Comptes rendus parus dans les Archives de philosophie

Comptes rendus parus dans les Archives de philosophie
Denis Thouard
Wilhelm von Humboldt, La diversità delle lingue, Introduzione e traduzione a cura di Donatella Di Cesare,
Premessa di Tullio De Mauro, Editori Laterza, Bari, 1991, CII & 373 p.
La parution de la première traduction italienne du grand oeuvre de Wilhelm von Humboldt sur le langage, Über
die Verschiedenheit des menschlichen Sprachbaues und ihren Einfluss auf die geistige Entwicklung des
Menschengeschlechts, édité après la mort de celui-ci sur l'initiative de son frère Alexander par Eduard
Buschmann en 1836, connu également comme l'introduction à l'ouvrage Über die Kawi-Sprache auf der Insel
Java (souvent désigné simplement comme le Kawi-Werk), est à plus d'un titre un heureux événement. Elle atteste
l'intérêt que suscite aujourd'hui la pensée de Humboldt, que l'on insiste davantage sur son anthropologie
philosophique, comme Jean Quillien en France (1991), ou sur sa démarche originale, transcendantale et
empirique à la fois, dans le champ du langage, comme c'est le cas ici; elle porte d'autre part à la connaissance des
lecteurs (non seulement italiens), tant par la traduction soignée que par son ample présentation, en réalité une
synthèse des points essentiels du livre, un texte plus souvent cité que lu; ce faisant, elle alimente notre réflexion
sur les problèmes spécifiques posés par la traduction de la langue humboldtienne, dont on ne saurait se libérer en
invoquant l'obscurité stylistique de Humboldt, ni tirer prétexte pour ajuster sa pensée à des préoccupations lui
restant étrangères.
Faisant le point sur les nombreux malentendus qu'a suscité, et que suscite encore, la Diversité des langues,
l'introduction de Donatella Di Cesare s'efforce d'en restituer l'intention première, indissolublement philosophique
et empirique. Que l'on lise Humboldt dans un sens strictement linguistique, que ce soit au sens de la linguistique
comparée du siècle dernier ou dans celui d'un structuralisme de stricte obédience (ou aussi bien dans la reprise de
Chomsky), aspirant à une scientifisation de cette pensée du langage, ou que l'on reprenne quelques thèmes,
comme la notion de "forme interne de la langue " (innere Sprachform) ou d' energeia, pour nourrir une
spéculation sur la langue en général, on s'éloigne chaque fois de cette intention. Ni les aspects strictement
linguistiques de l'ouvrage, ni sa dimension philosophique évidente ne sont négligés ici, l'accent mis par
Humboldt sur la linguistique de la parole renvoyant directement celle-ci à sa dimension philosophique. Entre
science et pensée, il est possible, selon D. Di Cesare, de rencontrer cette "herméneutique du langage" entendue
comme le "point d'intersection et de connexion ciproque entre des disciplines différenciées mais coordonnées
téléologiquement en vue de l'autoréflexion de l'homme" (p. XII-XIII), laquelle s'opère de manière privilégiée
dans le langage. Les conditions d'accueil d'un tel projet d'"étude du langage comprise comme synthèse de
réflexion philosophique et transcendantale et de recherche linguistique et empirique" semblent être dorénavant
présentes.
