Présentation - Rémi Bazillier

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« Comprendre l’Economie »
#ComprendreEco
Chapitre 3: Succès et échecs des
marchés
Rémi Bazillier
[email protected]
http://remi.bazillier.free.fr
Maitre de Conférences à l’Université d’Orléans
Introduction
• Exemple des conséquences du blocus des ports des Etats
sécessionnistes par Lincoln en 1861
– Forte chute de l’offre de coton et explosion du prix
– Forte baisse du profit pour les usines textiles
– Hausse de l’offre de coton dans d’autres régions (Inde, Egypte,
Brésil..)
• L’information transite par le prix
– Le prix est le résultat de multiples transactions effectuées par
des anonymes
– Pas de décision planifiée ou centralisée (comme dans un Etat
communiste ou dans une entreprise)
– Une évolution du prix peut résulter d’un changement de coûts
de la firme. Si le coût baisse, le prix doit baisser
Acheter et Vendre: Demande et Offre
• Situation où les marchés sont compétitifs
– Beaucoup d’entreprises (pas de monopole)
– Chaque entreprise est affectée par le comportement
des entreprises concurrentes
• Exemple du marché du livre d’occasion de
manuels universitaires
– La demande provient des étudiants débutant en cours
et de leur consentement à payer
• Personne ne sera prêt à payer un prix plus élevé que le prix
du manuel neuf
• Ce consentement à payer dépend également de la
motivation de l’étudiant
– L’offre dépend du consentement à accepter des
offreurs (ici les détenteurs de manuels
universitaires)
• Prix de réservation: prix à partir duquel l’offreur
accepte de vendre son livre
Marché et prix d’équilibre
• Qu’est ce qu’il va se passer sur le marché du livre
d’occasion?
– Cela dépend des institutions du marché
– Chaque étudiant va chercher un offreur avec le prix de
réservation le plus faible
– Chaque offreur va chercher un étudiant avec un consentement à
payer plus élevé
• Institutions traditionnelles de marché:
– Rassemblement d’une multitude acheteurs et vendeurs dans un
même lieu (le marché)
• Moins nécessaire dans un monde où la communication est
facile
– Les producteurs peuvent communiquer sur leur prix et le lieu de
vente
– Mais cela reste souvent plus pratique de rassembler beaucoup
d’acheteurs et vendeurs (marchés de matière première)
Le prix d’équilibre
• Le prix égalisant offre et demande
• Si prix > prix d’équilibre:
– Beaucoup d’offreurs potentiels
– Mais peu de demande:
• Même les acheteurs ayant un consentement à payer élevé savent
que les prix vont être amenés à baisser.
• Si prix < prix d’équilibre
– Les offreurs préféreront attendre plutôt que de vendre
• Mais ce raisonnement est vrai que si les produits sont
identiques
• Le marché est à l’équilibre quand les actions des
acheteurs et des vendeurs ne changent pas les prix et
quantités vendus (tant qu’il n’y a pas de changement
dans les conditions de marché)
Alfred Marshall (1824-1924)
• Fondateur avec Léon Walras de
l’école néoclassique.
• Nouvelles fondations théoriques à
l’économie
– Concept de surplus du producteur / du
consommateur
– Utilité marginale / Coût marginal
Est-ce que le marché est toujours à
l’équilibre?
• Dans la théorie Marshalienne: peu de variations
autour du prix d’équilibre
– Mais ce n’est pas toujours le cas
• Existence de rentes, chômage …
• Les individus sont preneurs de prix
– Personne ne serait prêt à commercer avec un étudiant
demandant un prix inférieur au prix de marché
– Il y a suffisamment de concurrence entre acheteurs et
vendeurs pour garantir cela
– Ce n’est pas toujours le cas: produits différenciés,
monopoles..
