JOURNAL DE PHYSIQUE Colloque Cl, supplément au n° 1, Tome 37, Janvier 1976, j?a#e Cl-67
LES MÉTHODES DE MESURE PHYSIQUE DE LA TURBULENCE
G. COMTE-BELLOT
Laboratoire de Mécanique des Fluides, Ecole Centrale de Lyon, 69130 Ecully, France
Résumé. — On examine les principales techniques de mesure qui permettent d'étudier les fluctua-
tions de vitesse, de température, de concentration, ..., dans les écoulements turbulents : anémomé-
trie à fil ou film chaud, anémométrie laser à effet Doppler, diffusion Raman, autres méthodes
optiques (en particulier strioscopie ou interférométrie avec faisceaux croisés), diffusion du son,
sondes à conductibilité électrique, sondes à induction magnétique, méthodes électrochimiques,
techniques de visualisation et de marquage.
Abstract. — The main experimental techniques employed in the investigation of velocity, tempe-
rature, or concentration fluctuations in turbulent flows are examined
:
hot-wire (or hot-film) anemo-
metry, laser Doppler velocimetry, Raman scattering, various optical methods
(e.
g.
schlieren or inter-
ferometry with crossed beams), sound scattering, electrical conductivity probes, electromagnetic
induction, electrochemical methods,
flow
visualisation and particle tracing.
1.
Introduction. — La turbulence se manifeste sur
toutes les quantités qui interviennent dans la définition
des écoulements et dans leurs propriétés fondamentales
et appliquées. Son investigation expérimentale néces-
site donc la mesure instantanée de nombreuses gran-
deurs de la physique : vitesse, température, pression,
masse volumique, concentration en constituants, en
phases ou en particules chargées, indice de réfraction,
champ électrique...
Les situations à aborder dans
les
mesures sont variées.
Il y a d'abord celles que l'on crée au laboratoire et qui
sont relativement bien définies : couches limites, jets,
sillages, modèles de turbulence isotrope ou anisotrope.
Il y a ensuite les situations plus complexes que l'on
rencontre dans les réalisations techniques actuelles
(réacteurs, turbomachines,...) ou celles qui appa-
raissent dans la nature (couche limite atmosphérique,
turbulence de ciel clair, nébuleuses, courants marins...).
La gamme des fréquences rencontrées est relative-
ment vaste, de 0,01 Hz à 100 kHz approximativement.
Elle est souvent prévisible, compte tenu des échelles
propres à la turbulence et du défilement imposé par la
vitesse moyenne U (hypothèse de Taylor). La limite
inférieure est de l'ordre de J7/C. où £ est l'échelle
intégrale de longueur ; la limite supérieure est approxi-
mativement V\t\ où r\ est l'échelle de Kolmogorov.
En outre,
rç/C
K («' C/V)_3/4, OÙ U' est la valeur efficace
des fluctuations de vitesse et v la viscosité cinématique
du fluide.
La description d'un champ turbulent peut être faite
au moyen de moyennes statistiques globales (valeurs
efficaces, spectres, corrélations...), les moyennes sur un
ensemble de réalisations du champ étant remplacées
par des moyennes temporelles (ou quelquefois spa-
tiales) plus accessibles aux mesures. Des phénomènes
importants échappent cependant à cette analyse.
L'intermittence qui apparaît à la frontière libre d'un
écoulement turbulent exige en effet la séparation des
caractéristiques propres au champ turbulent considéré
et à l'écoulement extérieur [1]. A l'intérieur même d'un
champ turbulent existent de grandes structures orga-
nisées en liaison avec les instabilités et déformations
imposées par le champ de vitesse [2]. En outre,
les zones où l'énergie cinétique est dissipée en chaleur
sont concentrées en certaines régions effilochées à
travers le champ [3]. Toutes ces structures particulières
retiennent actuellement l'attention des chercheurs [4].
Pour les atteindre, il faut, d'une part, disposer de cap-
teurs fournissant des signaux continus et, d'autre part,
réaliser les circuits électroniques aptes à fournir les
traitements appropriés (moyennes conditionnelles,
échantillonnages...).
Dans ce rapport, nous nous proposons de nous
limiter au problème liminaire qui se pose, à savoir
celui de la détection des diverses fluctuations existant à
tout instant en un point du champ turbulent. Les deux
méthodes classiques, anémométrie à fil (ou film) chaud,
et anémométrie laser à effet Doppler, sont d'abord
envisagées. Plusieurs autres techniques sont ensuite
présentées. L'accent est mis sur le principe des métho-
des et sur leurs limitations.
2.
Anémométrie à fil chaud. — L'élément sensible
est un fil fin (diamètre d ~ 0,5 à 5 um) et court
(longueur 2 / ~ 0,3 à 1 mm), chauffé par effet Joule.
Placé dans un écoulement, il est refroidi par convec-
tion, le plus souvent forcée, de sorte que sa tempéra-
ture 0, et par suite, sa résistance électrique R, dépen-
dent de la vitesse, de la température et des propriétés
physiques du fluide incident. Les lois d'échange en
régime permanent sont assez bien connues. Elle ne
font intervenir que la composante de vitesse normale
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphyscol:1976108