n s l g : s t t s : , . Sommaire Vol. XIII - N° 10 - novembre 2009 ÉDITORIAL 299 Sclérose en plaques et virus : quelles hypothèses retenir à l’heure actuelle ? Multiple sclerosis and viruses: where do we stand? R. Du Pasquier MISES AU POINT 302 Génétique des dégénérescences lobaires fronto-temporales Genetic aspects of frontotemporal lobar degenerations Multiple sclerosis and viruses: where do we stand? Atrophie multisystématisée : nouveaux critères diagnostiques R. Du Pasquier* N. Damon-Perrière, W. Meissner, F. Tison FICHE I-II Conduite à tenir devant une céphalée en coup de tonnerre M. Muresan, X. Ducrocq REVUE DE PRESSE 326 A. Ibdaïh, M. Sarazin, L. Calandreau, P. Trifilieff, A. Fromont, C. Dallière-Dara NEURO-ANATOMIE 332 Vascularisation artérielle de la moelle spinale L. Tatu CAS CLINIQUE 336 Association syndrome de Sotos et syndrome de West Sotos syndrome associated with West syndrome N. Allani-Essid, A. Essid, F. Herault, L. Burglen, J.M. Pinard ACTUALITÉS SUR… 340 Position paper sur la maladie d’Alzheimer au stade léger Résumé par M. Sarazin Sclérose en plaques et virus : quelles hypothèses retenir à l’heure actuelle ? I. Le Ber, M. Sarazin Multiple system atrophy and new diagnosis criteria ÉDITORIAL EN PLUS 347 L a cause de la sclérose en plaques (SEP) reste énigmatique. La génétique joue indéniablement un rôle dans le déclenchement de cette maladie, sans atteindre toutefois l’importance qu’elle peut avoir dans certaines maladies neuro-dégénératives. Dès lors, des facteurs environnementaux doivent être invoqués. Parmi ces derniers, l’étiologie infectieuse de la SEP est une hypothèse aussi ancienne que la description de la maladie, déjà évoquée par Pierre Marie au xix e siècle. Cependant, malgré de nombreuses recherches, il n’y a pas d’éléments, à l’heure actuelle, permettant d’affirmer que la SEP est une maladie infectieuse au même titre que la grippe ou le sida. En revanche, il est vraisemblable qu’un ou des virus puissent faciliter sa survenue chez des individus avec un profil génétique particulier. Nous passerons ici brièvement en revue les trois virus qui sont en vogue à l’heure actuelle. ❖ Nouvelles de l’industrie pharmaceutique * Services de neurologie et d’immunologie, CHUV BH-10, Lausanne. La Lettre du Neurologue • Vol. XIII - n° 10 - novembre 2009 | 299 ÉDITORIAL L’herpès virus humain 6 (HHV6), de la famille des β-herpèsvirus, existe sous la forme de HHV6B, cause de la roséole infantile, et de HHV6A, neurotropique. Ce dernier est responsable d’encéphalites limbiques chez certains patients immunosupprimés. Une réactivation contre HHV6 dans le sang et le liquide céphalo-rachidien (LCR) de patients atteints de SEP a été mise en évidence dans plusieurs études. Par ailleurs, bien que toutes les études ne soient pas univoques, la présence de matériel génétique et de protéines de HHV6B dans les plaques de patients souffrant de SEP a été montrée par certains auteurs (1). Un virus intrigant est le endogenous Multiple Sclerosis-associated Retrovirus (MSRV). Les rétrovirus sont des virus à ARN qui ont la capacité d’utiliser une rétrotranscriptase pour synthétiser de l’ADN viral, ADN qui va alors s’intégrer dans le génome de l’hôte. Le virus d’immunodéficience humain (VIH) est l’exemple le plus connu de rétrovirus exogène. Les rétrovirus endogènes, eux, se sont intégrés dans le génome humain il y a des centaines de milliers d’années, faisant maintenant partie de son code génétique. Et ce n’est que dans des circonstances exceptionnelles que les gènes viraux pourraient être transcrits et donner naissance à des particules virales. Le MSRV appartient à cette catégorie. In vitro, on observe une augmentation de la transcription du matériel génétique rétroviral en présence d’autres virus, en particulier les herpèsvirus. Le sang et le LCR de patients atteints de SEP contiennent un nombre augmenté d’anticorps spécifiques pour le MSRV par rapport à des sujets contrôles. L’ARN messager codant pour certaines protéines rétrovirales est présent, soit en plus grand