mise au point Prise en charge des communications interauriculaires vieillies Managment of atrial septal defect in adults C. Rey* L es communications interauriculaires (CIA) représentent les malformations cardiaques les plus fréquemment rencontrées chez l’adulte (1, 2). Leur diagnostic a été grandement facilité par l’échocardiographie à codage couleur. Les indications de fermeture ont évolué ces dernières années avec l’apparition des techniques de fermeture par voie percutanée. La prise en charge commence par le diagnostic de CIA, puis la localisation dans le septum interauriculaire (SIA) et l’évaluation de l’importance du shunt et de son retentissement, et finit par le choix de la conduite à tenir : fermeture de la CIA par chirurgie ou par cathétérisme interventionnel, ou abstention de tout geste et traitement uniquement symptomatique. Différentes CIA * Service des maladies cardiovasculaires infantiles et congénitales, hôpital cardiologique, Lille. Les CIA de type ostium primum sont habituellement diagnostiquées et traitées par chirurgie dans l’enfance. Il s’agit d’un défect proche des valves atrioventriculaires ; c’est donc un canal atrioventriculaire partiel associé le plus souvent à une fente mitrale Cette malformation est rarement découverte à l’âge adulte. En revanche, le suivi à l’âge adulte d’une CIA de type ostium primum opérée est indispensable, car il persiste souvent une insuffisance mitrale, voire un rétrécissement mitral secondaire à une plastie mitrale effectuée en même temps que la fermeture chirurgicale de la CIA. Les CIA de type ostium secundum sont les plus fréquentes ; elles siègent au niveau de la fosse ovale. Ce sont celles qui peuvent être fermées par voie percutanée, selon certaines conditions qui seront décrites plus tard. Elles sont deux fois plus fréquentes chez la femme que chez l’homme. Leur diagnostic a été facilité par l’échocardiographie. 22 | La Lettre du Cardiologue • n° 417 - septembre 2008 Les CIA de type sinus venosus siègent à la partie haute du SIA, proches de la veine cave supérieure (VCS) et s’accompagnent souvent d’un retour veineux pulmonaire anormal partiel supérieur droit. Ce type de CIA ne peut en aucun cas faire l’objet d’une fermeture par voie percutanée, car il n’y a pas de rebord supérieur. À l’inverse de ce qui est observé dans la CIA de type ostium secundum, la prédominance est masculine. Les CIA de type low septal defect sont basses, proches de la veine cave inférieure (VCI), peu fréquentes, et peuvent être à l’origine d’une cyanose chez l’adulte, car le flux de la VCI se dirige, via la CIA, vers l’oreillette gauche en traversant le SIA ; cela se voit d’autant plus qu’il existe une désorientation du SIA par dilatation de l’aorte ascendante. Ce genre de CIA ne peut être refermé par voie percutanée du fait de l’absence de rebord inférieur. Les CIA du sinus coronaire, déhiscences du toit du sinus coronaire, sont encore plus rares et de diagnostic difficile. Elles s’accompagnent d’une VCS gauche se drainant dans le sinus coronaire. La fermeture par voie percutanée n’est pas impossible. Signes d’appel Les circonstances de découverte sont rarement les mêmes que chez l’enfant : souffle systolique au deuxième espace intercostal gauche, dédoublement de B2, arc moyen gauche saillant avec hypervascularisation pulmonaire sur la radiographie de thorax faite pour infections pulmonaires récidivantes. La dyspnée d’effort est un motif de consultation auprès d’un cardiologue. Cependant, ce symptôme est souvent ignoré des patients qui ont pris l’ha- Points forts »» La communication interauriculaire est la malformation cardiaque la plus fréquente chez l’adulte. »» La communication interauriculaire ostium secundum peut être fermée par voie percutanée. »» Toutes les communications interauriculaires doivent être refermées par chirurgie ou par voie percutanée pour éviter les complications : insuffisance cardiaque, arythmies