OSP-Actualités Édition 4/2012 Temps fort editorial Margrit Kessler, Présidente OSP Ma première année comme Conseillère nationale s’achève. Plusieurs motions ont pu être initiées dans l’intérêt des patients. L’action politique me plaît, mais les rouages politiques sont lents et la tâche est loin d’être accomplie. Je peux m’y atteler avec d’autant plus de tran­ quillité que les deux directrices dirigent parfaitement la destinée de l’OSP et que toutes les collaboratrices font preuve d’un engagement sans faille. Je remercie vivement mes collègues et les membres du Conseil de fondation du travail fourni. Je me réjouis de poursuivre notre précieuse collaboration l’année prochaine. Tenir à un fil ... Un jeune pilote de motocross chute pendant l’entraînement. L’ORL responsable établit à plusieurs reprises des diagnostics erronés qui auraient presque coûté la vie du patient. Sans la ténacité de sa mère, le jeune homme n’aurait pas survécu. Margrit Kessler — Walter Bühler (19) aime le motocross par-dessus tout. Lors d’un week- end d’entraînement en Italie, il fait une chute malheureuse et son cou heurte malencontreusement le guidon. La douleur dans la région du larynx est telle qu’il est hospitalisé à Novara. Le diagnostic à l’admission du 16 mai est : lésion du cou, du larynx et de la trachée avec gêne respiratoire et hématome. De l’air avait par ailleurs pénétré sous la peau (emphysème sous-cutané). Lors de la tomographie assistée par ordinateur (TAO), les spécialistes italiens découvrent une déchirure de la paroi droite arrière au niveau de l’épiglotte. Le 19 mai, l’état de santé du patient permet son rapatriement en Suisse. Le transport est effectué par une ambulance de la REGA. Renvoyé chez lui malgré un danger de mort aigu Suivant les prescriptions des médecins italiens, Walter Bühler consulte un ORL à l’hôpital régional le plus proche. Le médecin constate lors de l’inspiration et de l’expiration des bruits respiratoires caractéristiques d’un rétrécissement ou d’un déplacement des voies respiratoires supérieures au niveau du larynx et de la trachée. En outre, la voix du patient est particulièrement rauque. Malgré un hématome important et une respiration difficile, le patient est confié à sa mère. Le prochain rendez-vous n’a lieu que six jours ≥ Cont. Temps fort Guide de l’OSP Comment l’OSP clarifie-t-elle une erreur de diagnostic supposée ? • La conseillère de l’OSP demande au patient une procuration pour défendre ses intérêts et récupère en premier lieu les dossiers médicaux de tous les pra­ticiens et cliniques concernés, y compris les radiographies, les procès-verbaux, les vidéos, etc. • La conseillère recherche ensuite dans ces dossiers les documents pertinents par rapport à l’erreur de traitement supposée et reproduit sur cette base l’historique médical sous forme de tableau. • Arrive ensuite la partie la plus difficile de la tâche qui consiste à examiner si les documents à disposition permettent de confirmer l’erreur de diagnostic supposée. La conseillère établit sa thèse et fait appel à un spécialiste en cas de doute. Ce dernier prend alors position oralement ou par écrit sur les questions posées. • Dans les cas difficiles et complexes, les questions aux spécialistes sont primordiales. C’est celui qui pose les questions qui dirige l’entretien. Des réponses vagues suscitent de nouvelles questions au lieu de mener à des bases de décision fiables. • à l’attention de l’avocat du patient, la conseillère formule son appréciation des faits en se basant sur le dossier et les réponses apportées par le spécialiste. • Nos prestations sont un instrument essentiel pour l’avocat du patient. C’est lui qui est chargé de poser à l’expert les bonnes questions. C’est pourquoi il est essentiel que les questions posées permettent d’obtenir des réponses compréhensibles. Notre mission consiste, par nos questions, à diriger l’expert dans la direction que nous souhaitons. Si les bonnes questions ne sont pas posées, l’expert pourra probablement con­tourner les points essentiels de la présente violation du devoir de diligence. Barbara Züst plus tard. Malgré l’absence de toute amélioration, le patient a dû rentrer chez lui. Sa mère expliquera plus tard à l’OSP que le médecin n’a jamais regardé les radiographies apportées d’Italie. Le 2 juin, des notes illisibles sont apportées au dossier médical et le patient est renvoyé chez lui. Il existe en revanche une lettre datée du 3 juin adressée à l’Université qui fait état d’un danger de mort aigu. Walter Bühler est néanmoins renvoyé à la maison. Trachéotomie