REVUE FRANÇAISE
DE
PEDAGOGIE
MÉMOIRE
ET
RÉSOLUTION
DE
PROBLÈMES
par
J.
f.
RICHARD
INTRODUCTION
1.
Mémoire
et
intelligence
On oppose souvent
mémoire
et
intelligence,
l'intelli-
gence étant considérée
comme
une activité créatrice
et
la
mémoire
comme
une activité de caractère passif et
répétitif.
En
fait
cette dépréciation
n'est
pas le
fait
des psy-
chologues qui
ont
étudié
la
mémoire, elle est héritée de
la
tradition
philosophique.
On
peut
s'en
étonner
car
tous
ceux qui
ont
étudié
la
mémoire
ont
mis
en
évidence les
liens qu'elle
entretient
avec les activités intellectuelles
les plus complexes (voir de Schonen,
1974).
Les recher-
ches récentes insistent de plus en plus sur les stratégies
qui interviennent
soit
au
niveau du stockage,
soit
au
ni-
veau de
la
récupération
en
mémoire:
certaines sont
d'un
niveau de complexité équivalent àcelles observées dans
la
résolution de problèmes,
Piaget
et
Inhelder
(1968)
ont
développé l'idée que
la
mémoire
était
le
reflet des
traitements
et
des opérations
60
juil.-août-sept.
1982,
9~
17
mentales
et
suivait le développement des structures opé-
ratoires de l'intelligence. Une perspective voisine aété
développée par l'école soviétique qui lie la mémoire
et
l'activité
(Zintcheko.
1966
;Smirnov. 19661.
On
trouve
également des idées équivalentes chez des auteurs anglo-
saxons
comme
Craik
et
Lockhart
(1972)
pour
qui la pro-
babilité qu'une
information
soit
conservée
en
mémoire
dépend du niveau de profondeur du
traitement
qui aété
effectué:
une
information
qui asubi un
traitement
séman-
tique
aplus de chances
d'être
retenue
qu'une
information
qui aété traitée àun niveau superficiel, phonétique ou
visuel
par
exemple. D'une façon générale, dans
la
lecture
des travaux récents on est frappé de la
similitude
du
lan-
gage utilisé
pour
parler de la
mémoire
et de l'intelligence.
L'idée centrale de cet article est que
l'activité
deréso-
lution de problèmes dépend dans une
très
large mesure
des
activités
mnésiques
et
que pour une grande part les
difficultés
rencontrées dans cette tâche
sont
liées aux
contraintes
de
fonctionnement
des systèmes mnésiques.
2. Les
types
de
mémoires
Il
faut,
pour
commencer, introduire
deux
distinctions
classiques
en
psychologie, qui
se
recouvrent en partie
mais ne
partent
pas du
même
point
de
vue:
La
première
distinction
est faite
d'un
point
de
vue
qu'on
pourrait
qualifier
d'anatomique
en
ce sens qu'elle
envisage les
structures:
c'est
la
distinction entre
mémoi-
re
â
court
terme
(M.C.T.)
et
mémoire
âlon9
terme
IM.L.T.I.
L'autre
distinction
est faite du
point
de vue
de
la
tâche àréaliser, c'est-à-dire dans une perspective fonc-
tionnelle
:
c'est
la
distinction
entre
mémoire
de travail
(M.T.)
et
mémoire
permanente.
2.1.
Mémoire
à
court
terme
et
mémoire
àlong
terme
Très
schématiquement
on peut considérer
la
mé-
moire àcourt
terme
comme
un registre dans lequel beau-
coup
d'informations
circulent :elle ressemble à
la
mé-
moire-tampon
des informaticiens. Dans ce registre peu
d'informations
sont résidentes à
la
fois:
sa
capacité est
limitée.
Une
information
ysubsiste pendant peu de
temps:
elle est sujette àeffacement à
moins
qu'une acti-
vité
particulière n'intervienne pour
la
maintenir. Elle est
donc labile mais al'avantage
d'être
facilement
récupé-
rable.