auriculaires et maladie vasculaire pulmonaire. bitude de limiter leurs efforts physiques. Le fait que le shunt gauche-droite auriculaire augmente progressivement avec le temps, la taille de la CIA ayant tendance à s’agrandir et la compliance du ventricule gauche (VG) diminuant (3), pousse en effet les patients à limiter eux-mêmes progressivement leurs efforts. A posteriori après fermeture de la CIA, les patients reconnaissent avoir une meilleure tolérance aux efforts ; d’où l’importance d’un bon interrogatoire. Les palpitations sont souvent un motif de consultation qui conduit au diagnostic de CIA. Elles peuvent être la conséquence d’un trouble du rythme auriculaire en rapport avec la dilatation de l’oreillette droite (OD) : fibrillation ou flutter auriculaire permanent ou paroxystique. Les signes d’insuffisance cardiaque droite peuvent être révélateurs d’une CIA large. Ces complications surviennent le plus souvent chez les patients de plus de 50 ans, voire même de plus de 80 ans. La désaturation à l’effort se voit surtout dans les CIA sinus venosus dans les CIA low septal defect, ou encore dans les CIA avec hypertension artérielle pulmonaire. Certaines complications sont parfois à l’origine de la découverte d’une CIA : accident ischémique transitoire, accident vasculaire cérébral, parfois même au cours ou au décours d’une grossesse, embolie paradoxale périphérique, abcès du cerveau, notamment en cas de sinus venosus, car la VCS est au-dessus de la CIA, ou de low septal defect. La cyanose due à une inversion du shunt au stade d’hypertension pulmonaire obstructive devient exceptionnelle à notre époque. Le diagnostic différentiel entre hypertension pulmonaire primitive associée à une large CIA et réaction d’Eisenmenger n’est pas toujours aisé. Dans ce cas, aucun traitement curatif n’est possible en dehors d’une greffe cardiopulmonaire, mais les traitements médicaux symptomatiques sont nécessaires. Signes cliniques Chez l’adulte, le souffle systolique au foyer pulmonaire avec dédoublement de B2 est inconstant, contrairement à ce qui est observé chez l’enfant. Le roulement diastolique au foyer tricuspide est très évocateur et est dû au débit augmenté à travers la valvule tricuspide. À l’ECG, l’axe droit et le bloc de branche droit incomplet ne sont pas constants, contrairement à ce qui est observé chez l’enfant. Un hémibloc antérieur gauche doit faire soupçonner une CIA ostium primum. Les troubles du rythme supraventriculaires sont loin d’être rares : fibrillation ou flutter auriculaire. À la radiographie de thorax, on note une cardiomégalie dans les CIA larges et évoluées, une hypervascularisation pulmonaire en rapport avec l’importance du shunt gauche-droite, une dilatation de l’artère pulmonaire et de ses branches. Bilan échocardiographique Quels que soient les signes d’appel et les signes cliniques, une échocardiographie transthoracique (ETT) et parfois une échocardiographie transœsophagienne (ETO) doivent être réalisées pour confirmer le diagnostic, rechercher des anomalies associées, évaluer l’importance du shunt, apprécier l’hémodynamique cardiaque et localiser la CIA afin de déterminer si une fermeture percutanée est possible. Le diagnostic de CIA doit être évoqué dès lors que l’on constate des signes de surcharge volumétrique du ventricule droit (VD) : dilatation du VD, mouvement anormal du septum interventriculaire. Si besoin est, le doppler tissulaire montrera la différence entre une surcharge volumétrique et une surcharge barométrique du VD (4). Plus le VD est dilaté et plus le shunt gauche-droite est important. Le diagnostic de localisation est réalisé sur les différentes incidences apicales et sous-costales ; le plus souvent, l’ETT suffit mais, chez les patients peu échogènes, l’ETO est indispensable. La CIA ostium primum est visible en incidence apicale des 4 cavités. Elle s’accompagne d’une insuffisance mitrale par fente mitrale de la grande valve ; les valves atrioventriculaires sont sur le même plan antéro-postérieur, il n’y a donc pas de décalage entre la valvule mitrale et la valvule tricuspide. Le diagnostic est souvent aisé avec l’ETT (figure 1). L’ETO est rarement nécessaire. Mots-clés Cardiopathie congénitale chez l’adulte Communication interauriculaire Cathétérisme interventionnel Highlights Among the congenital heart diseases in adults the atrial septal defect is the most frequent. Secundum atrial septal defect can be closed by interventional catheterization. All atrial septal defect must be closed by surgery or interventional catheterization to avoid. Keywords Congenital heart disease in adult Atrial septal defect Interventional catheterization congestive heart failure Atrial arrhytmias and pulmonary vascular disease La Lettre du Cardiologue • n° 417 - septembre 2008 | 23 mise au point Prise en charge des communications interauriculaires vieillies Figure 1. CIA de type ostium primum chez une jeune adulte. Il existe une large CIA adjacente aux valves atrioventriculaires qui sont sur le même plan. Figure 2. Échocardiographie avec doppler couleur en incidence apicale de 4 cavités chez un adulte : CIA ostium secundum avec un flux rouge de gauche à droite. La CIA sinus venosus est plus difficile à mettre en évidence en ETT, car elle passe souvent inaperçue. L’incidence apicale 4 cavités ou, mieux, l’incidence sous-costale passant par la VCS sont les 2 les plus utiles. L’échocardiographie à codage couleur facilite 24 | La Lettre du Cardiologue • n° 417 - septembre 2008 la visualisation de la CIA. La voie suprasternale peut être utile pour déceler un retour veineux pulmonaire anormal partiel dans la VCS ou dans la partie supérieure de l’OD. L’ETO confirme le diagnostic. La CIA low septal defect est rare et son diagnostic est évoqué en ETT dans l’incidence sous-costale longitudinale passant par la VCI. L’ETO est le plus souvent nécessaire chez l’adulte, contrairement à ce qui est observé chez l’enfant. La CIA ostium secundum est la plus fréquente et demande une étude échocardiographique minutieuse pour déterminer si elle peut être fermée par voie percutanée. Les renseignements utiles sont obtenus par ETT (figure 2) et ETO si le patient est peu échogène ou au moment de la fermeture en salle de cathétérisme. Ainsi, il faut évaluer : – le diamètre maximal dans les différentes incidences, apicale 4 cavités, sous-costale 4 cavités, sous-costale 2 cavités avec et sans doppler à codage couleur (5) ; – la longueur des rebords : bord inférieur adjacent aux valves atrioventriculaires, bord supéro-postérieur adjacent à la VCS et à la veine pulmonaire supérieure droite, bord postéro-inférieur adjacent à la VCI, bord supérieur adjacent à la paroi supérieure de l’OD, bord rétro-aortique. Ces rebords doivent avoir une longueur d’au moins 5 mm, excepté le rebord rétro-aortique, rarement présent chez l’adulte et qui n’est pas indispensable pour la fermeture percutanée ; – l’anatomie de la CIA : CIA unique ou multiple, avec des bords solides ou très souples ; présence d’un anévrysme du SIA avec une excursion ample ; longueur de la base de l’anévrisme. L’ETO avec reconstruction tridimensionnelle peut dans certains cas aider à prendre une décision de fermeture percutanée en montrant la géométrie de la CIA (6). Les anomalies associées doivent être recherchées systématiquement : VCS gauche se drainant dans le sinus coronaire, retour veineux pulmonaire anormal partiel dans l’OD ou la VCS, sténose pulmonaire organique, à différencier d’un gradient fonctionnel dû à l’hyperdébit pulmonaire, prolapsus mitral avec insuffisance mitrale et exceptionnellement rétrécissement mitral (syndrome de Lutembacher), maladie d’Ebstein avec shunt droite-gauche ou bidirectionnel, qui n’est pas une contre-indication à la fermeture par voie percutanée. L’hémodynamique cardiaque par échocardiographie doit également être évaluée par l’importance