CAS CLINIQUE Mots-clés Cœur triatrial – Syndrome coronarien aigu – Sténose du tronc commun – Communication interauriculaire Keywords Triatrial heart disease – Acute coronary syndrome – Left main stenosis – Atrial septal defect Cœur triatrial et syndrome coronarien aigu Congenital triatrial heart disease and acute coronary syndrome M. Berous*, M. Akodad** U n homme de 44 ans, fumeur, a été admis dans le service de soins intensifs de cardiologie pour un syndrome coronarien aigu sans élévation du segment ST (NSTEMI) et un œdème aigu du poumon. Il n’a pas d’antécédent médical significatif. Observation L’électrocardiogramme retrouve un bloc de branche droit et une hypertrophie ventriculaire droite (figure 1). Le bilan sanguin retrouve une élévation de la troponine (663 ng/l) et du NT-proBNP (27 000 ng/l). L’échocardiographie transthoracique (ETT) complétée par un examen par voie transœsophagienne (ETO) retrouve une large communication interauriculaire (CIA) de type ostium secundum (OS) associée à une dilatation sévère des cavités droites avec une fuite tricuspide fonctionnelle et une hypertension artérielle pulmonaire. Le tronc de l’artère pulmonaire est dilaté. De plus, ces examens mettent en évidence un cœur triatrial avec une fine membrane fenêtrée séparant l’oreillette gauche en 2 parties. Le ventricule gauche est globalement hypokinétique, avec une fraction d’éjection estimée à 40 % selon la méthode de Simpson biplan (figure 2). La coronarographie retrouve une sténose subocclusive, non athéromateuse, du tronc commun gauche (figure 3). Les autres artères ne présentent pas de lésions athéromateuses significatives. Le cathétérisme cardiaque droit identifie une hypertension artérielle pulmonaire précapillaire avec une pression artérielle pulmonaire moyenne élevée à 33 mmHg alors que la pression capillaire moyenne est basse à 3 mmHg. L’IRM cardiaque confirme le diagnostic de CIA OS et la présence d’une fine membrane dans l’oreillette gauche (figure 4). Un coroscanner montre l’absence de retour veineux pulmonaire anormal associé à la CIA, mais retrouve une naissance postérieure du tronc commun gauche comprimé par une dilatation ▲ Figure 1. Électrocardiogramme mettant en évidence un rythme sinusal régulier à 92 bpm, un bloc de branche droit complet, une hypertrophie ventriculaire droite. ▼ Figure 2. Réalisation de l’échocardiographie transthoracique (ETT) et trans­œsophagienne (ETO). A. ETT, coupe apicale 4 cavités, visualisation d’une large communication interauriculaire de type ostium secundum (CIA OS) [flèche rouge], et d’une fine membrane fenêtrée séparant l’oreillette gauche en 2 (flèche verte). B. ETT, coupe parasternale long axe, dilatation des cavités droites, visualisation de la membrane intra-auriculaire gauche (flèche verte). C. ETT, coupe apicale 4 cavités, visualisation en Doppler couleur d’une fuite tricuspide sévère. D . ETO, coupe à 0°, visualisation du passage en Doppler couleur au niveau de la CIA OS. A C B D * Clinique du Millénaire, Montpellier. ** Service de cardiologie, hôpital Arnaud-de-Villeneuve, CHRU de Montpellier. 32 | La Lettre du Cardiologue • N° 506 - juin 2017 CAS CLINIQUE ▲ Figure 3. Coronarographie mettant en évidence une sténose subocclusive non athéromateuse du tronc commun. ▲ Figure 4. Imagerie cardiaque par résonance magnétique : visualisation de la membrane intra-oreillette gauche fenêtrée (flèche blanche). ◀ Figure 5. Coro-TDM montrant la dilatation sévère du tronc de l’artère pulmonaire responsable d’une sténose du tronc commun gauche. sévère de l’artère pulmonaire à 54 mm de diamètre (figure 5). Une chirurgie est réalisée, qui consiste en une revascularisation myocardique par double pontage : mammaire interne gauche – artère interventriculaire antérieure et veine saphène – artère marginale gauche associée à une cure du cœur triatrial par ablation de la membrane additionnelle et fermeture de la CIA par un patch en Gore-Tex®. De plus, une annuloplastie tricuspidienne est réalisée. Conclusion Le coeur triatrial est très rare et représente seulement 0,1 % de toutes les cardiopathies congénitales. Il est associé à d’autres malformations cardiaques majeures, et en particulier à des communications interauriculaires dans près de 50 % des cas. Le diagnostic est posé par l’ETT (1). L’histoire naturelle dépend de la taille de la fenestration de la membrane (2). La révélation par une complication est relativement fréquente (3), mais l’association à un syndrome coronarien aigu par la compression du tronc commun gauche n’avaient jamais été décrites et correspondent à une évolution sévère et inhabituelle. ■ Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Ce cas clinique a été finaliste du Grand Prix Recherche clinique en cardiologie 2015. Références bibliographiques 1. Nassar PN, Hamdam RH. Cortriatriatum sinistrum: classification and imaging modalities. Eur J Cardiovasc Med 2011;1(3):84-7. 2. Slight RD, Nzewi OC, Buell R, Mankad PS. Cor-triatriatum sinister presenting in the adult as mitral stenosis: an analysis of factors which may be relevant in late presentation. Heart Lung Circ 2005;14(1):8-12. 3. Davlouros PA, Koutsogiannis N, Karatza A, Alexopoulos D. An unusual case of cor-triatriatum sinister presenting as pulmonary oedema during labor. Int J Cardiol 2011;150(3):e92-3.