nombre, soit exclusivement dans le cerveau de patients avec SEP. Enfin, parmi les patients souffrant de SEP, la détection, dans le LCR, du gène codant pour la protéine Pol du rétrovirus est un facteur de mauvais pronostic (2). Le virus d’Epstein-Barr (EBV), de la famille des γ-herpèsvirus, est le virus le plus souvent évoqué pour son implication possible dans la pathogenèse de la SEP. Il infecte plus de 90 % de la population. La plupart du temps, la primo-infection, asympto- matique, a lieu dans la petite enfance. Cependant, l’infection à EBV peut être plus tardive, survenant dans l’adolescence, caractérisée alors par une mononucléose infectieuse (MI). Une méta-analyse a démontré que le risque relatif de développer une SEP pour un individu ayant souffert de MI était 2,3 fois plus élevé que chez un sujet EBV+ n’ayant pas présenté de MI, et 20 fois plus élevé que chez une personne non infectée par l’EBV. On sait aussi que le taux d’anticorps dirigés contre EBV est significativement augmenté dans le sang des personnes qui vont développer une SEP au cours des années suivantes (3). La réponse immune cellulaire contre EBV paraît elle aussi dérégulée, en particulier au début de la SEP. Ainsi, nous avons observé une forte réponse des lymphocytes T cytotoxiques (CD8+) chez les patients avec un syndrome clinique isolé, mais pas chez ceux avec une SEP de plus longue évolution ou chez des patients avec d’autres maladies neurologiques (4). Reste à expliquer par quel(s) mécanisme(s) l’EBV pourrait être impliqué dans la pathogenèse de la SEP. Une hypothèse fréquemment évoquée est le fait que des leucocytes ou des anticorps dirigés initialement contre des antigènes viraux, reconnaîtraient aussi des antigènes de protéines présentes dans le système nerveux central, phénomène dit de “mimique moléculaire” (5). Enfin, une étude a suggéré qu’une réactivation d’EBV se déroulait dans des néo-follicules lymphoïdes situés dans les méninges de patients atteints de SEP (6). Cette observation intéressante n’a toutefois pas été confirmée dans un travail récent (7). En conclusion, il est vraisemblable que certains virus participent au déclenchement de la SEP chez des individus susceptibles. Il est aussi possible que ces virus se potentialisent (voir l’augmentation de production de particules virales de rétrovirus par les herpèsvirus). Cependant, un modèle animal serait crucial afin de pouvoir mieux étudier le rôle des virus dans la SEP, mais un tel modèle est particulièrement ardu à établir : l’EBV, par exemple, n’infecte que les humains. Ces considérations ne sont pourtant pas triviales puisque le développement de nouvelles thérapies antivirales et/ou de vaccins pourraient peut-être apporter un soulagement aux patients souffrant de SEP. ◾ Références bibliographiques 1. Challoner PB, Smith KT, Parker JD et al. Plaque-associated expression of human herpesvirus 6 in multiple sclerosis. Proc Natl Acad Sci USA 1995;92(16):7440-4. 4. Jilek S, Schluep M, Meylan P et al. Strong EBV-specific CD8+ T-cell response in patients with early multiple sclerosis. Brain 2008;131(Pt 7):1712-21. 2. Dolei A, Perron H. The multiple sclerosis-associated retrovirus and its HERV-W endogenous family: a biological interface between virology, genetics, and immunology in human physiology and disease. J Neurovirol 2009; 15(1):4-13. 5. Lang HL, Jacobsen H, Ikemizu S et al. A functional and structural basis for TCR cross-reactivity in multiple sclerosis. Nat Immunol 2002;3(10):940-3. 3. Ascherio A, Munger KL. Environmental risk factors for multiple sclerosis. Part I: the role of infection. Ann Neurol 2007;61(4):288-99. 7. Willis SN, Stadelmann C, Rodig SJ et al. Epstein-Barr virus infection is not a characteristic feature of multiple sclerosis brain. Brain 2009 (epub ahead of print). 300 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIII - n° 10 - novembre 2009 6. Serafini B, Rosicarelli B, Franciotta D et al. Dysregulated Epstein-Barr virus infection in the multiple sclerosis brain. J Exp Med 2007;204(12):2899-912.