du shunt en fonction de la dilatation du VD, par le rapport des débits pulmonaire et aortique (Qp/Qs), très souvent source d’erreurs chez l’adulte, de même mise au point que par le débit de shunt. La pression systolique du VD est évaluée par l’insuffisance tricuspide mais ne correspond pas toujours à la pression pulmonaire du fait du gradient de débit sur l’orifice pulmonaire, qui doit être pris en compte. Les pressions pulmonaires peuvent également être appréciées par l’insuffisance pulmonaire. Autres examens paracliniques L’IRM cardiaque est exceptionnellement nécessaire. Si elle est réalisée, elle peut confirmer le diagnostic de CIA et montrer des anomalies associées : anomalies du retour veineux systémique, anomalies du retour veineux pulmonaire. Le scanner thoracique permet parfois de mieux voir le retour veineux pulmonaire et les branches pulmonaires en cas de doute sur des sténoses pulmonaires périphériques. Parfois, une CIA avec anomalie du retour veineux pulmonaire est dépistée sur un scanner réalisé pour des affections pulmonaires à répétition. Bilan hémodynamique Le cathétérisme cardiaque est de moins en moins souvent réalisé, sauf s’il y a un doute concernant l’importance de la CIA et de son retentissement cardiaque, ou s’il y a une discordance entre l’aspect clinique et l’échocardiographie, notamment en ce qui concerne les pressions pulmonaires et l’existence ou non d’une réaction d’Eisenmenger. Traitement médical Chez les patients atteints de CIA, l’insuffisance cardiaque, lorsqu’elle existe, doit être traitée comme toute insuffisance cardiaque. Les arythmies supraventriculaires peuvent être traitées avec des médicaments antiarythmiques classiques, associés à des anticoagulants si un risque de thrombose intracardiaque existe. Le flutter auriculaire est une excellente indication d’ablation avant chirurgie ou fermeture percutanée. La fibrillation auriculaire est plus difficile à traiter par méthode ablative. En cas de réaction d’Eisenmenger, il faut surveiller la polyglobulie et l’uricémie, et adapter le traitement symptomatique en fonction de l’état clinique et paraclinique. Traitement par cathétérisme interventionnel La fermeture percutanée doit désormais être proposée à tous les patients présentant une CIA ostium secundum avec des rebords suffisants. Différents dispositifs ont été utilisés (7-11), mais le plus courant actuellement est le système d’Amplatz en nitinol. Il est constitué de deux disques réunis entre eux par une partie centrale qui doit correspondre au diamètre de la CIA pour l’obstruer. Le disque gauche a un diamètre plus large de 14 ou 16 mm par rapport à la partie centrale et de 4 à 6 mm par rapport au disque droit. Le diamètre de la partie centrale des dispositifs peut s’élever jusqu’à 40 mm, ce qui correspond à un disque gauche de 56 mm de diamètre. Le diamètre étiré est évalué au cours du cathétérisme cardiaque droit, avant fermeture et après avoir vérifié les pressions pulmonaires et l’absence de malformations associées qui pourraient contreindiquer la fermeture percutanée. Dans ce but, on introduit par voie veineuse fémorale un cathéter à ballonnet que l’on positionne dans l’oreillette gauche (OG). Sous ETO, on gonfle le ballon à un diamètre présumé supérieur à celui de la CIA et on l’applique contre la paroi gauche du SIA. Il est alors dégonflé progressivement, toujours sous contrôle de l’ETO, jusqu’au moment où il passe de l’OG vers l’OD avec une petite résistance. On mesure alors le ballon sur l’enregistrement de l’ETO ; c’est le diamètre étiré, qui est habituellement supérieur au diamètre calculé en ETT ou en ETO. Cette manœuvre est très importante : si les bords sont très souples, le ballon passe de gauche à droite avec un diamètre nettement supérieur à celui de la CIA mesurée sans ballon, mais c’est ce diamètre étiré qui doit indiquer la taille du dispositif à insérer (figure 3). Certains utilisent une autre sorte de