Firmes « preneuses de prix » et
comportement sur le marché
• Cas d’une petite boulangerie
• Prix du pain des concurrents: $2,35
– Vous ne pouvez pas vendre à un prix supérieur
La boulangerie: coûts et quantités
• Coût marginal: coût additionnel lié à
l’augmentation d’une unité de production
– Ici: coût de produire un pain supplémentaire
– Généralement, le coût marginal est faible pour
une production faible et augmente graduellement
• Pour produire UN pain: nécessité d’embaucher un
boulanger, d’ouvrir une boutique…
• Peu coûteux de produire un pain supplémentaire
• Par contre, au-delà d’un certain seuil, cela peut le
devenir (embauche d’un boulanger supplémentaire..)
• Coût moyen: coût de production par unité produite
– Généralement, le coût moyen est élevé quand la
production est faible
• Il est coûteux d’embaucher un boulanger pour produire UN pain
– Le coût marginal est plus faible que le coût moyen
• Quand la production augmente:
– Le coût moyen baisse mais le coût marginal augmente
– Lorsque Coût marginal = coût moyen, le coût moyen
augmente
• Profit: produit de la vente – coût total
– Courbe d’isoprofit: combinaison (prix, quantité)
permettant d’avoir un profit identique
– Pour un profit donné: soit on produit peu à un prix très
élevé, soit on produit beaucoup à un prix plus faible
Un problème d’optimisation
Prix = Coût Marginal
• Le boulanger va choisir la production lui permettant de
maximiser son profit
• Le boulanger est preneur de prix:
– Prix fixé par le marché (ici $2.25)
– Courbe de demande horizontale
• Le boulanger va choisir la courbe d’isoprofit la plus élevé
– Soit pour un prix de $2.25  quantité: 120
• C’est aussi la quantité pour laquelle le prix est égal au coût
marginal
– Si le boulanger veut produire un pain supplémentaire: le coût
marginal est supérieur au prix. Il fait des pertes.
– Si le boulanger produit moins, le coût marginal est inférieur au
prix. Il peut augmenter le profit en augmentant la production.
• Le boulanger choisit donc la quantité en fonction du prix du
marché
Et si le prix augmente?
La courbe de coût marginal est donc identique à la courbe d’offre
Offre de marché et équilibre
• A l’équilibre, le prix est égal au coût marginal
• Ici: le prix est fixé à un niveau supérieur au coût moyen
– Le coût marginal est supérieur au coût moyen pour le prix
fixé par le marché
• Ce qui implique que l’entreprise peut faire des profits
– Rente économique pour les boulangers
• Dans une économie concurrentielle, cela va susciter de
nouvelles vocations de boulangers
– Augmentation de l’offre de pain (nouveaux entrants)
– Théoriquement, jusqu’à suppression du profit
• Le profit est nul quand l’économie est concurrentielle
et les entreprises sont preneuses de prix
Effets des changements d’offre et de
demande
• Quinoa: céréales
produites dans
l’Altiplano (Andes)
• Récemment: forte
augmentation de la
demande de
consommateurs
(fortunés) européens et
américains
Augmentation du prix
• Positif pour les producteurs. Négatif pour les
consommateurs (locaux)
• De nouveaux pays se mettent à produire (France,
Etats-Unis)
Effet d’une hausse de la demande
Effet d’une hausse de l’offre
• Innovation technique permettant de produire du pain plus
rapidement
Volume d’offre, prix du pain et
révolutions
Mauvaise récolte en 1845
Volume d’offre, prix du pain et
révolutions
Les effets des taxes
• Les taxes ont deux vocations distinctes:
– Augmenter les recettes fiscales
– Changer l’allocation de biens et services / Changer
les comportements
• Le modèle d’offre et de demande permet de
bien comprendre les deux missions de la taxe
(1) Utiliser la taxe pour augmenter le
revenu
• Ex. de la taxation du sel:
– Chine ancienne, Inde ancienne, Europe par les rois
médiévaux…
– Source d’insatisfaction (Révolution Française,
Ghandi en Inde…)
• Pas de volonté de réduire la consommation de
sel et pourtant…
(1) Utiliser la taxe pour augmenter le
revenu
(1) Utiliser la taxe pour augmenter le
revenu
• Le surplus du consommateur baisse:
– Les consommateurs payent un prix plus élevé, et
moins de sel est vendu
• Le surplus du producteur baisse:
– Ils produisent moins et reçoivent un prix net plus
faible
• Le surplus total baisse:
– Les recettes fiscales ne compensent pas la baisse du
surplus du producteur et du consommateur
• D’où de possibles protestations!
