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le kaléidoscope de la physique les couleurs de la mer et du ciel
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plus loin. Le calcul de lintensité diusée
par une goutte sphérique de rayon R quel-
conque a été eectué par le physicien alle-
mand Gustav Mie en 1908. Son résultat est
une somme innie de termes qu’on peut
calculer numériquement. Pour une petite
goutte (R>λ est également simple. Dans ce
cas l’optique géométrique s’applique. Or
que dit la géométrie? Elle prévoit que le
nombre de rayons lumineux interceptés
par une sphère est proportionnel à la sec-
tion de cette sphère, donc à R2. Une grosse
goutte intercepte donc plus de rayons
qu’une petite goutte. En outre, le calcul
Par une nuit sans Lune, le ciel est
noir, à part quelques étoiles éparses.
Cela semble normal. Pourtant, il y a
énormément d’étoiles dans le ciel,
peut-être même une innité. Une
innité d’étoiles devrait produire une
luminosité innie. Le ciel noir est-il
l’indice d’un Univers ni? C’est ce que
pensait le savant allemand Johannes
Kepler au début du e siècle. Au
e siècle, un autre allemand, Hein-
rich Olbers, remarqua que les étoiles
les plus proches masquent proba-
blement les plus éloignées, de sorte
que, même si l’Univers est inni, la
luminosité ne doit pas être innie…
mais quand même très grande! L’expli-
cation actuelle est que l’Univers n’est
pas inni dans le temps. Depuis le Big-
Bang, une période dense et chaude
il y a 13,8 milliards d’années, l’Uni-
vers est en expansion. Il en résulte
que la lumière émise par les galaxies
lointaines est décalée vers le rouge.
D’autre part, lorsque l’on regarde loin,
du fait de la vitesse nie de la lumière,
on «remonte le temps»: on voit les
galaxies dans l’état où elles étaient
lorsqu’elles ont émis leur lumière, il y
a des milliards d’années. À partir d’une
certaine distance, on remonte à une
époque très proche du Big-Bang, où
les premières galaxies n’étaient pas
encore nées et l’Univers était sombre:
on atteint «l’horizon cosmologique»,
les limites de l’Univers observable.
Nous ne pouvons donc pas observer
l’Univers entier, qu’il soit ni ou inni,
et le ciel nocturne apparaît noir.
En fait il n’est pas tout à fait noir, mais
rempli d’un rayonnement électroma-
gnétique de longueur d’onde bien
plus grande que celle de la lumière
visible (de l’ordre du millimètre au
lieu du micromètre). Ce rayonnement
de faible amplitude, invisible pour nos
yeux, est mesurable par un radioté-
lescope susamment sensible (voir
gure). Sa découverte fortuite, en
1964, valut aux Américains Arno Pen-
zias et Robert Wilson le prix Nobel de
physique 1978. Il s’agit d’un «rayonne-
ment dius cosmologique » qui n’est
pas émis par des étoiles. Il subit l’ex-
pansion comme le reste de l’Univers,
et il en résulte que sa longueur d’onde
augmente avec le temps.
U Les mystères d’une nuit sans Lune
montre que l’intensité totale lumineuse
diusée par une grosse goutte ne dépend
guère de la longueur d’onde de la lumière.
Ceci explique le fait que la lumière dif-
fusée soit également blanche lorsque la
lumière incidente est blanche. Comme la
lumière du Soleil est blanche, les nuages
nous apparaissent donc blancs!
Interérences et cohérence
Le phénomène d’interférence lumi-
neuse fut mis en évidence au début du
esiècle par une expérience historique
t La première «image» de l’Univers, ou rayonnement dius
cosmologique, il y a environ 14 milliards d’années. Elle
cartographie les uctuations de température
qui agitaient l’Univers, quelques 380
000 ans après sa naissance, et qui
correspondent aux germes des futures
galaxies. date d’environ 14 milliards
d’années. Depuis la découverte de
ce rayonnement radio en 1965, il a
été étudié par les télescopes au sol et
les instruments embarqués à bord de
satellites ou dans des nacelles attachées
sous des ballons. Ici, la première image
détaillée établie par le satellite Wilkinson –
Microwave Anisotropy Probe.
du physicien anglais Thomas Young.
Les physiciens de l’époque étaient alors
partagés sur la nature de la lumière: ils
l’interprétaient comme un phénomène
ondulatoire, ce que semblait conrmer
l’expérience de Young, ou bien comme
un ux de particules. Dans la quatrième
partie de ce livre (voir chapitre 22
p.XXX), nous verrons que tous avaient
raison.
Le dispositif de Young (Figure 7) com-
prend une source lumineuse ponctuelle
S monochromatique, placée derrière
une plaque opaque où sont percés deux
trous de très faible diamètre (de l’ordre
de 0,1 mm) et peu espacés (quelques
millimètres). La lumière qui passe par
les trous est reçue sur un écran. Et ce
qu’on voit sur l’écran, ô surprise, ce n’est
pas une tache lumineuse continue, mais
une tache montrant une alternance de
franges obscures et de franges claires.
Que s’est-il passé?
L’intensité lumineuse observée en un
point M de l’écran résulte de la superpo-
sition des ondes issues des trous A et B.
Ce phénomène d’addition algébrique des
ondes provenant de points diérents s’ap-
pelle «interférence». Il peut aboutir à une
intensité totale nulle ou faible: on parle
alors d’interférences destructives ; ou à
une intensité plus élevée: les interférences
sont alors dites constructives. Le caractère
constructif ou destructif des interférences
dépend du décalage des ondes entre elles,
ou déphasage, lorsqu’elles parviennent
sur l’écran (Figure 8).
Figure visible sur l’écran
d
AB
O M
Écran
Cache percé de trous
Source
S
Dispositif
a
x
7 Expérience d’interférences
avec les trous d’Young. Une
source de lumière cohérente
vient éclairer les trous: on
observe, sur un écran, une
alternance de franges claires
et de franges sombres. Les
rayons issus de A et de B ont
«interféré». Avec un trou
unique, on observerait une
tache qui n’est pas nette et
entourée d’un anneau, à cause
du phénomène de diraction.
8 a. Deux ondes présentant
un déphasage quelconque φ.
b. Deux ondes en opposition
de phase interfèrent de
façon destructive: un
maximum d’amplitude de
l’une correspond au minimum
d’amplitude de l’autre.
t
t
a
b
E
Dans l’axe SO, les ondes issues de A et
de B arrivent en phase: on observe une
frange claire. Lorsque l’on s’écarte de
cet axe, selon le point de l’écran consi-
déré, les ondes issues des deux trous ont
parcouru une distance diérente. Leurs
phases se décalent et on observe une suc-
cession périodique de franges claires et
sombres. Il y a interférence destructive
(frange sombre) lorsque la diérence de
parcours est égale à une demi-longueur
d’onde, à un multiple de la longueur
d’onde près. Il y a interférence construc-
tive (frange claire) lorsque la diérence
de parcours est un multiple de la lon-
gueur d’onde.
Dans le visible, la longueur d’onde λ
est de l’ordre du micromètre, ce qui est
environ dix fois moins que le diamètre
d’un cheveu. Toutefois, la distance entre
les franges sur l’écran est notablement
plus grande si cet écran se trouve à une
distance d susante. La position OM =x
des franges claires se déduit de la condi-