Cours DU -Eschalier

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Cours DU -Eschalier
IMPLICATION DU SYSTÈME MONOAMINERGIQUE DANS LA
TRANSMISSION
ET LA RÉGULATION DU MESSAGE NOCICEPTIF
D. Jourdan, Clermont-Ferrand
Dernière mise à jour : 05-02-02
De nombreuses études ont été consacrées à la mise en évidence de l’implication des monoamines dans
les phénomènes douloureux. L’implication de la sérotonine et de la noradrénaline dans la régulation
centrale (essentiellement spinale) a été largement démontrée. D’autre part, ces molécules, interagissent à
d’autres niveau avec le message nociceptif: par une action pronociceptive en périphérie pour la sérotonine,
par une participation du système sympathique au développement et au maintien de certaines douleurs
chroniques pour la noradrénaline. La dopamine, dont les effets sont moins connus, pourrait aussi être
impliquée, mais des progrès dans la connaissance de son rôle dans les phénomènes liés à la douleur sont
encore nécessaires.
PLAN
I - SYSTÈME CATECHOLAMINERGIQUES
1°- Les catécholamines
2° - Système noradrénergique central
3°- Système noradrénergique périphérique
II - SYSTÈME SEROTONINERGIQUE
1°- Système sérotoninergique central
2°- Sérotonine périphérique et nociception
I - SYSTÈME CATECHOLAMINERGIQUES
On regroupe sous le nom de catécholamines trois composés dérivés de la phényléthylamine, tous
hydroxylés en position 3 et 4 sur le noyau aromatique. Ce sont l’adrénaline, la noradrénaline et la dopamine.
L’adrénaline, dont l’action est essentiellement hormonale, provient surtout de la glande médullo-surrénale,
bien qu’on la trouve aussi dans le cerveau. La noradrénaline est le neuromédiateur des terminaisons
nerveuses sympathiques. La dopamine, précurseur biosynthétique de l’adrénaline et de la noradrénaline,
agit essentiellement comme neuromédiateur dans le système nerveux central et en particulier dans la voie
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négro-striée. En terme d’influence sur la transmission du message douloureux, c’est la noradrénaline qui est
le produit le mieux connu.
1°- Les catécholamines
- Les structures des catécholamines.
- Les récepteurs adrénergiques sont au nombre de 4 : alpha1, alpha2, bêta1, bêta2 avec des
sous-types (p.ex. alpha2A, alpha 2B...).
2° - Système noradrénergique central
2.1. Les voies noradrénergiques centrales.
Les voies noradrénergiques centrales sont constituées par les prolongements de groupements neuronaux
(A1-A7) situés dans la partie latérale du bulbe et de la région pontique.
Ces groupements neuronaux donnent naissance à des voies longues ascendantes ou descendantes (vers
la moelle épinière en particulier) et à des voies courtes plus localisées. Certains d’entre eux participent à la
régulation de la nociception.
2.1.1. Les prolongements neuronaux descendants.
Plusieurs groupes neuronaux (A5, A7, noyau subcoeruleus, locus coeruleus) se projettent sur
la corne postérieure mais l’importance relative de chacun d’entre eux dans l’innervation de
cette corne postérieure varie suivant les espèces et même les souches. Les terminaisons
noradrénergiques établissent des contacts avec les neurones du faisceau spino-thalamique
dans la corne postérieure.
Le locus coeruleus (A6) et le groupe A5 innervent au niveau thoracique les neurones de la
corne intermédio-latérale. Le locus coeruleus innerve également la corne ventrale. Enfin les
neurones à destinée cardiovasculaire sont différents de ceux à destination de la corne
postérieure.
2.1.2. Projections neuronales courtes.
Les neurones noradrénergiques établissent également de nombreuses connections locales,
soit entre les différents groupes de neurones noradrénergiques, soit avec d’autres systèmes.