La
mémoire
àlong
terme
est un registre àentrée plus
sélective :des opérations
de
codage spécifique accom-
pagnent l'entrée
en
mémoire
àlong
terme.
C'est une mé-
moire àtrès grande
capacité:
la
conservation de
l'infor-
mation est durable, elle offre une
énorme
résistance à
l'effacement. Mais c'est une
mémoire
dans laquelle il y a
beaucoup d'interférences entre les
informations.
Celles
qui yentrent peuveQt transformer celles qui ysont déjà
9
et
être àleur
tour
transformées par
elles:
ce
qui est récu-
péré
n'est
pas nécessairement ce qui aété stocké. Par
aifleurs, une
information
présente
en
M.L.T. peut ne pas
être récupérable,
comme
le
montre
le
phénomène du
mot
sur
le
bout
de
la
langue:
on est sûr de l'avoir en
mémoire
mais on peut
mettre
très
longtemps
à
le
retrouver.
En
résumé
en
mémoire
à
court
terme
les
limitations
sont
principalement
dans
la
capacité de stockage et
la
brièveté de la conservation
de
l'information;
en
mémoire
àlong
terme
les aspects
déterminants
sont
le codage de
l'information
qui
intervient
au
moment
du stockage et
sa
récupération.
2.2.
Mémoire
permanente,
mémoire
de travail,
mé-
moire opérationnelle
La
mémoire
opérationnelle conserve les
informations
qui sont utiles aux
traitements
impliqués par
la
réalisa-
tion d'une tâche (Bisseret,
1970).
Dans ce
type
de
mé-
moire
il
y a une remise à
jour
continuelle
en
fonction
des
exigences
de
la
tâche. Par le biais de ces dernières est
exercé un
contrôle
sur
la rétention
en
mémoire:
les infor-
mations
sont
conservées pendant le
temps
nécessaire
et
sont généralement oubliées quand elles
sont
devenues
inutiles. Par exemple, dans
la
correction
de
copies, l'ensei-
gnant
retient des
informations
concernant la copie
en
cours
de
correction;
lorsqu'il passe àune autre copie il
y a effacement (pas
forcément
conscient) des
informa-
tions spécifiques à
la
copie, ce qui évite les
interactions
(par exemple,
imputer
àune copie les fautes repérées
dans
la
copie précédente),
Une autre notion voisine est celle de
mémoire
de
tra-
vail. Par
on entend une
mémoire
àcapacité limitée (du
type
de
la
mémoire
àcourt terme),
sont stockées les
informations
utiles à
la
tâche,
et
dont
la
capacité de
stockage dépend des activités cognitives qui sont exer-
cées
en
même
temps. Les
auteurs
qui
utilisent
cette
notion se réfèrent généralement à
la
conception selon
laquelle il existe un système àcapacité
limitée
dont
la
capacité est partagée entre
le
stockage
d'informations
et l'exercice
d'activités
cognitives
non
automatisées':
inférences, comparaisons, recherche
en
mémoire
àlong
terme,
contrôle
de
l'exécution
de la tâche
(Richard,
1980).
Si
la
charge mentale constituée par ces activités
cognitives est
importante
la
capacité de stockage est
réduite car alors ne
peuvent
s'exercer des activités qui,
comme
la
répétition mentale,
permettent
de
maintenir
plus
longtemps
l'information
en
mémoire à
court
terme.
L'exemple suivant
montre
comment
la
capacité de
maintien
d'informations
en
mémoire
à
court
terme
peut
être
réduite
par
la
mise
en jeu
d'une
activité
cognitive
intetiérente.
En
mémoire
immédiate
le
nombre
d'éléments
que
l'on
peut
retenir et rappeler est de
l'ordre
de 7 à 8.
