LA CHIRURGIE DES TUMEURS EPITHELIALES MALIGNES DE L'OVAIRE P. MORICE, CHEF DE SERVICE C. UZAN, ASSISTANT S. GOUY, ASSISTANT SERVICE DE CHIRURGIE GYNECOLOGIQUE Institut Gustave Roussy. Villejuif Correspondance et tirés-à-part : Pr Philippe MORICE. Service de Chirurgie Gynécologique Institut Gustave Roussy 35 rue Camille Desmoulins. 94805. Villejuif Email : [email protected] -2- Résumé: Les tumeurs epithéliales malignes invasives de l'ovaire sont des tumeurs de mauvais pronostic. La chirurgie est le temps essentiel du bilan d'extension et du traitement de ces tumeurs. Quel que soit le stade, elle doit comporter au minimum une cytologie péritonéale, une hystérectomie avec annexectomie bilatérale, une omentectomie, une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique, une appendicectomie et des prélèvements péritonéaux multiples. Dans les stades I, chez les femmes jeunes désireuses d'une grossesse, on peut proposer une conservation de l'utérus et de l'ovaire controlatéral. Dans les stades II et III, la stratégie thérapeutique, associe une chirurgie première et une chimiothérapie systématique. Dans les stades avancés la chirurgie radicale, comportant l'exérèse de l’ensemble des nodules de carcinose visible avec, si nécessaire, des résections digestives est dans ces cas indispensable, la taille du reliquat tumoral en fin d'intervention étant le facteur pronostique le plus important. Les tumeurs de l'ovaire à la limite de la malignité sont de bon pronostic quel qu'en soit leur stade. La chirurgie peut très souvent être conservatrice, en particulier chez la femme jeune. Mots clés : cancer épithéliaux de l’ovaire, chirurgie d’exerèse tumorale, reliquat tumoral, lymphadénectomie lombo-aortique, chirurgie conservatrice. Abstract : Surgery is the essential element of staging and treatment of epithelial invasive malignant ovarian tumors. Regardless of the stage, it must include peritoneal cytology, hysterectomy with bilateral adnexectomy, omentectomy, pelvic and para-aortic lymphadenectomy, appendicectomy and multiple peritoneal biopsies. In young women desiring a subsequent pregnancy with stage I tumor, preservation of the uterus and contralateral ovary can be proposed. In stages II and III tumor, the therapeutic strategy consists of primary surgery and systematic chemotherapy. In advanced stage tumors, radical surgery, including resection of peritoneal carcinomatosis with, if necessary bowel resections is essential, as the size of the residual tumor at the end of the surgery constitutes the most important prognostic factor. The prognosis of borderline ovarian tumor is good whatever the stage of the disease. So consevative surgery could be performed, particularly in young patients. Key words : epithelial ovarian cancer, debulking surgery, residual disease, para-aortic lymphadenectomy, conservative surgery. EMCovaire/17/10/2012 -3- Plan détaillé : 1. Tumeurs épithéliales invasives 1.1 La chirurgie initiale 1.1.1 La voie d’abord 1.1.2 Le bilan lésionnel 1.1.3 L’exérèse tumorale 1.1.3.1 La chirurgie des stades limités (stades I et IIa) 1.1.3.2 Complications de la chirurgie des stades limités 1.1.3.3 La chirurgie des stades IIb et III 1.1.3.3.1 Chirurgie des stades IIb 1.1.3.3.2 Complications de la chirurgie dans les stades IIb 1.1.3.3.3 Chirurgie des stades avancés 1.1.3.3.4 Complications de la chirurgie des stades avancés (III et IV) 1.2 Chirurgie « d’intervalle » 1.3 Chirurgie conservatrice 1.4 Chirurgie de restadification 1.5 Chirurgie de « second regard » 1.6 Chirurgie des récidives 1.7 Chirurgie laparoscopique 2. Traitements adjuvants des tumeurs invasives 3. Résultats du traitement des tumeurs invasives 4. La chirurgie des tumeurs à la limite de la malignité EMCovaire/17/10/2012 -4- L’incidence annuel des cancers ovariens est d’environ 4200 à 4500 nouveaux cas [1].Il est à l’origine de 3200 décès annuel (année 2003) mais cette mortalité spécifique a baissée de 15% en 10 ans, traduisant ainsi une amélioration des traitements [2]. Il reste la première cause de mortalité par cancer gynécologique. On peut distinguer deux grands groupes selon l'histologie de la tumeur : Les tumeurs épithéliales (tumeurs malignes et tumeurs à la limite de la malignité) et les tumeurs non épithéliales. Le pronostic de ces tumeurs non épithéliales est meilleur que celui des tumeurs épithéliales invasives. Leur traitement chirurgical est en règle conservateur et fera l’objet d’un autre chapitre. 1. Les tumeurs épithéliales invasives 1.1 La chirurgie initiale Le traitement des adénocarcinomes de l'ovaire comporte une approche pluri-disciplinaire associant chirurgie et le plus souvent chimiothérapie. La chirurgie doit impérativement être la première étape thérapeutique et ceci pour trois raisons : La chirurgie permet, et elle seule, de faire le diagnostic histologique grâce à des prélèvements sur la tumeur ovarienne ou sur les sites métastatiques, La chirurgie permet de faire un bilan d'extension tumorale fiable grâce à un inventaire précis des lésions tant au niveau pelvien qu'abdominal. Elle permet donc de définir le stade d'extension, La chirurgie permet une exérèse tumorale satisfaisante qui doit d'emblée être la plus complète possible. De la qualité de cette exérèse dépend l'efficacité des thérapeutiques adjuvantes et en conséquence l'augmentation du taux de survie. La chirurgie des cancers de l'ovaire comporte donc deux temps : le premier temps consiste à faire un bilan lésionnel, le deuxième temps est celui de l'exérèse tumorale. 1.1.1 La voie d'abord En cas de tumeur de l’ovaire suspecte ou probablement maligne (sur la triade : clinique, marqueurs et échographie) mais à priori limitée à l’ovaire, une exploration coeliochirurgicale, voire un traitement laparoscopique pur peut être réalisé. En cas de tumeur maligne évidente (ou après avoir trouvé une tumeur maligne lors d’une coelioscopie), la voie d’abord de référence est la EMCovaire/17/10/2012 -5- laparotomie médiane sous ombilicale prolongée à la demande au-dessus de l'ombilic (fig.1). L'incision transversale sus-pubienne de Pfannenstiel à visée esthétique doit donc en principe être proscrite car elle ne permet pas un jour suffisant pour pouvoir réaliser les différents gestes d’exérèse nécessaires. Le diagnostic sera confirmé par un examen histologique peropératoire extemporané. Néanmoins, l’interpretation de cet examen n’est pas toujours facile et dépend de l’expérience du pathologiste et de la taille des échantillons envoyés à l’analyse. On ne peut donc conçevoir son utilisation qu'à condition de ne tenir compte que des résultats formellement positifs. 