Par exemple, le locus coeruleus et le noyau subcoeruleus envoient des prolongements vers
d’autres groupes catécholaminergiques. Le groupe A5 reçoit et établit de nombreuses
connections, c’est un noyau carrefour. Parmi les structures neuronales impliquées dans ces
connections locales, citons la substance grise péri-aqueducale et les noyaux du raphé, en
particulier le raphé magnus riche en neurones sérotoninergiques.
2.1.3. Prolongement neuronaux ascendants.
Des projections noradrénergiques ont également été décrites vers le thalamus, il existe des
neurones bulbo-thalamiques qui projettent vers le noyau ventro-postéro-latéral et
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proviendraient du locus coeruleus, du noyau subcoeruleus et du groupe A5.
En conclusion : retenons l’importance du système noradrénergique bulbo-pontique et l’absence
d’interneurones médullaires noradrénergiques au niveau de la corne postérieure.
2.2. Rôle physiologique du système noradrénergique central dans la nociception.
2.2.1. Système noradrénergique bulbo-spinal.
A partir des différents groupes neuronaux bulbaires, on distingue trois voies
noradrénergiques à projection spinale directe et une voie noradrénergique à projection
spinale indirecte. Les trois premières voies directes exercent un effet antinociceptif, la 4ème
voie exerce un effet pronociceptif.
2.2.1.1. Preuves expérimentales de leur effet inhibiteur.
La stimulation du locus coeruleus provoque de l’antinociception avec
augmentation des taux de noradrénaline spinale et inhibition des neurones
nociceptifs spinaux. La stimulation de la substance grise périaqueducale qui
renferme des neurones noradrénergiques provoque une libération de
noradrénaline médullaire. La stimulation des noyaux A5 et A7 provoque une
antinociception par inhibition des neurones nociceptifs de la corne
postérieure. Les voies noradrénergiques bulbospinales sont donc inhibitrices
de la transmission du message nociceptif, leurs origines sont situées, pour ce
qui est des voies à transmission directe, dans le noyau subcoeruleus, le locus
coeruleus et les noyaux A5 et A7. La substance grise périaqueducale
intervenant de façon indirecte par le noyau raphe magnus.
A côté de ces preuves directes du rôle inhibiteur des voies noradrénergiques
bulbospinales, d’autres arguments confirment l’effet antinociceptif de la
noradrénaline au niveau spinal : l’application iontophorétique dans la moelle
de noradrénaline inhibe l’activité des neurones de la corne postérieure et leur
excitation par des stimuli nociceptifs. Cet effet inhibiteur de la noradrénaline
est dû à une augmentation de la conductance au potassium qui provoque
une hyperpolarisation neuronale. Le recours à des tests comportementaux
confirme cet effet antinociceptif, la noradrénaline administrée par voie
intrathécale augmente les seuils de douleur. Ceci est confirmé par l’action
antinociceptive d’agonistes des récepteurs alpha2-noradrénergiques, tels que
la clonidine efficace chez l’animal mais également chez l’homme après
administration péridurale. Il existe donc bien un effet inhibiteur des voies
bulbospinales dû à une libération de noradrénaline au niveau de la moelle.
Voyons maintenant quelles sont les modalités précises de cette action spinale
de la noradrénaline.
2.2.1.2. Modalités de l’action spinale des voies noradrénergiques
descendantes.
Les terminaisons noradrénergiques bulbospinales sont, comme nous l’avons
dit, groupées dans les couches superficielles de la corne postérieure de la
moelle épinière. A ce niveau, l’essentiel des synapses qui ont pu être
étudiées sont des synapses axo-dentritiques et axo-somatiques superficielles
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et profondes établies donc entre les voies noradrénergiques et les neurones
médullaires. Il semble exister également des synapses axo-axioniques entre
les terminaisons noradrénergiques et les fibres afférentes primaires, mais
elles sont très rares. Ces éléments anatomiques suggèrent que l’influence
des voies noradrénergiques descendantes est une influence essentiellement
de nature post-synaptique sur les neurones nociceptifs médullaires. Les
données sur les récepteurs noradrénergiques impliqués confirment cette
notion.
