M ise au point Avant-bras Prise en charge des fractures du radius distal Gilles Cohen Paris Liporace FA, Adams MR, Capo JT, Koval KJ Distal radius fractures. J Orthop Trauma 2009 ; 23 : 739-48. culaire. L’ensemble des études citées dans cet article apportent des résultats contradictoires tant sur le type d’immobilisation à adopter que sur les critères définissant les fractures stables pour lesquelles un traitement non chirurgical pourra a priori être proposé. Il apparaît cependant que, lorsqu’un traitement orthopédique est indiqué (fracture dite « stable »), une simple immobilisation par manchette suffit (plâtre ou résine). Une radiographie de contrôle sera faite au 7e jour puisque 75 % des déplacements secondaires surviennent lors de la première semaine. Les auteurs retiennent comme critères de stabilité des fractures : les fractures non déplacées et/ou les fractures déplacées avec un raccourcissement faible du radius (moins de 2 mm), une pente radiale de profil neutre ou de 10° supplémentaires au plus au côté controlatéral. Cet article fait le point sur les différentes modalités de prise en charge des fractures du radius distal. Incidence Les fractures du radius distal sont en constante augmentation, notamment chez les femmes de plus de 35 ans. C’est la fracture la plus fréquente. On en dénombre 200 000 par an aux États-Unis. Ce phénomène est, bien sûr, lié à la baisse du taux d’œstrogène responsable d’une diminution de la trame osseuse et, donc, d’une augmentation du risque de fracture. On distingue deux catégories de fracture : celles à basse cinétique touchant préférentiellement la femme âgée et celles à plus haute cinétique concernant l’homme jeune. Biomécanique Traitements chirurgicaux La sévérité d’une fracture, l’importance de son déplacement, voire le résultat clinique à 1 an sont proportionnellement liés à l’état d’ostéoporose avancée du patient. Bien sûr, l’index radio-ulnaire inférieur, l’âge et l’importance de la bascule dorsale influeront sur la stabilité métaphysaire, l’alignement de l’articulation radiocarpien et, donc, sur le résultat clinique final. Brochage intrafocal (technique de Kapandji) Cette méthode de fixation apporte de bien meilleurs résultats que le traitement orthopédique pour les fractures déplacées, tant au niveau de la récupération fonctionnelle que du maintien de la réduction de la fracture. Son efficacité s’exprime davantage dans le maintien de la hauteur du radius que sur la stabilisation des pentes radiales de face et de profil. Le brochage intrafocal peut être associé à un fixateur externe chez l’adulte jeune lorsque deux corticales sont comminutives, améliorant significativement les résultats clinique et radiologique. Cette association est également fréquente chez le patient âgé puisqu’elle est indiquée lorsqu’il existe une corticale comminutive. Traitement Traitement non chirurgical par immobilisation Historiquement proposé chez le patient âgé, ce traitement repose sur le « ligamentotaxis » pour réduire la fracture. Son efficacité est nulle sur les fractures à enfoncement articulaire du fait de l’atteinte des attaches ligamentaires pouvant aboutir à une dégénérescence arti- 14 Le fixateur externe « radial pur » Traitement chirurgical par plaque interne Les fiches du fixateur externe sont exclusivement placées sur le radius, en épiphysaire et en diaphysaire de part et d’autre du foyer de fracture. Les fiches distales sont utilisées comme « joystick » pour réduire la fracture. Ce mode de fixation externe a montré sa supériorité par rapport au fixateur qui ponte l’articulation radiocarpienne et dont le fonctionnement nécessite un ligamentotaxis efficace, ce qui n’est pas toujours le cas dans les fractures articulaires ou à bascule antérieure. Ainsi, le fixateur externe « radial pur » apporte des résultats intéressants sur la réduction radiologique de la fracture, mais aussi dans la récupération des mobilités articulaires du poignet et de la force. La morbidité d’une telle technique ne semble pas plus importante par rapport aux autres techniques usuelles. Initialement mises en place sur la face dorsale, les plaques palmaires ont rapidement été préférées par les chirurgiens pour éviter les nombreuses complications tendineuses dont elles étaient sujettes à l’origine. L’introduction des plaques verrouillées a apporté une rigidité telle qu’une mobilisation précoce est désormais possible, permettant une excellente récupération des mobilités du poignet et de la force pour une morbidité bien moindre. Traitement par « Spécifique-Fragment » fixation Cette méthode utilise des miniplaques et agrafes qui maintiennent individuellement une multitude de fragments osseux fracturés. Cette pratique a montré sa supériorité sur la rigidité du montage en comparaison avec les méthodes de synthèse chirurgicale par fixateur externe. Elle