cathéter à ballonnet gonflé au niveau de la CIA, l’empreinte des bords de la CIA sur le ballon servant pour la mesure du diamètre étiré. Il semble que la meilleure technique soit celle avec le ballon arrondi que l’on retire de l’OG vers l’OD. Lorsqu’il existe un anévrisme du SIA avec plusieurs orifices, il est essentiel de mesurer le diamètre étiré avec un ballon passé de gauche à droite, mais aussi de droite à gauche, car la variation du diamètre peut être importante. De même, s’il s’agit d’une maladie d’Ebstein, il est prudent de mesurer le diamètre étiré avec un ballon gonflé dans l’OD et poussé jusque dans l’OG. La longueur des rebords peut également être appréciée avec l’ETO lorsque le ballon est enclavé dans la CIA. La Lettre du Cardiologue • n° 417 - septembre 2008 | 25 mise au point Prise en charge des communications interauriculaires vieillies corporelle (CEC). La fermeture s’effectue soit par suture directe, soit par patch de péricarde autologue, soit par un matériau synthétique (12). La chirurgie classique se fait par sternotomie mais parfois, chez la femme, et afin d’éviter une cicatrice trop visible, on procède à une incision sous-mammaire droite. La thoracotomie postéro-latérale droite n’est pas réalisée chez l’adulte, elle est réservée à l’enfant. La morbi-mortalité est faible, mais elle est plus importante que chez l’enfant et également plus importante que lorsque la CIA est fermée par voie percutanée. A Indications thérapeutiques B Figure 3. ETO d’un patient : diamètre de la CIA mesuré à 29 mm (A) et diamètre étiré évalué à 32 mm (B). La technique de fermeture. On introduit une gaine de 7F à 12F dans la veine fémorale pour la positionner dans l’OG. Dans cette gaine de Mullins est glissé le système d’Amplatz. Le disque gauche est ouvert dans l’OG puis appliqué contre la paroi gauche du SIA ; il est parfois nécessaire d’ouvrir la partie centrale dans l’OG pour que le disque gauche se centre bien. Ensuite, on ouvre le disque droit en l’appliquant contre le SIA. Toutes ces manœuvres se font sous contrôle de l’ETO, voire sous échocardiographie endovasculaire et sous amplificateur de brillance. Le cathétériseur est guidé par l’échocardiographiste durant toutes ces manœuvres. La collaboration de l’échocardiographiste et du cathétériseur est indispensable. Avant le largage, on vérifie l’absence de shunt et de gêne au mouvement des valvules mitrale et tricuspide. Traitement chirurgical Dès 1958, des CIA ont été fermées par chirurgie. Cette opération nécessite une circulation extra- 26 | La Lettre du Cardiologue • n° 417 - septembre 2008 Les indications de fermeture des CIA de l’adulte augmentent depuis qu’un grand nombre de cellesci peuvent être fermées par cathétérisme interventionnel. Les indications de la chirurgie sont réservées aux CIA de types ostium primum, sinus venosus et low septal defect lorsque le débit de shunt est significatif, avec un débit pulmonaire double du débit aortique ou presque. Les CIA ostium secundum pour lesquelles la fermeture percutanée est contre-indiquée nécessitent une chirurgie : CIA trop larges, même s’il est possible d’en occlure certaines dont le diamètre est supérieur à 40 mm (13, 14), CIA avec absence de rebord suffisant, excepté le rebord rétro-aortique. Les CIA avec retour veineux pulmonaire anormal partiel sont fermées par chirurgie. Cependant, si le retour anormal est de très faible importance et la CIA centrale, on peut négliger le retour veineux anormal et fermer la CIA par voie percutanée ; mais cette circonstance est très rare. La fermeture percutanée est indiquée pour le traitement des CIA ostium secundum avec des rebords d’au moins 5 mm, dont le diamètre ne dépasse pas 44 mm avec shunt gauche-droite, et des pressions pulmonaires normales ou élevées sans réaction d’Eisenmenger. Les CIA avec shunt droite-gauche chez des patients atteints d’une maladie d’Ebstein peuvent être fermées par cathétérisme