SANTÉ DE LA FEMME La ménopause et vous Etape enrichissante ou passage obligé? Que savent les femmes belges de plus de 45 ans de la ménopause? Comment l’appréhendent-elles? Quelle est leur perception de l’impact de cette période de la vie qui représente aujourd’hui plus du tiers de la vie d’une femme? Comment les médecins gèrent-ils avec elles les aspects de cette étape et quels sont les traitements habituels et le taux de satisfaction par rapport à ces traitements? Vaste(s) question(s) auxquelles a tenté de répondre une enquête réalisée – sous l’égide de la Société Belge de Ménopause et grâce au soutien des laboratoires Abbott – auprès de 696 femmes belges âgées de 45 à 60 ans. La première question, d’apparence simpliste – «Avez-vous entendu parler de la ménopause?» –, a déjà apporté un lot important d’informations. En effet, si quasi toutes les femmes (98%) en ont entendu parler, elles la définissent cependant diversement: -c’est ainsi que un peu plus d’une femme sur deux (54%) évoque l’absence de règles; -tandis qu’une femme sur quatre (29%) mentionne les changements des taux hormonaux; - de manière moins fréquente, la perte de fertilité (21%), l’absence d’ovulation (16%) et la présence de bouffées de chaleur (14%) sont également citées comme pouvant définir la ménopause. Il est par contre plus surprenant d’apprendre que pour 61% des femmes interrogées, la ménopause n’est qu’une phase transitoire, 17% la définissant comme une période ne durant que 1 à 2 ans alors que 44% admettent une durée de 3 à 5 ans. Dans ce contexte, les Pr Axelle Pintiaux (Université de Liège), Serge Rozenberg (Hôpital St Pierre, Bruxelles) et Herman Depypere (Université de Gand) rappelaient au nom de la Société Belge de Ménopause (qui a commandité l’enquête) que: «La ménopause se marque par un arrêt irréversible (et donc définitif!) de la fonction ovarienne et donc de la période fertile. Il s’agit donc d’une situation physiologique qui se marque généralement après la cinquantaine pour le reste de la vie de la femme.» Faut-il consulter? Qui? Et quand? Ce manque de connaissance sur la ménopause étonne peu quand on sait par ailleurs que seules 37% des femmes ont discuté de cet aspect de leur vie avec un médecin avant de présenter des symptômes liés à la ménopause. Celles qui en avaient déjà discuté l’ont fait le plus souvent spontanément (dans 82% des cas) et avec leur gynécologue (68% des cas) ou leur généraliste (54% des cas). Une fois les symptômes présents, les femmes attendent en moyenne 4 mois ½ avant de «réagir»: 34% en discutent avec leur généraliste et 39% avec un spécialiste. Dans les faits, cette attitude se traduit dans 62% des cas par un diagnostic de ménopause effectué la plupart du temps sur base d’une prise de sang. Ce sont par ailleurs très logiquement les femmes qui en avaient discuté auparavant avec leur médecin qui ont consulté le plus rapidement, une consultation qui s’est traduite majoritairement par un accueil compréhensif et la diffusion d’informations pertinentes par le praticien. Après consultation, les médecins ont prescrit des hormones dans 33% des cas pour les généralistes et 54% des cas pour les spécialistes, ou des traitements ne nécessitant pas d’ordonnance (respectivement 27% et 13% des cas). «Il est frappant de constater dans cette enquête qu’une femme sur cinq environ n’a pas suivi l’avis formulé par le médecin consulté, sauf en cas de proposition de médicament sans ordonnance, probablement parce qu’elles ont peur des hormones et n’en connaissent pas bien les bénéfices possibles, ni les limites d’utilisation», commentent les experts de la Société Belge de Ménopause. Quant à savoir ce qu’ont fait les femmes qui n’ont pas consulté, les réponses sont très variées: recherche d’informations (sur Internet notamment) dans 34% des cas, demande d’information auprès d’un membre de la famille (13%), renseignements auprès du pharmacien (9%)… Faut-il traiter? Quand? Comment? «On ne traite une ménopause que lorsqu’il y a des symptômes, et que ces symptômes posent problème», rappellent les experts. Mais quels sont ces symptômes? Et quel est leur impact? Fatigue, douleurs musculaires et/ou articulaires, bouffées de chaleur figurent clairement dans le trio de tête des symptômes évoqués par les femmes en ménopause, notamment parce que ce sont les symptômes qui ont le plus d’impact sur leur vie au quotidien. «Mais il ne faut oublier les troubles du sommeil, les sautes d’humeur et l’irritabilité, la baisse de libido, liée ou non à la sécheresse vaginale, les palpitations, les troubles de la concentration et les ennuis urinaires…» Par ailleurs, la ménopause a eu un impact négatif sur les capacités physiques de 41% des femmes et sur l’apparence physique de 38% d’entre elles, leur vie sexuelle étant altérée dans un cas sur trois et leur santé mentale dans un cas sur quatre (dépression, anxiété…). Enfin, 22% des femmes ménopausées interrogées manifestent une insatisfaction importante quant à leur qualité de vie du fait des symptômes de la ménopause. Dans ces conditions, il est regrettable de constater qu’une femme sur deux seulement (53%) suit un traitement, quel qu’il soit. Les plus fréquents des «traitements» suivis sont l’activité physique (30%), l’évitement des situations de stress (20%), l’utilisation de crèmes vaginales contre la sécheresse vaginale (18%) et les traitements hormonaux (18% également). Plus rarement, les femmes utilisent de la phytothérapie, des protéines de soja, une contraception hormonale, des techniques de relaxation… avec un taux de satisfaction global allant de 7,1 à 8,3 sur une échelle de 1 à 10. Quant aux hormones, elles font peur, notamment pour le risque de cancer du sein (25% des femmes) ou le risque d’infarctus (34%), «alors que l’on sait maintenant que le risque cardiovasculaire n’existe pas si le traitement hormonal est pris en présence de symptômes (et non en prévention), dès le début de la ménopause (et non pas longtemps après) et pour une durée limitée à la présence de symptômes, et à la dose la plus faible possible», signale le Pr Serge Rozenberg. «Par ailleurs, le traitement hormonal est celui qui apporte l’efficacité la plus importante sur les bouffées de chaleur», renchérit le Pr Herman Depypere. «De plus, les hormones ont une action intéressante en prévention de l’ostéoporose liée à la ménopause, même si elles ne doivent pas être prises uniquement dans cette optique car il existe d’autres options thérapeutiques pour l’ostéoporose.» Que retenir? Parler de la ménopause à son médecin avant tout symptôme, permet d’en anticiper les symptômes et de les traiter de manière optimale le plus rapidement possible dès leur apparition. Ce qui permet de réduire voire d’effacer l’impact négatif de la ménopause sur la qualité de vie. DR DOMINIQUE-JEAN BOUILLIEZ