ENZYMOLOGIE GENERALE PACES 2010-2011 Professeur Brigitte LEININGER-MULLER Faculté de Pharmacie Faculté de Médecine 5, rue A. Lebrun INSERM U954 54000 NANCY Bâtiment C, 2ème étage INTRODUCTION 1. NOTIONS GÉNÉRALES 1.1. Catalyse enzymatique 1.2. Définitions 1.3. Localisation et variations physiopathologiques 1.4. Isoenzymes 1.5. Proenzymes ou zymogènes 1.6. Enzymes inductibles 2. STRUCTURE ET SPÉCIFICITÉ DES ENZYMES 2.1. Apoenzyme et coenzyme 2.2. Nécessités auxquelles doit répondre la structure des enzymes 2.3. Site actif 2.3.1. Définition – nature - fonctionnement 2.3.2. Conformation du site actif 2.4. Spécificité des réactions enzymatiques 3. CINÉTIQUE ENZYMATIQUE 3.1. Notions de cinétique des réactions 3.1.1. Vitesse de réaction – Vitesse instantanée 3.1.2. Différentes phases de la réaction enzymatique 3.2. Principe de la mesure des vitesses des réactions enzymatiques – Unités 3.3. Cinétique michaelienne 3.3.1. Variation de la vitesse en fonction du temps 3.3.2. Variation de la vitesse en fonction de la quantité d’enzyme 3.3.3. Effet de la concentration de substrat - Vitesse initiale 3.3.4. Equation de Michaelis et Menten - Hyperbole de Michaelis-Menten 3.3.5. Détermination de Km - Représentation de Lineweaver et Burk - Représentation de Eadie - Hofstee 3.4. Effecteurs chimiques de la réaction enzymatique 3.4.1. Activateurs 3.4.2. Inhibiteurs 3.4.2.1. Inhibiteurs compétitifs 3.4.2.2. Inhibiteurs non compétitifs 3.4.2.3. Inhibiteurs incompétitifs 3.4.3. Effecteurs allostériques 4. CLASSIFICATION DES ENZYMES. INTÉRÊT EN BIOLOGIE 4.1. Nomenclature 4.2. Oxydo-réductases 4.3. Transférases 4.4. Hydrolases 4.5. Lyases 4.6. Isomérases 4.7. Ligases Un catalyseur agit à des concentrations très faibles en comparaison avec les quantités des composés en réaction spécifique d’une réaction donnée, c’est à dire qu’il n’active que cette réaction se retrouve à la fin de la réaction tel qu’il était avant la réaction composé qui n’accélère que les réactions thermodynamiquement possibles, i.e : celles qui se traduisent par une diminution d’enthalpie libre. Le catalyseur diminue l’énergie d’activation nécessaire à la réaction. VARIATION D’ENERGIE AU COURS D’UNE REACTION AVEC ET SANS CATALYSE Niveau d’énergie E S…P - enzyme Sans catalyse SEP + enzyme S..E..P Avec catalyse S+P E2 <<< E1 Etat initial SP Etat final temps DEFINITIONS ENZYME : Protéine présentant des propriétés de catalyse spécifiques d’une réaction chimique du métabolisme de l’être vivant qui la produit SUBSTRAT : Molécule qui entre dans une réaction pour y être transformée grâce à l’action catalytique d’une enzyme PRODUIT : Molécule qui apparaît au cours d’une réaction catalysée par une enzyme LIGAND : Corps chimique ayant une liaison spécifique avec une protéine COFACTEUR : Corps chimique intervenant obligatoirement dans une réaction enzymatique - pour transporter ou compléter un substrat - pour accepter un produit - comme participant à la structure de l’enzyme COENZYME : Molécule biologique intervenant comme cofacteur indispensable dans la catalyse enzymatique d’une réaction Les coenzymes libres interviennent de manière stoechiométrique Les coenzymes liés interviennent dans la réaction de manière catalytique Le site actif d’une enzyme comporte 2 sites voisins : - le site de fixation du S. (ou site de reconnaissance) - le site responsable de la réaction chimique catalysée : = site catalytique SCHEMA DU SITE ACTIF DE LA CHOLINESTERASE MODELISATION DE LA REACTION ENZYME / SUBSTRAT : 2 hypothèses Serrure / clé : Modèle de Fisher Site actif Ajustement induit : Modèle de Koshland SCHEMA GENERAL D’UNE REACTION ENZYMATIQUE Enzyme Substrat + Produit Energie Coenzymes Ions - EVOLUTION DES CONCENTRATIONS DE S (substrat) ET DE P (produit) au cours de la REACTION ENZYMATIQUE, en fonction du TEMPS [S] ou [P] V= = temps DIFERENTES PHASES DE LA REACTION ENZYMATIQUE [Produit] temps [ES] [S] >>>[P] [EP] UNITES UTILISEES EN ENZYMOLOGIE Unité internationale (UI) : quantité d'enzyme qui transforme une micromole de substrat en 1 minute. Katal (unité du système international) (kat) : quantité d'enzyme qui transforme une mole de substrat en 1 seconde. Ceci correspond à des quantités énormes d'enzyme → utilisation de sous-multiples : µkat ou nkat 1 UI = 16,66 nkat EFFET DE LA QUANTITE D’ENZYME E3 [P3] [P2] [P1] E2 E1 EFFET DE LA CONCENTRATION EN SUBSTRAT S10 [P] S4 mmol/l S2 [P10] S1 [P4] [P2] [S10] >> [S4] >> [S2] >> [S1] [P1] t temps Vitesses initiales en fonction des concentrations en substrat : Hyperbole Vi mmol/min Constante de Michaelis : [S] mmol/l CINETIQUE MICHAELIENNE k1 E+S k3 ES k2 E = [enzyme] S = [substrat] P = [produit] E+P (1) k4 ES = [complexe enzyme-substrat] EP = [complexe enzyme-produit] ET = [enzyme totale] = [E] + [ES] Début de la réaction : [P] ≈ 0 ⇒ [EP] <<<< [ES] et k1 E+S réaction ES k3 ES k2 ES k2 négligeable E+P k4 k1 E+S E+P k3 E+P (1‘) CINETIQUE MICHAELIENNE Pendant la phase stationnaire (état d’équilibre) : V = k3 [ES] (2) Vitesse de FORMATION de ES [ES] = k1 [E][S] (3) Vitesse de DISPARITION de ES [ES] = k2 [ES] + k3 [ES] (4) donc k1 [E] [S] Par réarrangement, on obtient = (k2 + k3) [ES] [ES] = [E][S] k2 + k 3 (6) k1 On définit : CONSTANTE DE MICHAELIS (5) Km k2 + k3 = k1 (7) En remplaçant k2+k3/k1 par sa valeur dans l’équation (6), on obtient : [E][S] [ES] = Km (8) CINETIQUE MICHAELIENNE [S] ≈ [S] totale, si [E] <<< [S] et [ES] = [E] = [ET] – [ES] ([ET] – [ES])[S] (9) (10) Km Par réarrangement de cette équation, on obtient : [ES] [S] = [ET] [S] + Km En remplaçant ES par cette valeur dans l’équation (2), V = k3 [ES] (11) on obtient : [S] V = k3 [ET] [S] + Km (12) La vitesse maximale Vm est atteinte lorsque tous les sites enzymatiques sont saturés en substrat, c'est-à-dire lorsque [S] >>> Km et donc [S] [S] + Km Il s’ensuit que tend vers 1 Vm = k3 [ET] (13) En remplaçant Vm par sa valeur dans l’équation (12), on obtient l’EQUATION DE MICHAELIS-MENTEN EQUATION DE MICHAELIS-MENTEN V = Vm [S] ------------[S] + Km Cette équation décrit une courbe hyperbolique Pour des concentrations faibles en substrat, lorsque [S] <<< Km V = [S] Vm Km La vitesse est alors DIRECTEMENT PROPORTIONNELLE à la concentration en substrat Pour des concentrations élevées en substrat, lorsque [S] >>> Km, V = Vmax. La vitesse est alors INDEPENDANTE de la concentration en substrat VITESSE DE LA REACTION en fonction de la CONCENTRATION EN SUBSTRAT (cinétique michaelienne) DETERMINATION DE Km • Méthode de Lineweaver-Burk L’inverse de l’équation de Michaelis-Menten conduit à la formule suivante : 1 V = Km + [S] Vm [S] On peut écrire cette équation sous la forme : 1 V = Km Vm [S] [S] + Vm [S] Cette équation peut se simplifier et s’écrire 1 V = Km Vm 1 X [S] + On voit que si Km = [S] 1 qui correspond à l’équation d’une droite Vm V = Vm X 1 1+1 Soit V = Vm 2 y = ax + b DETERMINATION DE Km • Méthode de Lineweaver-Burk L’équation 1 V = Km Vm X 1 [S] + 1 Vm peut s’illustrer de la façon suivante : DETERMINATION DE Km • Méthode de Eadie-Hofstee V ([S] + Km) = Vm [S] soit V[S] + VKm = Vm [S] V[S] [S] VKm + [S] VKm = Vm ⇒ V = Vm - [S] V = Vm - Km [S] INHIBITION IRREVERSIBLE : EXEMPLE DE L’ASPIRINE Aspirine inhibition irréversible des COX en acétylant une sérine du SA INHIBITION COMPETITIVE compétition entre le substrat et l'inhibiteur pour se lier à l'enzyme. k ki INHIBITION COMPETITIVE : EQUATIONS INHIBITION COMPETITIVE : REPRESENTATION CINETIQUE [I]1 [I]2 [I]2 = 2 [I]1 [I]1 [I]2 Vm ne varie pas INHIBITION COMPETITIVE : EQUATIONS INVERSES INHIBITION COMPETITIVE : REPRESENTATION SELON LINEWEAVER-BURK [I]2 [I]1 [I]0 [I]1 [I]2 CO N CO Hypoxanthine HN