Qu`est-ce que la modernité

CONFÉRENCE PHILOSOPHIQUE
“Plus l’être humain sera éclairé, plus il sera libre.”
Voltaire
QU’EST-CE QUE LA MODERNITÉ ?
Actualité n’est pas modernité
CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN
Association ALDÉRAN Toulouse
pour la promotion de la Philosophie
MAISON DE LA PHILOSOPHIE
29 rue de la digue, 31300 Toulouse
Tél : 05.61.42.14.40
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conférence N°1600-171
QU’EST-CE QUE LA MODERNITÉ ?
Actualité n’est pas modernité
conférence d’Éric Lowen donnée le 22/03/2008
à la Maison de la philosophie à Toulouse
Qu’est-ce que la modernité ? Une période historique, un concept sociologique, un concept
politique, un concept d’opposition d’avec la Tradition ? La modernité n’est-elle pas confondue
la plupart du temps avec l’actualité ? N’est-elle pas parfois un mythe dont on use et abuse ?
En fait, il ne suffit pas de vivre dans le temps présent pour être moderne ; la modernité est
surtout une attitude, une exigence dans le domaine de la pensée et de l’action. Êtes-vous
capables d’être moderne ?
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QU’EST-CE QUE LA MODERNITÉ ?
Actualité n’est pas modernité
PLAN DE LA CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN
Nous, qui sommes si modernes,
serons anciens dans quelques siècles.
La Bruyère (1645-1696)
Discours sur Théophraste
I
LA MODERNITÉ, UNE JOYEUSE CONFUSION
1 - Depuis la Renaissance, la volonté d'être moderne n'a jamais cessé d'être au cœur des débats
2 - Le constat d’une confusion générale, même dans les milieux intellectuels
3 - L’absence de conceptualisation précise
4 - Ce qui va entraîner de nombreuses confusions :
A - La confusion chronologique, la modernité comme période historique
B - L’illusion de la post-modernité
C - La confusion de la modernité comme mode
D - La confusion de la modernité comme novation (le néopathisme)
E - La confusion de la modernité opposée à l’ancienneté
F - La confusion de la modernité comme technicité et hyperscience
G - La confusion de la modernité comme occidentalisme et occidentalisation
H - La confusion de la modernité assimilée aux anti-modernistes, à l’anti-modernisme
5 - La “Modernité” est devenue une idéologie, un mythe, un alibi, une justification
6 - La première raison de cette situation : confondre la modernité et les éléments de la modernité
7 - La deuxième raison : la confusion entre modernité et actualité
8 - Processus qui aboutit à la diabolisation de la modernité
II
DÉFINITION DE L’ACTUALITÉ
1 - Définition de l’actualité : ce qui est en acte dans le présent, une présence dans l’action
2 - Pensées actuelles et pratiques actuelles
3 - Une appréciation purement historique et chronologique
4 - Ce qui est actuel peut être ancien : l’actualité n’est pas que novation
5 - Ce qui est actuel n’est pas forcément moderne : actualité ne fait pas modernité
III
DÉFINITION DE LA MODERNITÉ
1 - Définition du principe de modernité, le front le plus avancé des progrès de l’esprit humain
2 - La genèse du mouvement de la modernité en Occident (un peu d’histoire)
3 - L’émergence de la notion de modernisme au 17ème et 18ème siècle
4 - La modernité n’est pas une qualité en soi, elle est une qualité contextuelle
5 - L’association erronée de la modernité avec ses éléments actuels, qui pourront être dépassés
6 - La marche en avant de la modernité, l’acceptation de l’avancement et du dépassement
7 - La dimension anhistorique de la modernité, son atemporalité
8 - L’universalité de la modernité
9 - La modernité comme valeur du devenir
IV
LE DÉFI DE LA MODERNITÉ, DE L’INTÉRÊT D’ALLER VERS LA MODERNITÉ
1 - Le défi de la modernité, un défi atemporel de la condition humaine
2 - Il ne suffit pas de vivre dans le temps présent pour accéder à la modernité
3 - La modernité exige un effort, elle n’est ni naturelle, ni spontanée, ni facile
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4 - La modernité implique une remise en question de soi pour s’évaluer soi-même
5 - La modernité exige une perspective historique pour comprendre l’évolution et situer le présent
6 - La modernité est aussi un combat : contre les archaïsmes actuels et notre inertie
ORA ET LABORA
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Document 1 : Voici la définition du terme “moderne” donné par l’Encyclopédie de Diderot (notons que la
notion de modernité n’y apparaît pas encore).
