Médecine et internet : vers une nécessaire évolution de la relation

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Médecine et Internet : vers une nécessaire évolution
de la relation médecin-patient et des rapports
entre médecine et société[1]
IP G. Moutel*, C. Hervé
À
travers l’histoire, le médecin a été considéré comme un mage
et il n’était pas question de mettre en cause sa science et le
fondement de son savoir.
Actuellement, nombreux sont les patients et les citoyens qui cherchent à comprendre l’art de la médecine. Les mentalités évoluent
et l’on constate désormais que le médecin doit mieux se faire
comprendre et engage sa responsabilité dans les pratiques qu’il
exerce sur autrui. Le médecin doit donc être conscient de son
devoir de responsabilité en regard de la demande croissante d’information des patients. Être responsable, c’est d’abord répondre à
l’attente du patient, non seulement à sa demande de soins mais
aussi à sa demande d’écoute et d’information.
Ê
tre responsable, c’est également répondre devant la société
aux interrogations légitimes de celle-ci à un moment
où :
 l’efficacité croissante de la médecine augmente aussi ses
risques ;
 les médecins ont une responsabilité impérieuse dans l’accroissement des dépenses de santé et de ses implications économiques ;
 la population tend à confondre droit à la santé et droit aux
soins ;
 de nombreux problèmes sociaux tendent à se médicaliser
(prise en charge des exclus, thérapeutiques du sujet âgé, handicaps, etc.).
Ainsi, la responsabilité apparaît comme la revendication
logique des conséquences de notre liberté d’action. Il est
donc impossible d’échapper à la règle commune liant l’exercice
d’une liberté à l’acceptation d’une responsabilité, en particulier
en termes d’information sur les enjeux de santé.
[1]
© Act Méd Int 2002;5(3):109-12.
* Universitaire au laboratoire d’éthique médicale, de droit de la santé et de santé publique de
Necker (Université Paris-V) depuis 1999, Grégoire Moutel assure, en parallèle les consultations
de médecine interne à l’hôpital Fourestier (Nanterre).
Outre ses DEA et doctorat en éthique médicale, il est titulaire d’un DES endocrinologie et métabolisme et d’un DESC d’andrologie.
Depuis deux ans, le Dr Moutel a – entre autres – pris en charge le secrétariat général de la
SFFEM (Société française et francophone d’éthique médicale), il assure avec le Pr Hervé l’enseignement et la direction des mémoires (maîtrise, DEA et DIU) d’éthique médicale de la Faculté
Necker et la coordination des programmes de recherche dans le cadre de l’IREB.
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En général, traditionnellement, chaque patient passait avec le
médecin un contrat de soins (souvent oral) qui précisait les
modalités de sa prise en charge. Le consentement aux soins
obtenu reposait alors sur une information claire et intelligible donnée en consultation ou au lit du malade. Telle était la
démarche souvent admise (1, 2). Selon un sondage CSA réalisé
en mai 2000 (3), près de 90 % des Français font plus confiance à
leur médecin qu’à Internet en matière de santé. Aux États-Unis,
les patients préfèrent d’abord, à 70 %, s’informer sur Internet. En
France, cette tendance s’amorce pour la tranche des 18-24 ans,
convaincue à 60 % de l’intérêt d’une information sur les sites
santé en plus de celle offerte par le médecin.
L’émergence d’Internet dans le domaine de la santé établit
un nouvel espace d’information aux données médicales
pour les médecins et les patients. Elle donne de ce fait une
nouvelle dimension à l’exercice médical en tant que tel dès lors
que chacun peut collecter des informations, voire effectuer des
démarches diagnostiques et/ou thérapeutiques via des serveurs
sur le Web. Comme l’écrit le Conseil de l’Ordre des médecins
dans son dernier rapport : “Le contact rendu possible entre
médecins et patients, et entre patients eux-mêmes, va conduire
à une circulation de données médicales qui va vite dépasser le
simple cadre des conditions existantes au sein du réseau actuel
de soins. Au confluent de l’informatique médicale et de la santé
publique, la cybermédecine constitue une véritable prise en main
par le patient des dernières données médicales et scientifiques
pouvant le concerner” (4).
