D O S S I E R T H É M A T I Q U E La thérapie photodynamique en gastroentérologie Photodynamic therapy in gastroenterology ● V. Maunoury*, S. Mordon** P O I N T S F O R T S P O I N T S F O R T S ■ La thérapie photodynamique repose sur la sensibilisation élective d’une lésion puis sa destruction par une activation lumineuse spécifique. ■ Les principaux photosensibilisants sont le Photofrin®, le Foscan® et le 5-ALA. ■ En endoscopie digestive, la lumière d’excitation provient d’une source laser appliquée sur la lésion cible par l’intermédiaire d’une fibre optique. ■ Le patient doit être informé des précautions à prendre visà-vis de la photosensibilisation cutanée et oculaire. ■ Les principales applications en pathologie digestive concernent les lésions superficielles de l’œsophage, néoplasiques ou prénéoplasiques, et le cholangiocarcinome. La photothérapie dynamique s’intègre dans le cadre d’une discussion multidisciplinaire. Mots-clés :Thérapie photodynamique - Laser - Cancer de l’œsophage - Cholangiocarcinome. Keywords: Photodynamic therapy - Laser - Œsophageal cancer Cholangiocarcinoma. a thérapie photodynamique (Photo Dynamic Therapy: PDT) consiste à sensibiliser électivement une lésion par l’administration d’un photosensibilisant puis à la détruire par une activation lumineuse spécifique du photosensibilisant. C’est une démarche en deux temps : d’abord, l’application ou l’administration d’un photosensibilisant qui s’accumule de manière variable, dans un délai de quelques heures à 3 jours, dans la lésion à traiter, puis l’éclairage de la lésion par une lumière de faible intensité, sans effet thermique, dont la longueur d’onde L * Service des maladies de l’appareil digestif et de la nutrition, CHRU Lille. ** EA 2689 INSERM IFR 114, CHRU Lille. 78 est préférentiellement absorbée par le photosensibilisant. L’excitation du photosensibilisant initie alors par transfert d’énergie une cascade de réactions finalement cytotoxiques. PRINCIPE DE LA THÉRAPIE PHOTODYNAMIQUE Rappelons d’abord que la lumière véhicule une énergie qui est en relation inverse avec sa longueur d’onde : la lumière bleue (400 à 450 nm) est plus énergétique que la lumière rouge (600 à 700 nm). D’autre part, sa pénétration dans les tissus augmente avec la longueur d’onde : le rouge pénètre 3 à 5 fois plus profondément que le bleu. À l’état fondamental (S0), une molécule (ici le photosensibilisant) présente une énergie d’équilibre dite minimale. Soumise à une excitation lumineuse, cette molécule peut être portée à un niveau d’excitation supérieur S1, S2… instable – l’absorption de lumière étant un phénomène très rapide, l’électron promu à un niveau d’énergie supérieur n’a pas le temps de modifier son spin et se retrouve dans une configuration dite singulet (S). Mais seuls certains photons, de longueur d’onde définie, sont absorbés : à chaque molécule correspond un spectre d’absorption (ou d’excitation). La molécule excitée possède un excès d’énergie qu’elle va perdre rapidement et spontanément soit sous forme de chaleur, soit en émettant une fluorescence (photodiagnostic), soit enfin en passant par un état intermédiaire dit “triplet” dont le retour à l’état fondamental est beaucoup plus lent que celui de l’état singulet (figure 1). C’est à l’état triplet que la molécule de photosensibilisant va avoir le temps de réagir avec les molécules intracellulaires, soit directement par des réactions d’oxydoréduction qui conduisent à des espèces radicalaires toxiques, soit indirectement par transfert d’énergie à l’oxygène, amenant celui-ci à un état singulet, espèce oxydante pour les acides aminés, certaines bases nucléiques et, à un moindre degré, les chaînes lipidiques composant les membranes (figure 2). Dans les deux cas, la présence d’oxygène est essentielle au processus photodynamique ; c’est un handicap pour le traitement des lésions évoluées hypoxiques. Dans le premier cas, le photosensibilisant est dégradé ; dans le deuxième, il revient