Parce qu’en réalité, lorsque nous étudions les
phénomènes viraux et immunologiques très
précoces après la contamination, nous nous
apercevons que le traitement, même très
précoce, arrive un peu tard. Le réservoir est
établi dès les premières semaines et
l’immunité, même si elle est restaurée sous
traitement, n’est pas restaurée à un niveau
suffisant ou, du moins, pas aussi bien
restaurée que ce que l’on observe chez les
patients « HIV controllers ». Dans les
différentes études à l’échelon international
nous pouvons observer que l’intérêt de ce
traitement se situe véritablement dans les
premières semaines après l’infection et que
nous n’avons plus le même impact par la
suite, même dans une période de prise en
charge rapide après la contamination. Enfin
nous manquons également d’essais contrôlés
pour démontrer l’efficacité d’une trithérapie
précoce comparée à un traitement plus tardif.
Nous pouvons toujours parler des limites des
thérapeutiques antirétrovirales en sachant que
maintenant nous disposons de traitements
beaucoup plus souples et mieux supportés et
que cet argument est à considérer en terme de
qualité de vie à long terme, la situation étant
moins préoccupante que ce que nous avons
connu dans les années 1990-2000.
Enfin ce que nous savons au travers des
interruptions de traitement c’est que, en
dehors de très rares patients, les patients
traités en primo-infection qui arrêtent leur
traitement vont retrouver, après l’arrêt, les
mêmes paramètres que ceux qu’ils avaient au
moment de la primo-infection, ou des
paramètres qui sont corrélés. En particulier la
plupart des traitements semblent avoir un
effet modéré sur le réservoir. C’est dans cet
esprit là qu’a été construit l’essai ANRS
OPTIPRIM, avec la comparaison entre un
traitement standard par trithérapie et un
traitement intensifié avec du raltégravir et du
maraviroc. Les inclusions sont terminées,
elles ont eu lieu très rapidement en France et
Antoine Cheret pourra en parler tout à l’heure.
La question qui m’a été posée est de savoir si,
lorsqu’un patient commence un traitement en
primo-infection, il peut l’arrêter. Pour l’instant
nous pensons que, si cette interruption
thérapeutique intervient, il faut qu’elle
intervienne dans le cadre de protocoles de
recherche. D’ailleurs à partir de 2008 nous
avions, dans les recommandations du groupe
d’experts, supprimé cette clause de traitement
transitoire au moment de la primo-infection
puisque nous disposons d’un certain nombre de
données pour montrer qu’il y a bien un bénéfice
persistant du traitement après son arrêt, mais
que ce bénéfice va s’épuiser dans des délais
assez rapides. Sur le niveau de remontée de
charge virale après arrêt du traitement nous
avions comparé les données du patient de
PRIMO à celles des patients non traités inclus
dans une ancienne cohorte appelée SEROCO
(maintenant terminée). Nous n’avions pas
observé de différences, au delà d’1 an, du niveau
de charge virale obtenu après arrêt du
traitement par rapport à des personnes non
traitées. En parallèle nous avons observé que
les CD4 baissaient de façon très progressive si
le traitement était arrêté, mais que nous avions
malgré tout, chez ces patients, un niveau de
CD4 qui restait plus élevé pendant au moins 3
ans, comparativement à des patients non
traités. Il y a donc un bénéfice immunologique
et ce bénéfice est conservé, mais de façon
transitoire, en tout cas pas pour des dizaines
d’années, si nous nous plaçons dans une
optique de latence ou de guérison fonctionnelle
prolongée.
Je vais vous présenter enfin les résultats de
l’essai SPARTAC, un essai international qui
évaluait un traitement court de 3 mois,
comparativement à un traitement, dit long, de
12 mois, par rapport à des patients non
traités. Il s’agit d’un essai contrôlé avec des
patients randomisés. C’est le seul essai qui a
comparé un traitement par rapport à
l’absence de traitement, sachant que ce
traitement était interrompu. Nous observons
là une ascension très forte du nombre de
CD4, avec une redescente après l’arrêt à 48
semaines, mais un bénéfice persistant sur le
niveau de CD4 chez les patients traités. Les
CD4 reviennent à leur niveau antérieur en à
peu près 3 ans, ce qui est assez proche de ce
que nous avions observé dans la cohorte sur
des données observationnelles. Nous voyons
également l’évolution naturelle des patients
en primo-infection non traités et cette
différence qui persiste au fil des mois.
Finalement, avec les données dont nous
disposons en 2012, nous pensons qu’il y a un