1.1.2 Le bilan lésionnel S'il existe une ascite, elle est prélevée d'emblée. Sinon un lavage péritonéal est effectué à la recherche d'une dissémination toujours possible (20 % de cytologies positives dans les stades I et II). La diffusion du cancer de l'ovaire est avant tout intra-péritonéale mais aussi ganglionnaire rétropéritonéale. Le premier temps de l'intervention va donc consister à apprécier la diffusion de la maladie. Tous les éléments de l'abdomen et du pelvis sont examinés : ovaires, utérus, trompes, viscères, péritoine des gouttières pariéto-coliques et des coupoles diaphragmatiques, grand épiploon, foie, rate et chaînes ganglionnaires rétro-péritonéales. L’absence d’adénomégalie lors de la palpation ne permettant pas d’éliminer une atteinte ganglionnaire, une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique ssystématique sera réalisée. L’extension de la tumeur sera très soigneusement précisée dans le compte rendu opératoire. En l'absence d'envahissement visible ou palpable, des biopsies péritonéales systématiques sont effectuées au niveau du cul de sac de Douglas, du cul de sac vésico-utérin, des gouttières pariéto-coliques et de la coupole diaphragmatique droite (fig.2). Le taux de métastases microscopiques constaté sur ces biopsies péritonéales systématiques avoisine 10 % dans les stades I et II [3]. La méconnaissance de ces envahissements infra-cliniques entraîne donc une sous-évaluation du stade d'extension tumorale. Au terme de ce bilan lésionnel et après confirmation histologique des prélèvements systématiques ou non, il est possible d'établir le stade d'extension tumorale selon la classification de la FIGO (1987). Stade I : Stade Ia : Stade Ib : Stade Ic : EMCovaire/17/10/2012 Tumeur limitée aux ovaires : Tumeur unilatérale, capsule intacte, pas de tumeur extériorisée en surface, pas d'ascite. Tumeur bilatérale, capsule intacte, pas de tumeur extériorisée en surface, pas d'ascite. Tumeur au stade Ia ou Ib mais avec extériorisation de la tumeur, la surface d'un ou des deux ovaires, ou rupture(s) capsulaire(s) ou présence d'ascite classe IV ou lavage péritonéal classe IV. -6- Stade II : Stade II a : Stade IIb : Stade IIc : Stade III : Stade IIIa : Stade IIIb : Stade IIIc : Stade IV : Atteinte d'un ou des deux ovaires avec extension pelvienne : Extension et/ou métastase à l'utérus et/ou aux trompes. Extension aux autres tissus pelviens. Tumeur au stade IIa ou IIb mais avec extériorisation de la tumeur à la surface d'un ou des 2 ovaires, ou rupture(s) capsulaire(s) ou présence d'ascite classe IV ou lavage péritonéal classe IV. Tumeur uni ou bilatérale avec implants péritonéaux en dehors du pelvis et/ou adénopathies rétropéritonéale ou inguinale : Atteinte microscopique des surfaces péritonéales abdominales. Pas d’atteinte ganglionnaire. Implants < 2 cm de diamètre. Pas d’atteinte ganglionnaire. Implants > 2 cm de diamètre et/ou ganglion rétro-péritonéal ou inguinal positif. Métastase à distance y compris intra-hépatique. Ce bilan lésionnel est fondamental pour la suite du traitement. Ceci implique qu’en cas d’exerèse ou de bilan d’extension chirurgical incomplet d’une tumeur épithéliale ovarienne maligne (par coelioscopie ou par incision de Pfannenstiel), une reintervention pour stadification s’impose (voir 1.3 Chirurgie de restadification). 1.1.3 L'exérèse tumorale Le second temps de l'intervention est celui de l'exérèse tumorale. Elle doit être impérativement la plus complète d'emblée, le facteur pronostique principal des adénocarcinomes ovariens étant en effet l'importance du volume tumoral résiduel après chirurgie initiale [4-8]. L’ojectif « idéal » de cette chirurgie est d’obtenir une résection complète de toutes les lésions péritonéales visibles. Ce type de chirurgie impose très souvent, lorsqu’il existe une dissémination de la carcinose au dessus du pelvis (stade III B/C ou IV), des résections viscérales (tube digestif et/ou rate en particulier) et une chirurgie des coupoles diaphragmatiques car l’extension de la maladie à ce niveau est très fréquente. Cette chirurgie nécéssite donc une très bonne expérience de la chirurgie pelvienne et de la chirurgie digestive. La nature des gestes à effectuer dépend bien évidemment des constatations pré et surtout per-opératoires. 1.1.3.1 La chirurgie des stades limités (stades I et IIa) EMCovaire/17/10/2012 -7- L'acte chirurgical doit comprendre [48]: - une cytologie péritonéale directe si il existe un épachement péritonéal o un lavage péritonéal en utilisant du sérum physiologique si il n’existe pas d’épanchement, - une hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale en raison de greffes métastatiques possibles sur la séreuse utérine ou l'endomètre, de l'association d'un adénocarcinome simultané de l'endomètre (20 % dans les formes endométrioïdes)[9] et de la bilatéralité fréquente des lésions ovariennes (65 % dans les formes séreuses) (fig.3,4,5). - une omentectomie systématique après décollement coloépiploïque emportant la partie flottante du grand épiploon : les micrométastases épiploïques sont en effet fréquentes (de 15 à 30 % dans les stades initiaux selon les auteurs) (fig.6). Cette omentectomie peut être infracolique en cas de tumeur sans dissémination péritonéale visible (stade I « macroscopique »). Par contre elle doit être infra-gastrique si il existe une extension péritonéale pelvienne macroscopiquement visible (stade II), - une appendicectomie systématique est souhaitable dans la mesure où il a été décrit des cas de métastases appendiculaires (formes mucineuses en particulier), - une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique avec résection des pédicules lombo-ovariens s'impose comme temps complémentaire obligatoire, le taux d'envahissement ganglionnaire atteignant 12 % à 25% dans les stades I et 20% à 50% dans les stades II (fig.7) [5,8,39]. De plus dans 12% des cas, cette atteinte ganglionnaire est isolée sans atteinte cytologique ou histologique du péritoine [10]. Les patientes sont donc sur-stadée uniquement sur l’information ganglionnaire (ce qui permettra à certaines d’entre-elles d’avoir un traitement adjuvant qu’elles n’auraient pas reçu en l’absence de chirurgie ganglionnaire). De plus les examens radiologiques (scanner, IRM ou PET-scan) ou la palpation per-opératoire ne permettent pas de définir avec fiabilité le statut ganglionnaire. - la lymphadénectomie pelvienne commence par le repérage de l'uretère et son refoulement en dedans (fig.8). On s'appliquera à ne pas le disséquer au plus près afin de conserver ses attaches vasculaires avec le feuillet postérieur du ligament large. Puis on ouvre la gaine vasculaire, artérielle et veineuse en regard de la bifurcation iliaque primitive. On enlève progressivement d’arrière en avant les chaînes ganglionnaires externes et moyennes du groupe iliaque externe en prenant contact avec la veine en regard de la bifurcation de l'artère iliaque primitive. On vérifie qu'il ne reste pas de ganglion au niveau de la région rétro-crurale. On réalise ensuite le curage de la chaîne interne en rasant le bord inférieur de la veine iliaque externe et en allant jusqu'au contact du muscle obturateur, les vaisseaux iliaques externes étant réclinés en dehors par l'écarteur de Papin. Le nerf obturateur est découvert soit en avant, soit en arrière ; il marque la limite inférieure de la dissection, les limites antérieures étant l'anneau crural et les limites postérieures le confluent veineux iliaque primitif (fig.9). EMCovaire/17/10/2012 -8- On s'assure qu'il n'existe pas de ganglion résiduel sous la bifurcation veineuse et en arrière de l'anneau crural. Une ligature ou un gros clip assurera la lymphostase en arrière de l'arcade crurale. - Lymphadénectomie lombo-aortique : L'incision doit être prolongée jusqu’à 2 à 3 cm sous la xyphoide. Elle peut être prolongée jusqu'à ce repère en particulier chez les patientes ayant une surcharge pondérale pouvant géner l’abord de l’axe lomboaortique. L’exposition du champ opératoire est obtenue par trois écarteurs auto-statiques : - valve sus-pubienne en bas ou écarteur d'Olivier, - écarteur de Gosset latéralement, - écarteur d'Olivier en haut qui permettra une traction vers le haut associée à un écartement réglable (fig.10). Premier temps : décollement colique droit (fig.11). - l'incision péritonéale se situe dans le sillon que limite le colon droit d'une part et la paroi postérieure de l'abdomen d'autre part. Elle contourne le caecum et remonte le long du colon ascendant jusqu'au transverse, le premier aide attirant légèrement le colon droit vers lui, - le décollement du fascia de Toldt droit s'effectue au ciseau ou au tampon monté. Il se fait de bas en haut et de dehors en dedans passant en avant du rein droit. Le décollement est poursuivi en dedans jusqu'à la libération du genu inferius et de la troisième portion du duodénum qui demeure fixée au plan postérieur (fig.12). Deuxième