LEÇON N˚ 63 :
Fonction réciproque d’une fonction
strictement monotone sur un intervalle de
R. Étude de la continuité, de la dérivabilité.
Exemples.
Pré-requis :
Applications injectives, surjectives, bijectives;
Définitions et propriétés : fonctions monotones, convexes, concaves;
Notions de continuité, de dérivabilité et de limite;
Théorème des valeurs intermédiaires.
Soit f:IRune fonction continue et strictement monotone définie sur un intervalle IR.
63.1 Fonctions réciproques
Définition 1 : Soient E, F R. Une application g:EFest dite inversible s’il existe une
application h:FEtelle que
hg= IdEet gh= IdF.
On dit alors que hest la fonction réciproque de get on note h=g1.
Remarque 1 :
Il faut absolument avoir les deux conditions!!
En effet, dans l’exemple ci-contre, on voit bien que
hg= IdE,
mais on a aussi clairement que
gh6= IdF.×
×
×
×
×
×
×
×
×
×
×
×
×
×
ghg
hggh
E F E F
Proposition 1 : Soient E, F Ret g:EF.gadmet au plus une fonction réciproque.
2Fonction réciproque; continuité, dérivabilité
démonstration :Soient h1et h2telles que h1g=h2g= IdEet gh1=gh2= IdF. Alors
on a h2(gh1) = h2IdF=h2. D’autre part, par associativité, on trouve que h2(gh1) =
(h2g)h1= IdEh1=h1. D’où h1=h2.
Remarques 2 :
Cela justifie la notation g1.
Si gest inversible, alors g1l’est aussi et (g1)1=g(conséquence de la définition).
Proposition 2 : Soient E, F Ret g:EF. Alors gest inversible si et seulement si gest
bijective.
démonstration :
"" : Supposons ginversible. Alors pour tous x, xE, on a g(x) = g(x)g1g(x)=
g1g(x)x=xd’où l’injectivité de g. Soit alors yF. Il s’agit de trouver xEtel que
g(x) = y. Or x=g1(y)convient, d’où la surjectivité de g, et gest finalement bijective.
"" : Supposons gbijective et notons g:x7−y. On pose h:FE:y7−xet l’on vérifie que
hest aussi bijective, que hg= IdEet que gh= IdF. On conclut que gest inversible.
Remarques 3 :
On vient juste de montrer que si gest inversible, alors g1est aussi une bijection, de Fdans E.
Dans un repère normé (dont les vecteurs unitaires sont de même norme), les courbes représentatives de get g1
sont symétriques par rapport à la droite d’équation y=x.
63.2 Inversibilité de f
Proposition 3 : fest injective si et seulement si fest strictement monotone.
démonstration :
"" : Supposons par exemple fstrictement croissante (l’autre cas se démontrant de manière totale-
ment analogue). Soient x, xI. Alors
f(x) = f(x)f(x)6f(x)
f(x)>f(x)x6x
x>xx=x.
Donc fest injective.
"" : Montrons ce résultat par contraposée et supposons donc fnon monotone. Alors il existe
x1, x2, x3, x4Itels que x1< x2f(x1)>f(x2)et x3< x4f(x3)6f(x4). On
pose alors
g(t) = ftx1+ (1 t)x3ftx2+ (1 t)x4.
gest continue sur [0,1] (puisque fl’est par hypothèse sur I) et l’on a g(0) 60et g(1) >0. Le
théorème des valeurs intermédiaires nous permet alors d’en déduire qu’il existe t0[0,1] tel que
g(t0) = 0. En posant finalement x5=t0x1+ (1 t0)x3et x6=t0x2+ (1 t0)x4, on a x5< x6
et f(x5) = f(x6), c’est-à-dire fn’est pas injective.
Fonction réciproque; continuité, dérivabilité 3
Remarques 4 :N’oublions pas que toutes ces propriétés sont vraies sous l’hypothèse générale que fest continue
sur un intervalle. Cela nous amène à deux subtilités :
[ ] [ ]
La fonction fdéfinie ci-dessus est injective et continue
(car continue sur chacun des deux intervalles), mais f
n’est pas monotone.
Cette fonction est inversible, mais n’est clairement pas
strictement monotone. Le problème vient de la conti-
nuité en 0.
On se gardera donc finalement de dire que les fonctions inversibles sont uniquement les fonctions strictement mono-
tones!
Conséquence : Si f:If(I)(condition vraie d’après le théorème des valeurs intermédiaires, rajoutant
la surjectivité à la proposition précédente), alors fest bijective (ou inversible selon la proposition 2) si et
seulement si fest strictement monotone.
Dans la suite de la leçon, on notera Jl’intervalle f(I), et f:If(I) = J.
63.3 Propriétés des fonctions réciproques
Notons avant tout que f:If(I), supposée être continue et strictement monotone sur l’intervalle I, est
donc inversible, d’inverse notée f1.
