LA CHIRURGIE DES TUMEURS EPITHELIALES
MALIGNES DE L'OVAIRE
P. MORICE, CHEF DE SERVICE
C. UZAN, ASSISTANT
S. GOUY, ASSISTANT
SERVICE DE CHIRURGIE GYNECOLOGIQUE
Institut Gustave Roussy. Villejuif
Correspondance et tirés-à-part : Pr Philippe MORICE.
Service de Chirurgie Gynécologique
Institut Gustave Roussy
35 rue Camille Desmoulins. 94805. Villejuif
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Résumé: Les tumeurs epithéliales malignes invasives de l'ovaire sont des
tumeurs de mauvais pronostic. La chirurgie est le temps essentiel du bilan
d'extension et du traitement de ces tumeurs. Quel que soit le stade, elle doit
comporter au minimum une cytologie péritonéale, une hystérectomie avec
annexectomie bilatérale, une omentectomie, une lymphadénectomie
pelvienne et lombo-aortique, une appendicectomie et des prélèvements
péritonéaux multiples. Dans les stades I, chez les femmes jeunes désireuses
d'une grossesse, on peut proposer une conservation de l'utérus et de l'ovaire
controlatéral. Dans les stades II et III, la stratégie thérapeutique, associe une
chirurgie première et une chimiothérapie systématique. Dans les stades
avancés la chirurgie radicale, comportant l'exérèse de l’ensemble des
nodules de carcinose visible avec, si nécessaire, des résections digestives
est dans ces cas indispensable, la taille du reliquat tumoral en fin
d'intervention étant le facteur pronostique le plus important.
Les tumeurs de l'ovaire à la limite de la malignité sont de bon
pronostic quel qu'en soit leur stade. La chirurgie peut très souvent être
conservatrice, en particulier chez la femme jeune.
Mots clés : cancer épithéliaux de l’ovaire, chirurgie d’exerèse tumorale,
reliquat tumoral, lymphadénectomie lombo-aortique, chirurgie conservatrice.
Abstract : Surgery is the essential element of staging and treatment of
epithelial invasive malignant ovarian tumors. Regardless of the stage, it must
include peritoneal cytology, hysterectomy with bilateral adnexectomy,
omentectomy, pelvic and para-aortic lymphadenectomy, appendicectomy
and multiple peritoneal biopsies. In young women desiring a subsequent
pregnancy with stage I tumor, preservation of the uterus and contralateral
ovary can be proposed. In stages II and III tumor, the therapeutic strategy
consists of primary surgery and systematic chemotherapy. In advanced stage
tumors, radical surgery, including resection of peritoneal carcinomatosis with,
if necessary bowel resections is essential, as the size of the residual tumor at
the end of the surgery constitutes the most important prognostic factor.
The prognosis of borderline ovarian tumor is good whatever the stage
of the disease. So consevative surgery could be performed, particularly in
young patients.
Key words : epithelial ovarian cancer, debulking surgery, residual disease,
para-aortic lymphadenectomy, conservative surgery.
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Plan détaillé :
1. Tumeurs épithéliales invasives
1.1 La chirurgie initiale
1.1.1 La voie d’abord
1.1.2 Le bilan lésionnel
1.1.3 L’exérèse tumorale
1.1.3.1 La chirurgie des stades limités (stades I et IIa)
1.1.3.2 Complications de la chirurgie des stades limités
1.1.3.3 La chirurgie des stades IIb et III
1.1.3.3.1 Chirurgie des stades IIb
1.1.3.3.2 Complications de la chirurgie dans les stades IIb
1.1.3.3.3 Chirurgie des stades avancés
1.1.3.3.4 Complications de la chirurgie des stades avancés (III et IV)
1.2 Chirurgie « d’intervalle »
1.3 Chirurgie conservatrice
1.4 Chirurgie de restadification
1.5 Chirurgie de « second regard »
1.6 Chirurgie des récidives
1.7 Chirurgie laparoscopique
2. Traitements adjuvants des tumeurs invasives
3. Résultats du traitement des tumeurs invasives
4. La chirurgie des tumeurs à la limite de la malignité
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L’incidence annuel des cancers ovariens est d’environ 4200 à
4500 nouveaux cas [1].Il est à l’origine de 3200 décès annuel (année 2003)
mais cette mortalité spécifique a baissée de 15% en 10 ans, traduisant ainsi
une amélioration des traitements [2]. Il reste la première cause de mortalité
par cancer gynécologique.
On peut distinguer deux grands groupes selon l'histologie de la
tumeur :
Les tumeurs épithéliales (tumeurs malignes et tumeurs à la limite
de la malignité) et les tumeurs non épithéliales. Le pronostic de ces tumeurs
non épithéliales est meilleur que celui des tumeurs épithéliales invasives.