Le choix de l'étude du langage n'est pas, pour D. Di Cesare, l'exploration d'une des dimensions qui sont offertes à
l'investigation anthropologique, mais bien le centre du projet d'une nouvelle discipline, transcendantale et
empirique à la fois : "Dans cette perspective, le passage de l'anthropologie à la philosophie du langage travers
l'esthétique- n'est pas contingent, n'est pas quelque chose qui a été dicté par le choix d'une des manifestations
possibles de l'esprit, le langage étant la manifestation par excellence de l'esprit humain, dans laquelle se révèle la
créativité du genre humain dans son ensemble, un peu comme dans une oeuvre d'art collective se produisant au
cours de l'histoire. L'étude de l'homme revient donc à l'étude du langage, puisque ce dernier est la clé pour
pénétrer la nature humaine" (p. XXVIII). Humboldt échappe à la perspective génétique et à la problématique de
l'origine du langage, communes au XVIII°, en adoptant un point de vue transcendantal; celui-ci n'est plus
compris comme hors-langue, mais en celle-ci, accomplissant ainsi ce que l'on pourrt nommer une
"transformation sémiotique du kantisme" (p. XXXIII). Le noeud entre langage et pensée révèle par la suite la
nature historique de celle-ci, le langage se alisant diversement dans les langues historiques. Cette diversi
(Verschiedenheit) foncière n'est pas cependant à prendre en un sens relativiste, mais comme un "don
inestimable", tant conséquence de la séparation des souches ethniques que moyen de la formation (Bildung) des
peuples, et surtout, comme une "diversité dans l'unité", l'individualisation des langues s'effectuant au sein "d'une
universelle concordance", ramenant à l'unité fondamentale du genre humain (p. XLIII). Cette diversiest ainsi
le ferment du caractère dialogique du langage, milieu entre l'homme et le monde parce que milieu entre les
hommes, lieu de l'objectivation des subjectivités, dont l'entre-croisement est à ne jamais perdre de vue; le fait-on,
comme à propos de la métaphore du "tout organique" pour désigner le langage, on cède à une objectivation
subreptice du phénomène du langage qui lui confère une trompeuse autonomie. Telle n'est pas l'intention de
Humboldt quand il propose cette métaphore : le langage n'est pas objectivement comme un organisme (entendu
ontologiquement), mais, simplement, il présente un caractère organique (p. XLVI); autrement dit, lire Humboldt,
c'est se défier des taphores passivement entendues (sitôt que l'on a appliqué les créations conceptuelles de
Humboldt dans une visée autre, par exemple chez Schleicher, leur dogmatisation était inévitable) pour retrouver
leur sens heuristique légitime de « métaphores vives »(cf. p. XXIII-XXVI).
La mise au point sur l'expression de la "vision du monde" est également très éclairante; si les trois termes
employés par Humboldt n'ont pas la fixité d'une "terminologie", il ne sont pas superposables, sauf à vouloir
délibérément suggérer un déterminisme et un relativisme linguistique de type néo-humboldtien : Weltbild est
l'image du monde telle que la science peut l'élaborer, Weltanschauung en revanche plutôt la conception du
monde, où une part de subjectivi(idées, croyances diverses) est incluse, alors que Weltansicht (vue du monde),
moins déterminé, n'indique que la première approche visuelle de la réalité phénoménale par l'homme (p. L). C'est
ainsi que celle-ci précède nécessairement la constitution d'une Weltanschauung ou d'un Weltbild, pour autant
qu'elle n'interprète pas le monde, mais le rend possible en remontant au moment de sa formation (p. LI). Le
concept de "forme" (pp. LII-LXX), pour évoquer encore un lieu de malentendus fréquents, est à penser dans sa
corrélation stricte avec l'energeia, dans le cadre d'une conception dynamique de la langue, et non en direction du
formalisme objectivant d'un Hjelmslev : Humboldt compare la forme d'une langue à une voie ou un chemin
qu'elle emprunterait pour se configurer, car la langue n'a pas seulement une forme, elle est forme, elle est forme
formante en tant que "procès synthétique" qui "consiste toujours dans l'unification du multiple sensible en une
forme spirituelle" (p. LVII). La forme d'une langue comprend deux aspects, externe et interne, qu'il y a peu de
sens à séparer; l'un est en effet "l'articulation du continuum phonique", conduisant à différents systèmes
phoniques en chaque langue, l'autre est "la configuration sémantique, elle aussi diverse en chaque langue, des
significations lexicales et grammaticales" (p. LXVII). Or, les études humboldtiennes, de Steinthal à Chomsky via
Weisgerber, ont proprement mythifié cette "forme interne", lui conférant, comme "principe formateur de la
langue", une autonomie et un privilège incroyables sur la forme phonique (ou sonore). Ce n'est cependant que
par la forme externe que la forme interne peut se déterminer, et l'oublier revient à négliger l'originalité et la force
de la position humboldtienne (p. LXIX).