d’urgence Le 8 juin, la mère du patient demande conseil à l’OSP. Morte d’inquiétude, elle nous informe que son fils souffre de crises d’étouffement régulières. Nous lui conseillons de se rendre immédiatement au centre hospitalier ; la situation n’est pas normale et il y a un risque aigu d’étouffement. Effectivement, le patient a dû subir une trachéotomie d’urgence. Au scanner, on diagnostique une fracture du larynx ainsi que du cartilage cricoïde et de l’anneau supérieur de la trachée. Malgré l’absence de toute amélioration, le patient a été renvoyé à domicile. à cause des 19 jours d’attente, un rétrécissement s’était formé. On recommande au patient de subir le plus rapidement possible une opération de correction. Un mois plus tard, l’opération a lieu, mais a dû être interrompue : la situation est tellement catastrophique que seule l’ablation d’un morceau de la trachée est envisageable. Cette opération n’est effectuée en Suisse que par trois spécialistes. On avait conseillé à Walter Bühler de se faire opérer à la Clinique universitaire de Lausanne car ce médecin-chef disposait de l’expérience nécessaire. Félicitations pour cette décision des médecins de ne pas effectuer eux-mêmes une opération aussi intéressante et rare ! Risque de séquelles L’opération étant reportée, Walter Bühler décide d’achever son apprentissage de paysagiste avec le cathéter et passe l’examen final avec succès. En août, le jeune homme subit une ablation de 5 cm de la trachée. C’est énorme, et ce n’est réalisable sans transplant que chez un patient jeune. Malgré la logopédie, Walter Bühler a aujourd’hui encore des problèmes avec sa voix. Toute future anesthésie représente un risque important pour le patient. En effet, une intubation ne doit en aucun cas léser la trachée ce qui s’avèrerait catastrophique. Il est incompréhensible que le médecin traitant n’ait rien entrepris au vu de cette blessure qui n’avait rien d’exotique, mais qui est une blessure classique suite à un accident. En résumé : Dans le cas présent, nous sommes en présence d’une violation du devoir de diligence avec un risque de séquelle probable. Grâce aux efforts déployés par l’avocat, le patient a reçu des dommages-intérêts. Il est incompréhensible que le médecin traitant n’ait rien entrepris au vu de cette blessure qui n’avait rien d’exotique, mais qui est une blessure classique suite à un accident. Un ORL praticien doit être en mesure d’identifier une telle blessure et prendre immédiatement les mesures nécessaires. Sans les observations et la ténacité de sa mère, le jeune homme n’aurait pas survécu. • POLITIQUE Demande de l’OSP concernant les droits des patients L’OSP chez le Conseiller fédéral Berset Le Conseiller fédéral Alain Berset a récemment reçu une déléguation de l’OSP. Cette visite de présentation était axée sur divers thèmes d’actualité en matière de politique sanitaire, dans lesquels l’OSP utilise son droit de prise de position afin de favoriser des solutions en faveur des patients dans les textes de lois, les décrets et les ordonnances. Dans cette interview, la Conseillère nationale et présidente de l’OSP Margrit Kessler ainsi que la directrice technique de l’OSP Barbara Züst prennent position sur les dossiers actuels et les principales demandes de l’OSP. Interview: Lukas Ott Droits de recours pour la protection et la représentation des patients Pourquoi l’OSP réclame-t-elle pour elle-même et d’autres organisations de patients un droit de recours ? Barbara Züst: La défense des intérêts des patients varie fortement d’un canton à l’autre. Sans possibilité de recours, il nous est impossible de remédier avec efficacité aux déficits d’exécution concernant Barbara Züst, lic. en droit, co-directrice les droits des patients. et directrice technique de la Fondation Contre quelles décisions de pouvoirs publics ou d’organes est-il pos- Organisation Suisse des Patients OSP sible de déposer un recours ? B. Z.: Nous n’avons pas de possibilité de recours, par exemple, contre les décisions de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) concernant l’admission étatique de médicaments. Au sein de quels organes des représentants de patients devraient-ils siéger ? B. Z.: Des représentants de patients devraient siéger dans des institutions telles que Swissmedic (Institut suisse des produits thérapeutiques), SwissDRG SA (organe chargé de régler la rémunération des prestations hospitalières) ou le Swissmedical Board (organe spécialisé chargé de formuler les recommandations à l’attention des décideurs politiques et des fournisseurs de