MODERNE, ce qui est nouveau, ou de notre temps, en opposition à ce qui est ancien.
Voyez ANCIEN.
Médailles modernes sont celles qui ont été frappées depuis moins de trois cent ans.
Voyez MÉDAILLES.
MODERNES, Naudé appelle modernes parmi les auteurs latins, tous ceux qui ont écrit
après Boèce. On a beaucoup disputé de la prééminence des anciens sur les modernes ;
& quoique ceux-ci ayent eu de nombreux partisans, les premiers n'ont pas manqué
d'illustres défenseurs.
Moderne se dit encore en matière de goût, non par opposition absolue à ce qui est
ancien, mais à ce qui était de mauvais goût : ainsi l'on dit l'architecture moderne, par
opposition à l'architecture gothique, quoique l'architecture moderne ne soit belle,
qu'autant qu'elle approche du goût de l'antique. Voyez ANTIQUE.
MODERNE, adj. (Matth.) se dit des différentes parties des Mathématiques & de la
Physique, en comparant leur état & leur accroissement actuel, avec l'état où les anciens
nous les ont transmises. L'Astronomie moderne a commencé à Copernic ; la Géométrie
moderne est la Géométrie des infiniment petits ; la Physique moderne était celle de
Descartes dans le siecle dernier, & dans ce siecle-ci c'est celle de Newton. Voyez
ASTRONOMIE, GEOMETRIE, NEWTONIANISME & CARTESIANISME.
Document 2 : Exemple de pensées actuelles dans nos sociétés, mais pas forcément modernes.
Il faut également se garder d'imaginer que le simple fait d'être dans une société
scientifique et technique «avancée» ait pour implication une élimination rapide de la
pensée irrationnelle. Au contraire, si nous n'y prenons garde, le danger existe que la
science elle-même soit pénétrée par des modes de pensée non rationnels et pénétrée
d'autant plus fort et plus profondément que la technique prend une ampleur de plus en
plus nécessaire. La science moderne, par sa complexité, semble être devenue quasiment
incompréhensible ; ses résultats, tels qu'ils sont présentés, sont aussi crédibles ou aussi
inintelligibles que les effets de la magie...
Henri Broch
Le paranormal, 1989
Document 3 : Être moderne, dans certaines disciplines, exige un effort considérable.
Courage, nobles sociologues
Penser est lent, écrire est long. Or la société change vite. C'est donc une preuve de
qualité de la part d'un sociologue si ses livres ne sont pas en phase avec le dernier état
de la société : il prend le temps de réfléchir sans se laisser obnubiler par ce dont - à tort
ou à raison - on est en train de parler. Ainsi, il arrive toujours trop tard. Les théories qu'il
publie à l'époque E et censées l'expliquer sont, en fait, périmées dès leur venue au jour.
Elles sont adaptées à l'époque E-1, disons, mais pas à l'époque E.
Les jeunes, à l'époque E, sont formés par les théories de cette époque, celles, donc, qui
rendent compte de l'époque E-1. Lorsque leur tour viendra d'analyser leur époque appelons-la E+1 - il leur faudra se convaincre que les théories qu'ils ont apprises sont
dépassées, ils devront les désapprendre (ce qui n'est pas facile), puis en forger d'autres.
Bref, les théories publiées à l'époque E éclairent une époque révolue, E-1, sont inutiles
pour comprendre E et gêneront ceux qui voudront comprendre E+1 ! J’espère n'avoir
découragé personne.
Didier Nortdon
Bloc-notes, Pour la science N°329 mars 2005
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Document 4 : Le devoir du philosophe n’est-il pas d’être à la pointe de la modernité pour mieux éclairer le
présent et anticiper le devenir de nos sociétés.