Nombreux autres aspects, recomposant la pensée développé dans Über die Verschiedenheit, sont présentés dans
leur connexion intime : l'importance de l'analogie, le rôle du discours et la relation d'enveloppement mutuel entre
langue et discours, le lien net liant cette philosophie du langage au problème de la compréhension, le le
original de la linguistique des caractères complétant la linguistique des structures (qui comprend la typologie,
laquelle n'est pas cette hiérarchie fixe que l'on a dite), "cde voûte" de l'étude du langage selon Humboldt, qui
prend en compte les transformations de l'usage, etc.
La différence des "caractères" du français et de l'italien ne masque cependant pas leur communauté de "type",
laquelle justifie un bref examen des solutions adoptées par la traductrice, propre à nous persuader que Humboldt
est traduisible en français. Cela n'est pas à dire que l'opération soit facile, car elle engage la compréhension de
Humboldt, de même que lui-même s'est engagé dans sa recherche, son Studium, et y a joué en grande part le sort
de sa pensée. La tentative de Pierre Caussat (Introduction à l'oeuvre sur le Kavi, Seuil, 1974) aspirait à fournir
un texte lisible pour le lecteur de 1974, non sans variations terminologiques, non sans crochements
syntaxiques inutiles, non sans périphrases excessives (les passages que nous en citons plus bas n'ont d'autre
fonction que de clarifier les difficultés que rencontre tout traducteur de Humboldt).
Les choix terminologiques sont ici effectués avec sûreté, mais quelquefois les possibilités du traducteur sont
limitées : si l'on rend par exemple Sprachkunde par linguistica, en traduisant Sprachsinn par senso linguistico, on
lui donnera une marque technique à laquelle échappera Sprachform, forma della lingua; difficulté similaire avec
Lautform, rendu par forma fonica (et non "phonétique" comme dans la traduction française) et Lautsystem par
sistema dei suoni. Souvent, c'est l'interprétation qui permet de trancher ces difficultés d'ordre technique; soit le
terme de Auffassung, il est traduit par interpretazione (p. 72), auffassend par con attitudine interpretativa, et
Naturauffassung par concezione della natura dans le § sur la forme interne de la langue (p. 73; la traduction
française parlait chaque fois de "stratégie", o. c. p. 236, ou de "manière de prendre en charge", p. 234).
Pour se faire une idée du traitement d'unités discursives plus amples, il est éclairant de comparer quelques
passages de l'original avec cette traduction ainsi qu'avec la traduction française existante; les pages sur la "forme
interne de la langue" paraissent à cet égard particulièrement appropriées puisque, en un sens, il s'agit bien de cela
:
Denn es muss innerlich jeder Begriff an ihm selbst eigenen Merkmalen oder an Beziehungen auf andere
festgehalten werden, indem die Artikulationssinn die bezeichnenden Laute auffindet. Dies ist selbst bei äusseren,
körperlichen geradezu durch die Sinne wahrnehmbaren Gegenständen der Fall. Auch bei ihnen ist das Wort nicht
das Äquivalent des den Sinnen vorschwebenden Gegenstandes, sondern der Auffassung desselben durch die
Spracherzeugung im bestimmten Augenblicke der Worterfindung. Es ist dies eine vorzügliche Quelle der
Vielfachheit der Ausdrücken für die nämlichen Gegenstände; und wenn z. B; im Sanskrit der Elefant bald der
zweimal trinkende, bald der Zweizahnige, bald der mit einer Hand versehene heisst, so sind dadurch, wenn auch
immer derselbe Gegenstand gemeint ist, ebenso viele verschiedene Begriffe bezeichnet. Denn die Sprache stellt
niemals die Gegenstände, sondern immer nur die durch den Geist in der Spracherzeugung selbsttätig von ihnen
gebildeten Begriffe dar; und von dieser Bildung, insofern sie als ganz innerlich, gleichsam dem
Artikulationssinne vorausgehend angesehen werden muss, ist hier die Rede. Freilich gilt aber diese Scheidung
nur für die Sprachzergliederung und kann als in der Natur vorhanden betrachtet werden.
