Modernité éternelle L'an dernier, les écrivains rassemblés à Bled se sont intéressés à l'accueil de nos écrits maintenant conditionné par les moyens mondiaux d'accès à la littérature et les nouvelles technologies de lecture. Les rencontres de cette année se proposent d'élargir le débat au domaine de nos propres activités et de s'interroger sur l'avenir de l'écriture dans le monde futur. - - - - - Le concept d'État national comme concept paradigmatique de la civilisation occidentale est en décomposition, par suite, sa désintégration mine le concept occidental de culture, plus particulièrement d'art. Il devrait être remplacé par une pensée contemporaine rationnelle qui voit dans la composante esthétique de la compréhension du monde une entrave communicationnelle à l'efficacité immédiate du message. En même temps avec ces processus globaux qui en découlent, nous sommes toujours plus confrontés à la réaction qui dans la lutte pour la suprématie sur ce qui vient d'être cité impose le principe de l'irrationnel et du local dans ces cultures dominantes qui voient dans la mondialisation une opportunité technologique mais rejettent la pensée qui se trouve derrière elles. Les processus décrits conduisent à une fracture de civilisation et à une crise des langues nationales qui, dans ce processus, deviennent non fonctionnelles et qui, selon ce mode de pensée, représentent un obstacle au changement rapide de la réalité autour de nous. À la fin du siècle précédent, le concept classique de l'art comme chemin vers la vérité qui rivalise avec la science, la philosophie, les religions, etc. s'est embourbé dans le solipsisme dans lequel la production artistique de plus en plus massive perd son sens d'élément décisif quant à l'avenir du monde. Ce qui met en question un des concepts clefs du modèle artistique dominant au siècle précédent, condition de modernité comme paradigme culturel fondé sur la notion de progrès. Quel est l'avenir de l'écriture en ce temps de rupture ? Dans la mesure où deux concepts de réalité qui s'excluent se trouvent face à face, une création moderne peut-elle être conditionnée par un système unique de valeurs et de quelle manière ? Et d'un autre côté le "pluralisme des valeurs" moderne ne conduit-il pas au relativisme nous ramenant ainsi au solipsisme du post-modernisme ? Est-il possible d'atteindre la notion de progrès dans le sens de quelque chose qui n'est pas fondé sur le passé mais qui apparaît comme l'avenir, avec une possible " éternelle modernité" des oeuvres qui surgissent maintenant et qui surgiront plus tard ?