La majorité des récepteurs médullaires noradrénergiques sont de type alpha.
Il existe quelques récepteurs bêta, mais leur concentration est
essentiellement marquée autour des motoneurones ; ils ne semblent donc
pas impliqués dans les phénomènes de régulation de la nociception, comme
le confirment d’ailleurs un certain nombre d’études pharmacologiques
réalisées avec des agonistes ou des antagonistes bêta.
Parmi les récepteurs alpha, il semble que ce sont les récepteurs alpha2 qui
sont de façon prédominante impliqués dans la régulation de la nociception.
En effet ces récepteurs alpha2 sont présents et particulièrement concentrés
dans les parties superficielles de la corne postérieure. Ils sont localisés tant
au niveau thoracique cervical que lombaire, avec cependant une plus forte
concentration dans ce dernier site. Cette distribution se rencontre chez le rat,
chez le chat, chez la brebis et chez l’homme. Il semblerait que le sous-type
alpha2A soit prédominant au niveau de cette partie superficielle de la corne
postérieure. Ceci a particulièrement été vérifié chez le rat. La majorité des
récepteurs alpha2 ne serait pas localisée sur les fibres afférentes primaires ou
sur les terminaisons des voies bulbo-spinales. En effet une rhizotomie ne
diminue que de 20% la densité en récepteurs alpha2 médullaire.
L’administration de capsaïcine à des doses susceptibles de détruire les fibres
C, n’entraîne pas de variation de densité des récepteurs alpha2. La
destruction des neurones catécholaminergiques descendants ne réduit pas la
concentration en récepteurs alpha2, que ce soit au niveau de la corne dorsale
ou de la corne ventrale où l’on peut retrouver ces récepteurs. Ce rôle des
récepteurs alpha2 dans la régulation noradrénergique de la nociception est
confirmé par une série d’expériences : les effets inhibiteurs de la stimulation
du locus coeruleus sont inhibés par l’administration intrathécale
d’antagonistes alpha2, l’effet de la clonidine est inhibé par la même
administration d’antagoniste alpha2, de même que l’effet de l’administration
intrathécale de noradrénaline. A l’inverse des antagonsites alpha1, tels que la
prazosine ou que le WB4101 sont inefficaces dans ces différentes situations
expérimentales.
Si les récepteurs alpha1 sont également présents au niveau de la moelle
épinière, tant au niveau cervical, thoracique que lombaire, où leur
concentration est la plus importante, ils ne semblent pas impliqués dans la
régulation noradrénergique de la nociception. Il n’est d’ailleurs pas possible
de démontrer une localisation préférentielle des récepteurs alpha1 en fonction
des différentes couches médullaires. Par ailleurs, les récepteurs alpha1 sont
impliqués dans des régulations motrices ; cet effet moteur rend d’ailleurs
l’analyse de leur participation à la nociception difficile.
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2.2.1.3. Conditions de mise en jeu des voies noradrénergiques
descendantes.
Existe-t-il une mise en jeu permanente tonique des voies noradrénergiques
descendantes ? Les résultats d’un certain nombre d’études expérimentales
tendraient à répondre positivement à cette question. En effet, la lésion des
voies noradrénergiques par des neurotoxines telles que la 6hydroxydopamine ou l’administration d’antagonsites au niveau spinal tend à
provoquer une hyperalgie selon certains auteurs avec augmentation de la
réponse à des stimulations nociceptives. Cependant, il existe toute une série
d’études expérimentales qui sont en contradiction avec ces résultats, que ce
soit chez le chat, chez le rat normal, chez le rat polyarthritique, chez le rat
mono-neuropathique ou chez le rat diabétique. Dans ces différentes situations
expérimentales, l’administration de yohimbine ou d’idazoxan, deux
antagonistes des récepteurs alpha2 noradrénergiques n’entraîne pas
d’hyperalgie. Il est donc difficile aujourd’hui de conclure à l’existence d’une
mise en jeu tonique des voies noradrénergiques descendantes. Il est en
revanche clair que ces voies peuvent être mises en jeu par des stimulations
d’origine cérébrale ou autres, s’intégrant dans les mécanismes de contrôles
supra-segmentaires de la transmission spinale.