Les États-Unis ont largement contribué à cette évolution en
offrant aux patients, sur le Net, des données scientifiques, des
sites de consultation, des lieux de débat et de forums, voire
la possibilité d’acheter certains médicaments en ligne. On
dénombre ainsi sur le Web anglophone plus de 15 000 sites
permettant un accès libre aux patients (5).
En Europe, des sites comme Planet Medica (www.planetmedica.fr)
proposent d’implanter un service avant consultation médicale et
un autre après celle-ci pour conseiller les patients. Il existe par
ailleurs de plus en plus de sites d’information médicale comme
www.notreDocteur.com, www.medimania.com, www.33 docavenue.com, qui permettent au patient de s’informer en dehors
de la présence des médecins et hors les murs des cabinets de
consultation ou des hôpitaux.
Parallèlement à cette évolution, les recommandations destinées aux médecins, pour l’information des patients, ont été
publiées par l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 5 - octobre 2006
en santé (ANAES) (6), en mars 2000, à la suite du rapport du
Pr Dominique Thouvenin. Ce rapport a le mérite de réaffirmer la primauté de l’information orale sur l’information
écrite et de rappeler les buts de l’information délivrée par
le médecin :
 éclairer le patient sur son état de santé, lui décrire la nature
et le déroulement des soins ;
 lui fournir les éléments de la décision d’accepter ou de
refuser les actes diagnostiques ou thérapeutiques qui lui sont
proposés ;
 consolider la relation de confiance avec le médecin ;
 obtenir la participation active du malade aux soins.
On constate néanmoins que, au-delà de ces recommandations,
aussi indispensables soient-elles, les patients et les familles
recherchent une information autre, souvent du domaine de
l’écrit et de plus en plus fréquemment obtenue et diffusée en
dehors de toute relation médecin-patient, à travers la presse et
les sites Internet. Il convient donc de réfléchir à l’évolution de
la relation médecin-patient et des rapports entre la médecine
et la société en regard de cette évolution (7).
Cela conduit à s’interroger sur la nature même de l’acte médical,
sur les choix pédagogiques auxquels les médecins doivent se
former et sur les domaines dans lesquels ils doivent s’impliquer pour instaurer une démarche de progrès qui permette
aux patients de mieux comprendre et les pousse à réclamer
plus de lisibilité.
Données médicales sur le Web :
l’importance d’un discours médical
transparent et validé
Le corps médical ne peut s’enfermer dans le silence. Il doit s’impliquer dans la gestion des enjeux éthiques et symboliques liés à
l’évolution du savoir et des pratiques médicales. Ce constat est
aujourd’hui d’autant plus nécessaire que, désormais, le progrès
scientifique et médical, bien qu’améliorant incontestablement
la santé des personnes, renferme des facettes qui intriguent
(génétique, clonage, devenir de la recherche sur l’embryon,
égalité d’accès aux soins, prise en charge de la douleur, devenir
des personnes âgées, etc.). Il y a là des choix de société impliquant directement la santé des individus dont les médecins ont
la charge et pour lesquels la responsabilité de l’acte professionnel
est engagée (application incertaine de nouvelles technologies,
sécurité sanitaire, choix en matière de politique de dépistage ou
remboursement de soins). Il convient donc de promouvoir, en
termes d’éducation de la population et d’organisation du débat
social, une réelle politique de transparence, d’information, mais
aussi de prise en compte des mécanismes de compréhension, de
désir ou de peur de l’opinion publique, du fait même que la vie
des individus qui la composent est souvent impliquée en premier
lieu par les conséquences des décisions prises. La régulation
des pratiques de soins et des choix médico-scientifiques se doit
donc de prendre en compte les aspects culturels et humains
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 5 - octobre 2006
de la population (prise en compte des impacts symboliques,
sociologiques, anthropologiques, etc.), qu’ils soient rationnels
ou non, pour accompagner harmonieusement et démocratiquement le progrès médical.
