CHANGEMETS DE REPERE Groupe IREM Mathématiques et Sciences Physiques au Lycée Monique Mandleur, Monique Sosset, Michèle Fauré, Gabriel Birague, Pierre López Introduction. On trouvera ci-dessous une première partie exposant la pratique de professeurs de sciences physiques (rédacteur : Gabriel Birague) suivie de réflexions que peuvent en tirer des professeurs de mathématiques pour leur enseignement (rédacteur : Pierre López). On invite les professeurs de mathématiques à lire en détails la partie physique. Ils en tireront sûrement des enseignements qui vont au-delà de ce qui est dit dans la partie mathématique1. En effet, on s’est contenté de faire certaines remarques les représentations graphiques des fonctions de la forme k.f . Cependant, au cours de la lecture de la partie physique, il est bon d’avoir à l’esprit qu’il n’est pas dans nos intentions de dire aux physiciens ce qu’ils doivent faire, mais plutôt d’être à l’écoute de ce qu’ils font. 1 On remarquera notamment que la recherche d’une puissance maximum peut se rapprocher de la recherche de l’aire maximum d’un rectangle inscrit dans un triangle, ce qui renvoie à la recherche du maximum du produit de deux nombres dont la somme est constante, ce qui renvoie à l’article sur les fonctions x → x (1 – x) et x → x + 1/x . §1) Adaptation de puissance. Transfert de puissance maximum. Ce problème bien connu des physiciens est habituellement l'occasion pour le mathématicien d'illustrer la notion de dérivée sur un polynôme d'ordre 2 (annexe). Nous proposons de reprendre cette question pour illustrer la fonction hyperbolique et ses propriétés, ainsi qu'à la fin, l'intérêt d'utiliser un repère orthonormé. 1°) Présentation du problème. En Physique (en électricité, notamment),, on cherche à utiliser au mieux le signal fourni par un capteur (dispositif délivrant une tension ou un courant proportionnel à une grandeur physique, par ex., vitesse, pression, force, etc...). Le signal obtenu est alors amplifié en tension et en courant. Le dispositif électronique réalise une amplification de puissance. Le niveau en sortie est proportionnel à la puissance récupérée à l'entrée. 2°) Exemple de situation où l'adaptation de puissan ce est nécessaire. Micro Amplificateur électronique Hautparleur Dispositif d'amplification audio Il est donc important de se placer dans les conditions où on recueillera le maximum de la puissance disponible sous forme électrique. Le schéma électrique équivalent est le suivant : i R u Re E Résistance d'entrée Micro Haut-parleur Amplificateur électronique Dans le modèle du micro, la source de tension E représente, à l'échelle des tensions, la grandeur physique (ici, les variations de pression de l'air dues à la vibration sonore). R est la résistance interne du micro, Re est la résistance d'entrée de l'amplificateur. 3°) Plan de l'étude. On se propose dans les lignes qui suivent de reprendre l'étude de cette question à partir de considérations sur le point de fonctionnement (u,i) du micro. Le signal sonore est une grandeur variable fonction du temps. Dans un souci de simplification, nous ferons l'étude en supposant les grandeurs électriques indépendantes du temps. Elles sont représentées par des lettres majuscules comme pour les tensions et courants continus. Le schéma peut être simplifié : I R U E Re On tracera la caractéristique (u,i) de celui-ci (droite de charge). On cherchera le lieu des points (u,i) équipuissance, puis on montrera que selon la valeur de cette puissance, il peut y avoir deux points de fonctionnement, un