La
situation
habituellement
utilisée
pour
l'étude de
10
l'empan
mnésique peut être modifiée de
la
façon suivan-
te
(Wimbey
et
Leiblum,
1967)
:
_
on
fait
entendre une liste de chiffres terminée
par
un
mot,
par exemple
le
mot
VERT;
_
le
sujet adevant lui une liste de couples
mots-
nombres,
du
type:
ROUGE
1
VIOLET
2
ROSE
3
BLEU
4
VERT
5
JAUNE
6
ORANGE
7
lorsqu'il entend le
mot
«
VERT»
11
doit
rechercher
ce
mot
dans
la
liste, lire le nombre correspondant, ici 5 ;
-
il
doit
alors écrire
~
la
ligne 5de
sa
feuille de ré-
ponse
tous les chiffres de la liste
dont
il se souvient.
Le
simple fait de ne
pouvoir
rappeler
immédiatement
la liste des chiffres mais de devoir auparavant rechercher
le numéro de
la
ligne donner
sa
réponse
diminue
à
peu
près de
moitié
le nombre de chiffres rappelés.
3,
Les
deux
types
d'activités
mnésiques dans la réso-
lution
de problèmes
L'exemple suivant montre
comment
dans
la
résolu-
tion
de problème interviennent deux types
d'activités
mnésiques.
Dans une situation de résolution de problème, on
doit
d'une part conserver
momentanément
des
informa-
tions
dont on abesoin pour des
traitements
ultérieurs
(données du problème, résultats déjà calculés
...
),
d'autre
part
rechercher
en
mémoire à
long
terme
des connais-
sances, des règles
d'action
utilisées
pour
la
résolution.
Prenons
comme
exemple
le
problème des
crypto-
grammes:
DONALD
+GÉRALD
D~5
ROBERT
-de D=5on tire T=0en allant rechercher
en
mémoire à
long
terme
l'algorithme
de l'addition
et
on
.note qu'on a 1
en
retenue à
la
26
colonne;
-
on
peut
ensuite déduire que D+G
~
9 : pour
cela on abesoin de remarquer 0+G=R(donnée du
problème
présente sous
Jes
yeux)
et
d'aller chercher en
mémoire
de travail
lïnformation
R
~
9(qui aété fournie
dans
I~
consigne:
les lettres représentent les chiffres de
oà
9);
-on peut déduire ensuite que R>5 :
pour
cela il
faut rechercher
en
mémoire de travail
l'information
D=
5, récupérer (toujours
en
mémoire de travail)
nnforma-
tion T=0,
et
se
souvenÎr (information donnée dans
la
consigne) que
le
même
chiffre ne peut correspondre à
deux lettres.
On
déduit
G*,O
àpartir de ces deux derniè-
res
informations
et
de D
==
5et G
=1=
0on
déduit
R>5 ;
-on remarque alors que Rest
impair:
pour cela il
faut retrouver
en
M.L.T.
la
connaissance qu'un nombre
ajouté à
lui-même
est un nombre pair
et
retrouver en
mémoÎre de travail la trace
de
la
retenue dans
la
26colon-
ne;
-on peut alors déduire R=7ou 9 : pour cela il
faut
retrouver
en
mémoire
de travail les deux informations,
Rest impair
et
R>5
...
;
-
et
ainsi
de
suite
...
Dans cette activité de résolution
on
fait appel à
la
fois àdes connaissances
en
mémoire àlong terme (pro-
priétés,
relation~s,
règles 'générales de déduction, algo-
rithmes) et àdes
informations
en mémoire de travail qui
sont ou bien des données fournies dans la consigne ou
bien des résultats déjà calculés.
1.
-
LES
LIMITATIONS
DE
LA
MÉMOIRE
ACOURT
TERME
1.
La
capacité
limitée
de la
mémoire
à
court
terme
Tout
le monde reconnaît que
la
capacité
de
la
mé-
moire àcourt terme est limitée.
La
difficulté est de savoir
quelle est réellement cette capacité. Les résultats expé-
rimentaux obtenus par différentes techniques ne sont
guère concordants.