temps : incision du mésentère. On poursuit alors par une incision du feuillet gauche du mésentère jusqu’au niveau de la veine mésentérique inférieure et du bord inférieur du pancréas. Cette incision permet une exposion idéale du rétropéritoine. Troisième temps : découverte de la veine rénale gauche (fig.13) et ligature du la veine gonadique droite. Après avoir récliné par une valve de Leriche le colon ascendant et l'angle droit, on retrouve le deuxième et le troisième duodénum. L'amorce du décollement du bloc duodéno-pancréatique est effectuée au ciseau de bas en haut sur un centimètre environ. Elle permet de découvrir sur la face gauche de la veine cave inférieure, l'aorte et la veine rénale gauche qui croisent la face antérieure de l'aorte. La libération complète de la veine rénale gauche permet son contrôle. Le bord inférieur de la veine rénale gauche correspond à la limite supérieure du curage. Le temps de décollement terminé, grêle et colon sont extériorisés, protégés par des champs humides et maintenus par des valves de Leriche. Le pédicule lombo-ovarien droit est ensuite libéré de ses attaches est suivi de bas en haut. Il est séparé de l'uretère qui est refoulé en dehors. EMCovaire/17/10/2012 -9- On aboutit ainsi à l'abouchement de la veine ovarienne dans la veine cave inférieure, la veine ovarienne droite est alors liée et sectionnée au contact de la veine cave inférieure. Quatrième temps : prélèvement ganglionnaire latéro-cave droit, pré-cave et inter-aortico-cave (fig.14). Après ouverture de la gaine de la veine cave, on prélève le tissu cellulo-ganglionnaire situé le long du bord droit de la veine cave et à sa face antérieure. L'exérèse des ganglions inter-aortico-caves se fait de bas en haut. Il est parfois nécessaire d'utiliser un écarteur de Papin pour incliner les gros vaisseaux. La partie haute de cette lame contient la citerne de Pecquet ainsi que de nombreux lymphatiques et de volumineux ganglions. L'utilisation de clips métalliques permet d'assurer une lymphostase correcte. Une autre alternative pour traiter cette canaux lymphatiques est d’utiliser les techniques de coagulation ou de thermofusion avec les nouvelles énergies qui semblent parfaitement adaptée à ce temps. La lame inter-aortico-cave est ensuite séparée du plan postérieur qui est constitué par l'aponévrose pré-vertébrale. Il faut éviter de blesser les vaisseaux lombaires situés transversalement sur le plan postérieur (fig.15). Cinquième temps : exérèse des lames ganglionnaires pré-aortique et latéroaortique gauche (fig.16,17). Après avoir découvert l'origine de l'artère mésentérique inférieure qui naît généralement trois à quatre centimètres au-dessus de la bifurcation aortique sur le flanc gauche de l'aorte et disséqué ses trois premiers centimètres, la lymphadénectomie latéro-aortique gauche intéresse successivement les ganglions situés au-dessus de l'artère mésentérique supérieure et ceux situés au-dessous de l'artère : elle est réalisée après avoir libéré le bord gauche de l'aorte, lié et sectionné l'artère ovarienne gauche, repéré et récliné en dehors l'uretère gauche. Le plan postérieur est ici musculaire. La veine ovarienne gauche est liée et sectionnée au ras de la veine rénale gauche et le pédicule lombo-ovarien gauche réséqué dans sa totalité. Sixième temps : exérèse des ganglions du promontoire (fig.18). La lame cellulo-ganglionnaire située sous la bifurcation aortique, en avant du sacrum et de la bifurcation cave est réséquée sans difficulté. Septième temps : lymphadénectomie iliaque primitive bilatérale (fig.19A et B). Cette lame est en continuité avec les ganglions iliaques externes déjà prélevés, en avant et en dehors de l'artère iliaque primitive. Les lymphadénectomies pelvienne et lombo-aortique ainsi menées permettent de réaliser l'exérèse de 35 à 40 ganglions en moyenne. - Des biopsies péritonéales systématiques sont ensuite pratiquées : chaque prélèvement péritonéal aura une surface d'un centimètre EMCovaire/17/10/2012 - 10 - carré en moyenne. Il est recommandé de pratiquer trois prélèvements au niveau du péritoine de chaque gouttière pariéto-colique, deux prélèvements au niveau de la coupole diaphragmatique droite, deux prélèvements au niveau du péritoine pelvien pré-vésical ainsi qu'au niveau du péritoine pelvien latéral, et deux prélèvements au niveau du péritoine du cul de sac de Douglas. (10 % environ d'envahissement microscopique sont ainsi découverts) [3] (fig.20). L'intervention se termine sans péritonisation après avoir mis en place un draînage aspiratif pelvien et éventuellement inter-aortico-cave. La sonde vésicale est enlevée le deuxième ou troisième jour postopératoire. Les drains aspiratifs sont retirés entre le cinquième et septième jour post-opératoire. 1.1.3.2 Complications de la chirurgie des stades limités En per-opératoire : Les complications per-opératoires sont rares et le plus souvent des plaies vasculaires qui peuvent intéresser la veine rénale gauche, la veine cave; ces plaies sont facilement contrôlées (si l’expostion de l’axe lomboaortique a été bien menée) avec des ligatures électives. En post-opératoire : - Des hémorragies post-opératoires peuvent survenir. Elles sont alors liées le plus souvent à un lachage de la ligature d’un pedicule lomboovarien ou un saignement secondaire d’une veine lombaire ou bien à un saignement secondaire sur le site de l’hystérectomie. Néanmoins ces complications sont très rares. - Les lymphocèles sont les complications post-opératoires les plus fréquentes (5 à 10%). Elles doivent être évoquées en cas de douleurs abdomino-pelviennes et/ou de fièvre et/ou de troubles du transit. Le diagnostic est confirmé par des examens radiologiques (échographie, scanner). Elles peuvent être traitées par ponction-drainage radio-guidée. Le drainage chirurgical (qui peut être alors réalisé par vois laparoscopique), pratiqué en cas d’echec des techniques radio-guidées, est actuellement très exceptionnel. 1.1.3.3 La chirurgie des stades II La diffusion tumorale est par définition limitée au pelvis avec un envahissement extrêmement fréquent du cul de sac de Douglas et, le plus souvent, de la charnière recto-sigmoïdienne par contiguité. En l’absence d’extension au recto-sigmoïde, une douglassectomie peut être pratiquée. Si le tube digestif est envahi, une resection de la charnière recto-sigmoïdienne EMCovaire/17/10/2012 - 11 - doit être réalisée. Dans ces cas la chirurgie est relativement simple et permet toujours d’obtenir un reliquat tumoral nul en fin d’intervention. 1.1.3.3.1 Technique chirurgicale dans les stades II L'exérèse tumorale macroscopiquement complète est possible à condition d'utiliser un abord pelvien sous-péritonéal pour réaliser une exérèse monobloc emportant le péritoine pelvien, l'utérus, les annexes et la charnière recto-sigmoïdienne (fig.21) [11]. Il n’y a aucune indication à réaliser une chimiothérapie première en cas de stade, car la résection macroscopiquement complète est toujours possible. L’abord sous-péritonéal permet d’enlever en monobloc l’utérus, les 2 ovaires, le péritoine du cul de sac de Douglas (qui est donc tumoral), la jonction recto-sigmoidienne et eventuellement le péritoine vésico-utérin. Cette chirurgie s’appelle la procédure de Hudson [11]. Sous le cul de sac de Douglas, le rectum est généralement sain et une anastomose colo-rectale (en général haute ou moyenne) est toujours possible. La réalisation d’une stomie n’est pas utile. Elle peut être éventuellement discutée en cas d’anastomose colo-rectale basse (dont la réalisation est très rare dans le cancer ovarien puisque le rectum sousdouglassien est très rarement envahi). Une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique doit être réalisée, le taux d'envahissement ganglionnaire