Nous avons évoqué l’existence de quatre systèmes noradrénergiques bulbospinaux dont trois à action directe sur la moelle avec effet antinociceptif et un
à action indirecte avec effet pronociceptif. C’est ce dernier système que nous
allons étudier maintenant. Il s’agit en fait de réseaux neuronaux
essentiellement établis entre le groupe de corps cellulaire noradrénergique A5
et le noyau raphe magnus sérotoninergique.
2.2.2. Système noradrénergique bulbaire.
2.2.2.1. Preuves physiologiques de l’existence de cette voie
noradrénergique bulbaire.
L’application iontophorétique de noradrénaline dans le noyau raphe magnus
(NRM) provoque une dépression des neurones de ce noyau. L’administration
d’antidépresseurs inhibiteurs du recaptage de la noradrénaline par voie intracérébro-ventriculaire ou intra-cisternale provoque, dans des modèles
animaux comportementaux, une petite hyperalgie. Enfin, l’administration
d’antagonistes des récepteurs noradrénergiques, en l’occurrence la
phentolamine, dans le noyau raphe magnus provoque une analgésie. Ces
données expérimentales convergent donc vers le constat qu’il existe une
influence inhibitrice sur les neurones du noyau raphe magnus exercée par
des terminaisons noradrénergiques dont l’action pronociceptive paraît être
tonique.
2.2.2.2. Aspect neurobiochimique.
L’implication du noyau raphe magnus est confirmée par l’influence
d’antagonistes sérotoninergiques : l’effet antinociceptif provoqué par
l’administration dans ce noyau raphe magnus d’antagonistes
noradrénergiques est inhibé par l’administration intrathécale de méthysergide
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(antagoniste des récepteurs sérotoninergiques) et la lésion des voies
sérotoninergiques bulbospinales ; il s’accompagne d’une augmentation des
taux de 5HT spinale.
Cet effet inhibiteur du Noyau Raphé Magnus par la voie noradrénergique
bulbaire est inhibé par le prazosin (alpha1-antagoniste injecté dans le NMR)
alors que la phényléphrine (alpha1-agoniste injectée dans le NRM) est
hyperalgésiante. Les récepteurs alpha1 sont donc en cause. L’efficacité
antalgique des antagonistes de ces récepteurs suggère une mise en jeu
tonique de cette voie noradrénergique et donc une inhibition permanente du
NRM. L’action hyperalgésiante de la yohimbine (antagoniste alpha2), injectée
dans le NRM suggère un contrôle négatif permanent de la libération de NAD
par stimulation de récepteurs alpha2 présynaptiques. Administrée dans les
mêmes conditions, la clonidine (agoniste alpha2) est analgésiante, ce qui
confirme l’influence tonique de la voie noradrénergique bulbaire.
En conclusion, la voie noradrénergique bulbaire issue du noyau A5 et
destinée au NRM exerce un effet inhibiteur tonique sur ce noyau qui se
projette par des voies sérotoninergiques inhibitrices sur la corne postérieure
de la moelle épinière.