La
technique de loin
la
plus répandue est celle du
rappel, qui est utilisée dans
la
mesure de l'empan mnési-
que. Quand le
rythme
de
présentation n'est pas
trop
rapi-
de, quand les
items
sont familiers, (lettres, chiffres) et que
le rappel est demandé
immédiatement
après
la
présen-
tation
;le
nombre
d'items
rappelés est de l'ordre de 7
pour
des adolescents et des adultes.
Quand une activité cognitive
même
peu complexe
est insérée entre
la
présentation et
le
rappel,
le
rappel est
nettement
plus faible
comme
on l'a signalé plus haut.
Wimbey
et Leiblum
(1976)
ont
comparé
la
condition
classique (rappel
immédiat)
et la condition décrite plus
haut préalablement
au
rappel le sujet
doit
rechercher
àquelle ligne de
sa
feuille donner ses réponses
en
consul-
tant
une liste. Les
items
àrappeler étaient des chiffres
rangés
en
listes de 5, 6, 7, 8
ou
9et présentés
au
rythme
rapide
de
2à
la
seconde.
Le
nombre
de chiffres rappelés
est 5,5
en
moyenne
par
liste dans la condition de rappel
immédiat, il est seulement de
2,33
en
moyenne dans
la
condition de rappel différé.
On observe également une
diminution
importante
du
nombre
d'items
rappelés
quant
au
lieu de présenter une
liste courte de l'ordre de l'empan
et
de
demander
le rappel
de
l'ensemble de
la
liste, on présente une liste très longue
(20
ou
30
éléments), on
l'interrompt
àun
moment
donné
et on
demande
au
sujet de rappeler
tous
les
derniers
items
dont
il
se
souvient. L'empan mesuré de cette façon,
et
appelé empan mobile (running span, Pollack, Johnson,
Knaff,
1959),
est
nettement
plus réduit.
Dans
la
technique classique de mesure de l'empan on
surestime vraisemblablement
la
capacité de la
mémoire
à
court
terme, car les conditions de présentation
permet-
tent
d'utiliser
des repères spatio-temporels de
début
et
de
fin de liste
et
d'user
au
mieux des possibilités de répé-
tition
mentale.
Ce
n'est que dans les conditions les plus
favorables que le rappel est de l'ordre de 7
éléments:
ce
nombre constitue une
limite
supérieure de
la
capacité de
la
mémoire
à
court
terme.
On peut également étudier la capacité de
la
mémoire
à
court
terme, sans exiger un rappel explicitedes éléments
présentés mais en
demandant
au
sujet
d'effectuer
un trai-
tement
sur des données qu'il n'a pas sous les yeux mais
qu'il aenregistrées dans
sa
mémoire. Case
(1972)
a
uti-
lisé une tâche de sériation mentale
Qui
aces caractéris-
tiques.
On
présente verbalement une suite de nombres
de plus en plus grands àl'exception du
dernier:
la
tâche
du sujet est
d'indiquer
en
quelle position celui-ci
doit
être
mis
pour
être à
sa
place dans la série. Supposons, par
exemple, que l'on donne
la
suite 3, 9, 18, 11 ;
le
sujet
doit
répondre 3car
11
est
en
troÎsième position dans
la
série. Pour
déterminer
quelle position adans
la
série le
dernier
nombre
présenté, le sujet
doit
évidemment
retrou-
ver dans
sa
mémoire
les différents nombres de
la
liste.
Des enfants de
10
ans réussissent
la
tâche quand
la
suite
est de longueur 4
comme
dans rexemple ci-dessus, mais
quand
la
suite est plus longue ils échouent. Dans une
situation de rappel
immédiat
ils sont capables
pourtant
de restituer une liste contenant deux éléments de plus
en
moyenne.
Donc, lorsque l'on
doit
effectuer un
traitement
même
simple (une comparaison dans l'exemple ci-dessus) sur
des données
en
mémoire,
la
capacité de stockage
de
la
mémoire
à
court
terme
est
nettement
inférieure àl'empan.