varie de 25 à 50 % [12,13,14]. L'intervention va comporter un temps pelvien et un temps abdominal. - Temps pelvien (fig.22): La ligature section des pédicules lombo-ovariens et la ligature section des ligaments ronds permet l'ouverture large du ligament large. Les 2 uretères sont alors repérés et éventuellement mis sur lac. Ils sont disséqués en sous-péritonéal jusqu’à l’artère utérine. Lorsque celle-ci est repérée, elle est alors liée soit en dehors de l’urétère, soit encore plus en dehors au niveau du tronc ombilico-utérin (fig.23). Le temps suivant consiste à décoller le péritoine vésical antérieur de proche en proche jusqu'au cul de sac vésico-utérin. On réséquera les éventuels nodules de carcinose sur le péritoine vésical (fig X). On continue alors la dissection en arrière au niveau du rectum. En cas d’atteinte du recto-sigmoïde, on effectue ensuite la section de l'anse sigmoïde en zone saine (5 cm au dessus de la tumeur environ) après section du méso en regard et est effectuée sans ouverture préalable grâce à l'utilisation d'une pince automatique type GIA, ce qui supprime un temps septique. La pièce est alors mobilisable, ce qui facilite son exérèse (fig.24). Le temps suivant est celui du décollement rétro-rectal qui doit être poussé nettement sous la tumeur (ce clivage du plan pré-sacré ne pose EMCovaire/17/10/2012 - 12 - généralement aucun problème) (fig.25). Ce décollement est aisé et nonhémorragique. Il faut pour cela bien suivre le plan habituel du méso-rectum. Cette dissection est menée aisement au bistouri éléctrique. Les décollements antérieur vésico-vaginal et postérieur rétrorectal étant réalisés, on s'aperçoit qu'il est toujours possible d'extirper la tumeur (fig.26). Le temps suivant est celui du traitement des ailerons latéraux du rectum. Ce traitement peut être réalisé soit par ligature successive, soit au bistouri éléctrique, soit (c’est la technique que nous privilegions actuellement car elle est la plus rapide et pratique), en utilisant des techniques de coagulation ou de thermofusion avec les nouvelles energies. Une fois les ailerons lateraux traités, ils faut ensuite traiter le meso-rectum. Cette manœuvre est facilitée par la traction verticale de la pièce qui permet de bien repérer et différentier le méso-rectum de la paroi rectale qui ne doit pas être ouverte. Pour faciliter cette manouvere d’expostion par la traction, il est quelques fois plus aisé de réaliser en premier la colpotomie avant le traitement du mesorectum. Pour cela, on ouvre la paroi vaginale antérieure au bistouri éléctrique en débutant par la paroi antérieure puis postérieure. Une fois que le vagin est sectionné et le méso-rectum traité, la pièce n'est plus alors retenue que par le rectum (fig.27). Le dernier temps est alors celui de la section du rectum (fig.28). Afin d'éviter la contamination de la cavité abdominale, on effectue la section rectale en utilisant soit une pince mécanique type TA (fig.29,30). Le vagin est ensuite fermé, après application d’antiseptique, par un surjet. L'anastomose colo-rectale, peut alors être effectuée manuellement par deux surjets de fil résorbable 3/0 ou à la pince mécanique par voie endo-anale (pince EEA) en fonction de la hauteur de cette anastomose (fig.31). Il est souvent nécessaire pour effectuer cette anastomose sans traction, de libérer l'angle gauche colique et donc de lier la veine mésentérique inférieure au ras du bord inférieur du pancréas et l’artère mésentérique inférieure au niveau de la face antérieure de l’aorte. Cette dernière ligature permettra d’ailleurs une exposition plus aisée de l’axe lombo-aortique lors du curage. Dans certains cas (mais ce ne sont pas les plus nombreux), l’atteinte du Douglas est modérée et il est alors possible de pratiquer une douglassectomie simple sans résection digestive. Les nodules de carcinose éventuels sur le peritoine latero-pelvien seront réséqués. Cette exerèse nécessite souvent une dissection de la portion pelvienne de l’uretère. - Temps abdominal On réalise une lymphadénectomie lombo-aortique et iliaque primitive après décollement colique droit avec résection dans leur totalité des EMCovaire/17/10/2012 - 13 - pédicules lombo-ovariens, l'exérèse de la totalité du grand épiploon (jusqu'à la grande courbure gastrique) et les différents prélèvements péritonéaux précédemment décrits. Après avoir vérifié l'hémostase, le draînage est réalisé grâce à un drain aspiratif situé dans le pelvis en arrière de l'anastomose recto-colique. Un autre drain peut éventuellement être mis en place en avant des gros vaisseaux au niveau du curage lombo-aortique, sans péritonisation préalable. 1.1.3.3.2 Complications de la chirurgie dans les stades II Les complications de la lymphadénectomie sont les mêmes que dans les stade. Elles sont néanmoins plus fréquentes car la lymphadenectomie lombo-aortique peut être plus difficile du fait de la fréquence de l’atteinte ganglionnaire. La suture digestive peut se compliquer d’une fistule secondaire. Néanmoins ce risque est faible et estimé entre 3% et 5% [15]. La réalisation d’une stomie de protection ne diminue par ce risque. Ce risque faible est obtenu en appliquant les règles rigoureuses de la chirurgie des anastomoses digestives : préparation colique pre-opératoire, hémostase parfaite en fin d’intervention pour éviter des hématomes éventuellement à l’origine de fistule secondaire, absence de traction et bonne vascularisation des segments coliques. La préparation colique pré-opératoire débute 5 jours avant l’intervention par un régime sans résidu, puis par l’administration de soluté per-os (en 24 ou 48 heures) pour la vidange colique et 1 ou 2 lavement(s) par le rectum selon la qualité de la preparation du colon. Les fistules urétérales secondaires sont très rares (< 1%). Elles peuvent être dues à une dévascularisation de la portion pelvienne de l’uretère du fait d’une dissection trop poussée. Elles sont curables par les techniques de radiologie interventionnelle (néphrostomie et/ou endoprothèse urétérale). 1.1.3.3.3 Chirurgie des stades avancés (III et IV) Cette chirurgie doit permettre d’enlever la totalité de la maladie péritonéale visible. Pour réaliser une telle intervention, il faut que la maladie péritonéale soit résecable en totalité, ce qui est presque toujours le cas (bien sur entre les mains d’opérateurs entrainés à cette évaluation et donc aux différents gestes nécéssaires pour aboutir à une resection complète). Trois sites sont stratégiquement déterminants et peuvent être des limites techniques à une telle chirurgie. Ce sont : Les coupoles diaphragmatiques. L’envahissement d’une ou des deux coupoles est très fréquente et pratiquement toujours résécable. Néanmoins en cas d’extension massive avec envahissement vrai confluent cavo-hépatique, une résection complête ne peut être obtenue. En l’absence d’une telle atteinte, les autres formes d’envahissement des coupoles sont pratiquement toujours résécables. Par contre, il est exclu de réséquer tout le diaphragme. L’ouverture de la plèvre, fortuite ou non, EMCovaire/17/10/2012 - 14 - est donc très fréquente dans cette chirurgie. Elle permettra de s’assurer par la vue qu’il n’y a pas de carcinose pleurale de contiguïté. Cette ouverture pleurale est aussitôt refermée après avoir pris un soin extrême pour éviter sa contamination. L’atteinte massive du pédicule hépatique. L’atteinte du péritoine recouvrant le pédicule hépatique est fréquente en cas de carcinose étendue. Il s’agit le plus souvent d’une extension assez superficielle résécable en pelant les éléments. Néanmoins, si il existe une atteinte massive à ce niveau (envahissement du tronc porte, de l’artère hépatique ou du choledoque) ou bien si il existe une atteinte sous forme de carcinose infiltrant