à son état fondamental, disponible pour une nouvelle excitation lumineuse. Le mécanisme du deuxième type est habituellement prépondérant (1). La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 2 - vol. IX - mars-avril 2006 D O S S I E R T H États singulets S1 Oxygène singulet Fluorescence Absorption Niveaux d'énergie S2 État triplet T1 Radicaux libres S0 Niveau fondamental Figure 1. Diagramme représentant les niveaux d’énergie d’une molécule et les différentes voies conduisant à l’émission de fluorescence et aux processus de photosensibilisation (1). Photon Substance Oxygène Substance activée Oxygène singulet Mort cellulaire Altérations cellulaires Figure 2. Mécanisme de type II prépondérant dans le processus photodynamique (1). LES PHOTOSENSIBILISANTS Un photosensibilisant est une molécule non toxique pour l’organisme et dénuée d’activité thérapeutique propre. Il est idéalement caractérisé par : – une fixation ou une rétention élective par les cellules cancéreuses ; – un pic d’absorption lumineuse (ou parfois plusieurs). Administré en topique ou par voie générale, sa posologie dépend du poids du malade et non des indications. Trois photosensibilisants sont actuellement utilisés en gastroentérologie : le porfimère sodique (Photofrin® ou Photobarr®, Axcan Pharma), le méta-tétra hydroxyphényl chlorin (mTHPC) (Foscan®, Biolitec™), et l’acide 5 aminolévulinique (5-ALA) (commercialisé par plusieurs sociétés dont Medac, Dusa, PhotoCure), qui n’est pas un photosensibilisant mais un précurseur d’un photosensibilisant endogène, la protoporphyrine IX. Dérivé de l’hématoporphyrine (HpD), le Photofrin® est le photosensibilisant le plus anciennement et le plus couramment utilisé. Son spectre d’absorption présente plusieurs pics ; l’absorption est maximale dans le bleu à 400 nm. Cependant, il est en pratique excité à 630 nm en raison d’un compromis entre l’absorption de la molécule et la pénétration tissulaire de la lumière. Il est excité 48 à 72 heures après son administration i.v. (2 mg/kg). Il présente plusieurs inconvénients : un faible coefficient d’absorption dans le rouge, un faible gradient de concentration tumorale/tissu sain et La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 2 - vol. IX - mars-avril 2006 É M A T I Q U E une photosensibilisation cutanée prolongée qui oblige les patients à se protéger de la lumière vive pendant 3 à 6 semaines (2). L’ALA est métabolisé en excès, pour des raisons mal connues, en protoporphyrine IX dans les cellules tumorales ; administré per os à la posologie de 30 à 60 mg/kg, son accumulation est rapide (4 à 6 heures) pour un traitement qui peut être réalisé avec la même longueur d’onde et donc le même laser que pour le Photofrin®. Surtout, sa rétention cutanée est brève (36 à 48 heures). Les vecteurs et la dynamique de l’accumulation (ou de la rétention) des photosensibilisants dans les tumeurs avec un gradient de concentration tissu tumoral/tissu sain sont mal connus ; il s’agit d’un processus complexe faisant intervenir le type de la tumeur, sa taille, sa vascularisation et le degré d’infiltration par les macrophages. Il est ainsi très variable et cette variabilité rend compte de la reproductibilité parfois inconstante de la PDT comme de ses effets secondaires (sténose). Ce processus semble dépendant des lipoprotéines de basse densité (LDL), qui sont les principaux transporteurs sanguins des porphyrines et dont les cellules cancéreuses expriment plus de récepteurs spécifiques que les cellules normales. Des travaux ont montré le rôle du récepteur spécifique des LDL dans la capture cellulaire des porphyrines (3). Une méthode originale consisterait à encapsuler le photosensibilisant dans des vecteurs capables de le transporter sélectivement vers les cellules tumorales (4). Les liposomes sont le plus couramment utilisés car ils peuvent incorporer en leur sein aussi bien des molécules hydrophiles que des molécules hydrophobes. Les liposomes ne peuvent