8 le Bulletin scientique de l’arapi - numéro 25 - printemps 2010
10ème Université d'automne
Comment évaluer la qualité
de vie ? Les instruments
existent, également, mais
on leur reproche d’être
prétentieux et normatifs.
Peut-on utiliser un instrument
normé pour un trouble
autistique ? De quelle qualité
de vie parle-t-on ?
préférable d’avoir de multiples solutions qu’une pauvreté
de recours possibles. Encore une fois, cette question n’est
pas spécique au domaine des TED qui nous préoccupe
ici. Le diabète donne une bonne illustration : quel critère
choisir pour évaluer l’évolution des patients : la norma-
lisation de la glycémie ou la prévention de survenue des
complications ? Il est évident que l'étude de la normalisa-
tion de la glycémie coûte moins cher que celle de la pré-
vention des complications. Dans la cognition, la question
de la sensibilité au changement est-elle un critère ? Si la
personne est plus performante, peut-on dire pour autant
qu’elle va mieux ? La réponse est non, le changement
constaté ne signie pas qu’il y ait amélioration de l’état
de la personne. Dans la schizophrénie, les psychiatres ont
proposé des mesures cognitives que la FDA ( Food and
Drug Administration, bureau américain de contrôle ali-
mentaire et pharmaceutique) a refusé en tant que mesures
de l’efcacité. Cela
se discute, car les
modèles cognitifs ont
leur pertinence dans
la compréhension du
fonctionnement psy-
chique de la personne.
Cela ne remet pas en
question la pertinence
des instruments qui
existent pour mesurer
les symptômes, qui
cristallisent le savoir-
faire médical. Pour autant ils présentent l’inconvénient
majeur d’être médico-centrés. Les médecins peuvent né-
gliger d’autres dimensions de la maladie comme l’attes-
tent les syndromes décitaires dans la schizophrénie, qui
ne peuvent être appréhendés que par une investigation
de nature cognitive. Comment évaluer la qualité de vie ?
Les instruments existent, également, mais on leur repro-
che d’être prétentieux et normatifs. Peut-on utiliser un
instrument normé pour un trouble autistique ? De quelle
qualité de vie parle-t-on ? De celle du patient ou de celle
de sa famille ? En l’absence de plainte du sujet concerné,
la qualité de vie de l’entourage est-elle un meilleur indi-
cateur ?
Comment mettre en place un protocole ? Y a t-il nécessité
d’un « groupe contrôle » ? La réponse est globalement af-
rmative. Si un groupe s’améliore, il importe de pouvoir
attribuer l’amélioration à la méthode observée, et pas à
d’autres facteurs. Néanmoins, dans certaines situations,
si une personne présente une dégradation, une rupture,
il n’est pas besoin d’un groupe contrôle. Il existe des
méthodes alternatives au groupe contrôle, par exemple
la comparaison historique avant-après, mais la difculté
réside, là encore, dans l’interprétation des résultats.
Qu’en est-il du tirage au sort pour former les groupes ?
Cette méthode est la seule façon d’interpréter les données
recueillies. Il ne s’agit pas, cependant, de se laisser obnu-
biler par le tirage au sort. On peut aussi inventer d’autres
modèles, mais la condition est la prise en considération
des biais possibles. La question fondamentale reste celle
de la transférabilité des résultats. Enn, la question du
nombre de sujets à inclure dans le protocole est, là aussi,
une question méthodologique importante. Si la pratique
qu’on évalue est très efcace, il faudra un nombre moins
conséquent de patients à inclure et à comparer. En revan-
che, si la méthode n’est pas d’une très grande efcacité,
il faudra inclure un grand nombre de patients.
L’apport fondamental de l’évaluation est de clarier les
pratiques, ce n’est pas si difcile, nous disposons des
moyens utiles, et cela nous aide à progresser efcace-
ment. Aujourd’hui, il y a une vraie prise de conscience de
la nécessité d’évaluer les pratiques psychiatriques mais il
s’agit d’être vigilant sur les raccourcis et les risques de
« dérapage ». Ce n’est pas parce qu’on ne se prête pas à
l’évaluation que ce que l’on fait est mauvais ! Derrière
l’évaluation, il y a des enjeux de pouvoirs.
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