interventionnel. Les complications sont rares et sont celles de tout cathétérisme cardiaque. En outre, des troubles du rythme transitoires sont possibles. Des embolisations de la prothèse ont été décrites : dans les cavités droites si le diamètre de la CIA a été sous-estimé ou si les rebords n’étaient pas suffisants, et dans les cavités gauches si la mesure du diamètre étiré n’a pas été vérifié par un passage du ballon de droite à gauche. L’embolisation d’une prothèse conduit soit à l’extraction au lasso si cette opération est possible, mise au point soit à l’extraction chirurgicale avec fermeture de la CIA. Signalons également un cas d’hémolyse chez une personne atteinte de la maladie d’Ebstein et d’une insuffisance tricuspide dont le jet se dirigeait contre le dispositif implanté (15), et des cas d’épanchements péricardiques par lésion traumatique de l’aorte due à la prothèse (16). Pour éviter cette complication, il est recommandé, en l’absence de rebord rétroaortique, de faire en sorte que les deux disques épousent les parois de l’aorte. Bénéfices de la fermeture d’une CIA de l’adulte Il est maintenant certain que les adultes atteints d’une CIA avec shunt significatif tirent un bénéfice de la fermeture de celle-ci, que ce soit par voie percutanée ou par chirurgie. La dyspnée diminue, voire disparaît complètement, et les adultes disent eux-mêmes qu’ils ont une activité physique et sportive plus importante qu’avant la fermeture. Les signes d’insuffisance cardiaque régressent très rapidement. Les cavités cardiaques droites diminuent de volume et, à l’échocardiographie, le diamètre du VD est moindre et peut même revenir à la normale à condition que la fermeture ne soit pas pratiquée chez le patient âgé. Le mouvement du SIA se normalise le plus souvent et les pressions pulmonaires, si elles étaient élevées, se stabilisent ou diminuent. La fermeture percutanée diminue le risque d’apparition de troubles du rythme, que le patient ait présenté ou non des arythmies avant la fermeture. En revanche, la chirurgie auriculaire peut être responsable d’arythmies supraventriculaires (17, 18). Les avantages de la fermeture par voie percutanée par rapport à la chirurgie sont nombreux : absence de cicatrice, absence de CEC, absence de passage en réanimation, hospitalisation moins longue, pas de rééducation postopératoire, reprise du travail très rapide, reprise des activités physiques et sportives plus précoce, morbidité et mortalité moindres. Enfin, certaines personnes chez qui les risques de la chirurgie ne sont pas négligeables peuvent bénéficier d’une fermeture percutanée : patients d’un âge avancé, comorbidité importante, déficit de certaines fonctions vitales, insuffisance respiratoire, rénale ou antécédents d’AVC. Conclusion Les CIA de l’adulte sont maintenant mieux dépistées grâce à l’échocardiographie, qui est pratiquée devant toute symptomatologie cardiovasculaire. Les indications de fermeture sont plus larges du fait des progrès de la chirurgie et de la réanimation postopératoire, mais surtout grâce aux méthodes de fermeture percutanée. On n’hésite pas à fermer une CIA par cathétérisme interventionnel chez une personne de plus de 70 ans, car le bénéfice est certain, avec une nette amélioration des conditions de vie. ■ Références bibliographiques 1. Himbert J, Renais J, Garcia-Moll M, Scebat L, Lenègre J. Histoire naturelle des communications interauriculaires. Arch Mal Cœur 1965;58:690-710. 2. Petit J. Communications interauriculaires : problèmes posés à l’âge adulte. Arch Mal Cœur 2002;95:1069-73. 3. McMahon C, Feltes T, Fraley J et al. Natural history of growth of atrial septal defects and implications for transcatheter closure. Heart 2002;87:256-9. 4. Hsiao SH, Wang WC, Yang SH et al. Myocardial tissue Doppler-based indexes to distinguish right ventricular volume overload from right ventricular pressure overload. 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