s’évader du compartiment sanguin, sauf lorsque celui-ci est altéré par un état inflammatoire ou tumoral ; d’autre part, leur structure “étrangère” à l’organisme rend compte de leur destruction par les macrophages. Ce double mécanisme explique leur intérêt potentiel comme vecteur des photosensibilisants. LES SOURCES LUMINEUSES Une lumière d’excitation monochromatique et d’intensité définie est habituellement utilisée pour initier la PDT. Observons néanmoins qu’une lumière blanche couvrant les différents pics d’absorption du photosensibilisant initie aussi une réaction photodynamique. Cela explique la photosensibilité cutanée. Néanmoins, une source de lumière laser est le plus souvent employée, car elle est non seulement monochromatique mais elle a surtout l’avantage de pouvoir être conduite dans une fibre optique passée dans le canal opérateur d’un endoscope. Une des raisons du renouveau actuel de la PDT tient à la mise à disposition de diodes laser de différentes longueurs d’onde, d’usage plus facile et de coût bien moindre que les lasers à colorant accordables initialement employés. Le plus souvent, les lasers diodes proposés pour la thérapie photodynamique émettent à 630, 635, 652 ou 730 nm. Rappelons que la longueur d’onde de la lumière émise est un paramètre essentiel, dépendant de l’absorption du photosensibilisant mais aussi déterminant de la profondeur de l’action photodynamique : superficielle dans le bleu (400 nm), plus profonde dans le rouge et l’infrarouge (600 à 700 nm). 79 D O S S I E R T LES SYSTÈMES D’ILLUMINATION La mise en œuvre de la PDT requiert un applicateur ou un diffuseur de lumière, le plus souvent cylindrique, de longueur variable, situé à l’extrémité d’une fibre optique à usage unique. Ces fibres, en silice (Biolitec™), semi-rigide, ou en plastique (Medlight™), plus souple, ne présentent jamais une transmission de 100 % ; par conséquent, l’intensité lumineuse en bout de fibre ou au niveau du diffuseur cylindrique est diminuée par rapport à l’intensité délivrée par la source. C’est la raison pour laquelle la fibre doit être calibrée (sphère de calibration) avant son utilisation afin que l’émission laser compense la perte liée à la transmission par la fibre. Des ballonnets transparents tels que ceux développés par la société Medlight ou des fibres diffusantes telles que celles proposées par la société Osyris permettent de distribuer de manière homogène la lumière aux tissus (figures 3 et 4). Ce système de diffusion lumineuse vise à appliquer une dose de lumière optimale, définie par unité de surface lésionnelle. Elle est exprimée en J/cm2 (fluence). Elle dépend des indications. Elle correspond à la puissance (en watts [W]) délivrée par le laser au niveau du diffuseur (après calibration) multipliée par le temps d’exposition (en secondes [s]), rapportée à la surface illuminée en centimètres carrés. Dose de lumière (J/cm2) = puissance (W) x temps de traitement (s) / surface (cm2) En pratique, elle est souvent exprimée en joules par centimètre de diffuseur ; c’est ainsi que, pour une illumination de 300 J/cm recommandée pour le traitement du cancer superficiel de l’œsophage par le Photofrin®, avec un diffuseur de 2 cm de long délivrant une puissance de 1 W, la durée d’illumination sera de 600 s (10 minutes). Mais, idéalement, la surface traitée est mieux définie par l’utilisation d’un ballon centreur et diffuseur de lumière. Le ballon est un cylindre de diamètre (D) et de longueur (L) définis ; par exemple, si D = 1,8 cm et L = 2 cm, sa surface est de 11 cm2. En Figure 3. Ballon diffusant développé par la société Medlight. Figure 4. Fibre diffusante développée par la société Osyris. 