Car tout concept doit s'articuler intérieurement sur des indices distinctifs qui lui sont propres ou qui signalent ses
relations à d'autres concepts, tandis que , de son côté, le sens articulatoire se met en quête des marques
phonétiques. Tel est le cas même en ce qui concerne les objets extérieurs, corporels, directement perceptibles par
les sens. Ici aussi, on a affaire, avec le mot, moins à un équivalent exact de l'objet offert aux sens, qu'à la manière
dont il a été pris en charge par la production du langage à l'instant même le mot a été inventé. Nous tenons
une des sources de la pluralité des expressions disponibles pour les mes objets, et quand en Sanscrit, par
exemple, l'éléphant se nomme tantôt "l'animal qui boit deux fois", tantôt "celui qui a deux dents", tantôt "celui
qui est pourvu d'une main", on se trouve par là en présence d'autant de concepts diversement marqs, bien qu'on
y vise chaque fois le même objet. Car la langue ne représente jamais les objets, mais toujours les concepts que
s'en forme l'esprit et qu'il produit de lui-même dans la langue; et c'est de cette instauration, pour autant qu'il
s'impose de la considérer dans son intériorité, comme anticipant en quelque sorte le sens articulatoire, qu'il est ici
question. Mais, à la vérité, une telle dissociation n'a qu'une valeur méthodologique et ne saurait être imputée à la
nature elle-même. (tr. fr., p. 234-235).
Ogni concetto deve infatti venire coordinato interiormente ai tratti che gli sono proprio o alle relazioni che lo
legano ad altri concetti, mentro il senso articulario trova i suoni designativi. Questo si verifica perfino per gli
oggetti esterni, corporali, direttamente percipibili attraverso i sensi. Anche qui la parola è l'equivalente non
dell'oggetto che si offre ai sensi, ma dell'interpretazione che di quest'ultimo si dà con la produzione linguistica
nell'istante preciso dell'invenzione della parola. E di qui che scaturisce in modo particolare la moltiplicità di
espresssioni per i medesimi oggetti; quando ad esempio il sanscrito l'elefante viene chiamato ora 'quello che beve
due volte', ora 'quello con due zanne', ora 'quello provvisto di una mano', vengono in tal modo designati
altrettanti concetti diversi, benché sia sempre inteso il medesimo oggetto. Il linguaggio infatti non rappresenta
mai gli oggetti, ma sempre i concetti che lo spirito, a partire da questi, spontanamente forma nella produzione
linguistica; questa formazione è qui in questione, in quanto essa deve essere concepita come del tutto interna, in
qual modo anteriore al senso articolario. Indubbiamente, pero, questa divisione ha valore solo per l'analisi
linguistica e non la sia puo considerare come data in natura (p. 72).
Donner un extrait plus bref aurait réduit à peu l'intérêt de la comparaison; si l'on laisse au lecteur le soin
d'observer par lui-même les différentes options terminologiques effectuées, c'est-à-dire aussi bien, cela a
suffisamment é évoqué, les différentes approches interprétatives (voir par exemple la notion cardinale de
Bildung, ou la Sprachzergliederung), qu'il apprécie la performance accomplie au niveau de la tenue syntaxique
de la traduction qui, autant que le permet une langue romane, épouse le développement des phrases, des pensées,
d'un pas très naturel. La difficulde la traduction humboldtienne n'est pas de se heurter à un texte compliqué,
mais impose d'entrer dans la force productive à l'oeuvre, au coeur de son effort exploratoire, dans le foyer de
pensée du langage qui n'est précisément pas une logique, dans cette energeia. Et la pensée de Humboldt ne peut
s'atteindre en faisant l'économie de cette expérience de langage, en négligeant sa forme externe.
L'anthropologie philosophique de G. de Humboldt, de Jean Quillien, Presses Universitaires de Lille, Villeneuve
d'Ascq, 1991, 644 p.
