DIAGONALISATION DES MATRICES GABRIEL LANG Résumé Dans cette partie, on présente la méthode de diagonalisation des matrices carrées. Elle consiste à écrire une matrice donnée comme un produit de trois matrices plus simple à manipuler. Cette partie utilise la relation entre une application et sa matrice associée dans une base. Il s'agit de trouver un changement de base particulier et d'utiliser la formule de changement de bases pour les matrices associées pour obtenir le produit désiré. Vecteur propre d'une application linéaire Un vecteur propre d'une application g est un vecteur x dont l'image g(x) reste colinéaire à x. Denition 1. Etant donnée une application g de E dans E , un vecteur x de E est un vecteur propre de g si et seulement si il existe un réel λ tel que g(x) = λx. Le nombre λ est appelé valeur propre associée au vecteur propre x pour g. Si on choisit une base (e1 , .., en ) formée uniquement de vecteurs propres pour g , la matrice associée à g dans cette base prend une forme particulière. Soit (e , .., e ) une base formée uniquement de vecteurs propres pour et (λ , ..., λ ) les valeurs propres correspondantes. La matrice associée à g est la suivante : λ 0 ··· 0 . . . ... 0 λ . . . . . . . 0 .. Propriété 1. g 1 1 n n 1 2 0 ··· 0 λn Cette matrice a des coecients nuls partout sauf sur la diagonale où apparaissent les valeurs propres. On dit qu'une telle matrice est diagonale. Diagonalisation d'une matrice carrée On considère une matrice carrée G donnée de dimension n. On considère l'espace vectoriel Rn , muni de la base (e1 , .., en ) où ei est le n-uplet ne contenant que des 0 sauf à la i-ème place où se trouve un 1. On note g l'application linéaire qui est associée à G dans cette base. S'il existe une autre base (e , .., e ) de R formée uniquement de vecteurs propre de g alors la matrice G associée à cette base est diagonale. Si on note P est la matrice de passage de (e , .., e ) à (e , .., e ), on a Denition 2. 0 1 0 1 Soit n G0 = P −1 GP. G = P G0 P −1 . 1 0 n 0 1 n 0 n Cette égalité est appelée diagonalisation de la matrice G. La diagonalisation n'est pas possible pour toutes les matrices, cela dépend de l'existence d'une base de vecteurs propres. Les paragraphes suivants discutent de l'existence et du calcul des vecteurs propres. Détermination des valeurs propres On commence par déterminer quelles sont les valeurs propres de g . Un réel λ est une valeur propre s'il existe un vecteur propre non nul asssocié On peut réécrire la relation vériée par le vecteur propre x associé à la valeur propre λ. On dénit une nouvelle application linéaire gλ (x) = g(x) − λx. Alors x est tel que gλ (x) = 0, ce qui signie que x est un élément de Ker(gλ ). Les valeurs propres de g sont les réels λ tels que Ker(g ) contient un élément non nul. Propriété 2. λ Cette propriété peut se traduire sur les matrices associées par Les valeurs propres de g sont les réels λ tels que G − λI est de déterminant nul. Propriété 3. n Preuve : Ker(gλ ) contient un élément non nul si et seulement si gλ n'est pas injectif. C'est équivalent à dire que gλ et sa matrice associée G − λIn ne sont pas inversibles donc que cette matrice est de déterminant nul. Il s'agit donc de déterminer quelles sont les valeurs de λ qui rendent nulles le déterminant de G − λIn . La matrice G − λIn a les mêmes coecients que G sauf sur la diagonale où on retranche λ à tous les coecients. Un calcul explicite de son déterminant par la méthode des mineurs montre que : Propriété 4. Le déterminant de G − λI est un polynôme Q(λ) de degré n en λ. n On en déduit qu'il y a au plus n valeurs propres. Si les n racines du polynômes sont réelles et distinctes, la matrice est diagonalisable. Propriété 5. G Preuve : pour chacune des racines λi du polynôme Q, il existe au moins un vecteur propre e0i . Il sut de montrer que ces n vecteurs forment un système libre. Supposons que les k premiers vecteurs soient libres, mais le (k + 1)-ième soit une combinaison linéaire des précédents : e0k+1 = µ1 e01 + ...µk e0k alors g(e0k+1 ) = λk+1 e0k+1 = λk+1 µ1 e01 + ... + λk+1 µk e0k g(e0k+1 ) = g(µ1 e01 + ... + µk e0k ) = µ1 g(e01 ) + ... + µk g(e0k ) = λ1 µ1 e01 + ... + λk µk e0k Et comme les k premiers vecteurs sont libres, on déduit que pour i = 1 à k, λk+1 µi = λi µi . Les µi n'étant pas tous nuls, on en déduit que λk+1 = λi , pour un des i ce qui contredit le fait que toutes les racines sont distinctes. Donc les vecteurs propres forment un système libre, donc une base et la matrice est diagonalisable. Si les n racines du polynômes sont réelles et qu'il existe des racines multiples, la matrice G est diagonalisable s'il existe pour chaque racine autant de vecteurs propres libres que l'ordre de multiplicité de la racine. Propriété 6. Si le polynôme a une racine double λ, il faut que Ker(gλ ) soit de dimension 2, c'est à dire qu'il contienne un système de deux vecteurs libres. Propriété 7. Si certaines des racines du polynôme sont complexes, la matrice G n'est pas diagonalisable. 2 Calcul des vecteurs propres Une fois connues les n valeurs propres réelles, il sut de déterminer une base de Ker(gλ ), ce qui revient pour chaque racine à résoudre un système linéaire. Dans le cas où certaines valeurs propres sont multiples, on doit vérier que Ker(gλ ) est bien de la dimension de l'ordre de multiplicité (ce n'est pas toujours le cas) pour que la matrice soit diagonalisable. Application : calcul de la puissance d'une matrice Pour calculer une puissance élevée de matrice, il peut être plus simple de passer par la diagonalisation en utilisant la propriété suivante des matrices diagonales : Si une matrice A est diagonale de coecients diagonaux (a , ..., a ), alors A est diagonale de coecients diagonaux (a , ..., a ). Propriété 8. 1 n n 1 p n p Supposons qu'on a diagonalisé une matrice G : G = P DP −1 , où D est une matrice diagonale. Alors Gn = P DP −1 P DP −1 · · · P DP −1 = P Dn P −1 et Dn se calcule directement par la proposition précédente. 3