Il
est
important
de remarquer que dans
toutes
ces
expériences sur
la
capacité de
la
mémoire
à
court
terme,
les
items
constituent
un ensemble amorphe. Si les élé-
ments présentés sont organisés, s'ils constituent, par
exemple, des phrases,
le
nombre
d'éléments
susceptibles
d'être
maintenus
en
mémoire
à
court
terme
est beaucoup
plus élevé. Ainsi on peut retenir après une seule lecture
presque
autant
de phrases simples que de
mots
isolés.
11
2.
La
compétition
en
mémoire
àCourt
terme
On ade bonnes raisons actuellement de penser que
dans le système àcourt terme, il y a
compétition
entre
d'une part, le stockage de
l'information
et
d'autre
part,
l'exercice
d'activités
cognitives non automatisées qui
peuvent
se
faire
difficilement
sans contrôle conscient
et
qui
éventuellement
peuvent s'accompagner
d'une
verb~
Iisation.
Ce
sont par exemple des activités de comparaI-
son, d'inférence,
d'anticipation,
de
construction
de repré-
sentation, d'élaboration de plans, de test d'hypothèses,
d'identification
perceptive dans des
conditions
difficiles,'
de sélection
de
réponses, etc. Baddeley
et
Hitch
(1974)
ont
réalisé une série d'expériences qui
permettent
de
préciser dans quelles
conditions
une telle
compétitio~
intervient. Dans l'une de ces expériences le sUjet dott
évaluer une assertion, du
type
de celles présentées dans
le
tableau 1,
en
répondant par vrai ou faux,
Tableau 1
Types
da
phrases présentées
dans
l'expérience
de
Baddaley
et
Hitch
119741
Énoncé Stimulus Réponse
correcte
An'est
pas
précédé par B
BA
faux
Aprécéde B
AB
vrai
Aest précédé par B
BA
vrai
An'est pas précédé par B
AB
vrai
Par exemple on lui présente
la
phrase «An'est pas
précédé
par
B»puis on lui présente les deux lettres BA.
La
réponse attendue est «faux
)}
puisque dans BA, Aest
précédé par
B,
On
mesure le
temps
de réponse.
Le sujet
doit
exécuter
simultanément
une autre tâche
qui varie selon les
conditions:
il
doit
répéter mentalement
une suite de 6chiffres qui lui aété présentée avant
la
tâche de
jugement
et
qu'il
devra restituer ensuite, ou bien
il
doit
compter
rapidement de 1à6ou encore répéter
«The
...
The
...
The
...
»,
Ces deux dernières
conditions
sont
destinées à
imposer
au
sujet une
activité
de répétition
sans charge mentale. Dans
la
condition contrôle
le
sujet
exécute seulement
la
tâche de
jugement.
Les résultats
sont présentés dans les tableaux 2et 3.
Quand
le
sujet
doit
retenir 6chiffres en mémoire le
temps
de réponse à
la
tâche de
jugement
est
notablement
augmenté,
et
Cette
augmentation
est
d'autant
plus
forte
que
la
phrase est plus complexe
et
le
jugement
plus
dif-
ficile,
12
Tableau 2
Temps
de
réponse èla tAche
de
jugement
pour
les différentes
conditions
expérimentales
(d'après Baddeley et Hitch,
1974,
table
Ill.
p.
55)
Temps de réponse
Tâche concurrente
(en
secondes)
1Aucune (situation contrôle)
2,79
2Répéter
"The,
..
The.,. The»
3,13
3.
Répéter
{(
1,
2,
3, 4,
5,
6,
1,2,3,.
"
3,22
4.