le hile ou la scissure hépatique, la résection complète ne peut être obtenue. L’intestin grêle et le mésentère. S’il est possible de réséquer une ou plusieurs parties du grêle, il est exclu que le patient ait ensuite un « grêle court ». Un minimum de 1,5 m doit être conservé, à la condition de garder une partie de l’estomac et une partie du colon. Par contre en cas de tumeur de stade IV avec atteinte pleurale, la chirurgie ne doit pas être systematiquement récusée. En effet, cette extension pleurale et/ou ganglionnaire peut être associée avec une atteinte abdominale et pelvienne peu importante. Le pronostic des tumeurs à ce stade alors proche de celui des tumeurs au stade III. L’atteinte pleurale est en règle sensible à la chimiothérapie. Par ailleurs, les patientes doivent être prévenues avant l’intervention chirurgicale, de l’éventualité d’une stomie digestive, à priori, transitoire. - Temps abdominal L'intervention va donc débuter par le temps abdominal puisque c’est à ce niveau que vont se situer les limites potentielles à la réséction complète des lésions. On débute par l’omentectomie qui facilitera l’exploration et le traitement ultérieur de l’hypochondre droit. L’omentectomie et l’exploration de l’estomac En cas d’envahissement important de l’épiploon, la première partie de l’opération consiste réaliser une omentectomie pour libérer le centre de l’abdomen d’un large volume tumoral. Cet envahissement réalise ce que l'on appelle classiquement un "gateau épiploïque". Le grand épiploon est élevé puis séparé du colon transverse. Ceci expose tout le mésocolon transverse et la face antérieure du pancréas. L’épiploon est retiré systématiquement en totalité en passant au raz de la courbure gastrique (fig.32). Le petit épiploon est largement ouvert en réséquant la pars flacida. L’étude de l’estomac et principalement des vaisseaux coronaires stomachiques est importante. La squeletisation de ces vaisseaux recouverts de péritoine tumoral, surtout de la EMCovaire/17/10/2012 - 15 - fragile veine coronaire stomachique, se fait millimètre par millimètre, à leur contact immédiat et en s’aidant de clips vasculaires de petite taille (5 mm). Le traitement de l’hypochondre droit et du foie Le péritoine pariétal de l’hypochondre droit est pelé en partant en arrière des muscles grands droits et en se dirigeant vers la coupole diaphragmatique. Cette dissection est effectuée au bistouri électrique et est facilitée par la mise sous tension du péritoine par des pinces de Bengolea. L’hémidiaphragme est ainsi pelé à la demande en fonction de l’étendue de la carcinose, exposant le muscle diaphragmatique et ses vaisseaux.. Le foie doit être systématiquement mobilisé de ses attaches péritonéales (section des ligaments triangulaires et coronaires gauches et droits). La veine cave sus-hépatique et la terminaison des veines sus-hépatiques peuvent également être exposées en réséquant le péritoine qui les recouvre s’il existe une atteinte de la coupole assez « médiane ». Le tissu tumoral qui recouvre la capsule de Glisson est essentiellement détruit par électrofulguration. Cette dernière est poursuivie jusqu’à ce que le parenchyme hépatique soit exposé et donc la capsule détruite. L’exérèse du ligament rond, du ligament falciforme et du ligament d’Arantius est quasi systématique. Une chlocystectomie peut être nécéssaire en cas d’atteinte de la séreuse recouvrant la vésicule. Deux zones doivent faire l’objet d’une étude minutieuse pour ne pas laisser en place le moindre nodule de carcinose et sont particulièrement difficiles à nettoyer: ce sont le pédicule hépatique et le péritoine avoisinant le segment I. Le pédicule hépatique peut être entièrement recouvert de lésion. Dans ce cas, on en fait totalement l’ exérèse en cheminant pas à pas au contact direct des structures vasculo-biliaires que l’ on met progressivement sur lacs. Il faut être très vigilant au niveau de la plaque hilaire ou l’infiltration tumorale peut s’enfoncer très loin dans le foie. Le nettoyage du segment I demande, en avant, de réséquer la totalité du ligament d’Arantius s’il est infiltré, et en arrière, de réséquer tout le péritoine tumoral recouvrant la face antérieure gauche de la veine cave inférieure rétro-hépatique. En cas de résection du diaphragme, il peut exister des ouvertures, intentionnelles ou fortuites, de la plèvre. Ces ouvertures sont plus fréquentes lors du traitement de la portion interne (membraneuse) de la coupole droite, que lors du traitement de la portion, plus externe (« musculaire » et donc plus épaisse que la portion membraneuse). La fermeture de ces ouvertures pleurales est simple et repose sur la réalisation de deux hemi-surjets. Cette fermeture ne pose en générale aucune difficulté car l’hépatolyse complète initiale permet une bonne « mobilisation » du diaphragme restant et donc une fermeture aisée et sans traction. Elle ne nécessite donc en général pas de pose de plaque. Une pose d’un drain thoracique peut être utile lorsque le deffect diaphragmatique est important mais elle n’est pas systématique. Dans notre expérience nous la réalisons dans 15% à 20% des cas [16]. Lorsqu’il n’y a pas de drain thoracique posé, nous exsufflons la plèvre avec une sonde de Foley. Une petite bourse est réalisée autour de EMCovaire/17/10/2012 - 16 - cette sonde de Foley. Cette bourse est en fait réalisée sur une des 2 portions les plus externes de l’ouverture diaphragmatique. Une petite zone de 5 mm à 1 cm est laissée avant de mettre le point d’angle de départ de l’hemi-surjet. La sonde de Foley est mise dans ce deffect de 5 mm puis une bourse est réalisée autour. La ballonnet de la sonde est gonflé avec 10 ml de serum physiologique. Une fois que les 2 hémi-surjets sont serrés et le diaphragme donc fermé, l’air est aspiré dans une seringue de 60 ml. Plusieurs exsufflation à la seringue sont souvent nécessaires. Pour vider la seringue entre deux exsufllation, un clamp est mise sur la sont pour maintenir une pression negative. Une fois que tout l’air est exsufflé, le ballonet est degonflé et la sonde retirée en serrant la bourse. Cette manœuvre de fermeture et d’exsufflation de la plèvre à droite doit être réalisée avant de débuter le traitement de l’hychondre gauche (en cas d’ouverture pleurale à gauche potentielle). Le traitement de l’hypochondre gauche Tout le péritoine pariétal envahi par la CP est pelé de la même façon qu’à droite. Il est nécessaire de mobiliser l’angle colique gauche pour bien exposer cette région. La rate est mobilisée, mais une splénectomie n’est effectuée que si elle est recouverte de tissu tumoral en surface ou au niveau du hile. Si l’on fait une splénectomie, il est primordial de réaliser une dissection très fine des vaisseaux hilaires afin de ne pas léser la queue du pancréas. Le traitement du grêle et du mésentère L’intestin grêle dans sa totalité et le mésentère doivent être libérés et inspectés millimètre par millimètre. Une atteinte étendue du grêle, laissant présager un intestin court, est une contre-indication à la cytoréduction chirurgicale. Les anses intestinales infiltrées sont réséquées tandis que celles qui sont touchées superficiellement sont traitées par électrofulguration élective. Les nodules mésentériques sont également traités en évitant de traumatiser les vaisseaux et en prenant soin de déplisser chaque cornet du mésentère. Le traitement du colon Le colon est exploré et traité de la même façon que le grêle, tout en sachant que, partiellement fixé, il est souvent plus atteint. L’atteinte fréquente de la gouttière pariétocolique droite impose souvent une hémicolectomie droite. L’infiltration tumorale des mésos peut demander des sacrifices vasculaires qui imposent ensuite une une colectomie étendue. Les résections intestinales