Mais, il a également été montré que l’effet antinociceptif secondaire à
l’injection de phentolamine dans le NMR est inhibé à la fois par l’injection
intrathécale simultanée de ce produit (antagoniste alpha1 et alpha2) ou par la
lésion des voies noradrénergiques bulbospinales. Le système
noradrénergique serait donc impliqué or il n’existe pas de neurones
noradrénergiques dans le NRM. Une autre structure possédant des neurones
noradrénergiques serait donc en cause. La lésion de la partie rostrale du
noyau A5 bloque l’effet antinociceptif de la phentolamine injectée dans le
NRM. Une voie neuronale impliquant la substance P établirait la connexion
entre le NRM et l’aire A5 (l’injection de substance P dans l’aire A5 provoque
une antinociception inhibée par l’administration intrathécale d’antagonistes
alpha2). Ainsi, la voie noradrénergique bulbaire inhiberait en permanence, par
l’intermédiaire des récepteurs alpha1 du NRM, l’activation à la fois des voies
sérotoninergiques raphé-spinales analgésiantes et d’une voie substance
Pergique dont l’effet analgésiant implique les voies noradrénergiques
bulbospinales inhibitrices provenant du noyau A5.
En conclusion : même s’il existe une voie noradrénergique bulbaire hyperalgésiante, les voies
noradrénergiques bulbospinales sont analgésiantes et participent au contrôle supra-segmentaire de la
transmission nociceptive.
3°- Système noradrénergique périphérique
Dans les douleurs neuropathiques, les mécanorécepteurs à faible seuil sont sensibles à de faibles stimulus
non nociceptifs mais qui deviennent douloureux (allodynie) du fait d’altérations du système nerveux. Or la
réversion de l’allodynie rencontrée dans ces syndromes par un bloc sympathique suggère une implication
du système nerveux sympathique qui a fait parler de sympathetically maintained pain (SMP) par les
anglosaxons. La causalgie en est un exemple comme l’algoneurodystrophie (dystrophie réflexe
sympathique) ou le syndrome épaule-main. Cette sensation douloureuse évoquée par le tact implique des
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fibres de large diamètre. Quelle est la nature et le mécanisme de l’implication sympathique ?
Cette douleur est liée à un effet périphérique du système orthosympathique :
- après section d’un filet nerveux orthosympathique, la stimulation du fragment périphérique
provoque une douleur, mais pas celle du bout central,
- l’administration locale de guanéthidine (inhibiteur de la libération de noradrénaline) diminue
la douleur observée dans les syndromes évoqués plus haut.
Mais est-ce que cette douleur est due à une augmentation de la libération de noradrénaline ou a un
changement de son activité périphérique ?
Chez un sujet normal, une administration intradermique de noradrénaline est très peu douloureuse et ne
provoque pas d’allodynie.
Si l’on fait une sympathectomie chez un patient douloureux, la sensibilité à la noradrénaline est inchangée,
son injection périphérique est douloureuse.
Il y a donc une sensibilité périphérique accrue à la noradrénaline dans ces syndromes douloureux
chroniques, basée sur une interaction noradrénaline-voies nociceptives qu’il convient de préciser.
Les douleurs avec participation sympathique sont améliorées par la phentolamine ou la phénoxybenzamine
(antagonistes des récepteurs alpha-noradrénergiques). Les récepteurs alpha sont donc impliqués. S’agit-il
de récepteurs alpha1 ou alpha2 ? Les deux précédents antagonistes ne sont pas spécifiques mais
l’administration locale de phényléphrine (agoniste alpha1) entraîne une douleur et réactive l’hyperalgie.
Cependant, la clonidine (administrée localement) est analgésiante. Il y aurait donc un effet alpha1postsynaptique (récepteurs alpha1 sur les nocicepteurs), responsable de l’hyperalgie et des récepteurs
alpha2 sur les terminaisons orthosympathiques, inhibiteurs de la libération de noradrénaline.
Mais puisque dans les conditions normales, la noradrénaline n’entraîne pas d’allodynie, cela signifie que les
nocicepteurs ne répondent pas aux afférences sympathiques et suggère qu’il existe une sensibilisation
alpha1-adrénergique dans les conditions pathologiques. Cette sensibilité aux stimulations
orthosympathiques en pathologie a été démontrée expérimentalement. Quelle est son origine ?