80 H É M A T I Q U E reprenant l’exemple ci-dessus, la fluence sera de 1 W x 600 s / 11 cm2 = 55 J/cm2. Mais, si le ballon est “gonflé” à un diamètre inférieur, par exemple 1,5 cm, sa surface sera de 9 cm2 ; en gardant les mêmes paramètres que ci-dessus, il y aura une surexposition lumineuse de 20 % (67 J/cm2) ; il faudra donc réduire le temps d’exposition à 480 s pour garder la même dose de lumière appliquée aux tissus. Enfin, on note que, pour une dose de lumière constante, la puissance et le temps d’illumination peuvent varier. Il semble préférable, pour une meilleure efficacité de la PDT, de diminuer la puissance et d’allonger le temps d’illumination ; cela évite la dégradation trop rapide du photosensibilisant (photobleaching) et l’épuisement brutal des “réserves” du tissu en oxygène. LES APPLICATIONS EN HÉPATOGASTROENTÉROLOGIE Matériel et méthode L’information préalable du malade au cours d’une consultation particulière est essentielle au bon déroulement du traitement. Bien qu’indolore, le traitement est au mieux réalisé sous anesthésie générale. Les suites sont habituellement simples, en dehors de quelques douleurs relevant d’un traitement antalgique banal. L’alimentation normale peut être reprise sans délai ; il est rare que l’intensité de la réaction nécrotique nécessite une détersion endoscopique. Toute réaction d’intensité ou de durée inhabituelle nécessite un bilan hospitalier pour éliminer une perforation de survenue différée. À un peu plus long terme, la survenue d’une sténose est une complication non exceptionnelle, habituellement soulagée par des dilatations prudentes parfois itératives. Le malade doit enfin éviter d’exposer sa peau et ses yeux à toute lumière vive pendant une durée variable (un mois pour le Photofrin®), fonction du photosensibilisant, afin d’éviter d’éventuels accidents (brûlures) de phototoxicité cutanée. L’exposition à une lumière de faible intensité (pénombre) est en revanche recommandée pour favoriser la dégradation du produit retenu dans la peau. Ces précautions doivent être expliquées au patient avant le traitement ; son information est renforcée par la délivrance d’un Guide du patient. La fibre optique diffusante est passée dans le canal opérateur de l’endoscope. Les vidéoendoscopes ne sont pas équipés d’un filtre électronique supprimant le spectre lumineux émis lors du traitement à 630 nm (pour le Photofrin®), d’où un “éblouissement” du CDD ; en pratique, une fois le diffuseur en place, le traitement est réalisé en aveugle, le vidéoendoscope éteint (ce qui, de plus, évite une surexposition lumineuse liée à la lumière de l’endoscope). Il peut être relativement plus pratique, si l’on peut encore en disposer, d’utiliser un fibroscope, avec des lunettes qui suppriment la lumière diffusée lors du traitement sur une bande spectrale autour de 630 nm. Aucun traitement associé n’est requis. En l’absence de toxicité cumulative, le traitement peut être renouvelé. Le cas échéant, la réalisation d’une PDT ne constitue nullement une gêne à la mise en œuvre ultérieure d’une radio- et/ou chimiothérapie. Une surveillance clinique, endoscopique et histopathologique est pratiquée au mieux 2 mois après le traitement, puis tous les 3 mois pendant 2 ans ; elle est ensuite adaptée aux risques de récidive ou associés de la pathologie traitée. La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 2 - vol. IX - mars-avril 2006 D O S S I E R T H Indications Elles résultent, au terme d’un bilan préthérapeutique, d’une discussion en Unité de concertation pluridisciplinaire en oncologie. Il faut distinguer les indications de l’AMM des photosensibilisants et celles en cours d’évaluation. Ce sont respectivement : – les dysplasies de haut grade sur endobrachyœsophage et les récidives œsophagiennes superficielles après traitement locorégional du cancer de l’œsophage ; – les cancers superficiels non accessibles à une autre thérapeutique, les cholangiocarcinomes non résécables et/ou non opérables et les cancers du pancréas non résécables et/ou non opérables. Résultats ■ Les dysplasies de haut grade (DHG) sur endobrachyœsophage (EBO) : le risque de dégénérescence proche de 50 % à 5 ans des dysplasies de haut grade sur endobrachyœsophage justifie une prise en charge