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Au cours des dix dernières années, il a été démontré que le RM est également
exprimé dans des cellules non épithéliales comme les cardiomyocytes ou les cel-
lules endothéliales et musculaires lisses des vaisseaux. L’expression du RM dans
les cardiomyocytes a ainsi été montrée chez le lapin, le rat, la souris ou l’homme
[3, 4, 5]. L’existence d’un système paracrine a été proposé : la voie de synthèse
de l’aldostérone (CYP11B2) a été mise en évidence dans le cœur et la synthèse
locale d’aldostérone a été rapportée [6], en particulier chez l’homme, en cas
d’insuffisance cardiaque [7].
Le rôle physiopathologique du RM et de l’aldostérone dans ces cibles non clas-
siques reste à déterminer [8]. De nombreuses données suggèrent que l’aldostérone
agit comme un médiateur dans certaines pathologies dégénératives comme l’insuf-
fisance rénale chronique ou le remodelage artériel ou myocardique, indépendam-
ment ou en synergie des effets connus de l’angiotensine II [8, 9]. La vasculopathie
liée à l’aldostérone pourrait être une phase clé de plusieurs pathologies cardio-
vasculaires, spécialement dans l’insuffisance cardiaque où on peut observer une
hyperaldostéronémie plus ou moins importante. Les effets vasculaires de l’aldo-
stérone pourraient ainsi directement participer à l’hypertension artérielle [10] et
au remodelage myocardique secondaire aux altérations des vaisseaux coronariens
[11, 12, 13]. Dans le modèle animal du rat aldostérone-sel et chez l’homme, le
facteur déclenchant de la cardiopathie pourrait être une vasculopathie induite par
l’aldostérone, via l’activation du RM. Les antagonistes du RM atténuent également
le remodelage artériel associé à diverses vasculopathies (athérosclérose, diabète)
[14, 15].
ALDOSTÉRONE/MINÉRALOCORTICOÏDES :
UNE NOTION ÉMERGENTE DES PATHOLOGIES
DÉGÉNÉRATIVES CHEZ L’HOMME
L’implication clinique du rôle physiopathologique du couple aldostérone/RM
dans les pathologies dégénératives a été étudiée dans plusieurs essais cliniques
chez l’homme. L’étude RALES a clairement démontré que la spironolactone, un
inhibiteur du RM, chez des patients en insuffisance cardiaque sévère, en complé-
ment d’un traitement classique utilisant les inhibiteurs de l’enzyme de conversion
de l’angiotensinogène diminue le risque de mortalité de 30 p. 100 [16]. Récem-
ment, l’essai EPHESUS utilisant un antagoniste plus spécifique, l’éplérenone, a
également montré un effet bénéfique dans des cardiopathies ischémiques [17].
Les effets dans RALES et EPHESUS sont dus pour moitié à une diminution des
morts subites [16, 17]. Jusqu’à présent, les mécanismes et cibles cellulaires impli-
qués dans ces effets n’ont pas clairement été identifiés. Il faut noter que l’activa-
tion du RM chez l’homme a des conséquences électrophysiologiques majeures.
La fludrocortisone, minéralocorticoïde synthétique, exacerbe [18, 19, 20] les
paramètres électrophysiologiques cliniques de risque d’arythmie tel que la dis-
persion de l’interval QT, alors que la spironolactone les améliore. La spironolac-
tone augmente la variabilité du rythme sinusal et diminue les extrasystoles
ventriculaires et les épisodes de tachycardie ventriculaire des patients en insuffi-
sance cardiaque, au repos ou à l’effort [21]. Des données expérimentales obtenues
sur des cardiomyocytes en culture primaire indiquent que l’aldostérone par elle-