seul ou aucun, s'il n'y a pas d’intersection. On peut terminer en traçant les graphes dans un repère orthonormé (tension uI, tension u) où uI = Ri. Il est impossible de parler de repère orthonormé pour un plan (u,i), car les grandeurs ne sont pas de même nature et l'on ne peut pas prendre la même échelle sur les deux axes. 4°) Droite de charge du micro. La loi des branches permet d'écrire la relation courant-tension pour ce dipôle. U = E - RI Le tracé ci-dessous est effectué pour E= 10 mV et R = 10 kΩ. Point de fonctionnement 0,014 0,013 0,012 0,011 0,01 M u tension en V 0,009 0,008 u 0,007 0,006 0,005 0,004 0,003 0,002 N 0,001 0 0,00E+00 1,00E-07 2,00E-07 3,00E-07 4,00E-07 5,00E-07 6,00E-07 7,00E-07 8,00E-07 9,00E-07 1,00E-06 i courant A Considérons le point de fonctionnement pour i = 0,1µA. On lit sur le graphe U = 9 mV. La puissance fournie par le dipôle est P = UxI; elle vaut pour le point considéré P= 0,9 nW. 5°) Points de fonctionnement équipuissance. Les points de fonctionnement à puissance constante sont définis par la relation u * i = P =Constante, soit u = P . i Le tracé ci-dessous montre le graphe pour P = 0,9 µW. droite de charge et lieu équipuissance P=9nW 0,014 0,013 0,012 u, tension en V 0,011 0,01 0,009 0,008 u 0,007 up 0,006 0,005 0,004 0,003 0,002 0,001 7 7 7 7 7 6 1, 00 E0 9, 00 E0 8, 00 E0 7, 00 E0 6, 00 E0 7 7 7 5, 00 E0 4, 00 E0 3, 00 E0 2, 00 E0 0, 00 E+ 00 1, 00 E07 0 i, courant en A 6°) Puissance maximum fournie. Traçons une 2ème courbe équipuissance pour P = 4 nW. Nous constatons que cette courbe se situe plus à droite dans le plan et que cette courbe n'a aucun point d'intersection avec la droite caractéristique. Le dipôle ne peut donc pas fournir une telle puissance. La recherche de la puissance maximum fournie revient à déterminer la valeur de P pour laquelle l'hyperbole est tangente à la droite. lieux équipuissance P =0,9nW, 2,5nW, 4nW 1,40E-02 1,20E-02 u, tension en V 1,00E-02 u 8,00E-03 up upp 6,00E-03 uppp 4,00E-03 2,00E-03 0,00E+00 0,00E+00 1,00E-07 2,00E-07 3,00E-07 4,00E-07 5,00E-07 6,00E-07 7,00E-07 8,00E-07 9,00E-07 1,00E-06 i, courant en A 7°) Analyse dans un repère orthonormé. La difficulté de l'étude graphique vient des coordonnées qui ne sont pas de même nature : courant pour l'abscisse, tension pour l'ordonnée. Définir un repère orthonormé revient à faire l'étude avec deux variables de même nature, par exemple deux tensions et une échelle identique sur les deux axes . Nous devons choisir une tension proportionnelle au courant. La relation courant-tension pour ce dipôle , U = E – RI suggère de prendre comme variable de l’axe des abscisses, la tension UR=RxI . Nous nous plaçons dans un repère U(UR) au lieu de U (I). La relation courant-tension pour ce dipôle devient U = E - UR . La pente est constante, indépendante de R et vaut -1. UxUR P.R La courbe équipuissance s'écrit P = UxI = , soit U = R UR L'étude devient générale et les graphes montrent des symétries intéressantes qui simplifient la solution. Adaptation de puissance Repère orthonormé 1,40E-02 1,20E-02 1,00E-02 tension U U 8,00E-03 9nW 25nW 40nW 6,00E-03 UR 4,00E-03 2,00E-03 0,00E+00 0,00E+00 1,00E-03 2,00E-03 3,00E-03 4,00E-03 5,00E-03 6,00E-03 7,00E-03 8,00E-03 9,00E-03 1,00E-02 tension UR La pente de la droite de charge valant -1, le point de l'hyperbole où la tangente à la courbe a cette pente a les coordonnées suivantes : dU PxR == -1, soit URM = PxR = UM, le point est sur la 1ère bissectrice. dUR URM2 E U = E-UR= E-U, soit U = , résultat général. 