thérapeutique agressive qui vise à supprimer la dégénérescence présumée superficielle (échoendoscopie) et à détruire la métaplasie intestinale spécialisée ainsi qu’à permettre son remplacement par une muqueuse malpighienne, réparation favorisée par l’association d’un traitement prolongé et renforcé par un inhibiteur de la pompe à protons. Chez des patients souvent âgés, fragiles et surtout asymptomatiques, la mise en œuvre d’un traitement endoscopique est une alternative séduisante à une œsophagectomie. La PDT peut être préférée à une mucosectomie soit très large, circonférentielle, encore peu pratiquée, soit souvent incomplète lorsque la lésion dysplasique est mal limitée, et qui laisse, en outre, persister le risque de lésions synchrones méconnues ou métachrones au sein de l’EBO restant (5). La PDT offre l’avantage théorique d’un traitement global et homogène qui peut être réalisé en une séance. L’expérience d’Overholt fait autorité : chez 100 malades avec une dysplasie de haut grade, dont 13 adénocarcinomes (ADK) traités par PDT (Photofrin®), une destruction de la DHG a été obtenue dans 91 % des cas et de l’EBO dans 43 % des cas (6). Ces résultats ont été confirmés par une étude multicentrique internationale montrant, 2 ans après le diagnostic d’une dysplasie sévère, une évolution dans 13 % des cas vers un ADK dans le groupe traité par PDT (et oméprazole) contre 28 % dans le groupe simplement surveillé et traité par oméprazole (p < 0,05). La persistance de reliquats superficiels d’EBO, sous forme d’îlots ou de languettes, peut ensuite être éradiquée par une électrocoagulation par plasma argon. Plus ennuyeux est le risque de persistance d’îlots glandulaires sous-épithéliaux ; il semble moins important qu’après électrocoagulation ; il justifie le maintien d’une surveillance endoscopique, que l’on peut proposer de réaliser annuellement. Récemment, Pech et al. ont rapporté les résultats à long terme (3 ans) de la thérapie photodynamique par le 5-ALA, administré per os avec une illumination dans l’infrarouge, de 66 cas d’EBO soit en dysplasie sévère soit avec un carcinome intramuqueux. Si une destruction complète de la lésion visée a été obtenue dans quasiment tous les cas, une récidive a été observée au cours du suivi dans 20 à 30 % des cas, sans obérer cependant la survie actuarielle à 5 ans (7). Encore plus récemment, la même équipe allemande a confirmé l’intérêt d’une approche endosco- La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 2 - vol. IX - mars-avril 2006 É M A T I Q U E pique pragmatique de l’œsophage de Barrett en dysplasie sévère, soit par mucosectomie lorsque la lésion dysplasique était bien identifiable, soit par PDT (5-ALA) lorsqu’elle ne l’était pas, traitements éventuellement combinés et dans quelques cas complétés par une électrocoagulation. Une récidive ou une lésion néoplasique métachrone est survenue dans 17 % des cas à 36 mois, retraitée avec succès de la même manière (8). Cependant, les résultats publiés de la PDT par ALA dans cette indication restent contradictoires (9). ■ Les cancers œsophagiens superficiels : les résultats obtenus dans cette indication, qui mélangent des traitements réalisés, presque toujours avec le Photofrin®, parfois avec le Foscan®, pour des récidives œsophagiennes superficielles après radiothérapie selon l’AMM et ceux réalisés pour des cancers superficiels non accessibles d’emblée à une autre thérapeutique, ont été rapportés essentiellement par des équipes françaises (10-14). Une destruction complète est obtenue dans environ 80 % des cas, sans différence entre épidermoïde et adénocarcinome. Le caractère profond et parfois transmural de la nécrose obtenue et la très relative rétention sélective du Photofrin® par la tumeur rendent compte de la survenue de complications, exceptionnellement des perforations dans l’arbre bronchique, plus fréquemment des sténoses, notamment chez des patients traités après une radiothérapie. À l’heure actuelle, ce