adaptées à l'étendue des lésions peuvent être nécessaires : il peut s'agir de colectomie segmentaire : colectomie transverse, hémicolectomie droite ou hémi-colectomie gauche (fig). La colectomie totale doit être proscrite en cas de chirurgie intiale car la tolérance fonctionnelle de cette chirurgie dans ce contexte est mauvaise. Une telle chirurgie ne peut EMCovaire/17/10/2012 - 17 - être discutée qu’en cas de persistence d’une atteinte pan-colique après chimiothérapie neo-adjuvante. Traitement du péritoine abdominal Le temps suivant est celui des péritonectomies : le péritoine des gouttières pariéto-coliques, siège fréquent de nodules métastatiques sera réséqué dans sa totalité à droite comme à gauche : il est généralement aisé de décoller le péritoine du plan sous-jacent musculo-aponévrotique en partant de l'incision abdominale Lymphadénectomie lombo-aortique Enfin, une lymphadénectomie lombo-aortique considérée comme partie intégrante de la chirurgie de réduction tumorale sera réalisée (le taux d'envahissement ganglionnaire atteignant 50% à 70 % dans les stades III) chez les patientes ayant eu une résection complète de leur maladie péritonéale [13,17]. En effet, en cas de résidu tumoral macroscopique péritonéal résiduel, la réalisation de cette chirurgie ganglionnaire devient caduque car l’événement carcinologique qui va alors dominer est celui de la récidive péritonéale. - On passe ensuite au temps pelvien de l'intervention Il sera tout à fait identique à celui décrit dans les stades II. On termine l'intervention en rétablissant la (ou les) continuité(s) intestinale(s). Ces anastomoses sont éventuellement protégées par une iléostomie de proche amont en cas de résection multiples. 1.1.3.3.4 Complications de la chirurgie des stades avancés (III et IV) Les complications sont directement lié à l'importance des exérèses effectuées. En conséquence la chirurgie supra-radicale est grevée d'une morbidité dominée par les complications infectieuses et hémorragiques. Le taux global de complications varie entre 10% et 20% selon la radicalité du geste et l’état nutrionnel de la patiente en pre-opératoire [6,18,19]. Le risque de fistule digestive reste relativement faible et est < 5% [15]. En cas de fistule digestive la réalisation de stomie (iléostomie ou colostomie provisoire) est nécéssaire. Cette morbidité peut être minimisée par une preparation et un monitorage pré, per et post-opératoire intensif : - en pré-opératoire :correction de troubles métaboliques et nutritionnel et d'une anémie éventuelle, ponction d'ascite ou pleurale évacuatrice, préparation colique systématique (cf 1.1.3.3.2), traitement anti-coagulant et antibiothérapie systématiques. EMCovaire/17/10/2012 - 18 - - en per-opératoire : nécessité d'une surveillance hémodynamique stricte (pression artérielle sanglante, capnigraphie et si besoin monitorage de la saturation veineuse en oxygène), éviter l'hypothermie, compenser les pertes sanguines, maintenir la diurèse, corriger les troubles d'hémostase (fibrinolyse et thrombopénie fréquentes). - en post-opératoire : compensation des pertes et lutte contre l'hypovolémie, ventilation artificielle jusqu'au réchauffement complet, hyper-alimentation parentérale à partir de J1 et transfusion si nécessaire, aspiration digestive retirée à J2 en l'absence de suture digestive, dès la reprise du transit en cas d'anastomose digestive, compensation éventuelle de l'ascite jusqu'à J2 voire J3, traitement anti-coagulant systématique. 1.2 Quelle stratégie chirurgicale dans les cancers de l’ovaire de stade avancé ? Chirurgie initiale ou « d’intervalle » (après chimiothérapie néo-adjuvante) ? La chirurgie des carcinoses péritonéales primitives, ovariennes ou tubaires est une chirurgie complexe mais dont l’intérêt thérapeutique pour les patientes est majeur [8]. La balance bénéfices-risques doit être pesée avant de débuter l’intervention d’éxérèse qui doit idéalement obtenir un résidu nul (taille définie par celle du plus petit nodule tumoral laissé en place). On classifie la qualité de la chirurgie réalisée comme : Complète quand le résidu tumoral post-opératoire est nul. Optimale quand le résidu tumoral est 2 cm et plutôt 1 cm dans les séries les plus récentes. Suboptimale lorsqu’elle laisse un résidu > 1 ou 2 cm. Palliative quand aucun geste d’exérèse ne peut être réalisé. L’intérêt pronostique de la taille du reliquat tumoral est connu depuis très longtemps [5,6,8,20]. Ce qui a évolué c’est le concept de chirurgie « optimale ». En effet, lorsqu’il existe un reliquat macroscopique visible mais « de petite taille » (dont la taille a en fait évolué dans le temps), cette chirurgie était considérée comme optimale. Or des travaux récents, en particulier de l’équipe de Memorial à new York, démontrent parfaitement qu’il existe un gain en terme de survie très important entre les patientes ayant bénéficié d’une chirurgie complète versus celles qui ont eu une chirurgie optimale, même si celle-ci laisse en place un reliquat minime [21-24]. La « seule » chirurgie « optimale vraie » devrait être la chirurgie complète sur la plan macroscopique [17]. Ceci explique que l’on voit se multiplier maintenant dans la littérature de nombreux papiers sur la chirurgie de l’étage susmésocolique dans les cancers de l’ovaire [24-29], car on sait que c’est à cet étage que l’effort chirurgical doit être poussé pour obtenir une résection complète. EMCovaire/17/10/2012 - 19 - Le type d’intervention réalisée lors de la résection peut être classé en 3 groupes selon sa radicalité : L’intervention standard doit comporter dans ces stades avancés la réalisation de (au minimum): une hystérectomie totale non conservatrice (avec annexectomie bilatérale) une cytologie péritonéale des biopsies péritonéales multiples (cul de sac de Douglas, péritoine vésical, pariéto-colique droit et gauche, diaphragmatique droit) une omentectomie infragastrique une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique remontant jusqu’au pédicule ovarien à droite et sous la veine rénale à gauche, doit nous discuterons l’intérêt thérapeutique plus loin. Dans les stades de la maladie ou il existe une masse pelvienne engainant le rectum, une résection de la charnière recto-sigmoidienne doit être souvent associée (intervention de Hudson). Cette chirurgie est qualifiée de radicale. Dans les stades IIIB, IIIC et IV, la résection chirurgicale optimale doit comprendre l’exérèse de la totalité des implants péritonéaux. Cette chirurgie est qualifiée de « supra-radicale » si elle comporte une splénectomie et/ou une ou des résections digestives et/ou des péritonectomies importantes (résection d’une gouttière pariéto-colique complète, du péritoine diaphragmatique, etc.) Les complications post-opératoires doivent être évitées au maximum pour ne pas risquer de retarder l’institution de la chimiothéapie adjuvante (2ème élément-clé pronostic du traitement des cancers de l’ovaire). C’est la constatation de ce taux important de complications qui a introduit le concept de chirurgie d’intervalle (réalisée après 3 ou 4 cures de chimiothérapie ayant pour but de réduire les volumes tumoraux et donc la radicalité chirurgicale), chez les patientes ayant une carcinose très importante En effet, dans certains cas où la maladie péritonéale est étendue, le risque de complications retardant la chimiothérapie est plus important que le bénéfice du résidu obtenu (surtout lorsqu’une chirurgie complète ne peut être obtenue). Or, les études actuelles, toutes non randomisées, montrent qu’il peut exister un bénéfice à traiter initialement les patientes atteintes de carcinose non complètement résécables par une chimiothérapie néoadjuvante (3 à 4 cycles) suivie d’une chirurgie de réduction du volume tumoral [30,31,32,33]. Cette