CH HN CH HC N HC N NH N NH Allopurinol CO N HN CH OC NH CO Xanthine oxydase NH NH HN CO OC NH Xanthine NH Acide urique INHIBITION COMPETITIVE : Exemple de l’inhibition de la xanthine oxydase par l’ALLOPURINOL, utilisé dans le traitement de la GOUTTE Autre exemple : Ethanol et intoxication par « l’alcool à brûler » = composé ménager : éthanol + méthanol (5%) Méthanol : forte toxicité : métabolisé par l’alcool deshydrogénase en formaldéhyde, très toxique pour les tissus (cristallin risque de cécité) : CH3-OH HCHO Perfusion d’une solution diluée d’éthanol inhibiteur compétitif de plus, l’alcool deshydrogénase oxyde l’éthanol en acétaldéhyde : CH3-CH2-OH CH3-CHO INHIBITION NON COMPETITIVE Liaison sur ES Liaison sur l'enzyme libre INHIBITION NON COMPETITIVE : EQUATIONS INHIBITION NON COMPETITIVE Equation de Michaelis-Menten Représentation cinétique [I]0 [I]2 = [I]1 [I]1 [I]2 [I]2 2 [I]1 INHIBITION NON COMPETITIVE Equation inverse Représentation selon Lineweaver-Burk [I] 2 [I] 2 [I] 1 [I] [I] 1 0 INHIBITION NON COMPETITIVE : Exemple de l’inhibition de l’ANHYDRASE CARBONIQUE par l’ACETAZOLAMIDE, utilisé comme diurétique Anhydrase carbonique Gaz carbonique Carbonate acide Acétazolamide INHIBITION INCOMPETITIVE : EQUATIONS E+S ES E+P ESI [ES] [I] Ki = ---------- [Et] = [E] + [ES] + [EI] [ESI] Vm [S] [I] 1+ V= Ki [I] [S]+ Km (1 + Ki ) INHIBITION INCOMPETITIVE : REPRESENTATION CINETIQUE [I] 2 = 2[I]1 [I] 0 [I] 1 [I] 2 [I] 1 [I] 2 [I] 2 [I] 1 [I] 0 INHIBITION INCOMPETITIVE ENZYMES ALLOSTERIQUES : MODELISATION Modèle concerté : Monod +S T T +S SS R R S S R R S SS R R S S Modèle séquentiel : Koshland T T +S S R T +S CINETIQUE D’UNE ENZYME ALLOSTERIQUE V m V m 2 (cinétique michaélienne) NOMENCLATURE DES ENZYMES EC. 2 . 7 . 3 . Enzyme commission Classe : Transférases Sous-Classe : Phosphotransférases : Transférases qui transfèrent un groupement contenant du Phosphore Sous-sous-classe : Phosphotransférases qui possèdent un groupement Azote comme accepteur Numéro d'ordre dans la sous-sous-classe 2 CLASSES D'ENZYMES 1. Oxydoréductases : transfert d’électrons 2. Transférases : transfert de groupements de différentes natures 3. Hydrolases : réactions d’hydrolyse (transfert de groupements fonctionnels sur l’eau) 4. Lyases : addition de groupements à des atomes engagés dans des doubles liaisons ou formation de doubles liaisons par élimination de groupements 5. Isomérases : échanges (de position, de groupement ou de fonction) entre différentes molécules pour conduire à des isomères 6. Ligases : condensation de deux molécules OXYDO-REDUCTASES Exemple de la 3phosphoglycéraldéhyde déshydrogénase Réaction catalysée (in vivo) Exemple de la lactate déshydrogénase L-Lactate + NAD+ Pyruvate + NADH-H+ Réaction utilisée pour mesure d'activité (in vitro) Pyruvate + NADH-H+ Lactate + NAD+ LES TRANSFERASES : AMINO- et PHOSPHO-TRANSFERASES (kinases) EXEMPLE DE FONCTIONNEMENT D’UNE ENZYME A PHOSPHATE DE PYRIDOXAL réactions d'échange d'un groupement aminé –NH2 contre un groupement cétone –CO entre un acide aminé et un acide α cétonique. Alanine aminotransférase (ALAT) Transaminase glutamique pyruvique (TGP) NH3+ NH3+ alanine ac. aminé 2-oxoglutarate ac. α cétonique pyruvate glutamate LES TRANSFERASES : ACETYL- et ACYL-TRANSFERASES LES TRANSFERASES : CARBOXYLASES LES TRANSFERASES : METHYL- et MEYHYLENE et METHENYL-TRANSFERASES HYDROLASES C – Z + H2O C – OH + Z – H H OH H OH + α-amylase (Hydrolyses de liaisons internes α-1, 4 de l’amidon) ou 1,4-α-D-glucanne glucanohydrolase LYASES Fumarate hydratase ISOMERASES Triose phosphate isomérase LIGASES ou SYHTHETASES Utilisent directement l’énergie de l’ATP pour condenser 2 composés Glutamine synthétase O – acide glutamique H2N – C – CH2 – CH2 – CH + NH2 COOH NH2 – – OH – C – CH2 – CH2 – CH – = NH2 = O ATP + H2O COOH glutamine