prestations). C’est la seule manière d’intégrer de manière conséquente la perspective du patient et d’en tenir compte. Débat transparent sur la médecine de transplantation Pourquoi l’OSP critique-t-elle les nouvelles dispositions de l’ASSM ? Margrit Kessler: Jusqu’ici, la mort cérébrale était la condition sine qua non au prélèvement d’organes vitaux chez une personne. Désormais, un prélèvement d’organes sera possible après un arrêt cardiaque. Cette disposition accorde aux médecins le droit de provoquer le décès de patients gravement malades en arrêtant l’assistance respiratoire ou les médicaments cardio-vasculaires. L’arrêt cardiaque est provoqué, suivi de la mort cérébrale dix minutes plus tard ; le prélèvement d’organes peut alors commencer. Margrit Kessler, Conseillère nationale, présidente de la Fon­ dation Organisation Suisse des Patients OSP Qu’est-ce que cela signifie pour la révision de la loi sur la transplantation ? M. K.: Sur ce point, la loi sur la transplantation ne doit en aucun cas être adaptée. Le ­modèle du consentement étendu aujourd’hui en vigueur est tout à fait adéquat. Depuis l’introduction de la loi sur la transplantation, le nombre des donneurs a de nouveau ­augmenté. Les articles de presse négatifs ont entre-temps pratiquement disparu. Pourquoi l’OSP exige-t-elle avec une telle véhémence une clarification des oppositions ? M. K.: Les personnes souhaitant faire un don d’organe comptent sur le fait que le pré­ lèvement d’organe ne sera effectué qu’après leur mort certaine. Dans le cas contraire, la volonté de faire don d’organes des personnes encore disposées à le faire disparaîtra complètement. • Pour une mise en œuvre efficace des droits des patients dans la pratique, les droits de recours pour les organisations de défense des patients doivent être ancrés au niveau fédéral. Les prises de décisions importantes exigent la concertation de représentants de patients. En Suisse, les droits des patients ne sont souvent que du vent puisque des mesures pour la mise en œuvre des revendications font défaut dans le droit médical. Les individus ne peuvent faire valoir leurs droits qu’en sollicitant l’aide d’un avocat avec le risque financier que cela comporte. Il est donc primordial de disposer de droits de recours pour les collectifs ou les organisations de défense des patients qui sont confrontés de manière systémique et institutionnelle à des violations des droits du patient et autres abus du système de santé. Les organisations de défense des patients doivent disposer de possibilités légales de ­signaler des irrégularités systémiques auprès des autorités et des organes responsables sans devoir redouter des conséquences négatives. Par ailleurs, les or­ga­­nisations de défense des patients en tant qu’associations doivent bénéficier de droits de recours et d’opposition à l’encontre des décisions prises par des organes ou pouvoirs publics dans le domaine de la santé. Demande de l’OSP concernant la Loi sur la transplantation Transparence dans le cadre de la révision de la Loi sur la transplantation, notamment sur le prélèvement d’organes après un arrêt cardio-circulatoire induit médicalement. à l’insu de la population, un petit comité d’experts de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM) a mis en vigueur l’année dernière de nouvelles directives sur le diagnostic de la mort qui contredisent la législation en vigueur sur la transplantation. La chirurgie de transplantation se con­ centre désormais sur des donneurs potentiels souffrant d’une grave lésion cérébrale, mais qui ne sont pas encore en état de « mort cérébrale ». Pour ces personnes, les médecins renoncent de façon ciblée – dans l’esprit de l’euthanasie passive – à poursuivre des mesures de médecine intensive, c’est-à-dire qu’ils provoquent un arrêt cardio-circulatoire contrôlé. Selon les nouvelles directives de l’ASSM, les médecins sont autorisés à déclarer la mort cérébrale dix minutes au moins après qu’un tel arrêt cardio-circulatoire a été constaté. En Allemagne, le pré­ lèvement d’organes dans de telles conditions est interdit. L’OSP exige des processus transparents afin que la population puisse développer la confiance si nécessaire à l’augmentation des donneurs d’organes. colonne Temps de l’attente OSP Conseil OSP Conseil Martina Tapernoux-Tanner, aumônière réformée à l’hôpital Pour toute la Suisse (pour non-membres) Téléphone 0900 56 70 48, français, Fr. 2.90 p. min. Lundi + Jeudi 9.00 – 12.00 et 13.00 – 16.30 Service de consultation OSP Zurich (Bureau) La période de l’Avent est un temps de