pourrait permettre selon la rigidité du montage une mobilisation précoce. Sa grande maniabilité et sa capacité à fixer électivement des petits fragments osseux articulaires lui ont permis d’être adoptée par plusieurs centres spécialisés. Le fixateur externe pontant l’articulation radiocarpienne Les fiches proximales sont placées sur la diaphyse du radius et les fiches distales sont situées sur le 2e métacarpien de sorte que le fixateur « ponte » l’articulation radiocarpienne. Ce type de montage a montré sa supériorité sur le traitement orthopédique des fractures du radius distal déplacées, mais la rigidité de ce système est bien moins efficace en comparaison avec les autres fixations chirurgicales quelles qu’elles soient. Ce mode de fixation est surtout utilisé en complément d’ostéosynthèse avec des broches ou même des plaques. Son mode de fonctionnement nécessite un ligamentotaxis efficace des ligaments radiocarpiens, ce qui n’est pas toujours le cas pour les fractures articulaires. L’ajout d’une 5e fiche de fixateur externe au niveau du fragment distal du radius apporterait davantage de solidité au montage afin d’éviter les pertes de correction postopératoire ainsi que les pertes de hauteur. Aussi rencontrons-nous davantage de complications avec ce type de montage telles des pseudarthroses, des raideurs postopératoires, des irritations des branches sensitives du nerf radial et des infections des fiches. Fixation intramédullaire du radius distal Cette nouvelle technique utilisant le Micronail® permet un traitement mini-invasif des fractures du radius distal. Le clou (nail) est introduit par la styloïde radiale et comprend trois vis distales de 2,4 mm sous-chondrales et d’orientation divergente antérieure et postérieure. Il existe également deux vis proximales introduites à l’aide du viseur de l’ancillaire. Le clou est entièrement intramédullaire. Cette technique d’ostéosynthèse serait indiquée pour les fractures extra-articulaires, voire les fractures articulaires simples. Les fractures associées de la styloïde ulnaire Les effets d’une fracture de la styloïde ulnaire non traitée, associée à une fracture du radius distal, ont largement été discutés, mais non unanimement reconnus. Certains auteurs redoutent une instabilité de l’articulation radio-ulnaire distale (RUD), ou des perforations du Triangular FibroCartilage Complex (TFCC), voire des répercussions sur la mobilité et la force du poignet. Il semblerait que les fractures de la base de la styloïde déplacées de plus de 2 mm soient significativement à l’origine d’une instabilité de l’articulation RUD. Elles sont donc une indication idéale à une ostéosynthèse par broche. Traitement chirurgical assisté par arthroscopie Bien que cette pratique nécessite une courbe d’apprentissage non négligeable, elle permet de contrôler l’absence de marches d’escalier articulaires persistantes passées inaperçues à la radioscopie peropératoire. Elle permet surtout de détecter et de traiter des lésions ligamentaires intracarpiennes souvent associées au traumatisme du poignet. 15 M ise au point lisation postopératoire et d’améliorer la récupération des mobilités articulaires. En conclusion, les auteurs proposent un arbre décisionnel sur la prise en charge thérapeutique des fractures du poignet. Selon des critères précis préalablement cités, il sera proposé ou non un traitement chirurgical. En cas de traitement chirurgical, le choix de la technique utilisée semble davantage lié à l’habitude et/ou à l’expérience du chirurgien. Supplémentation ostéobiologique Plusieurs études prospectives et randomisées vantent les effets des dérivés du phosphate de calcium associés au traitement chirurgical par broche. Les études biomécaniques sur sujets cadavériques rapportent une meilleure rigidité des ciments phosphocalciques par rapport à des broches de Kirschner. Leur association augmente significativement la stabilité postopératoire de la fracture et permettrait de diminuer la durée d’immobi- Cet article présente une mise au point sur la prise en charge thérapeutique des fractures du poignet. Excepté peut-être la fixation intramédullaire du radius distal, aucune nouveauté n’apparaît sur les différentes techniques proposées. On pourrait reprocher le fait d’évoquer exclusivement la technique de Kapandji pour l’ostéosynthèse par broche alors que la tendance actuelle est de proposer un brochage mixte à quatre broches (Kapandji associé à une broche styloïdienne). On regrette également l’absence de comparaison entre l’ostéosynthèse par broche versus plaque antérieure, notamment en fonction de l’âge du patient opéré. On aurait souhaité de la part d’auteurs expérimentés davantage de précisions (voire de pertinence) dans l’arbre décisionnel en conclusion. Cependant, l’article s’appuie sur une bibliographie complète et de qualité. 16