Les Femmes savantes, de Molière Comédie représentée la première fois à Paris sur le théâtre de la salle du Palais-Royal le 11 mars 1672 par la Troupe du Roi. PERSONNAGES CHRYSALE, bon bourgeois. PHILAMINTE, femme de Chrysale. ARMANDE HENRIETTE filles de Chrysale et de Philaminte. ARISTE, frère de Chrysale. BÉLISE, sœur de Chrysale. CLITANDRE, amant d'Henriette. TRISSOTIN, bel esprit. VADIUS, savant. MARTINE, servante de cuisine. L'ÉPINE, laquais. JULIEN, valet de Vadius. LE NOTAIRE. La scène est à Paris. I. Un personnage central : Chrysale. Ce "bon bourgeois" (nous dirions "grand bourgeois" : Chrysale est un homme riche) est le pivot d'une famille ; il a une femme, deux filles, un frère et une sœur. Les conventions de la comédie, tout comme les réalités sociales du e XVII s., lui donnent un rôle essentiel : ce chef de famille a le pouvoir d'autoriser ou d'empêcher le mariage de ses filles. II. Une intrigue amoureuse. Clitandre est l' "amant d'Henriette", ce qui signifie qu'il aime la jeune femme et que ses sentiments sont partagés ; si tel n'avait pas été le cas, il aurait été qualifié d' "amoureux" - celui qui aime sans être payé de retour, au XVIIe s. Ces deux jeunes gens s'aiment, et ils finiront forcément par se marier, à la fin de la pièce : une comédie a forcément un dénouement heureux. Cependant, des obstacles sont prévisibles : Trissotin ou Vadius peuvent être des rivaux. III. Une famille de comédie. Les noms des personnages appartiennent à plusieurs univers (dans une tragédie, on aurait l'homogénéité est assurée par la mythologie ou par l'histoire). 1. Des noms dérivés du grec : Chrysale Philaminte Ariste Clitandre. 2. Des noms qui existaient réellement au XVIIe s. : Armande Henriette Martine Julien ; peut-être L'épine, qui peut être un surnom. Le notaire, désigné par sa profession, ancre la comédie dans le monde réel. 3. Des noms caricaturaux : Bélise (son nom est proche de "bêtise" ; est-elle "belle", ou "bêle"-t-elle ? Trissotin est un triple sot ; Le nom de Vadius est latinisé – il s'agit d'un pédant. IV. Castigat ridendo mores. "Elle (la comédie) châtie les mœurs en faisant rire". Les cibles de Molière sont les "femmes savantes", désignées par le titre. L'acte I nous éclairera sur les camps en présence : Les "femmes savantes" sont groupées autour de Philaminte, qui est entourée de sa belle-sœur Bélise et de sa fille Armande. Clitandre et Henriette peuvent compter sur l'appui d'Ariste, dont le nom signifie en grec "le meilleur" : ce personnage incarnera donc le bon sens. Clitandre est un nom traditionnel pour un amoureux de comédie, mais Molière a choisi des noms originaux pour Chrysale et Philaminte. Chrysale fait songer à une chrysalide ; comme un insecte en cours de métamorphose, il n'est peut-être pas tout à fait mûr ! En outre, le mot grec "chysos" désigne l'or (un chrysanthème est une fleur dorée) : il peut avoir un "caractère en or" – mais la bienveillance devient vite faiblesse. Quant à Philaminte, elle porte fièrement devant elle la racine grecque "Phil" – "qui aime", et l'on songe au mot "philosophie", qui signifie, étymologiquement "l'amour de la sagesse". Il est remarquable que la traduction française suive le mot grec : Phil – ami –nte : voilà un personnage qui préfère le grec au français ! Les noms de Chrysale et de Philaminte se terminent par un e muet ; qui est l'homme, qui est la femme ? La pièce montrera que Philaminte est autoritaire et que son mari lui obéit – ce qui est une inversion des rôles traditionnels.