l’attente. à l’hôpital, c’est en fait toute l’année l’Avent. De nombreux patientes et patients attendent. Ils attendent une explication à leurs douleurs, ils attendent une visite, ils attendent la mort – comme Monsieur Müller* par exemple. Je lui ai rendu plusieurs fois visites et je l’aime bien. En entrant dans sa chambre, mon regard fixe ses bras. Ils sont encore plus maigres que la semaine dernière. Le ventre est ­gonflé. Dort-il ? Dois-je repartir ? Il cille des yeux. « Bonjour Monsieur Müller. » Il hoche de la tête. « Comment allez-vous ? » Pas de réaction. « Puis-je m’asseoir à côté de vous ? » Il hoche de la tête. Je prends une chaise et m’asseois. Sa respiration est irrégulière. Avec des intervalles importants entre l’inspiration et l’expiration. Je remplis le vide en comptant : 37, 38, 39. Il inspire à nouveau. Pour la dernière fois ? Je suis heureuse d’être l’aumônière de l’hôpital et non son épouse. Comment supporte-t-elle cette tension entre la vie et la mort ? Elle n’a pas le choix ... Monsieur Müller attend-il encore quelque chose de la vie ? Je ne sais pas. Attend-il ou sa famille la mort qui le délivrera de ses souffrances ? Monsieur Müller s’est rendormi. Je décide de partir. Après-demain, je reprendrai mon service. Peut-être que cette chambre sera déjà occupée par une autre personne. Je me désinfecte les mains et me sens fatiguée, triste et vide. à la cafétéria, je bois un café et me change les idées en lisant le journal. Cela va mieux à nouveau. Ma prochaine visite est la chambre occupée par Madame Keller* et Madame Meier*. Madame Keller a l’esprit confus. Elle me demande pourquoi elle est ici. Je n’en sais rien. Elle est inquiète. J’essaie alors de diriger la conversation sur un autre sujet. Sur la table de nuit, il y a une photographie. Je lui demande qui elle représente. Elle parle de ses enfants, de ses petits-enfants et de ses arrière-petits-enfants. Elle est heureuse de la façon dont ils vivent leur vie. Je me réjouis avec elle. Sa voisine de chambre, Madame Meier, se penche du lit et je crains qu’elle ne tombe. Je prends donc congé de Madame Keller pour m’occuper de Madame Meier. Sa bague est tombée par terre, me dit-elle. Sa valeur est surtout sentimentale. Je cherche sur le sol, regarde sous le lit – pas de bague. Mon regard se pose alors sur le dernier tiroir de la table de nuit. La bague est là. Madame Meier est heureuse que je l’ai retrouvée. Elle parle des examens qu’elle a déjà effectués et de ceux qui lui restent à faire. Elle est inquiète et me demande de prier avec elle et Madame Keller. Je le fais très volontiers. Qu’attendent ces deux femmes ? Madame Keller attend de pouvoir rentrer chez elle. Dans son environnement habituel où elle a ses repères. Et Madame Meier attend un diagnostic. J’aime être aumônière d’hôpital. J’aime la vie. Surtout lorsqu’elle est aussi intense que dans les situations de crise, en début ou en fin de vie. Et moi, qu’est-ce que j’attends ? Le petit enfant qui naîtra dans la saison la plus sombre de l’année et qui nous offrira à tous de nouvelles perspectives. • *noms modifiés Häringstrasse 20, 8001 Zurich Téléphone 044 252 54 22, Fax 044 252 54 43 Lundi – Jeudi 9.00 – 12.00 et 13.30 – 16.30 Servizio di consultazioni OSP Bellinzona piazza indipendenza 1, c. p. 1077 6501 Bellinzona, Téléphone 091 826 11 28 Jeudi 9.00 – 12.00 et 13.30 – 16.30 Service de consultation OSP Berne Eigerplatz 12, 3007 Berne Adresse postale: Postfach, 3000 Berne 14 Téléphone 031 372 13 11, Fax 031 372 13 16 Lundi, Mardi et Jeudi 8.30 – 12.00 et 13.30 – 16.00 Service de consultation OSP St-Gall Rosenbergstrasse 72, 9000 St-Gall Téléphone 071 278 42 40, Fax 071 278 20 40 Lundi et Vendredi 9.00 – 12.00 et 13.30 – 16.30, Mercredi 9.00 – 12.00 Service de consultation OSP Olten Im Spitalpark, Fährweg 8 Postfach, 4603 Olten Téléphone 062 212 55 89 Mardi 10.00 – 16.00 Service de consultation OSP Lausanne Chemin de Mont-Paisible 18, 1011 Lausanne Téléphone 021 314 73 88, Fax 021 314 73 89 Lundi 9.00 – 12.00 et 13.30 – 16.30 Service de consultation OSP Genève Rue Gabrielle Perret-Gentil 4, 1211 Genève 14 Téléphone 022 372 22 22, Jeudi 9.00 – 12.00 et 13.30 – 16.30 Impressum OSP-Actualités Édition et Rédaction SPO Patientenschutz Häringstrasse 20, 8001 Zürich [email protected] / www.spo.ch Rédaction Katrin Bachofen Texte français Corinne Kissling, Anne-Marie Bollier Layout, Impression rva Druck und Medien AG, Altstätten SG « OSP Actualités » est envoyé à tous les membres de l᾿ association des donateurs. 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