Ainsi, alors qu’un discours général, particulièrement
médiatique et entretenu par certains scientifiques, pourrait consister à présenter la performance technologique
uniquement sous ses angles spectaculaires et positifs, il est
du devoir médical d’en souligner aussi les inconvénients, les
limites, voire les dérives, et de les exposer au public, préalablement (et non a posteriori) à la réalisation des choix. Sinon,
un discours qui laisserait croire en permanence que les choix
sont établis sur des certitudes déboucherait, en cas d’aléas, sur
une attitude de rejet et de défiance du public à l’égard du corps
médical qui n’aurait pas joué son rôle de vigile en santé publique
et de garant de la santé des individus. Une telle attitude pourrait
être source, à l’avenir, d’une suspicion du public à l’égard du
progrès médical et, donc, source de régression.
Au début de l’année 2000, le site du secrétariat d’État à la Santé a
présenté le nouveau portail d’accueil, sante.fr, donnant accès aux
différentes adresses Web des organismes et agences officiels du
secteur de la santé publique. Cette annonce faite par la Direction
générale de la Santé s’inscrit dans la perspective de promotion
de la qualité des informations santé sur Internet (8).
Durant ce même premier semestre 2000, le Conseil national
de la recherche aux États-Unis a rendu un rapport sur la mise
en place des systèmes de soins sur Internet (9).
 Il constate que des milliers de sites existent déjà, qu’ils soient
constitués dans une visée pédagogique, diagnostique ou thérapeutique, avec possibilité d’achat de médicaments en ligne.
 Il souligne que, en regard des services proposés, les exigences
opérationnelles habituelles de la pratique médicale ne sont pas
toujours respectées en termes de déontologie, de compétence
professionnelle, de validité des informations et, enfin, sur les
plans marchand et commercial.
L’essor considérable des nouvelles technologies telles qu’Internet
aboutit à une abondance d’informations dont la validité doit
être remise en cause. N’importe qui peut délivrer des données
sur la santé, aborder des maladies et des traitements, proposer
des produits et des services. La qualité des informations est
très variable, ce qui, en matière de santé, peut faire courir de
réels dangers. La difficulté est de distinguer ce qui est valable
de ce qui ne l’est pas.
On peut rapprocher ce constat des recommandations destinées
aux médecins, concernant l’information des patients (6). Ce travail
pose clairement la question de la légitimité des informations
offertes aux patients. Cette légitimité repose en grande partie
sur l’obligation de diffuser uniquement des données validées et
qui doivent présenter tous les aspects d’un sujet, c’est-à-dire les
bénéfices attendus des soins proposés mais aussi leurs inconvénients et risques éventuels. Il est également recommandé que les
documents écrits soient testés sur des patients ou des utilisateurs
pour valider leur niveau de compréhension, qu’il s’agisse de textes
rédactionnels ou de tout autre support audiovisuel ou multi-
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média. C’est pourquoi plusieurs grands principes scientifiques
et éthiques doivent s’appliquer à la gestion du contenu et à
l’animation d’un site Internet médical (8, 10) :
 nécessité d’une politique pédagogique qui ne peut se faire qu’à
partir de travaux de références (travaux de recherche validés,
publications internationales reconnues, rapports officiels) ;
 validation du contenu du site par un comité éditorial et
scientifique composé à la fois de médecins, de scientifiques,
de professionnels de la communication et d’utilisateurs ;
 nécessité pour ce comité d’avoir recours à des relecteurs ou
experts extérieurs pour valider les textes mis en ligne ;
 nécessité d’une validation de la compréhension du contenu
par les utilisateurs ;
 travail de rédaction des documents permettant un maximum
d’exhaustivité des données, avec une obligation de qualité concernant les liens hypertextes et l’articulation des différentes contributions sur le site ;
 politique de liens intersites qui doit reposer également sur
un principe de validation, c’est-à-dire qu’il convient de ne pas
établir de liens avec des sites dont la légitimité ne serait pas
sûre et dont la validation scientifique des données ne serait
pas acquise ;
 mise à jour mensuelle indispensable, pour “coller” au plus près
à l’évolution des pratiques et données médicales et scientifiques,
à l’actualité du débat social et à la législation ;
 prise en compte des questions et remarques formulées sur le
site (obligation d’une zone de dialogue avec les utilisateurs) par
des professionnels ou par le public et recherche des réponses
(soit dans le contenu du site, soit auprès de personnes référentes
dans chaque thématique).
