MAT3632 : théorie des nombres, automne 2013 Équations polynomiales Supposons que f (x) = ad xd +ad−1 xd−1 +· · ·+a1 x+a0 est un polynôme dont les coefficients ad , . . . , a0 sont entiers. Du théorème de restes chinois, si on veux étudier et résoudre les congruences f (x) ≡ 0 (mod n), il suffit de résoudre les congruences f (x) ≡ 0 (mod pv ), où p est nombre premier et v ≥ 1. Hensel a montré que souvent il suffit de considérer seulement le cas v = 1. Plus précisément, on a le théorème suivant. Ici on dénote par f ′ (x) le dérivé de f (x), définie comme f ′ (x) = dad xd−1 + (d − 1)ad−1 xd−2 + · · · 2a2 x + a1 . Théorème 1 (Hensel). Soit f (x) = ad xd + ad−1 xd−1 + · · · + a1 x + a0 un polynôme dont les coefficients ad , . . . , a0 sont entiers. Si f (x1 ) ≡ 0 (mod p) et f ′ (x1 ) ̸≡ 0 (mod p), alors pour chaque v ≥ 2 il existe une classe d’équivalence xv (mod pv ) unique pour laquelle xv ≡ x1 (mod p) et f (xv ) ≡ 0 (mod pv ). Le théorème au-dessus est un corollaire direct du lemme suivant. Lemme 2 (Hensel). Soit f (x) = ad xd + ad−1 xd−1 + · · · + a1 x + a0 un polynôme dont les coefficients ad , . . . , a0 sont entiers. Si f (xv ) ≡ 0 (mod pv ) et f ′ (xv ) ̸≡ 0 (mod p), alors il existe une classe d’équivalence xv+1 (mod pv+1 ) unique pour laquelle xv+1 ≡ xv (mod pv ) et f (xv+1 ) ≡ 0 (mod pv+1 ). Démonstration. On pose xv+1 = xv + tpv . Il suffit de montrer qu’il existe un t unique mod p tel que f (xv + tpv ) ≡ 0 (mod pv+1 ). En effet, on a que ( ) ( ) m m−1 v m m−2 v 2 v m m (xv + tp ) = xv + xv tp + x (tp ) + · · · 1 2 v m−1 v ≡ xm tp (mod pv+1 ), v + mxv puisque 2v ≥ v + 1 pour v ≥ 1. Donc f (xv + tpv ) = d ∑ am (xv + tpv )m ≡ m=0 d ∑ m−1 v am (xm tp ) v + mxv (mod pv+1 ) m=0 ≡ f (xv ) + tpv f ′ (xv ) (mod pv+1 ). On a que pv |f (xv ) par hypothèse. Par la suite f (xv + tpv ) ≡ 0 (mod pv+1 ) ⇔ tpv f ′ (xv ) ≡ −f (xv ) (mod pv+1 ) ⇔ tf ′ (xv ) ≡ −f (xv )/pv (mod p). Puisque p ∤ f ′ (xv ), il existe un unique t (mod p) qui satisfait la dernière relation. Ça conclut la démonstration. □ Démonstration du Théorème 1. Par le Lemme 2 et induction sur v, on trouve qu’il existe une suite x2 , x3 , x4 , . . . telle que xv (mod pv ) est l’unique classe d’équivalence mod pv pour laquelle xv ≡ xv−1 (mod pv−1 ) et f (xv ) ≡ 0 (mod pv ). Alors le résultat désiré suit tout de suite. □ 1 2 Exemple. Quelles sont les solutions à l’équation quadratique x2 − 4x + 8 ≡ (mod 25)? Solution. Soit f (x) = x2 − 4x + 8. Tout d’abord, on résoudre l’équation mod 5. Á fin de faire cela, on compléter le carré : f (x) = (x − 2)2 − 22 + 8 = (x − 2)2 + 4 ≡ (x − 2)2 − 12 (mod 5) ≡ (x − 3)(x − 1) ≡ (mod 5). Alors f (x) ≡ 0 (mod 5) ⇔ x ≡ 3 (mod 5) ou x ≡ 1 (mod 5). Puis, on observe que f ′ (x) = 2x−4 et donc f ′ (1) = −2 ̸≡ 0 (mod 5) et f ′ (3) = 2 ̸≡ 0 (mod 5). Alors le lemme de Hensel implique qu’il existe exactement une racine de f mod 25, soit a (mod 25), telle que a ≡ 1 (mod 5) et f (a) ≡ 0 (mod 25). De plus, si on pose a = 1 + 5t, la démonstration du lemme de Hensel nous donne que f ′ (1)t ≡ −f (1)/5 (mod 5) ⇔ 2t ≡ 1 (mod 5) ⇔ t ≡ 3 (mod 5). Donc a ≡ 16 (mod 25). De même, il existe exactement une racine de f mod 25, soit b (mod 25), telle que b ≡ 3 (mod 5) et f (b) ≡ 0 (mod 25). On pose b = 3 + 5s pour que f ′ (3)s ≡ −f (3)/5 (mod 5) ⇔ 2s ≡ −1 (mod 5) ⇔ s ≡ 2 (mod 5). Donc b ≡ 13 (mod 25). Par conséquent, les solutions à l’équation f (x) ≡ 0 (mod 25) sont x ≡ 13 (mod 25) et x ≡ 16 (mod 25).