2 8°) Approche par la dérivée. L’expression de la puissance fournie à l'entrée de l'amplificateur est E , P= U x I = Re x I2 avec I = R+Re E2 . d'où P = Re x (R+Re)2 On cherche la dérivée de P par rapport à Re : dP (R+Re)2 _ 2Re(R+Re) R2 - Re2 2 =E x = , dRe (R+Re)4 (R+Re)4 d’où les extremums pour Re = +/- R. §2) Les représentations graphiques des fonctions x a k x 2 k et x a . x Dans ce qui précède, on peut tout d'abord remarquer au paragraphe 7 le sens qui est donné à la notion de repère orthonormé en sciences physiques sans que cela débouche sur un graphique avec un repère orthonormé au sens mathématique. Par ailleurs, on aura remarqué les tracés des hyperboles d'équipuissance. En classe de mathématiques, lors de la construction des représentations graphiques des k fonctions x a k x 2 et x a , on trouve le plus souvent la démarche qui consiste à x utiliser une affinité (de manière implicite) ou un changement d'unité sur l'axe des ordonnées. Ceci est assez naturel. Cependant, on peut induire ainsi l'idée qu'il y a déformation de la courbe par une sorte d'allongement (ou de contraction) sur la direction de l'axe des ordonnées, ce qui traduit mal la pratique précédente du physicien. Aussi il paraît intéressant de revenir à la pratique qui consiste à faire intervenir des homothéties (ou d' « agrandissement/réduction »). On va rappeler ces pratiques. 2 1°) Cas de la fonction f : x a k x . On considère un repère ( O ; i , j ). On cherche un nombre non nul a tel que la représentation graphique de f soit l'image par une homothétie de centre O et de rapport a de la représentation graphique de la fonction « carrée » . Or un point M ( x ; y ) est l'image par cette homothétie d'un point M1 (x1 ; y1) si x = a . x1 et y = a . y1 . Donc à partir de y = k x 2 , on déduit a . y1 = k a2 . x12 donc y1 = k a . x12 . Alors pour que M1 appartienne à la représentation graphique de la fonction 1 « carrée », il suffit de prendre a = . k Par exemple, si on prend k = 2 , la représentation graphique de f est la réduction de celle de 1 la fonction « carrée » d'un coefficient . En d'autres termes, la représentation graphique de la 2 fonction f : x a 2 x 2 est la même que celle de la fonction « carrée » mais « vue de plus loin ». 2°) Cas de la fonction f : x a k (avec k > 0). x On pose la même problématique que précédemment et on l'aborde de la même manière que dans le cas précédent (mutatis mutandis). Cela donne : k à partir de y = , on déduit x k k donc y1 = 2 a . y1 = . a . x1 a . x1 Il suffit donc de prendre a tel que a 2 = k . Par exemple, si on prend k = 2, la représentation graphique de f est l'agrandissement de celle de la fonction « inverse » d'un coefficient 2 . En d'autres termes, la représentation graphique 2 de la fonction f : x a est la même que celle de la fonction « inverse », mais « vue de x plus près ». On remarquera le parallélisme des deux résultats : 1 , a - pour la fonction « inverse », on a k = a 2 . - pour la fonction « carrée », on a k = Conclusion. Cet article sans prétention a pour objectif de contribuer à une meilleure connaissance de nos pratiques de classe afin de considérer les élèves comme des acteurs d'un enseignement pluridisciplinaire. On remarquera pour finir que, avec le vocabulaire du programme de seconde, on a montré que toutes les paraboles ont « même forme ». Or on sait que si on se place assez loin, la parabole peut être rendue « indiscernable » avec l'axe des ordonnées ; et si on se place assez près, ce sera avec l'axe des abscisses. Aussi que peut-on dire de la « perception » dans ce cas ?