chirurgie dite « d’intervalle » se doit d’être également complète avec obtention d’un résidu nul en fin d’intervention afin d’améliorer le pronostic de la patiente. Néanmoins, même si ces résultats sont encourageants, ces études ont toutes des biais méthodologiques rendant leurs conclusions EMCovaire/17/10/2012 - 20 - moins valides qu’après essais randomisées. De plus, plusieurs études récentes et concordantes ont même rapportés une survie moins bonne chez les patientes ayant une chirurgie complète (absence de reliquat macroscopique) après chimiothérapie première comparée aux patientes opérées d’emblée [34,35,36]. Seule une étude prospective randomisée pourra confirmer la place de la chirurgie d’intervalle. Cette étude menée par l’EORTC vient de se terminer et devrait prochainement être publiée. En attendant les résultats de cet essai, eu égard les résultats inquiétants de certaines séries rétrospectives suggérant une survie moins bonne des patientes traitées après chirurgie intervallaire versus chirurgie initiale, le seul « standard » dans les cancers de l’ovaire de stade avancé doit rester la chirurgie initiale complète sur le plan macroscopique [17]. Cette chirurgie nécessite une expertise de l’équipe (opérateurs, anesthésistes et personnels assurant la surveillance et les soins post-opératoires) et des moyens techniques (unités de soins post-opératoires) adaptés permettant d’une part d’optimiser le nombre de patientes ayant une résection complète et d’autre part de diminuer la morbidité peri-opératoire de ces interventions [17,37]. Lorsqu’une résection initiale complète n’est pas réalisable (au sein d’équipes entrainées), il n’est par contre pas recommandé de réaliser une chirurgie de résection laissant en place un reliquat tumoral car, d’une part, les patientes n’en tirent pas un bénéfice en terme de survie et, d’autre part, le taux de morbidité est significativement augmenté dans ce groupe de patientes ayant une chirurgie sub-optimale [38]. Dans ce genre de situation, c’est la place pour réaliser une chimiothérapie première avant d’envisager la chirurgie intervallaire dans un second temps [17]. Le diagnostic d’opérabilité de ces stades avancés pour permettre d’évaluer la résécabilité initiale des lésions repose sur plusieurs éléments (clinique, scanner) mais la laparoscopie d’évaluation a toute sa place dans cette stratégie et sa valeur diagnostique est maintenant reconnue par les SOR [17]. De plus, cette laparoscopie permet de faire des biopsies dirigées pour confirmer la nature histologique précise de la carcinose (et éliminer une carcinose d’origine digestive, mammaire ou autres..)[39,40,41]. La laparotomie uniquement exploratrice pour évaluer la résécabilité devrait être abandonnée (sauf en situation d’urgence comme une occlusion…)[17]. 1.3 Chirurgie conservatrice La chirurgie conservatrice, théoriquement contre-indiquée dans les tumeurs épitheliales malignes de l’ovaire, peut toutefois se conçevoir chez des femmes très jeunes, nullipares ou désireuses de maternité et porteuses d'une tumeur unilatérale bien encapsulée sans atteinte ni rupture de la capsule, ni adhérences (stade Ia) [42,43]. Ce type de prise en charge ne devrait être proposée qu’aux patientes ayant une tumeur de grade 1 ou 2, après information et obtention du consentement éclairé des patientes. Les patientes ayant des tumeurs histologiquement plus agressives (carcinomes EMCovaire/17/10/2012 - 21 - indifférenciés, carcinome à cellules claires de l’ovaire) ne peuvent pas bénéficier d’un traitement conservateur. Pour pouvoir proposer un traitement conservateur, il faut que le bilan chirurgical ait été complet pour permettre un bilan d’extension exact : celui-ci doit donc impérativement inclure une cytologie péritonale, une omentectomie, des biopsies péritonéales systématiques multiples, un curetage biopsique de l'endomètre, une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique [17,44]. L’ovaire contro-latéral ne sera biopsié qu’en cas d’anomalie macroscopique et/ou lors de la palpation. En effet la réalisation de biopsies ovariennes peut être adhésiogène et donc à l’origine d’une infertilité ultérieure [45]. Ces différents gestes chirurgicaux peuvent être réalisés par laparotomie ou par coelioscopie (cf 1.7). Seule la négativité de ces différents prélèvements permet de définir une tumeur de stade Ia. La chirurgie est alors souvent le seul traitement de ces formes dépistées à temps. Néanmoins une surveillance post-opératoire stricte à la fois clinique, échographique et biologique s'impose dès lors. En effet les récidives surviennent le plus souvent au niveau de l’ovaire restant (associé eventuellement à une carcinose). Dans les rares cas où cette chirurgie conservatrice a pu être proposée, une fois le désir de grossesse satisfait, une réintervention peut être envisagée dans le but de compléter l'exérèse [44]. Des grossesses ont été rapportées après ce type de traitement [46]. 1.4 Chirurgie de restadification Lorsque le diagnostic de tumeur maligne de l’ovaire est posé au moment de l’examen histologique définitif, après une intervention (souvent laparoscopique) pour une tumeur ovarienne non ou peu suspecte lors du bilan pre et per-opératoire, la chirurgie initiale a été le plus souvent carcinologiquement incomplète (ovariectomie ou annexectomie seule). Une chirurgie de complément, dite « de restadification », doit être impérativement réalisée afin d’effectuer les gestes d’exérèse nécessaires à une stadification fiable. Cette intervention est indispensable car il existe une surstadification chez 25% à 35% après cette chirurgie de restadification [3,47,48]. Ce changement de stade peut est liée à la découverte d’une atteinte extra-ovarienne histologique non décelable lors de l’examen macroscopique : atteinte ganglionnaire (4% dans la série de Faught) [3] ou le plus souvent atteinte péritonéale et/ou épiploïque. Ce changement de stade est fondamental car il peut modifier le traitement post-chirurgical est impliquer la réalisation d’une chimiothérapie adjuvante qui n’aurait pas été administrée en l’absence de stadification correcte (25% dans la série de Leblanc) [48,49]. Lors de la re-intervention chirurgicale de restadification, une cytologie péritonéale, une omentectomie, une appendicectomie, des biopsies péritonéales, une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique et éventuellement une hystérectomie avec annexectomie controlatérale (cf EMCovaire/17/10/2012 - 22 - chapitre 1.3) doivent être réalisés. Ces différents gestes peuvent être réalisé par coelioscopie si la tumeur paraît à priori limitée à l’ovaire ou par laparotomie. La laparotomie sera préférée si il existe une ascite et/ou une tumeur de stade initial > IC. 1.5 Chirurgie de « second regard » On appelle, par définition, une intervention de "second regard" une réintervention de principe réalisée après une chirurgie initiale correcte de bilan et d'exérèse maximale suivie, au minimum, de 6 cures de chimiothérapie. Elle est donc réalisée à la fin de la séquence thérapeutique. Elle ne se conçoit qu’en l'absence de toute poursuite évolutive clinique, biologique (marqueurs) ou radiologique à la fin de la chimiothérapie. Cette chirurgie doit comporter : une exploration minutieuse de l’ensemble de la cavité abdomino-pelvien, un lavage péritonéal pour examen cytologique et des prélévements péritonéaux systématiques. Cette intervention peut être réalisée classiquement par laparotomie ou par coelioscopie. Toutefois, l’exhaustivité de l’exploration abdominale par coelioscopie semble moins bonne que par laparotomie, car il existe très souvent des adhérences sévères. Néanmoins, la coelioscopie pourrait être intéressante car, en cas de carcinose évidente lors de l’exploration laparoscopique, elle éviterait une laparotomie systématique. Celle-ci serait alors réservée aux échecs de la coelioscopie (adhérences trop sévères pour permettre la réalisation des temps initiaux de la coelioscopie -insufflation ou mise en place des trocarts- ou pour permettre une exploration complète de la cavité abdomino-pelvienne). L'intérêt de cette chirurgie de contrôle de principe est remis en question car elle n’a pas montré son bénéfice en terme de survie [50,51]. Elle est donc pratiquement abandonnée par toutes les équipes. Le « second look » ne doit être réalisée que dans le cadre de protocole thérapeutique. En revanche, dans les cas ou la chirurgie initiale n’a pas été complète (absence de lymphadénectomie lombo-aortique), cette chirurge de « second regard » permet de réaliser les lymphadénectomies pelvienne et lombo-aortique. En effet, la chimiothérapie semble peu active sur les métastases ganglionnaire [52,53]. Les ganglions peuvent être les seuls sites ou il existe de la tumeur résiduelle lors de cette chirurge de contrôle. Néanmoins, le bénéfice thérapeutique de cette chirurgie ganglionnaire réalisée lors du « second regard » reste discuté . 