Il me semble de plus en plus que le philosophe, étant nécessairement l'homme de
demain ou d'après-demain, s'est de tout temps trouvé en contradiction avec le présent ; il
a toujours eu pour ennemi l'idéal du jour. Tous ces extraordinaires pionniers de l'humanité
qu'on appelle des philosophes et qui eux-mêmes ont rarement cru être les amis de la
sagesse mais plutôt des fous déplaisants et de dangereuses énigmes, se sont toujours
assignés une tâche dure, involontaire, inéluctable, mais dont ils ont fini par découvrir la
grandeur, celle d'être la mauvaise conscience de leur temps.
Nietzsche (1844-1900)
Par-delà le bien et le mal
Document 5 : De nombreux éléments de notre modernité remontent à la grâce antique, un bel exemple qui
montre que la modernité peut être fort ancienne.
On peut se demander s'il vaut la peine aujourd'hui, pour un homme cultivé, de se
renseigner sur l'histoire politique d'un petit peuple dont le développement économique
était si différent du nôtre, qui n'a jamais connu une forme politique stable, et dont la vie
n'a été qu'un long conflit entre cités jalouses et États éphémères. Et sans doute y a-t-il
quelque chose de décevant à voir les Grecs s'approcher tant de fois d'une organisation
qui leur aurait permis de constituer un vaste et solide État, sans pouvoir jamais la réaliser
d'une manière durable. Mais d'abord il n'est peut-être pas sans profit de constater ces
tentatives, de rechercher la cause de ces échecs, de se dire qu'il n'a peut-être manqué à
Athènes au Ve siècle qu'un plus grand souci de l'instruction publique et une application
sincère du principe de la représentation des cités alliées, à la Ligue achéenne qu'une
meilleure législation militaire et un peu plus d'esprit civique, pour que les destinées du
monde grec eussent été changées. Mais surtout on est frappé de voir se manifester dans
l'histoire de la Grèce des formes et des tendances politiques qui nous sont familières : à
l'intérieur des États, royauté, aristocratie de naissance ou d'argent, démocraties
diversement nuancées ; dans les rapports des États entre eux, un nationalisme
passionné ; un impérialisme vigoureux et maladroit ; le rêve réalisé pendant quelques
années, de la conquête et de l'organisation du monde ; un fédéralisme qui, s'il avait su se
développer, aurait peut-être assuré le salut de la Grèce ; enfin l'esprit de cosmopolitisme
et de fraternité humaine. Ces tendances et ces formes, il n'est pas indifférent de les voir
s'affronter chez un peuple qui, intellectuellement, était très près de nous, et chez qui elles
se sont exprimées avec une netteté singulière et dans un raccourci saisissant car nous
les retrouvons dans notre Europe contemporaine, et de l'issue de leur conflit dépend
sans doute l'avenir de notre civilisation.
Jean Hatzfeld
Histoire de la Grèce ancienne, 1947
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POUR APPROFONDIR CE SUJET, NOUS VOUS CONSEILLONS
- Les cours et conférences sans nom d’auteurs sont d’Éric Lowen -
Revue de philosophie “ALDÉRAN”
N°27 - Le plus vaste horizon du monde, par William Ruthenford
N°28 - Le réenchantement du monde, par William Ruthenford
N°29 - La seconde mort de dieu, par William Ruthenford
Conférences sur la modernité des connaissances
- Les grandes révolutions scientifiques
- La révolution scientifique, l’invention de la Science et des sciences
- La révolution euclidienne, la découverte de la nature mathématique du monde
- La révolution hérodotienne, l’invention de l’Histoire
- La révolution astronomique, la découverte de la nature ordonnée du cosmos
- Les grandes découvertes maritimes, révolutions géographiques et humaines
- La révolution copernicienne, le début du décentrage du monde
- La révolution galiléenne, l’explosion des limites du cosmos
- La révolution newtonienne, la découverte des forces naturelles
- La révolution naturaliste : Linné, Buffon, Cuvier et les autres
- La révolution chimique, la découverte de la puissance interne de la matière
- La révolution biologique, le début de l’exploration des mécanismes de la vie