Cybermédecine :
vers une nouvelle prise de conscience
de la relation médecin-patient
et des rapports entre médecine et société
L’émergence d’Internet dans le domaine de la santé établit un
nouvel espace d’accès aux données médicales pour les médecins et les patients. Elle donne de ce fait une nouvelle dimension à l’exercice médical en tant que tel dès lors que chacun
peut collecter des informations, voire effectuer des démarches
diagnostiques et/ou thérapeutiques via des serveurs sur le Web.
Comme le souligne le rapport du Conseil de l’Ordre (4), il faut
différencier plusieurs stades de contact entre un médecin
et son patient sur le Net.
 Le plus répandu réside dans une information délivrée comme
elle le serait dans une revue de vulgarisation pour le grand public.
À ce niveau, comme sur tout autre support, la question de la
validation médicale ou scientifique de cette information paraît
fondamentale, et une information de qualité sur le Web peut,
dès lors qu’elle est de qualité, être un apport complémentaire
de ce qu’aura fait ou de ce que fera un médecin au cours d’une
consultation précédente ou à venir.
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 Au-delà
de cette information, plus détaillée, certains sites
délivrent des conseils personnalisés en fonction du profil des
personnes qui se connectent sur Internet. Comme le soulignent
les experts, le développement de ces conseils est exactement “à la
frontière entre l’information et la véritable consultation en ligne”.
C’est ici qu’il faut s’interroger sur la ou les raisons qui poussent
certains de nos concitoyens à rechercher ces conseils sur le Web
plutôt que directement auprès d’un médecin en consultation,
au sein du colloque dit singulier. Plusieurs hypothèses sont
à discuter. La possibilité d’anonymat pour le patient et celle
d’une plus grande liberté d’expression sont souvent évoquées
par les personnes se connectant sur les sites santé d’Internet. Il
convient que les médecins s’interrogent alors sur la façon dont
ils conçoivent la nature de l’exercice médical. En effet, si les
patients vont chercher sur le Net, c’est que la consultation ne
leur apparaît plus comme un lieu de confidentialité et de liberté
suffisant. Le secret médical, conçu avant tout pour protéger le
patient, est une valeur qu’il convient donc de leur expliciter
pour que la consultation médicale reste le lieu possible de prise
en compte de l’intimité des personnes (11). Quant à la liberté
d’expression, cela implique que les médecins sachent redonner
confiance aux patients, en leur ouvrant les portes du dialogue
dans tous les domaines de la santé, quel que soit le motif apparent
de la consultation. Cela implique que les médecins combattent
leurs propres tabous et s’investissent dans leur rôle de prise en
charge globale des personnes. Il s’agit là d’une réelle réflexion
sur le rôle du médecin dans la société et sur la formation des
médecins à exercer leur art en regard des attentes du public. Tout
médecin généraliste ou spécialiste doit donc se considérer
comme un acteur d’information et d’éducation des patients.
Une vision parfois trop disciplinaire ou technique de l’exercice
médical a peut-être fait oublier que chaque professionnel de
santé est avant tout un acteur devant inciter au dialogue sur
les choses du corps et de l’esprit ainsi que sur les questions
qui touchent à la médecine et à la société (sexualité, OGM,
génétique, mort... autant de questions abordées aujourd’hui
sur les sites de santé).
Le médecin a donc à repenser la nature de son exercice en remettant au centre la personne et en refondant le concept de prise en
charge globale des personnes. Ainsi, un cardiologue doit parler
à une patiente de la nécessité d’effectuer une mammographie et
de consulter un gynécologue, et tout médecin doit aborder la
question de la mise à jour des vaccinations, des comportements
sexuels, de la prévention des cancers, du risque suicidaire et
de tous les enjeux de santé publique ou éthique qui inquiètent
les patients. Toutes les dimensions de la santé devraient ainsi
réintégrer l’espace des consultations médicales. On ressent
alors combien l’émergence de la médecine sur Internet pose
de manière claire la question de l’évolution de la consultation
médicale traditionnelle et du temps consacré à un patient et
à ses préoccupations fondamentales. À travers cette évolution, la question d’une reconnaissance du rôle de conseiller des
médecins et du bienfondé de consultations longues, d’au moins
30 minutes d’écoute, d’information et d’éducation à la santé, est
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 5 - octobre 2006
donc plus que jamais posée. Faute de telles évolutions, seuls
d’autres médias, comme Internet, offriront la possibilité aux
patients d’un accès à l’information médicale.