1.6 Chirurgie des récidives Le traitement chirurgical des récidives reste discuté. Néanmoins, celui-çi pourrait avoir un intérêt chez des patientes jeunes en bon état général, pouvant bénéficier d’une résection complète des lésions, ayant un intervalle long entre la fin du traitement initial et la récidive et pouvant bénéficié d’une chimiothérapie de rattrapage après cette chirurgie [54]. EMCovaire/17/10/2012 - 23 - 1.7 Chirurgie laparoscopique Les modalités techniques de cette voie d’abord ne seront pas détaillées dans ce chapitre car elles font l’objet d’un autre chapitre de cette Encyclopédie. 2. Traitements adjuvants des tumeurs invasives Le premier temps thérapeutique dans les tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire est chirurgical. En dehors des rares cas de tumeur de stade Ia et de grade 1 (voire 2) ou le traitement est exclusivement chirurgical (à condition d’avoir bénéficié d’une stadification complète), cette chirurgie est suivie d’une chimiothérapie. Cette chimiothérapie est en règle une polychimiothérapie associant (en première ligne) au moins un sel de platine pendant une durée minimum de 6 cycles et du paclitaxel. Ses modalités seront abordées dans un autre chapitre de cette Encyclopédie. 3. Résultats du traitement des tumeurs invasives Dans les formes limitées (stades I et IIa) les résultats sont généralement bons et la survie à 5 ans varie de 60 à 80 %. Dans les formes évoluées (stade IIb, III et IV), comme nous l’avons vu, la plupart des études publiées à ce jour montrent que le facteur pronostique le plus important de la maladie est la présence ou non d'un reliquat tumoral après la chirurgie initiale : c'est ainsi que la survie à 5 ans des patientes ayant un cancer de l'ovaire stade III se situe entre 35 % et 50 % selon les auteurs en cas de chirurgie complète, alors qu'elle est inférieure à 10 % en cas de reliquat tumoral post-opératoire ne laissant en place que des nodules tumoraux dont le diamètre est inférieur à 1 cm. Ces résultats démontrent l’importance de la qualité de la chirurgie initiale est fondamentale pour optimiser la survie des patientes. Des études démontrent que celle-ci dépend de la formation et de l’habitude du chirurgiens prenant en charge les tumeurs malignes de l’ovaire. Ainsi, dans ces travaux, l’exhaustivité de la stadification et les résultats de la chirurgie d’exerèse (en particulier dans les stades III) sont meilleurs lorsque cette chirurgie est pratiquée par des gynécologues spécialisés en cancérologie [55]. 4. La chirurgie des tumeurs à la limite de la malignité (Boderline) Les tumeurs de l'ovaire à la limite de la malignité (Borderline) constituent une entité histologique tout à fait particulière qui les situe entre les tumeurs bénignes et les tumeurs franchement malignes : elles sont caractérisées par l'absence d'envahissement du stroma [56]. EMCovaire/17/10/2012 - 24 - Il n'y a aucune différence macroscopique entre les tumeurs invasives vraies et les tumeurs à la limite de la malignité. La très grande majorité de ces tumeurs sont diagnostiquées au stade I mais en opposition avec les tumeurs invasives vraies, le pronostic est bon quel que soit le stade. Presque tous les auteurs préconisent actuellement l'attitude chirurgicale suivante : - Devant une tumeur ovarienne unilatérale isolée : - une annexectomie bilatérale (+/- hystérectomie) chez les patientes traitées en post-ménopause. Chez les patientes jeunes souhaitant préserver leur fertilité ultérieure, une chirurgie conservatrice (kystectomie, ovariectomie ou annexectomie unilatérale) peut être réalisée, - un lavage péritonéal systématique pour examen cytologique, - une omentectomie partielle enlevant la partie flottante de l'épiploon, - des biopsies péritonéales multiples, - il n'y a pas d'indication à faire un curage pelvien et lomboaortique réglé systématique. En cas d’adénomégalie, une adénectomie sera alors pratiquée, - une appendicectomie systématique. La biopsie systématique de l'ovaire contro-latéral normal n'est plus préconisée car elle n'est pas performante et risque de compromettre la fertilité de ces patientes. Ce traitement conservateur augmentent le risque de récidive ovarienne [57]. La kystectomie expose au risque de récidive homolatérale et l ‘annexectomie au risque de récidive controlatérale [57]. Les patientes doivent être informées de ce risque. Mais, dans notre expérience, ces récidives après traitement conservateur sont toujours survenues avec une histologie de type borderline (jamais sur un mode invasif), ont toujours été accessible à un traitement chirurgical itératif et n’ont jamais mis en jeu le pronostic vital [57]. Ce traitement conservateur permet de préserver la fertilité et d’obtenir des grossesses [57]. Néanmoins compte tenu du risque de récidive, une surveillance étroite clinique, échographique et biologique (marqueurs) doit être instituée afin de prendre en charge précocement les récidives ovariennes éventuelles. Il n'y a pas d'indication à mettre en oeuvre un traitement adjuvant ; il n'y a pas non plus d'indication à réaliser une réintervention de contrôle ("second look"). - Devant une tumeur de l'ovaire uni ou bilatérale mais avec des implants péritonéaux macroscopiques. EMCovaire/17/10/2012 - 25 - Le type de chirurgie dépend des caracteristiques histologiques de ces implants (invasifs ou non invasifs)[58]. En cas d’implants péritonéaux non invasifs, le traitement peut être conservateur mais l’ensemble des implants péritoneaux doit être resequé. Il n’y a pas alors d’indication à réaliser un traitement adjuvant [ref]. En cas d’implants péritonéaux invasifs, une chirurgie radicale est preferable: hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale, et résection des implants péritonéaux la plus complète possible mais sans résection intestinale. Un traitement adjuvant est discuté après l’intervention chirurgicale. EMCovaire/17/10/2012 - 26 - BIBLIOGRAPHIE 1. Hill C, Doyon F. La fréquence des cancers en France : mortalité en 2003, évolution depuis 1968 et cancer de l’enfant. Bull Cancer 2007 ; 94 : 713. 2. Hill C, Doyon F. La fréquence des cancers en France en 2000 et son évolution depuis 1950. Bull Cancer 2005 ; 92 : 7-12. 3. Faught W, Le T, Fung Kee Fung M, Krepart GV, Lotocki RJ, Heywood MS. Epithelial ovarian cancer staging : where is the microscopic disease actually found ? 7 th Meeting of International Gynecologic Cancer Society. (Rome 1999). Publié dans Int J Gynecol Cancer 1999 ; Suppl 1 : A147. 4. Gallion HH, Van Nagell JR, Donaldson ES, Hanson MB, Kryscio RJ. 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