(1) Utiliser la taxe pour augmenter le
revenu
• Pour augmenter les recettes fiscales au
maximum, l’Etat préférera taxer des biens pour
lesquels la demande est peu réactive au prix
– Faible élasticité-prix
– Justification à la taxation du sel (peu d’alternative
pour la conservation des aliments)
• La taxe peut augmenter ou réduire le bien-être en
fonction de l’utilisation des recettes fiscales
– Si les dépenses fiscales améliorent le bien-être, cela
peut compenser la perte de surplus du consommateur
(2) Utiliser la taxe pour changer les
comportements
• Ex. taxation sodas, matières grasses…
(2) Utiliser la taxe pour changer les
comportements
• Ici également: perte de surplus du
consommateur
– Mais nécessité de prendre en compte d’autres
effets positifs (effets sur la santé, économies à
venir, hausse d’autres types de consommation…)
– Vision normative: l’Etat définit ce qui est « bon »
ou « mauvais »
• Même logique pour les taxes pollueurspayeurs
Le modèle de
concurrence pure et parfaite
• Hypothèses:
– Une multitude de vendeurs aux produits indifférenciés (pas
de pouvoir de marché)
– Une multitude d’acheteurs potentiels prêts à acheter le bien
au prix le moins cher possible
– Les acheteurs connaissent le prix de vente de tous les
vendeurs (sinon ils ne peuvent pas choisir le moins cher)
– Pas de cartel (du côté des acheteurs ou des vendeurs)
• Sous ces conditions, marchés parfaitement compétitifs:
– Loi du prix unique: tous les transactions se font au même
prix
– A ce prix, l’offre est strictement égale à la demande
– Les acheteurs et vendeurs sont preneurs de prix. Pas de
possibilité de jouer sur le prix.
Léon Walras (1834-1910)
• Fondateur de l’école néo-classique
• Deux échecs à Polytechnique, il entre aux Mines.
Chaire d’Economie Politique à l’Université de
Lausanne
• Son objectif: la « théorie pure en
économie »
• Théorie de l’équilibre général
– Ensemble d’équations
mathématiques rationnalisant les
comportements humains et d’offre et
de demande sur les marchés.
– Formalisation de la théorie de la
main invisible d’Adam Smith
Est-ce que la concurrence pure et
parfaite existe?
• Est-ce que toutes les entreprises vendent au
coût marginal
• Est-ce que toutes les transactions se font au
même prix?
Est-ce que les entreprises vendent au
prix marginal?
• Difficile à tester car le coût marginal est difficile à calculer
• Analyse sur le marché des cartes de crédit aux Etats-Unis dans les années
1980
Pourquoi le prix n’a pas baissé?
• Changer de banque a un coût:
– pas de concurrence effective. Les banques
peuvent maintenir des tarifs élevés
• Les banques ne peuvent pas décider du profil
de risque des consommateurs
– Les consommateurs à risque peuvent être plus
sensibles aux prix. Baisser les prix attireraient les
« mauvais clients ».
La loi du prix unique est-elle vérifiée?