Une lésion périphérique initiale pourrait conduire, secondairement à l’activation des fibres nociceptives, à
une production accrue de récepteurs alpha1 par le ganglion spinal. Leur migration vers le foyer douloureux
pourrait expliquer la sensibilité secondaire de ces fibres à la libération de noradrénaline par les fibres
sympathiques. De là découlerait l’hyperpathie observée dans ces conditions. L’excès d’influx nociceptif ainsi
obtenu s’accompagnerait d’une augmentation de l’efficacité synaptique entre les terminaisons médullaires
des fibres de gros calibres et les neurones de la corne dorsale, d’où perception douloureuse de stimulations
tactiles et donc allodynie. Enfin, ce phénomène en tâche d’huile dans la corne postérieure de la moelle
pourrait s’étendre vers la corne antérolatérale et sensibiliser ainsi les neurones sympathiques, donc l’activité
accrue participerait à l’entretien du phénomène douloureux. Ces mécanismes successifs convergents vers
une implication périphérique d’une médiation noradrénergique alpha1 justifie le recours aux différentes
thérapeutiques périphériques évoquées plus haut : bloc à la guanéthidine, administration de phentolamine
ou de clonidine.
En conclusion : le système noradrénergique a une place importante dans le contrôle de la nociception
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ainsi qu’en physiopathologie, au niveau central et périphérique. Cela explique ou participe à l’intérêt
thérapeutique de l’administration centrale d’agoniste alpha2, de l’administration systémique
d’antidépresseurs, des traitements périphériques évoqués au paragraphe précédent.
II - SYSTÈME SEROTONINERGIQUE
La sérotonine (5HT), médiateur largement répandu dans le système nerveux central et dont l’implication a
été démontrée dans de nombreuses fonctions physiologiques fait aujourd’hui l’objet de nombreuses
approches pharmacologiques (anxiété, dépression, psychose, boulimie, troubles obsessionnels compulsifs,
migraine). De nombreux arguments plaident en faveur d’un rôle de la sérotonine dans la douleur.
1°- Système sérotoninergique central
1.1. Les voies sérotoninergiques.
Elles trouvent leur origine dans des noyaux B1 à B9. A large distribution centrale, elles sont
ascendantes, descendantes, voire locales. Les voies sérotoninergiques impliquées dans la
régulation de la nociception sont représentées dans la planche jointe (voies
sérotoninergiques et douleur).
Les voies bulbospinales sont particulièrement impliquées dans le contrôle de la nociception.
A noter qu’il existe de nombreuses co-localisations avec la sérotonine dans les neurones des
noyaux du raphé : substance P, somatostatine, enképhaline, TRH. Il existe également des
neurones bulbospinaux à Cholécystokinine, GABA. L’essentiel des terminaisons
sérotoninergiques spinales (toutes au niveau lombaire) sont d’origine supraspinale. Il n’existe
chez le singe par exemple qu’une très petite quantité de neurones sérotoninergiques spinaux
intrinsèques. La sérotonine médullaire participe à des synapses différenciées : avec les
neurones spino-thalamiques des couches I, IV et V et des neurones enképhalinergiques.
1.2. Les récepteurs sérotoninergiques.
1.2.1. Leur nature.
Ils sont très nombreux et pour beaucoup d’entre eux leur séquence
en acides aminés est connue (cf. planche).
1.2.2. Leur localisation médullaire.
- 5HT1 : corne postérieure (CP), couches I et II ; corne ventrale (CV), couche VII.
Les récepteurs 5HT1A représentent 50% des récepteurs 5HT1 médullaires. Ils sont répartis
dans les couches I et II avec une plus grande densité au niveau lombo-sacré qu’au niveau
cervical et thoracique ; ceci chez le rat et l’homme.
Les récepteurs 5HT1B (rats et souris ou 5HT1Dß dans d’autres espèces, l’homme) sont
localisés dans les couches I, III et IV chez le rat, sans gradient rostrocaudal. Leur densité
équivaut à 35% de celle des récepteurs 5HT1A.