Dans le cas contraire, les sites Internet viendraient compléter
intelligemment et utilement les données apportées lors de la
rencontre entre le médecin et son patient. Au-delà de la diffusion
d’information et de l’avis médical sur Internet, la question peut
se poser d’une véritable consultation sur le Net. Sur les plans
déontologique et médico-légal, elle est à ce jour exclue en France
(condamnations pour médecine à distance ou médecine par téléphone). Il n’en demeure pas moins que la question ne saurait être
aussi simplement réglée par ce seul interdit. En effet, Internet
peut être un formidable outil de télémédecine en permettant
l’accès à des compétences ou à des expertises à distance non
disponibles dans une zone géographique ou compte tenu de l’incapacité d’un patient à se déplacer. Là encore, plutôt que d’exclure
cette évolution, il s’agit pour le médecin de l’accompagner. C’est
ainsi qu’il sera envisageable de consulter un médecin sur Internet
par l’entremise d’un médecin intermédiaire qui sera à côté du
patient. Une telle approche pourra enrichir en compétence et
en qualité l’acte médical diagnostique ou thérapeutique (second
avis sur une imagerie radiologique ou échographique, sur un
tracé ECG, sur une lésion dermatologique, conseil sur une intervention chirurgicale à distance, etc.) sans que la technique ne se
substitue à la relation médecin-patient, un médecin étant au côté
du patient en consultation, en hospitalisation, voire au domicile
de ce dernier pour l’instruire dans cette nouvelle démarche de
soins. On constate donc, là aussi, que c’est vers une évolution
positive de la relation médecin-patient que la cybermédecine et
la télémédecine peuvent déboucher dès lors que les médecins
s’y investissent. Il conviendra parallèlement que, sur les plans
déontologique et juridique, soient alors clarifiées les nouvelles
responsabilités, telles celles du médecin télé-expert (lorsqu’il
agit à distance sans examiner le patient), celles du médecin qui
est aux côtés du patient (pour lequel le recours à la téléexpertise
pourra constituer une nouvelle obligation de moyens), mais aussi
celles des prestataires techniques des réseaux (pour lesquels des
obligations de confidentialité des réseaux et de sécurité feront
partie du cahier des charges).
Conclusion :
ordinateur–médecin ou médecin informatisé ?
Réfléchir à la médecine telle que nous la pratiquons
La relation entre le médecin et son malade, fondamentale
dans l’acte médical et base du crédit de la profession médicale,
peut-elle être modifiée à ce point sans que les conséquences
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 5 - octobre 2006
sur cette relation, et donc sur la médecine, soient envisagées ?
En gommant l’aspect relationnel entre le médecin et le patient,
comme pourrait le faire craindre une évolution croissante vers
une médecine qui ne serait que cybermédecine, ne risque-t-on
pas d’appauvrir cette relation, dont on sait qu’elle est humainement complexe et qu’elle se fonde essentiellement sur le concept
sociologique d’“attitude” entre deux personnes ? Ce concept sur
lequel repose la relation médecin-patient donne priorité à la
relation entre l’acteur et l’objet de l’action, au lieu de les séparer.
Parler d’attitudes dans le rapport au malade, c’est reconnaître
l’importance centrale des relations interpersonnelles dans les
soins et surtout comprendre que l’efficacité d’une action médicale
dépend en partie de l’attitude du malade à l’égard des soins et
des personnes qui les décident.
Le paradigme de la médecine apparaît alors de plus en plus
différent de celui de la biologie et de ses applications techniques. La médecine ne doit pas être aveuglée par les progrès
techniques.
En fait, si nous nous interrogeons sur la mise en marche d’un
accès à la médecine sur Internet, c’est qu’elle remet en lumière
l’importance, peutêtre oubliée, de la dimension relationnelle
de la médecine. Ainsi, l’évolution de la cybermédecine a ceci
de positif que, par l’opportunité des questions qu’elle pose,
elle nous donne à réfléchir sur la médecine telle que nous la
pratiquons. ■
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