63.3.1 Continuité
Proposition 4 : f1est strictement monotone sur Jet est de même sens de variations que f. De plus,
f1est continue sur J.
démonstration :Avant de commencer, nous allons énoncer et démontrer un lemme qui nous sera utile :
Lemme 1 : Soit gune fonction définie sur [a, b], strictement monotone. Si g([a, b]) est un intervalle,
alors gest continue.
démonstration :Supposons gstrictement croissante. Soit c[a, b]. On veut montrer que gest
continue en c. Comme gest croissante, les limites à gauche et à droite en cde g(x)existent, valent
respectivement = sup{g(x), x < c}et L= inf{g(x), x > c}. On a donc 6g(c)6L.
Supposons alors 6=L. Alors x < c g(x)[g(a), ℓ]et x > c g(x)[L, g(b)], donc
]ℓ, L[\{g(c)} 6⊂ [g(a), g(b)] = g([a, b]). Or g([a, b]) est un intervalle, donc celle non inclusion est
impossible, d’où =L=g(c), donc
lim
xc
g(x) = g(c).
Si jamais c=aou c=b, on ne regarde que la limite à droite ou à gauche. Finalement, gest continue
en c, donc sur [a, b].2
Nous allons donc pouvoir commencer la démonstration de cette proposition. Supposons fstrictement
croissante. Soient x, xI. Alors x < xf(x)< f(x). Posons y=f(x)f(I) = Jet
4Fonction réciproque; continuité, dérivabilité
y=f(x)J. Or f1(y) = xet f1(y) = x, donc y < yf1(y)< f 1(y)et f1
est strictement croissante. Pour prouver la continuité de f1, il suffit alors d’appliquer le lemme avec
g=f1et [a, b] = f(I). En effet, fcontinue implique que f(I)est un intervalle et f1f(I)=Iest
un intervalle.
63.3.2 Dérivabilité
Proposition 5 : Si fest dérivable sur Iet fne s’annule pas sur I, alors f1est dérivable sur J, de
dérivée
(f1)=1
ff1.
démonstration :Soit x0Iet ∆ : I\{x0} −Rla fonction définie par
∆(x) = f(x)f(x0)
xx0
.
On pose y0=f(x0). Pour yJ\{y0}, on a
f1(y)f1(y0)
yy0
=f1(y)f1(y0)
ff1(y)ff1(y0)=f1(y)x0
ff1(y)f(x0)=1
f1(y).
Or fest dérivable sur Iimplique que fy est continue, et par la proposition, f1est continue sur J,
donc f1(y)
yy0
f1(y0) = x0et ∆(x)
xx0
f(x0)(6= 0 par hypothèse), donc le théorème de
composition des limites nous assure que
lim
yy0
f1(y)f1(y0)
yy0
= (f1)(y0) = (f1)f(x0)=1
f(x0)=1
ff1(y0),
ce qui démontre le résultat.
63.3.3 Autres propriétés
Proposition 6 :
Si fest impaire, alors f1est impaire;
Si fest strictement croissante et convexe (resp. concave), alors f1est concave (resp. convexe);
Si fest strictement décroissante et convexe (resp. concave), alors f1est convexe (resp. concave).
démonstration :
Pour tout xI, on a f(x) = f(x). Donc f1f(x)=f1f(x)=x. Or on a
aussi f(x) = f(x), donc f1f(x)=x=f1f(x)=f1f(x). D’où l’égalité
f1f(x)=f1f(x). En conclusion, pour tout y=f(x)f(I), on a f1(y) =
f1(y).
Conséquence immédiate de la symétrie entre Cfet Cf1par rapport à la droite d’équation y=x.
Conséquence immédiate de la symétrie entre Cfet Cf1par rapport à la droite d’équation y=x.
Fonction réciproque; continuité, dérivabilité 5
63.4 Exemples
63.4.1 Fonctions ln et exp
Soit fla fonction définie ci-dessous et sa réciproque f1:
f:R
+R
x7−ln(x).et f1:RR
+
x7−exp(x).
On a alors pour tout xR,
(f1)(x) = 1
ff1(x)=1
1
xexp(x)
=1
1
exp(x)
= exp(x).
y=x
f1
f
63.4.2 Fonction racine (nN)
Soit fla fonction définie ci-dessous et sa réciproque f1:
f:R+R+
x7−xn.et f1:R+R+
x7−x1
n=n
x.
On a alors pour tout xR,
(f1)(x) = 1
ff1(x)=1
nn
xn1=1
n xn1
n
=
n
x
n x .
y=x
f1
f
63.4.3 Fonctions trigonométriques
Soit fla fonction définie ci-dessous et sa réciproque f1:
f: [0, π][1,1]
x7−cos(x).et f1: [1,1] [0, π]
x7−arccos(x).
On a alors pour tout xR,
(f1)(x) = 1
ff1(x)=1
sin arccos(x)=1
1x2.
y=x
f1
f
Remarque :Pour tout x[1,1],sin(arccos x)2+x2= 1 sin(arccos x) = ±1x2. Or sin(arccos 0) =
sin 0 = 1, donc
sin(arccos x) = p1x2.
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