Répéter 6chiffres présentés auparavant et
4,27
les retenir
Tableau 3
Oifférence
dans
le
temps.
de
réponse
moyen
entre
la
condition
4
(répétition
de
6chiffres èretenir)
et
la
situation
1(contrôle)
pour
les4
types
de
phrases
(d'après Baddeley
et
Hitch,
1974}
Différence avec
Forme
de
la
phrase
la
situation contrôle
(en
secondes)
-Affirmative -active
0,70
-
Affirmative·
passive
1.10
-Négative· active
1,40
_Négative -
pasSive
2.40
La tâche mnésique
intetière
donc
avec la tâche
de
jugement
et ceci d'Çlutant plus que
la
tâche de
jugement
est plus complexe. Un autre résultat de l'expérience de
Case
(1972)
citée plus
haut
va
dans
le
Sens
de
cette
interprétation et suggère qu'il y a également une dété-
rioration de la rétention en
mémoire
à
court
terme
quand
l'actÎvité cognitive concurrente est plus complexe. Ces
auteurs constatent
en
effet que
la
différence entre
le
nombre
d'éléments
maintenus
en mémoire dans une
tâche de rappel
immédiat
et le nombre
d'éléments
main-
tenus en mémoire dans une tâche de sériation
mentale
tend à
diminuer
avec
l'âge:
cette
différence qui est de
2,5
éléments vers
8-9
ans tend àdiminuer avec l'âge.
Cela peut
s'expliquer
par
le
fait que chez des
jeunes
enfants
la
tâche de comparaison de nombres est
nette-
ment
plus complexe et constitue une charge mentale plus
importante
que
pour
des adolescents chez qui elie
tend
à
s'automatiser
de sorte qu'elle n'interfère
pratiquement
plus avec
le
stockage
en
mémoire.
Pourquoi y
a-t-il
concurrence entre les activités de
stockage
et
des activités
de
traitement?
On
ne
peut
pour
l'instant
que
formuler
des hypothèses,
dont
l'une des
plus plausibles est que
l'information
en
M.C.T., étant très
labile, doit,
pour
n'être
pas perdue, être entretenue par
une activité
qui
po-urrait être une sorte
de
récapitulation,
de révision périodique
dont
\a
répétition mentale est une
forme. Si pendant le
même
temps
sont exécutés des
trai-
tements
cognitifs
complexes qui ne souffrent pas d'être
interrompus, alors l'information
en
M.C.T. pourra avoir
disparu parce que cette activité de récapitulation aura
été empêchée (voir Richard, 19811.
3. Relation
entre
capacité de stockage en
mémoire
à
court
terme
et
résolution de problèmes
Diverses recherches
ont
mis
en
évidence une corréla-
tion
entre
la
mesure
de
l'empan
et
la
réussite dans
la
résolution de problèmes. Ainsi Whimbey, Fishof et Sili-
kowitz
(1969)
trouvent
une corrélation de
.76
entre
l'empan
mnésique mesuré selon
la
technique décrite plus
haut (p. 10)
et
la
réussite àdes problèmes du type suivant,
A,
B,
Cet 0représentent des catégories d'objets
dif-
férents. Vous avez 8A, 3
B,
2 C et 5
0,
on vous donne
2 B
et
5
D.
Combien avez-vous pour chaque
catégorie?
(réponse:
8A, 58, 2
C,
10
Dl. Cette
corrélation
est
d'autant
plus remarquable que
la
réussite àces problè-
mes,
tout
comme
l'empan
mnésique, sont
faiblement
cor-
rélés avec un
test
de vocabulaire, qui est une assez bonne
estimation
du niveau général d'intelligence.
La
corréla-
tion
entre
l'empan
et
la réussite au problème ne
peut
donc
s'expliquer par le
facteur
général d'intelligence.
Il
y a par ailleurs une corrélation entre le Q1
et
la
mémoire
àcourt
terme
comme
le
montrent
une série
d'expériences de Cohen
et
Sandber9 (19771.
La
techni-
que utilisée
pour
mesurer la capacité de la mémoire à
court
terme est la
suivante:
on présente
une
liste de 9
chiffres mais
au
lieu de demander de répéter l'ensemble
de
la
liste on demande de rappeler seulement
tantôt
les
trois
chiffres du début,
tantôt
ceux du milieu,
tantôt
ceux
de la fin.