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30% des récepteurs 5HT1 de la moelle épinière de rats ne correspondent pas à des sites
connus ; on les a appelés 5HT1S. Leur affinité est de l’ordre du nanomolaire. Ils semblent
être spécifiques de la corne postérieure avec une plus grande densité dans les couches
superficielles. Ils pourraient représenter une cible intéressante pour des agents qui seraient
alors dénués d’effets indésirables car la localisation de ces récepteurs est limitée et
spécifique.
- 5HT2 : il existe trois sous-types 5HT2A , 5HT2B et 5HT2C. Leur localisation est diffuse dans
la corne postérieure. Les 5HT2A étant plus concentrés dans la corne antérieure. Leur densité
est globalement très faible et leur présence est même discutée par certains auteurs.
- 5HT3 : ils sont présents essentiellement dans la couche I chez le rat comme chez l’homme.
1.2.3. Leur localisation neuronale.
1.2.3.1. Sur les fibres descendantes.
Les récepteurs 5HT1 sont post-synaptiques : la lésion par
la 5,7,dihydroxytryptamine des voies sérotoninergiques
bulbospinales n’entraîne pas de diminution de la densité
des récepteurs 5HT1 et provoque même une
augmentation de leur concentration, donc pas de
récepteur 5HT1A ou B sur les fibres noradrénergiques
descendantes. Ils sont présents en postsynaptique en
regard de ces fibres.
1.2.3.2. Sur les fibres afférentes.
- Récepteurs 5HT1A,B : la rhizotomie ou l’administration néonatale de
capsaïcine réduisent de 20 à 25% la densité en ces récepteurs. Les mRNA
qui codent pour ces deux récepteurs sont présents dans les neurones du
ganglion spinal. Il existe donc une certaine localisation présynaptique.
- Récepteurs 5HT3 : la rhizotomie ou l’administration de capsaïcine réduisent
de 50 à 80% la densité de ces récepteurs. Les mRNA sont également
présents dans le ganglion spinal. Il existe donc une large proportion de
récepteurs 5HT3 présynaptiques. Cependant, le mRNA qui code pour ces
récepteurs a également été détecté dans les couches superficielles de la
corne postérieure; il existe donc des récepteurs 5HT3 postsynaptiques.
1.3. Implication des voies sérotoninergiques bulbospinales dans la physiologie de la nociception.
1.3.1. Preuves expérimentales de leur rôle inhibiteur.
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La stimulation du noyau raphé magnus, analgésiante, provoque une augmentation des taux
de 5HT spinale, en augmentant le turn over et les taux de son métabolite. L’analgésie
secondaire à la stimulation de la substance grise périaqueducale, liée au NRM, peut être au
moins en partie prévenue par une déplétion en 5HT ou l’administration intrathécale
d’antagonistes sérotoninergiques. Les voies sérotoninergiques bulbospinales seraient
impliquées dans l’analgésie morphinique.
Les voies sérotoninergiques sont donc analgésiantes.
1.3.2. Implication physiologique de ces voies.
Leur rôle est-il tonique ou phasique ? Les résultats sont
contradictoires : les antagonistes des récepteurs sérotoninergiques
administrés par voie intrathécale ou la lésion des voies
sérotoninergiques descendantes provoquent, selon certains auteurs,
une hyperalgie, preuve d’un tonus inhibiteur. Mais l’inverse a
également été retrouvé. D’autres résultats tendraient à suggérer qu’il
n’existe pas de tonus.
1.3.3. Mécanisme de l’analgésie spinale provoquée par la sérotonine.
L’administration intrathécale de sérotonine entraîne un effet antinociceptif qui semble être
essentiellement postsynaptique par rapport aux fibres afférentes, par inhibition des neurones
nociceptifs de deuxième ordre.
