Pour tenter de mieux étudier ce phénomène,
nous avons interrogé 154 patients en consulta-
tion de cardiologie à l’hôpital de Lariboisière,
dont 24 % de diabétiques. Ces patients ont
répondu à un questionnaire auto-administré de
17 items en salle d’attente, la validité du ques-
tionnaire étant vérifiée en consultation. Le
temps d’administration du questionnaire
variait, en fonction des personnes, de 8 à
12 minutes.
Deux cent cinquante questionnaires ont été
remis ; 59 ont été refusés.
Les items recensés par les questionnaires per-
mettaient de définir :
– les aspects majeurs de la cognition, c’est-à-
dire de la perception et de la vision que le patient
a de lui-même, d’autrui et des autres ;
– les composantes de l’affectivité, c’est-à-dire
l’intensité, la diversité et l’adéquation de la
réponse émotionnelle ;
– les fonctionnements interpersonnels.
Six profils de patients ont pu être inventoriés.
✓
Le logicien : responsable, logique, organisé. Il
aime s’informer. Il va se documenter sur sa
pathologie et la gérer en essayant de contrôler
le plus de paramètres possibles (alimentation,
traitement, style de vie). Introverti, il exprime
peu ses émotions.
Stressé, il évoque le tableau de l’obsessionnel :
il veut tout gérer, “surcontrôle”, vérifie, se fixe
des objectifs draconiens.
✓
Le moralisateur : observateur, consciencieux,
persévérant. Il a des opinions, des convictions
qu’il veut transmettre, notamment sur sa mala-
die, sur les traitements. Il s’implique dans ses
actes.
Stressé, il présente les caractéristiques de la per-
sonnalité de type A et/ou des traits paranoïaques :
il peut devenir procédurier, entrer en conflit, car il
est sujet à la colère.
✓
Le multi-sensoriel : sensible, chaleureux,
empathique, il est gourmand, il aime manger et
partager des moments conviviaux. Émotif, il se
demande pourquoi il est malade, il est affecté, il
parle de sa maladie, il se plaint.
Stressé, il présente les caractéristiques de la
personnalité dépendante et il décompense en
mangeant.
✓
L’“actionneur” : charmeur, plein de ressources,
il a une grande capacité d’adaptation. Il aime l’ac-
tion, le mouvement, la vitesse. Il aime les sensa-
tions fortes et peut consommer (tabac, alcool,
etc.) avec excès. C’est un patient qui va réagir à
l’annonce de la maladie, puis il adaptera son trai-
tement et son régime en fonction de ses résultats.
Stressé, il a les caractéristiques des personnalités
antisociales et narcissiques : il a des conduites à
risque.
✓
L’“énergisateur” : spontané, créatif, il aime
les rencontres et les contacts qui le stimulent.
Tonique, il aime s’amuser et blaguer. Il réagit de
façon très affective, il aime ou déteste, il accepte
ou refuse catégoriquement sa pathologie.
Stressé, il a les caractéristiques des personna-
lités histrioniques : il fait comme si tout allait
bien, en fait trop…
✓
Le songeur : réfléchi, rêveur, il aime le calme
et a besoin de “moments” et d’endroits propices
à la solitude. C’est un patient qui a besoin d’être
motivé et soutenu, car il craint l’échec.
Stressé, il a les caractéristiques des personnali-
tés schizoïdes : il s’isole.
Ces profils, outre leurs spécificités caracté-
rielles, ont des “représentations temporelles”
qui leur sont propres. Certains sont axés sur le
présent, d’autres se projettent dans le futur et
d’autres, enfin, se situent dans un présent pas-
séiste (figure 1).
La temporalité ainsi que cette particularité indi-
viduelle dont Hippocrate faisait déjà état sont
des aspects essentiels dans l’élaboration du
contrat thérapeutique : “En effet, c’est en pré-
voyant et en prédisant, au chevet des malades,
le présent, le passé et l’avenir, et en expliquant
en détail ce que les patients laissent de côté
qu’il les persuadera qu’il connaît mieux qu’un
autre les affaires des malades, si bien que les
gens oseront s’en remettre au médecin”
(8).
Les profils émergents sont les multisensoriels et
les logiciens. On note l’incidence de l’âge sur les
scores : le moralisateur est un profil plus repré-
senté dans la classe des plus de 65 ans (figure 2).
Pour davantage de finesse dans l’étude et la
répartition des comportements de patients,
nous avons retenu les deux scores de profil les
plus forts pour chacun (figure 3).
Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2006
30
coaching
R
ÉFÉRENCES
1.
Balint M. Le médecin, le malade et la
maladie. Collection Bibliothèque scienti-
fique Payot. Paris : Payot, 1988.
2.
Golay A, Apfeldorfer G, Zermatila JP.
Restriction cognitive face à l’obésité.
Histoire des idées. Description clinique.
Press Med 2001;32(30).
3.
Zarifian E. La force de guérir. Paris :
Odile Jacob, 1999.
4.
Prochaska JO, Norcross JC. Systems do
psychotherapy, a transtheoretical analysis.
Pacific Grove (CA) : Brooks/Cole, 1994.
5.
Reach G. Pourquoi se soigne-t-on ?
Collection Clair&Net 2005.
6.
Allaert FA. Influence du profil socio-
démographique et clinique des patients dys-
lipidémiques sur leur adhésion aux règles
d’hygiène alimentaire associées au traite-
ment hypocholestérolémiant (enquête
Nutrivast). Ann Cardiol Angeiol 2004;
53:279-89.
7.
Magometschnigg D. The role of com-
pliance in clinical care. In: Métry JM, Meye
UA, Eds. Drug regimen compliance, issues
in clinical trials and patient management.
Wiley, 1999;157.
8.
Hippocrate. Pronostic § 1. Paris : GF
Flammarion, 1999;189.
9.
Magne L, Gally O. La grande méthode
du t’as qu’à. Nutrition & Facteurs de
risques 2005;14.