Leur traitement chirurgical est en règle conservateur et fera l’objet d’un autre
chapitre.
1. Les tumeurs épithéliales invasives
1.1 La chirurgie initiale
Le traitement des adénocarcinomes de l'ovaire comporte une
approche pluri-disciplinaire associant chirurgie et le plus souvent
chimiothérapie. La chirurgie doit impérativement être la première étape
thérapeutique et ceci pour trois raisons :
La chirurgie permet, et elle seule, de faire le diagnostic histologique grâce
à des prélèvements sur la tumeur ovarienne ou sur les sites
métastatiques,
La chirurgie permet de faire un bilan d'extension tumorale fiable grâce à
un inventaire précis des lésions tant au niveau pelvien qu'abdominal. Elle
permet donc de définir le stade d'extension,
La chirurgie permet une exérèse tumorale satisfaisante qui doit d'emblée
être la plus complète possible. De la qualité de cette exérèse dépend
l'efficacité des thérapeutiques adjuvantes et en conséquence
l'augmentation du taux de survie.
La chirurgie des cancers de l'ovaire comporte donc deux temps :
le premier temps consiste à faire un bilan lésionnel,
le deuxième temps est celui de l'exérèse tumorale.
1.1.1 La voie d'abord
En cas de tumeur de l’ovaire suspecte ou probablement maligne
(sur la triade : clinique, marqueurs et échographie) mais à priori limitée à
l’ovaire, une exploration coeliochirurgicale, voire un traitement
laparoscopique pur peut être réalisé.
En cas de tumeur maligne évidente (ou après avoir trouvé une
tumeur maligne lors d’une coelioscopie), la voie d’abord de référence est la
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laparotomie médiane sous ombilicale prolongée à la demande au-dessus de
l'ombilic (fig.1). L'incision transversale sus-pubienne de Pfannenstiel à visée
esthétique doit donc en principe être proscrite car elle ne permet pas un jour
suffisant pour pouvoir réaliser les différents gestes d’exérèse nécessaires.
Le diagnostic sera confirmé par un examen histologique per-
opératoire extemporané. Néanmoins, l’interpretation de cet examen n’est pas
toujours facile et dépend de l’expérience du pathologiste et de la taille des
échantillons envoyés à l’analyse. On ne peut donc conçevoir son utilisation
qu'à condition de ne tenir compte que des résultats formellement positifs.
1.1.2 Le bilan lésionnel
S'il existe une ascite, elle est prélevée d'emblée. Sinon un lavage
péritonéal est effectué à la recherche d'une dissémination toujours possible
(20 % de cytologies positives dans les stades I et II). La diffusion du cancer
de l'ovaire est avant tout intra-péritonéale mais aussi ganglionnaire rétro-
péritonéale. Le premier temps de l'intervention va donc consister à apprécier
la diffusion de la maladie. Tous les éléments de l'abdomen et du pelvis sont
examinés : ovaires, utérus, trompes, viscères, péritoine des gouttières
pariéto-coliques et des coupoles diaphragmatiques, grand épiploon, foie, rate
et chaînes ganglionnaires rétro-péritonéales. L’absence d’adénomégalie lors
de la palpation ne permettant pas d’éliminer une atteinte ganglionnaire, une
lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique ssystématique sera réalisée.
L’extension de la tumeur sera très soigneusement précisée dans le compte
rendu opératoire.
En l'absence d'envahissement visible ou palpable, des biopsies
péritonéales systématiques sont effectuées au niveau du cul de sac de
Douglas, du cul de sac vésico-utérin, des gouttières pariéto-coliques et de la
coupole diaphragmatique droite (fig.2). Le taux de métastases
microscopiques constaté sur ces biopsies péritonéales systématiques
avoisine 10 % dans les stades I et II [3]. La méconnaissance de ces
envahissements infra-cliniques entraîne donc une sous-évaluation du stade
d'extension tumorale.
Au terme de ce bilan lésionnel et après confirmation histologique
des prélèvements systématiques ou non, il est possible d'établir le stade
d'extension tumorale selon la classification de la FIGO (1987).
Stade I : Tumeur limitée aux ovaires :
Stade Ia : Tumeur unilatérale, capsule intacte, pas de tumeur
extériorisée en surface, pas d'ascite.
Stade Ib : Tumeur bilatérale, capsule intacte, pas de tumeur
extériorisée en surface, pas d'ascite.
Stade Ic : Tumeur au stade Ia ou Ib mais avec extériorisation de la
tumeur, la surface d'un ou des deux ovaires, ou rupture(s)
capsulaire(s) ou présence d'ascite classe IV ou lavage
péritonéal classe IV.
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