On
aainsi des
informations
sur la rétention des
différentes parties de
la
liste
et
on peut mieux apprécier
la contr"lbution de la
mémoire
àcourt
terme,
qui est plus
importante
pour
la
fin de
la
liste que pour le début.
Le
Q1
est dans
toutes
les expériences corrélé plus
fortement
avec le taux de
rappel
de
la
dernière
partie
de
la
liste
qu'avec celui de
la
première partie. O'autre part,
la
corré-
lation est observée
même
pour des rythmes de présen-
tation
extrêmement rapides (6 ou 9chiffres par seconde).
Toute possibilité de répétition est donc exclue
et
il appa-
raît que
la
rétention
en
mémoire à
court
terme,
même
en
l'absence
de
répétition, est liée
au
Q
1.
4. Les effets des
limitations
de la
mémoire
à
court
tenne
sur la résolution de problèmes
Les
limitations
de
la
mémoire à
court
terme
peuvent
se
traduire de diverses manières dans
la
résolution de
problèmes.
Un premier
effet
peut
se
manifester dans
la
compré-
hension de l'énoncé.
La
lecture de celui-ci
met
en
jeu une
double
activité:
une activité de déchiffrage
du
texte
et
une activité de codage
et
de stockage de
l'information
en
mémoire.
La
première est loin d'être automatisée chez
l'enfant, elle
peut
constituer
une charge mentale très
importante
et
d'après
ce
que nous avons vu concernant
la
compétition
entre
l'activité
de stockage
et
les activités
cognitives telles que l'identification,
on
peut
s'attendre
àce que
le
stockage en
mémoire
soit
perturbé
si
la
lec-
ture est difficile.
Ces
limitations
peuvent
se
traduire par
le
défaut de
prise
en
compte
de certaines données, non pas parce que
l'élève n'aurait pas été assez
attentif
dans
sa
lecture mais
parce qu'il
n'a
pas été assez sélectif dans la
mémorisa-
tion des informations, parce qu'il avoulu
trop
retenir de
choses
et
que
sa
capacité mnésique aété dépassée. Elles
peuvent
se
traduire, bien sûr,
par
l'oubli de résultats anté-
rieurs mais aussi par une restriction des possibles àconsi-
dérer, par l'omission d'éventualités alors que l'élève a
toutes
les connaissances requises
pour
les envisager.
Ainsi, dans
le
problème des
cryptogrammes
présenté plus
haut, beaucoup d'erreurs sont dues
au
fait
que l'on néglige
l'éventualité qu'il yait une retenue
et
que l'on
se
place
sanS
s'en rendre
compte
dans l'hypothèse d'absence de
retenue.
Les
limitations
de
la
mémoire
àcourt
terme
peuvent
également avoir
pour
conséquence une perte du contrôle
de
l'exécution dans les situations
l'algorithme
de réso-
lution
est un peu
complexe,
un certain
nom
bre
de
sous-buts
doivent
être réalisés dans un certain ordre pour
que
le
but
principal puisse être atteint.
5.
Comment
Surmonter ces
limitations?
Il est assez improbable que l'on puisse améliorer de
façon sens'Ibie la capacité de
\a
mémoire
àcourt
terme.
En
revanche on peut améliorer les procédures de résolu-
tion et développer des stratégies qui exigent une moindre
charge en mémoire.
Les représentations imagées (Denis,
1979,
1982)
sont
sans aucun
doute
un moyen efficace
pour
yparvenir
et ceci
pour
deux raisons.
La
première est qu'une repré-
sentation imagée permet d'actualiser facilement l'infor-
mation qui yest contenue.
La
seconde est que
la
repré-
sentation imagée occupe un registre mémoire qui n'est
pas
le
registre verbal mais
le
registre visuel principale-
ment
et
que de
ce
fait elle est moins sujette aux effets de
compétition
dus àl'exercice simultané d'activités cogni-
tives non automatisées.
L'utilisation de représentations imagées appropriées
contribue à
diminuer
la
charge de
la
mémoire
àcourt
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