traitement peut être proposé : – pour des lésions mal limitées, relativement étendues et planes, difficilement accessibles à une mucosectomie, présumées superficielles (T1N0) au terme d’une exploration échoendoscopique au mieux réalisée avec une minisonde de haute fréquence ; on sait en effet que l’envahissement de la sous-muqueuse entraîne un risque d’extension ganglionnaire d’environ 20 % ; – en rattrapage après radiothérapie d’une lésion persistante, récidivante ou métachrone, et en première intention chez des patients inopérables. Les patients aux antécédents de cancers des voies aérodigestives qui ont un dépistage endoscopique systématique sont l’exemple d’une population volontiers susceptible de bénéficier d’une PDT. L’extension des indications de la PDT pour tous les cancers superficiels de l’œsophage ne relevant pas d’une mucosectomie passe encore, à notre sens, par une définition préthérapeutique plus sûre des cancers sans risque d’extension lymphatique, c’est-à-dire ne franchissant pas la musculaire muqueuse, et la mise en œuvre de systèmes d’illumination permettant une dosimétrie fiable. Ces conditions nous paraissent des préalables à une comparaison prospective randomisée avec la radiothérapie endoluminale (brachythérapie) et l’œsophagectomie. ■ Les cholangiocarcinomes et les cancers du pancréas non opérables ou non résécables : c’est encore le cas de la majorité de ces cancers, notamment des cholangiocarcinomes qui intéressent le hile hépatique dans 70 % des cas (Klatskin II-IV), d’évolution essentiellement locorégionale et de sombre pronostic à court terme après le diagnostic en l’absence de traitement à visée curative ; ils relèvent le plus souvent d’un drainage biliaire palliatif réalisé par voie endoscopique rétrograde ou trans-hépatique, dont l’efficacité conditionne la durée de la survie. Par ces voies d’abord, une PDT peut être réalisée avant la mise en place d’une endo81 D O S S I E R T prothèse. Les résultats obtenus dans une étude randomisée par Ortner et al. en 2003 comparant la PDT (Photofrin®) + endoprothèse versus drainage simple pour le traitement de cholangiocarcinomes inopérables ont fait l’effet d’un coup de tonnerre qui rend compte pour une grande part de l’effervescence actuelle autour de la PDT (15). La démonstration d’un allongement très significatif de la survie dans le groupe traité par PDT (493 jours versus 98 jours, p < 0,01) ouvre en effet une perspective thérapeutique dans une indication fréquente qui en était quasi complètement dépourvue. La seule réserve tenait à une survie particulièrement médiocre dans le groupe non traité, laissant supposer un drainage inefficace. L’étude de Cheon a cependant confirmé ces résultats en montrant une amélioration de la survie dans le groupe traité, contre un groupe non traité dont la survie était plus en accord avec les résultats d’un drainage biliaire efficace (558 jours contre 288 jours, p < 0,02) (16). En revanche, le traitement par PDT des cancers du pancréas via l’implantation transcutanée de fibres optiques est encore en cours d’évaluation ; la faisabilité et l’intérêt potentiel d’une telle prise en charge a été rapportée par Bown avec le Foscan® (17). CONCLUSION La thérapie photodynamique est un concept thérapeutique ancien qui bénéficie d’un regain d’intérêt lié au développement des lasers à diodes et à la démonstration de son efficacité pour le traitement de deux situations pathologiques majeures en hépatogastroentérologie : la dysplasie de haut grade sur endobrachyœsophage et le cholangiocarcinome. Ces progrès ne doivent pas occulter les inconnues qui persistent quant au déroulement de la réaction photochimique et aux paramètres qui la régissent. Le photosensibilisant idéal reste à trouver. Enfin, le clinicien doit être au fait des modalités d’une illumination optimale. ■ 82 H R É É F É M R E N A C E S T B I I B L I Q O G R A U P H I E Q U E S 1. Brault D. 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