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Conférence de
Consensus en Médecine durgence
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6 Quelles sont les attitudes
et les indications thérapeutiques
:
traitement conservateur,
traitement opératoire, réadaptation,
pour une entorse de cheville ?
Introduction
Les modalités thérapeutiques des entorses du liga-
ment latéral de la cheville ont évolué ces dernières
années, particulièrement depuis dix ans. La tendance
essentielle pourrait se résumer en une augmentation
des indications du traitement fonctionnel au détri-
ment de celles du traitement chirurgical. Le traite-
ment fonctionnel, privilégiant la mobilité et l’appui
précoce est admis dans les entorses peu ou modéré-
ment symptomatiques.
Quand il existe une rupture ligamentaire franche
avec laxité ligamentaire importante (habituellement et
classiquement dénommée entorse grave), la littérature
est désormais en faveur du traitement fonctionnel.
De nombreuses publications récentes d’études
ran-
domisées comparent les trois méthodes les plus
employées (traitement chirurgical initial suivi d’un
plâtre
;
traitement orthopédique par plâtre seul
;
trai-
tement fonctionnel). Il apparaît à la lecture de ces tra-
vaux que le traitement fonctionnel est supérieur au
traitement orthopédique et/ou chirurgical en terme
de délais de récupération fonctionnelle, de reprise des
activités physiques et professionnelles et de risque
iatrogène. Restent discutés les résultats sur la stabi-
lité ultérieure de la cheville, le risque de voir appa-
raître à long terme des lésions articulaires
dégénératives. Les résultats du traitement chirurgi-
cal ultérieur des éventuelles instabilités ligamentai-
res séquellaires sont aussi bons que ceux d’un
traitement chirurgical primaire. L’aspect économique
de cette orientation thérapeutique n’est pas encore
précisément évalué, mais paraît favorable. De ce fait
le traitement chirurgical apparaît désormais devoir
être réservé aux cas particuliers des lésions les plus
graves survenant chez les sportifs de haut niveau
ainsi qu’à certaines entorses associées à des lésions
osseuses.
Principes généraux des différents traitements
Traitement fonctionnel
Le but du traitement fonctionnel est de limiter
l’immobilisation et la décharge au strict nécessaire.
Dès les premières heures, et pendant les premiers
jours, le traitement fonctionnel est habituellement
précédé d’un traitement symptomatique qui a pour
but de lutter contre les phénomènes hémorragiques,
œdémateux, inflammatoires et douloureux, en utili-
sant de façon diversement associés le repos, la
cryo-
thérapie, la compression, les postures déclives et les
médicaments.
Dès que les phénomènes initiaux ont cédé, le trai-
tement fonctionnel se propose d’introduire un appui
partiel ou total, ainsi qu’une mobilisation protégée
de façon à favoriser les activités métaboliques
cir-
culatoires et cicatricielles. L’immobilisation
partielle
pendant les trois premières semaines environ protège
les processus cicatriciels constitués par la proliféra-
tion fibroblastique dans la zone ligamentaire trauma-
tisée, suivie par la formation de collagène. Dans le
même temps, elle évite les inconvénients d’une
immobilisation plus stricte, tant sur le plan trophi-
que (décalcification, amyotrophie), que vasculaire
(phlébite), iatrogène (anticoagulant), et
socio-
économique (délai de récupération et de reprise
d’activité physique et sportive).
Au-delà de la troisième semaine, l’augmentation
progressive de la mobilisation et de l’activité, d’autant
plus contrôlée que les signes cliniques initiaux étaient
sévères, accompagnent la maturation du collagène et
la formation du tissu cicatriciel définitif.
Limmobilisation stricte
Le traitement orthopédique non opératoire par
immobilisation complète, qu’il s’agisse
d'une
botte
plâtrée, ou de son équivalent en résine rigide, a pour
but la cicatrisation des lésions ligamentaires en posi-
tion courte, la consolidation des fractures non dépla-
cées et éventuellement opérées, le contrôle des
douleurs importantes et invalidantes. L’immobilisa-
tion complète introduit à l’évidence un risque inhé-
rent notamment vasculaire, trophique, cutané,
neurologique périphérique. Ces risques particuliers
nécessitent une technique de confection rigoureuse,
un traitement médicamenteux et une surveillance
appropriée.
Le traitement chirurgical
Le principe du traitement chirurgical d’une rupture
ligamentaire est de guider la cicatrisation en réali-
sant une simple suture du ligament rompu. Il ne dis-
pense pas de l’immobilisation plâtrée. Il permet
l’évacuation et le drainage de l’hémarthrose, le " net-
toyage articulaire " et l’ablation d’éventuels frag-
ments chondraux libérés. Il permet le traitement des
fractures associées de l’arrière pied. Il introduit un
risque iatrogène bien évalué dans la littérature du fait
de l’anesthésie, du garrot pneumatique et de l’ouver-
ture articulaire.
Moyens thérapeutiques non chirurgicaux
et non médicamenteux
Le traitement symptomatique
Le traitement symptomatique initial repose sur
l’application des principes popularisés sous le terme
de
"
RICE
" (Rest, Ice, Compression, Elevation) pro-
posé par Ryan. Ce traitement comporte plusieurs
éléments
:
-
Le repos, la diminution ou l’arrêt de la mise
en charge de l’articulation au stade initial sont
main-
Réan.
Urg.,
1995, 4 (4
ter),
491-501