- La révolution de la thermodynamique, le début de la physique de l’énergie
- La révolution électromagnétique, la découverte des pouvoirs de l’électricité et du magnétisme
- La révolution géologique, la découverte de l’extraordinaire ancienneté de la terre
- La révolution préhistorique, la découverte d'une humanité avant l'humanité
- La révolution darwinienne, la découverte des origines animales de l'humanité
- La révolution archéologique, la découverte de l’immensité du passé culturel de l’humanité
- La révolution sociologique, l’invention des sciences sociales
- La révolution psychologique, la découverte du psychisme humain et de son origine immanente
- La révolution freudienne, la découverte de l’inconscient et de l’origine contingente du sujet
- La révolution atomiste, la découverte de la puissance intérieure de la matière
- La révolution einsteinienne, la naissance de la cosmologie moderne
- La révolution quantique, les surprises de la physique quantique
- La révolution ethnologique
- La révolution cosmologique, la découverte du big bang et des premiers instants de l’univers
- La révolution génétique, l’accès aux mécanismes intimes de la vie
- La révolution des neurosciences, l’exploration de la matière pensante, le cerveau humain
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Conférences sur la fabrication du réel
- La fabrication du monde, voyage au cœur de l’évolution créatrice
- Le Big bang et les premiers instants de l’univers
- La création du système solaire, notre archipel cosmique
- La naissance de la terre, notre oasis spatial dans l’immensité infini de l’espace
- L’apparition de la vie sur la Terre
- L’histoire de la vie sur notre planète, de la biogenèse à aujourd’hui
- Les origines préhistoriques de l’Être Humain, l’anthropogénèse évolutionniste de l’homme
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Conférences sur l’histoire de la philosophie
- La révolution athénienne, l’invention de la Démocratie
- Démocrite et l’Atomisme
- Montaigne et l’Humanisme de la Renaissance
- Descartes et la méthode, par Mickaël Dubost
- Condillac et la sensation, par Mickaël Dubost
- Popper et la connaissance, par Mickaël Dubost
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Conférences sur des notions présentées dans cette conférence
- La genèse de la culture, l’origine naturelle des cultures
- La condition humaine
- L’être humain, un être en devenir
- L’universalité de la nature humaine et l’unicité de l’individu
- La condition humaine, du déterminisme vers la liberté
- Le perspectivisme, introduction à la pensée perspectiviste
- Manichéisme et complexité, introduction à la pensée complexe
- Éloge de la raison
- L’obscurantisme, les idéologies de l’ignorance
- Croyance, superstition et obscurantisme
- L’obsolescence de dieu
- Les droits humains, fondements et universalité
- La citoyenneté du monde
- Démocratie et humanisme
- Démocratie et laïcité
- L’invention de l’Humanité
- La conscience de l’Humanité
- Le devenir de l’Humanité
- Réhabiliter le Progrès
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Quelques livres sur le sujet
- Les antimodernes, de Joseph de Maistre à Roland Barthe, Antoine Compagnon, NRF Gallimard, 2005
- Athéisme et religion, Éthique et modernité, Alain Gérard, Ères, 1999
- L'utopie archaïque - José Maria Arguedas et les fictions de l'indigénisme, Mario Vargas Llosa et Albert
Bensoussan, Gallimard, 1999
- L'actualité d'un archaïsme, la pensée d'extrême droite et la crise de la modernité, Alain Bihr, Éditions
Page 2, 1998
- De la modernité au modernisme, Henri Lefèbvre, Arche, 1998
- Cinq paradoxes de la modernité, Antoine Compagnon, Seuil, 1990
- Les modernes, Jean-Paul Aron (1984), Gallimard, 1986
- Les désillusions du progrès. Essai sur la dialectique de la modernité, Raymond Aron, 1969
- La tradition du nouveau, H. Rosenberg (1960), 1962
- L’esprit du temps, Edgar Morin, Seuil, 1952
- Les immémoriaux, Victor Ségalen (1907), Seuil, 1985
Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-171 : “Qu’est-ce que la modernité ?“ - 15/06/2005 - page 9