
Des modifications du régime alimentaire permettant de réduire
l’absorption de graisses saturées semblent protéger les patients
du risque de cancer de la prostate. Les connaissances des méca-
nismes du développement du cancer de la prostate donnent dès
maintenant le substratum scientifique pour développer des
essais de chimioprévention (2). Ainsi, les résultats du premier
essai de chimioprévention initié en 1994 à large échelle a été
rendu en 2003 : il s’agit de l’essai Prostate Cancer Prevention
Trial (PCPT) (10).
2. La chimioprévention : quelles molécules ?
Les principales molécules candidates à des essais de chimiopré-
vention peuvent être classées selon les mécanismes d’action
qu’elles ont (11) :
•les anti-androgènes (12) :
-inhibiteurs de la 5 alpha réductase (Finastéride) (13, 14)
-les anti-androgènes non stéroïdiens (Flutamide) (15, 16)
•Les régulateurs de la fonction du récepteur aux androgènes et
agents différenciants :
-Les rétinoïdes (fenretinide, vitamine A, D, …) (7, 17-21)
-Les analogues des œstrogènes (tamoxifène) (22)
-Les glitazones (ligands des Peroxysome Proliferator Activated
Receptor)
•Les anti-inflammatoires non stéroïdiens :
- Le sulindac
-Les inhibiteurs de la cyclo-oxygénase 2
•Les inhibiteurs de la synthèse des polyamines :
-LeDifluorométhylornithine (DFMO) (23-25)
•Les thérapeutiques de détoxification des carcinogènes
(inducteur du cytochrome P 450) :
-L’oltipraz* (qui est un anti-schistosomal)
•Les antioxydants (26, 27) :
-Vitamine E
-Sélénium (28, 29)
-Lycopène
-Isoflavone (30, 31)
•Les médicaments antiangiogénèse :
-Le linomide (32)
La vitamine E et le sélénium sont en cours d’évaluation et les
résultats des études devraient être connus dans 2 ans environ
(essai SELECT).
Les auteurs de l’essai PCPT ont montré que le finastéride modi-
fiait l’histoire naturelle du cancer de la prostate en diminuant le
nombre de cas de cancer dans le groupe traité (- 24,8%), sans
modifier la mortalité (10). Néanmoins avec le finastéride, le
nombre de cas de cancer ayant un potentiel agressif (haut grade)
est significativement augmenté comparativement au groupe
témoin (6,4% versus 5,1%), même si l’incidence cumulée ne se
modifie pas pendant la période de suivi de l’étude (7 ans).
L’explication n’est pas complètement clarifiée (réduction du
volume prostatique permettant une meilleure détection des can-
cers de haut grade, meilleure performance du PSA pour le grou-
petraité, modifications histo-pathologiques dues au finastéride).
D’autres essais sont prometteurs et méritent une attention parti-
culière tels que ceux utilisant les inhibiteurs de la cyclo-oxygé-
nase 2 ou d’autres antioxydants. C’est le cas d’un essai de pré-
vention tertiaire comparant les effets du jus de grenade sur la
cinétique du PSA après un traitement local à visée curative chez
des patients ayant un cancer de la prostate en récidive biolo-
gique. Les auteurs ont montré que le temps de doublement du
PSA était 4 fois plus lent dans le groupe traité. Les molécules
présentes dans le jus de grenade ont un effet sur la prolifération
tumorale et sont probablement des antioxydants.
La chimioprévention peut aussi s’effectuer par une modification
des régimes alimentaires comprenant en particulier une baisse
d’absorption des graisses et une prise plus importante de fibres.
Cet aspect nutritionnel rentre aussi dans le cadre de la préven-
tion des risques cardiovasculaires et de l’obésité. Ainsi, un cer-
tain nombre de stratégies d’action peut être proposé et concer-
nera des règles hygiéno-diététiques claires données dans le
cadre de l’éducation et de l’information du consommateur per-
mettant ainsi une diminution sensible de la carcinogenèse et
donc de l’incidence du cancer de la prostate.
3. Les essais actuels de chimioprévention
Les essais actuels ont été initiés pour certains à partir de
connaissances issues de la médecine holistique, pour d’autres
sur des arguments scientifiques obtenus à partir de modèles par-
fois éloignés du cancer de la prostate ou encore à partir d’études
épidémiologiques (33-42). C’est ainsi que le finastéride module
les effets de la testostérone, l’alpha tocophérol et le sélénium
modulent les dommages de l’ADN grâce à ses effets antioxy-
dants, que les inhibiteurs de la cyclooxygénase induisent l’apop-
tose des cellules tumorales et participent à la détoxification de
substances carcinogéniques.
Dans l’essai SELECT, où sont étudiés les effets du sélénium et
de l’alpha-tocophérol, ce sont des études épidémiologiques qui
ont permis son initiation (43). Ces deux molécules ont réduit
d’un tiers pour le premier et de deux tiers pour le second le
risque de développer un cancer de la prostate lors d’analyse
secondaire d’essais randomisés prospectifs et contrôlés étudiés
dans d’autres pathologies néoplasiques.
Les essais cliniques de chimioprévention sont spécifiques et leur
construction dépend de l’objectif que l’on s’assigne initialement
(44-49). Il existe plusieurs options :
•La première consiste à démontrer in vivo la diminution du
risque de cancer de la prostate après examen histologique. Tel
est le cas pour l’essai PCPT (50, 51). Ces essais ont une durée
importante supérieure à 10 ans à l’origine d’un coût financier
conséquent. Pour réduire les coûts et la durée de tels essais,
le bon exemple serait d’inclure les patients ayant une néopla-
sie intra épithéliale (PIN) prostatique (52-54), comme dans
l’étude 9917 du SWOG, ou ceux ayant un PSA élevé avec des
biopsies négatives (55). Les études épidémiologiques ont
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