’entourent. L’approche constructiviste valorise l’activité et la capacité de chaque sujet qui lui permettent « d’appréhender la réalité qui l’entoure». Avec le constructivisme, les connaissances développées par les apprenants sont une re-construction de la réalité. Cette réalité est construite par le sujet « au cours de ses activités en interaction avec l’environnement ». La compréhension chez l’apprenant est alors souvent renouvelée. Elle s’élabore à partir de ses représentations des événements vécus antérieurement. “Apprendre est donc, un processus d’ajustement de nos modèles mentaux pour s’adapter à de nouvelles expériences”. En effet, l’apprenant confronte les connaissances reçues avec ce qu’il a appris à travers ses propres expériences. Cette confrontation permet de faire une re-conceptualisation interne des connaissances reçues. Il s’agit en fait du phénomène de restructuration conceptuelle à travers ses expériences. eaed 8 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden Ainsi, la construction des connaissances est un processus dynamique, où l’apprenant se sert de ses connaissances antérieures comme échafaudage sur lequel pourront prendre assise de nouvelles connaissances et se développeront de nouvelles représentations du monde. De plus, compte tenu des nouvelles expériences et du contact avec l’environnement, la structure des schémas mentaux se complexifie et se trouve en constante modification. En d’autres termes, ce qu’un individu va apprendre dépend de ce qu’il sait déjà; et plus un individu connaît, plus il peut apprendre. 1. L’assimilation et l’accommodation Selon Jean Piaget (1964) un individu confronté à une situation donnée va mobiliser un certain nombre de structures cognitives, qu’il nomme schèmes opératoires. L’apprentissage de ces schèmes se fait à travers deux processus complémentaires : L’assimilation et l’accommodation. L’assimilation est l'action de l'individu sur les objets qui l'entourent, en fonction des connaissances et aptitudes acquises par le sujet. Mais il y a inversement une action du milieu sur l'organisme, appelée accommodation, qui déclenche des ajustements actifs chez ce dernier. Pour que le mécanisme d’accommodation s’opère, il faut dans un premier temps, qu’une tentative d’assimilation ait lieu afin que les structures cognitives soient déjà mobilisées. L’assimilation crée une perturbation au sein des structures cognitives que Piaget nomme «conflit cognitif» qui est elle- même régulée afin d’arriver à une nouvelle forme d’équilibre. Le constructivisme considère l’appropriation du savoir à travers des conflits cognitifs, des phases de rupture et de consolidation capables de faire avancer la construction des connaissances. V. Le socioconstructivisme Le socioconstructivisme, qui remonte à Vygotsky (1978), est une approche selon laquelle la connaissance interpersonnelle est réalisée par sa construction sociale. Le monde social d'un étudiant ou d’un élève est un concept important dans le socioconstructivisme. Il comprend tous les gens qui peuvent avoir un impact direct sur cette personne, y compris des professeurs, des amis, des étudiants, des administrateurs et des participants à toutes les formes d'activité. Ceci prend en considération la nature sociale des processus d'acquisition et la place que peut occuper une collaboration sociale plus large pour le développement de la connaissance sur un sujet donné. Le socioconstructivisme met alors l'accent sur le rôle des interactions sociales multiples dans la construction des savoirs. La construction d'un savoir s'effectue dans un cadre social. Les informations sont en relation avec le milieu social et le contexte. Elles sont le résultat à la fois de ce que l'on pense et des interactions des autres. Il s’agit en effet d’une confrontation entre un processus inter psychique et un processus intrapsychique. Partant de ce principe, nous pouvons affirmer que le web favorise une large interaction sociale grâce aux échanges qui s’effectuent à travers des modalités de type « chat », ou « forum ». Ils s’effectuent également à travers des constructions hypertextuelles ou multimédias avec l’envoi des courriers électroniques. Dans ce cas, la théorie de Vigotsky, selon laquelle l’apprentissage est le fruit d’une interaction sociale, est en train de s’étendre et prend tout son sens. En effet, un nouveau moyen de socialiser est en train de se concrétiser de plus en plus : des groupes de discussion, une participation personnelle active à la construction intersubjective d’hypothèses et des interprétations ou choix opérationnels partagés et soutenus par une communauté virtuelle. Les membres de cette communauté virtuelle, sans se connaître, sans se rencontrer partagent des valeurs et des ressources matérielles. Pour ce faire, ils trouvent dans le tutorat des modalités de guide, un soutien eaed 9 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden émotionnel et nouent tout de même un lien de solidarité à moyen terme. Bref, les concepts clés de la communauté éducative sont la synergie, le partage et l’interaction. Conclusion Ce qu’il faut retenir, c’est que toutes ces théories de psychologie ont donné naissance à des pratiques diversifiées se réclamant tantôt celle-ci et tantôt celle-là. Prises comme un tout, la référence à ce cocktail nous permettra de mettre en place le scénario d’apprentissage qui prévale et que nous pouvons défendre corps et âme en nous forgeant un rôle de metteur en scène avec à chaque circonstance selon les acteurs mis à notre disposition, l’environnement à notre portée et les outils disponibles. eaed 10 Pédagogie générale M. Nasser Ahmed Aden Biblographie Pierre BOURDIEU ( 2002), Questions de sociologie, p75 Karl POPPER ( 1973), La logique de la découverte scientifique, P286 F DE SSAUSURE ( 1916 ),Cours de linguistique générale,P101 http://uqu.edu.sa/page/ar/39649 http://www.uqac.ca/pminier/cognit/ http://sites.estvideo.net/gfritsch/doc/rezo-cfa-315.htm http://kg-cu.ahlamontada.net/t7291-topic http://louiseroy.wordpress.com/2009/10/04/behaviorisme-cognitivisme-et-onstructivisme/ http://edutechwiki.unige.ch/fr/Constructivisme http://www.parisdescartes.fr/UNIVERSITE http://wiki.univ-paris5.fr/wiki/Apprentissage Source d’image : Jean Emmanuel Maigret (Doc de Sophie Genès (ISP)), Production Personnelle eaed 11