L'oeuvre de G. de Humboldt n'est pas inconnue en France, des études et des traductions, parfois controversées,
rappellent l'importance de ce grand représentant de la culture allemande du siècle de Goethe, auquel par exemple
Louis Dumont a consacré un vaste chapitre dans L'idéologie allemande intitulé "aux sources de la Bildung "
(Gallimard, 1991, pp.1O8-184). Une présentation d'ensemble manquait cependant, ainsi qu'une tentative
d'évaluation systématique de sa pensée. Le livre de M. Jean Quillien, qui offre au lecteur une version condensée
de sa monumentale thèse (1615 p.!), vient combler cette vacance à partir d'une vaste érudition et d'une
interprétation forte : il faut lire Humboldt comme une philosophe, ouvrant à partir de la critique kantienne un
nouvel univers philosophique. Loin de toute métaphysique comme de toute théologie, Humboldt accomplirait la
philosophie de Kant en une anthropologie philosophique, dégageant ainsi l'univers du sens et fondant
réflexivement les sciences humaines. laissant système et spéculation chers à la philosophie post-kantienne, il
opérerait un "changement de terrain" (p.571) par un retour sur l'homme, ou plutôt, par l'avénement de l'homme,
puisqu'avec lui, "l'homme commence" (p.299). Il convient donc d'introduire Humboldt dans l'histoire de la
philosophie comme celui qui peut conjoindre "discours" et "langage" (p.14), inaugurant une "transformation de
la philosophie" avant K.-O. Apel (p.19), laquelle consiste cependant essentiellement pour l'A.. dans ce
recentrement sur l'homme, l'exploration de l'univers du langage ne modifiant en rien la conquête anthropologique
(p.244).
L'exposition est classique, retraçant, sur les traces de R. Leroux (G. de Humboldt. La genèse de sa pensée
jusqu'en 1794, Strasbourg, 1932), qu'il critique (note 1, pp.258-259), la genèse d'une pensée dont la structure,
l'organisation des concepts fondamentaux dans un cadre systématique reconstruit, est présentée telle qu'elle se
configure dans la décennie 1790-1800.
Les anes d'apprentissage de Humboldt montrent comment se conjuguent trois sources philosophiques
contrastées, le rationalisme de l'Aufklärung (Campe, Engel, Dohm), la "fascination" dégagée par le réalisme de
Jacobi qui se propose, "dans la tension du discours impossible", de faire "retour aux choses-mêmes" (et dont le
geste n'est pas sans rappeler celui de Heidegger, p.108), et une lecture en profondeur de Kant qui restera
décisive. Puis, suivent des années de voyage, où Humboldt paraît procéder par épuisement de domaines :
étudiant la chose politique à l'occasion d'un jour à Paris, où il arrive en août 1789, trouvant une liberté plus
Parisisch que paradiesisch (p.159), fréquentant la société, dialoguant avec F. von Genz, écrivant ses essais Sur
les limites de l'action de l'Etat (dont M. Schaub a rappelé récemment l'actualité dans les Temps Modernes,
N°525, avril 199O) ou sur la Constitution de 1791; puis se consacrant à "l'étude de l'Antiquité" en intense
contact avec F.A. Wolf, de 1792 à 1794, phase philologique à laquelle l'A. avait consacré Humboldt et la
Grèce, Modèle et histoire (PUL, 1983); en 1794, il s'installe à Iéna , en compagnie de Schiller, il se concentre
sur l'esthétique et la création poétique, résumant ses méditations sur l'imagination poétique dans l'essai Sur
Herrmann et Dorothée de Goethe (1798); de 1797 à 1801 enfin, de retour à Paris, il poursuit ses investigations
anthropologiques et remarque l'intérêt du langage pour celles-ci. Chaque fois, Humboldt prend une profonde
connaissance de ses sujets, entre en rapport avec les meilleurs spécialistes du moment, mais ne laisse de ces
études que des esquisses.
C'est ce que l'A. aimerait pouvoir appeler la "brouillonneté" de Humboldt (p.262), le caractère morced'une
oeuvre qui se présente comme une activité incessante, une energeia, une formation ou Bildung continuée : un
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