La nature des récepteurs en cause n’est pas encore pleinement élucidée, parce que les
réactifs pharmacologiques utilisés ne sont toujours assez spécifiques et parce qu’il peut
exister des effets “parasites” (ex. effet stimulant moteur par stimulation 5HT1A):
- les récepteurs 5HT1A : résultats contradictoires, rôle pro- ou antinociceptif ? Peut-être plutôt
pronociceptif ? Les antagonistes 5HT1A inhibent l’analgésie morphinique.
- les récepteurs 5HT1B : opinion assez consensuelle, leur stimulation inhibe la réponse des
neurones convergents aux stimulations nociceptives.
- les récepteurs 5HT2 : leur stimulation provoque un effet antinociceptif mais l’inverse a été
retrouvé. La stimulation de récepteurs 5HT2 supra-spinaux active les voies inhibitrices
bulbospinales.
Les récepteurs 5HT3 : les antagonistes 5HT3 inhibent l’effet antinociceptif de la sérotonine
administrée par voie intrathécale. Ce sont les récepteurs postsynaptiques. Les récepteurs
5HT3 préesynaptiques exercent une action excitatrice par augmentation de libération de
substance P et de CGRP.
2°- Sérotonine périphérique et nociception
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Cours DU -Eschalier
La sérotonine exerce à ce niveau un effet pronociceptif. Libérée dans le contexte de douleurs
inflammatoires, elle active les nocicepteurs et les sensibilise aux autres agents algogènes. Elle participe
ainsi à la “soupe inflammatoire”.
2.1. Preuves expérimentales de cette influence et nature des récepteurs impliqués
L’injection intradermique de 5HT provoque une réaction inflammatoire localisée, accompagnée de douleur.
Dans un état inflammatoire provoqué par injection de carragénine, il y a libération locale de sérotonine. La
douleur inflammatoire provoquée par ce polysacharide est inhibée par un antagoniste des récepteurs 5HT3
(tropisétron).
La sérotonine augmente la libération périphérique de CGRP provoquée par la capsaïcine à partir des fibres
C de la trachée de rat, effet bloqué par le tropisétron mais pas par des antagonistes des récepteurs 5HT1 et
5HT2.
Les récepteurs 5HT2 et 1A semblent cependant être impliqués dans l’effet algésiant de la sérotonine.
Il semblerait pour résumer que l’effet pronociceptif périphérique de la sérotonine soit dû :
1 - à une activation directe des nocicepteurs, dans le cadre d’un état inflammatoire, par
action sur les récepteurs 5HT3, voire 5HT2,
2 - à une sensibilisation des nocicepteurs au chaud et à la pression par action sur les
récepteurs 5HT1A et 5HT2.
En conclusion : bien qu’un peu négligée, la sérotonine conserve un rôle, central et
périphérique, dans la physiologie et la physiopathologie de la douleur. Les modalités de sa mise
en jeu, le caractère tonique ou pas de l’implication des voies sérotoninergiques bulbo-spinales,
la nature des récepteurs et leur rôle restent encore à élucider.
Perspectives pharmacologiques : la tendance actuelle est de privilégier la noradrénaline plutôt que la
sérotonine comme facteur monoaminergique impliqué dans le contrôle du message nociceptif. Ainsi les
inhibiteurs spécifiques du recaptage de la sérotonine ne semblent pas très actifs dans les douleurs
neurogènes. Par ailleurs, la complexité de la pharmacologie de la sérotonine ne permet pas actuellement de
privilégier telle ou telle cible réceptorielle. En revanche, les récepteurs alpha2-adrénergiques médullaires
sont reconnus comme étant impliqués dans le contrôle inhibiteur de la nociception (cf supra), ce qui justifie
le développement de nouveaux agonistes de ces récepteurs (dexmédétomidine p.ex.). Le système
dopaminergique est peu exploré, même si certains résultats expérimentaux suggèrent une efficacité antinociceptive d’agonistes des récepteurs D1 et D2.
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