mémoire étant souvent le fruit de procédures expérimentales
ayant conduit par la suite à des procédures d’évaluation stan-
dardisées et normées (Desgranges et Eustache, 2003).
Aujourd’hui, la neuropsychologie de l’enfant se développe
considérablement de même que l’intérêt clinique et théorique
pour l’évaluation de la mémoire au cours de l’enfance. Cette
nouvelle approche neuropsychologique prend sa source sur les
modèles et les procédures effectuées chez l’adulte mais nécessite
toutefois de prendre en compte les spécificités liées au dévelop-
pement. Ainsi, l’analyse des performances mnésiques doit tenir
compte de l’évolution des processus en fonction de l’âge, du
niveau de conceptualisation et de raisonnement de l’enfant et
ceci en lien avec la dynamique de la maturation fonctionnelle
cérébrale. De façon plus spécifique, il s’avère nécessaire de
mieux appréhender le développement des différents systèmes
mnésiques. Par exemple en ce qui concerne la mémoire à court
terme même s’il a été établi chez l’adulte que l’empan se situait
ordinairement à 7 ± 2 éléments, on ne peut attendre d’un en-
fant de 6 ans, n’ayant pas la maturation cérébrale d’un adulte,
qu’il atteigne le même niveau de performance (Ganoac’h et
Pross, 2005). En ce qui concerne la mémoire épisodique, vu son
émergence tardive, son exploration reste difficile avant l’âge de
5-6 ans. De plus, il faut attendre l’âge scolaire pour que l’enfant
s’adapte facilement à des situations d’apprentissage intention-
nel. Enfin, l’évaluation de la mémoire chez l’enfant nécessite
une estimation de son rendement intellectuel général (raison-
nement, attention...) de même que de ses aptitudes linguisti-
ques et perceptivo-motrices.
Dans le cadre de l’épilepsie, la majorité des enfants ont une
intelligence normale mais présentent souvent des difficultés
scolaires (Bulteau et al., 2000). Des problèmes mnésiques sont
régulièrement évoqués pour rendre compte de leurs difficultés
d’apprentissage et ceci tout particulièrement chez ceux souf-
frant d’une épilepsie du lobe temporal. L’évaluation de la mé-
moire aura pour but de déterminer, d’une part, si les difficultés
scolaires de ces enfants sont en lien avec des troubles mnésiques
et, d’autre part, de tenter de déterminer l’impact de la maladie
sur les différentes étapes du fonctionnement mnésique (enco-
dage, stockage, récupération). Dans le contexte de l’épilepsie,
l’hypothèse de troubles de la consolidation de la trace mnésique
est la plus souvent évoquée mais l’on peut également suspecter
des difficultés dès l’encodage de l’information avec une lenteur
d’apprentissage (Jambaqué, 2005).
Enfin, comme chez l’adulte, l’évaluation de la mémoire doit
pouvoir tenir compte du type de matériel proposé : les capacités
en mémoire sont, en effet, susceptibles d’être en rapport avec la
nature verbale ou visuospatiale du matériel signant l’influence
de l’asymétrie hémisphérique (Jambaqué et al., 1993).
Évaluation mnésique chez l’enfant
L’exploration de la mémoire repose d’abord sur un entretien
avec l’enfant et sa famille afin d’apprécier l’expression d’une
éventuelle plainte mnésique et l’impact possible de difficultés
mnésiques dans la vie quotidienne et dans les apprentissages.
Néanmoins, une évaluation objective s’avère nécessaire de
même que l’analyse plus détaillée des capacités permettant
d’apprendre, de retenir et de rappeler des informations. En ce
qui concerne la mémoire de travail, la mesure de l’empan
mnésique est largement répandue. L’identification des troubles
de la mémoire à long terme repose, en règle générale, sur
différentes échelles permettant de calculer des indices généraux
tout en sachant que les différents types d’épreuves reflètent une
certaine diversité des activités mnésiques. Les techniques les
plus utilisées en neuropsychologie clinique sont les suivantes :
épreuves de reconnaissance d’un matériel visuel (dessins, visa-
ges) et plus rarement verbal (mots, phrases) et ceci par choix
forcé (comme par exemple dans la batterie de Signoret, 1991) ou
par réponse de type oui/non (comme par exemple, dans la CMS,
Cohen, 2001) ; apprentissage d’une liste (mots, signes abstraits),
apprentissage de paires associées, mémoire d’un ensemble plus
ou moins organisé (récit, figure géométrique), situations de
simulation (comme dans le RBMT, Wilson et al. 2000).
Évaluation de la mémoire de travail
Les capacités en mémoire de travail sont intimement liées
aux capacités attentionnelles et jouent un rôle dans les fonc-
tions exécutives. Dans son modèle de 2000, Baddeley a ajouté à
son modèle en trois sous-systèmes une quatrième composante,
qui est réservée au stockage temporaire des informations. Cette
mémoire tampon épisodique permet l’intégration et la manipu-
lation d’informations multimodales en mémoire lors de l’exé-
cution de tâche cognitives. Le nombre d’éléments qui pourra
être intégré en mémoire de travail est sous-tendu par les capa-
cités attentionnelles du sujet. Ainsi, des difficultés attentionnel-
les et/ou en mémoire de travail peuvent interférer dans les
activités cognitives comme, par exemple la résolution de calculs
mentaux qui nécessite notamment de pouvoir maintenir les
informations en mémoire de travail et de les manipuler. De plus,
dans le contexte d’une épilepsie active, le risque de ruptures
attentionnelles et donc de difficultés en mémoire de travail
engendrant des difficultés d’apprentissage est notable (Metz-
Lutz et al., 1999).
Évaluation de la boucle phonologique
L’évaluation s’effectue à l’aide des épreuves d’empan verbal
(empan de mots ou de chiffres) afin de voir si la rétention à court
terme des informations est dans la norme. L’empan verbal est le
plus souvent estimé grâce à une épreuve de répétitions de
chiffres. L’enfant doit répéter des séquences de deux chiffres
puis des séquences de longueur croissante. Quand il échoue à
deux séquences consécutives, l’épreuve est arrêtée et on déter-
mine l’empan comme correspondant à la longueur du dernier
item réussi. Cette épreuve est alors réalisée en ordre inverse (à
partir de 6-7 ans) permettant d’apprécier la capacité de manipu-
ler des informations en rapport avec l’administrateur central.
On retrouve ce type d’épreuve notamment dans les échelles de
développement intellectuel de Wechsler (2005), de McCarthy
(1976) et de Kaufman et Kaufman (1993).
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´pilepsies, vol. 18, Numéro spécial, septembre 2006
L’évaluation de la mémoire chez l’enfant épileptique
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