Les défaillances de marchés
• A partir des années 1970, profonds bouleversement
dans l’analyse économique avec la prise en compte des
défaillances de marché
–
–
–
–
Un marché peut être concurrentiel mais « non optimal »
Prise en compte du rôle des externalités
Problème des asymétries d’informations
Problème de l’aléa moral et des phénomènes de sélection
adverse
• Dans ces situations, l’action de l’Etat peut être
nécessaire pour palier aux défaillances de marchés
• L’Etat a aussi un rôle à jouer pour fournir les
institutions nécessaires au bon fonctionnement des
marchés (droits de propriété, lutte contre la rente…)
L’exemple des antibiotiques
• Depuis la découverte de la pénicilline en 1928,
formidables progrès médicaux
• Mais l’Organisation Mondiale de la Santé s’inquiète de
« l’ère post antibiotiques » du fait de la résistance des
bactéries
– Besoin d’actions fortes et urgentes pour limiter le recours
aux antibiotiques
• Ex. Inde: les antibiotiques sont librement accessibles
en pharmacie. L’offre et la demande sont régulées par
le marché (et donc le prix)
• « Dilemme social »: l’antibiotique est bonne
individuellement mais peut devenir un problème social
– Problème de la non prise en compte des conséquences des
actions individuelles sur les autres individus
Les externalités
• Situations dans lesquelles le marché ne prend
pas en compte les conséquences positives ou
négatives d’actions de certains agents
économiques
– Externalité négative: pollution
– Externalité positive: effet de l’arrivée du TGV sur le
marché immobilier
• Coûts ou bénéfices sociaux différents des
coûts ou bénéfices privés
Deux grands économistes
• Ronald Coase (1910-2013):
– Négociations entre agents pour
prendre en compte ces externalités.
Attribution de « droits de propriété »
(ex: droits à polluer)
• Arthur Pigou (1877 – 1959):
– L’Etat doit agir pour prendre en
compte ces externalités
– Taxe pigouvienne pour changer les
comportements
Les problèmes informationnels
• Les asymétries d’informations peuvent provoquer deux
phénomènes:
– L’aléa moral: Ex. de l’effort du salarié non-observable (cf.
ch. 2)
– La sélection adverse: les individus vont systématiquement
faire les mauvais choix
• Le problème des « Lemons » (Akerlof, Spence et
Stiglitz, Prix Nobel 2001)
Le problème des « lemons »
• Marché des voitures d’occasion
• La qualité de chaque véhicule est inconnue, seule la qualité
moyenne l’est
• Supposons 10 vendeurs:
– Qualité comprise entre 0 et 9000€
– Qualité moyenne: 4500€
– Les vendeurs refusent de vendre au prix inférieur à la valeur du
véhicule
– Les consommateurs ne sont pas prêts à mettre plus que la
valeur moyenne
– Seuls les vendeurs de voitures de mauvaise qualité accepteront
de vendre à 4500€… ce qui fait baisser la valeur moyenne des
véhicules sur le marché
– A chaque période, les vendeurs de voitures de meilleures
qualités sont exclus du marchés.
– Seuls les véhicules les plus mauvais peuvent être vendus
La solution?
• Certains mécanismes de marché peuvent
permettre de faire face à ces problèmes
– Assurance pour les véhicules d’occasion
• L’action de l’Etat est le plus souvent nécessaires
– Systèmes de taxations
– Normes / informations obligatoire / clauses dans les
contrats..
• Les mécanismes de marché peuvent parfois être
contre-productifs
Un exemple de mécanisme de
marchés contre-productif
• Système d’amendes pour les parents en retard mis en
place en Israël en 2000
Conclusion
• Mécanismes de marchés décentralisés
• Ils fonctionnent de manière optimale sous des
conditions bien précises (et restrictives):
– Concurrence / pas de pouvoir de marché
– Pas de problème informationnel
– Pas d’externalités
• Dans tous les autres cas: l’action de l’Etat est
souvent indispensable
Prochaine séance
La monnaie, les banques, la finance
Financement de l’économie, politiques monétaires et
inflation
Mercredi 10 février
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