52 le Bulletin scientique de l’arapi - numéro 21 - printemps 2008
Communications afchées
(KO), les animaux dont la mère a reçu un traitement lors
de la gestation ou ceux chez lesquels on a provoqué une
infection expérimentale à la naissance.
Ces types de manipulations peuvent inuer sur des aspects
comportementaux altérés dans l’autisme. Au niveau des
comportements sociaux par exemple, le décit d’hormo-
nes telles que la vasopressine ou l’ocytocine perturbe ou
diminue la reconnaissance sociale chez le rat et la souris.
L’inactivation du récepteur aux opioïdes diminue l’émis-
sion de vocalisations chez les souris nouveaux-nés isolés
de leur mère. Le traitement prénatal avec de l’acide val-
proïque (un anti-épileptique) chez le rat diminue les com-
portements sociaux. Certaines de ces modications ont
également des conséquences sur la rigidité du comporte-
ment. Jusqu’à aujourd’hui, aucun modèle n’a été évalué
sur l’ensemble des critères du trouble autistique comme
il serait souhaitable. Plusieurs mutations liées à des pa-
thologies associées à l’autisme restent encore à tester, no-
tamment NF1 (gène impliqué dans la Neurobromatose
I), MECP2, Engrailed 2, Pet-I (tous trois impliqués dans
le syndrome de Rett), ainsi que FMR1 (gène impliqué
dans le syndrome de l’X Fragile).
Concernant le troisième critère de validité, un modèle
pour l’autisme devrait théoriquement répondre à des
traitements pharmacologiques ou comportementaux uti-
lisés chez les humains. Par exemple, Ventura et coll., en
2004, ont démontré que les amphétamines amélioraient
les performances cognitives chez les souris Fmr1 KO.
Néanmoins très peu de modèles expérimentaux ont été
testés pour ce dernier critère.
Un trouble associé à l’autisme,
l’X Fragile
Le syndrome de l’X Fragile est à la mise en silence
d’un seul gène. La qualité et la sévérité des symptômes
constatés est variable. C’est la première cause génétique
de retard mental. Des manifestations cliniques telles que
l’hyperactivité, l’impulsivité, l’agressivité, les troubles
du sommeil, l’épilepsie sont souvent constatées dans l’X
Fragile et l’autisme. Environ 30% des personnes X fragi-
le font partie du spectre autistique. Elles représentent 7%
de la population autiste (Narayanan et Warren, 2006).
La dénition du trouble autistique est basée sur
des critères comportementaux. La terminologie
« trouble autistique » est utilisée pour désigner
l’occurrence simultanée d’une triade de troubles com-
portementaux débutés avant l’âge de trois ans. Selon les
personnes, la qualité et la sévérité de ces symptômes va-
rient grandement.
Cette variabilité des troubles du spectre autistique et les
limites techniques des méthodes non invasives chez l’hu-
main font ressentir la nécessité de mettre en place des
modèles animaux pour comprendre les mécanismes en
jeu dans leur ontogenèse (Belzung et coll., 2005).
Utilité de modèles animaux
pour étudier l’autisme
Les différents traits caractéristiques d’un organisme vi-
vant (le phénotype) résultent de l’interaction de ses gènes
avec l’environnement. L’utilisation de modèles animaux
permet de diminuer et de contrôler la variabilité de ces
deux facteurs pour étudier leur rôle spécique.
Le modèle est un
outil de travail pour
étudier un phénomè-
ne biologique dont la
validation dépend de
celle de trois critères.
Il doit développer des caractéristiques semblables à cel-
les de la pathologie humaine (comportementales, neuroa-
natomiques et cognitives) dans des conditions identiques
à la pathologie humaine. Un modèle valide doit aussi être
prédictif et répondre aux traitements qui diminuent les
symptômes de la pathologie.
Les causes de l’autisme semblent être diverses. Les étu-
des montrent notamment une forte composante génétique
(Muhle et coll., 2004). L’origine semble être polygéni-
que et les gènes candidats de l’autisme sont nombreux,
avec un mode de transmission qui n’est pas simple. Dans
tous les cas l’aspect développemental est un consen-
sus qui doit être observé dans la génération du modèle.
Répondent à ce critère les animaux modiés génétique-
ment pour éteindre l’expression d’un gène particulier
Etudes des traits autistiques
chez deux souches de souris Fmr1 KO
Maude Bernardet et Wim Crusio1
1Equipe de Neurogénétique Comportementale, Centre de Neurosciences Intégratives et Cognitives, CNRS UMR5228, Université
Bordeaux1, Maude Bernardet : doctorante CNIC, av des Facultés, 33405 Talence, Tél : 05 40 00 87 48
Mots clés : traits autistiques, souris
Fmr1 KO, modèle animal,
comportement, autisme.
Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification v.4.0 Internationale (cc-BY-NC-ND4.0)
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Communications afchées
Le syndrome de l’X fragile est provoqué par la mise en
silence d’un gène, FMR1 et par l’absence de synthèse de
la protéine codée par ce gène. Bien que l’on connaisse la
cause de ce trouble et que la protéine soit bien caracté-
risée, sa fonction reste encore mal connue. Et cependant
la compréhension de son rôle est cruciale dans la mesure
elle semble jouer un rôle fondamental dans la cogni-
tion. Cette protéine semble normalement présente dans
tout le tissu neuronal et joue un rôle dans la régulation
de la traduction des ARNm. Sa propre traduction peut
être déclenchée par l’activation de certains types de -
cepteurs au principal neurotransmetteur excitateur dans
le cerveau, le glutamate (Willemsen et coll., 2004).
Etude des traits autistiques
chez la souris Fmr1 KO
Notre équipe s’attache à tester la validité des souris Fmr1
KO pour la modélisation des traits autistiques par la mise
au point de tests comportementaux spéciques adaptés
aux souris.
Le modèle souris Fmr1 KO de l’X fragile a été validé pour
ce syndrome (The Dutch-Belgian Fragile X Consortium,
1994). Les souris Fmr1 KO présentent la macroorchidie
(augmentation du volume des testicules) observée chez
les hommes X Fragile et sont plus actives que les souris
contrôles. Au niveau neuroanatomique on retrouve chez
les souris Fmr1 KO une caractéristique présente chez les
personnes X Fragile : des neurones très arborisés, c’est-à-
dire qui forment plus de connections, non matures, avec
les autres neurones (Mc Kinney et coll., 2005).
Il est possible que ces souris présentent aussi des traits
autistiques (Bernardet et Crusio, 2006). En effet, il a été
observé une altération de l’extinction d’un apprentissage
dans une tâche de navigation spatiale assimilable à de
la rigidité cognitive, ainsi qu’une altération de la régu-
lation sensorielle présente dans les deux syndromes et
une susceptibilité aux crises épileptiques audiogènes.
L’augmentation de l’anxiété qui est un trait caractéristi-
que de ces deux troubles n’a pas pu être mis en évidence.
Les interactions sociales semblent présenter des parti-
cularités par rapport aux animaux contrôles et méritent
d’être approfondies. D’autres traits caractéristiques des
symptômes principaux de l’autisme, comme la commu-
nication sociale, la susceptibilité à la nouveauté ou des
symptômes variables de l’autisme, comme les comporte-
ments stéréotypés, sont en voie d’être testés.
Interaction gène et fond génétique
Nous nous intéressons également à la variation de l’ex-
pression phénotypique de la mutation de Fmr1. Bien que
lié à la mise en silence d’un seul gène, le syndrome de
l’X fragile se manifeste de façon non homogène puis-
que les symptômes de retard mental et d’autisme n’ap-
paraissent pas avec le même degré de sévérité chez tous
les individus concernés. L’interaction avec le reste du
génome, l’« arrière-fond génétique », semble également
intervenir. En effet, les deux différentes lignées pures
de souris Fmr1 KO testées (une lignée pure provient de
croisements consanguins sur plusieurs générations) pré-
sentent un prol différent. La connaissance des facteurs
d’inuence permettra de comprendre la genèse du syn-
drome de l’X fragile et peut-être d’appréhender les fac-
teurs multiples responsables du développement des trou-
bles autistiques. An de mettre en évidence cette varia-
tion de l’expression phénotypique de la mutation Fmr1,
nous travaillons sur des souris Fmr1 KO et contrôles de
deux lignées ainsi que sur les hybrides de ces lignées. Le
but de cette approche à long terme est de pouvoir faire la
relation entre les interactions inter-gènes avec les com-
portements exprimés.
Bibliographie
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Willemsen, R., Oostra, B., Bassell, G., Dictenberg, J. (2004).
The Fragile X Syndrome: From molecular genetics to neuro-
biology, Mental Retardation and Developmental Disabilities
Research Reviews, 10, 60-67.
Bien que lié à la mise
en silence d’un seul gène,
le syndrome de l’X fragile
se manifeste de façon non
homogène puisque
les symptômes de retard
mental et d’autisme
n’apparaissent pas avec
le même degré de sévérité chez
tous les individus concernés.
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