3- Les traumatismes du membre inféri e u r

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3 - Les traumatismes
du membre inférieur
C. Cyteval*, A. Cotten*, M-P.Sarrabère*, N. Tixedor*
Le membre inférieur a pour mission de supporter le poids du corps et de permettre de se
mobiliser; toute irrégularité articulaire entraîne une arthrose rapide et des séquelles fonctionnelles. Le bilan initial doit être précis pour permettre d’effectuer une réduction anatomique
des fractures articulaires et de préserver la longueur et l’axe de chaque segment du membre.
En urgence, la vitalité du membre traumatisé et son état vasculaire doivent être la préoccupation première.
Lésions osseuses de la ceinture
pelvienne
Les fractures de la ceinture pelvienne sont fréquentes mais
ne représentent que 2 à 3 % de l’ensemble des fractures
au cours des accidents de la voie publique. Le bassin constitue un anneau continu qui présente trois points de faiblesse : en avant, le complexe ischiopubien ; latéralement,
les cotyles; en arrière, le complexe ilio-sacré.
Le bilan radiographique standard repose essentiellement
sur quatre clichés : bassin de face ; hémibassin traumatisé
de face, oblique alaire qui déroule l’aile iliaque, explore le
bord postérieur de l’os iliaque et le bord antérieur du cotyle ; oblique obturatrice qui étudie le détroit supérieur, le
bord postérieur du cotyle et le cadre obturateur. Deux clichés complémentaires peuvent être réalisés : “outlet” ou
face ascendante qui dégage les branches supérieures et inférieures du pubis ; “inlet” ou face descendante qui permet
une bonne visualisation du sacrum (1).
Fractures du bassin (2)
Elles sont secondaires à un traumatisme violent et résultent de forces de compression directe antéro-postérieure
ou latéro-latérale et/ou de forces de cisaillement vertical
par chute d’un lieu élevé (il faut rechercher des lésions des
apophyses transverses associées). Les associations lésion*Service d’Imagerie Médicale, Hôpital Lapeyronie, Montpellier
nelles, homo latérales ou croisées, sont multiples et facteurs
d’instabilité. Elles présentent un risque hémorragique
majeur et pour certaines des risques viscéraux ou neurologiques.
Lésions postérieures
Les lésions des articulations sacro-iliaques comportent les
disjonctions pures et les fractures-disjonctions. Ces deux
entités constituent des équivalents de fracture verticale
postérieure. Les fractures verticales du sacrum (postérieures du bassin) sont toujours associées à des fractures
verticales antérieures de l’anneau pelvien. La gravité dépend
du retentissement sur les racines sacrées. Le diagnostic sur
les radiographies standard est inconstant.
Lésions de l’arc antérieur
Ce sont les fractures et disjonctions symphysaires
pubiennes. Elles sont de diagnostic facile sur les radiographies standard. Les fractures isolées sont stables mais
exceptionnelles; leur constatation impose donc la réalisation d’une TDM pour rechercher une lésion associée de
l’arc postérieur. Ces associations sont facteurs d’instabilité d’autant plus qu’elles sont souvent croisées.
Lésions de l’aile iliaque
L’hématome sous-péritonéal est particulièrement fréquent
dans ce contexte. Les fractures isolées, par choc direct,
sont plus rares (choc direct lors des accidents de moto).
27
Que faire?
La TDM a un triple intérêt en urgence ou de façon différée : le bilan plus précis des lésions (fracture postérieure
méconnue ou discordance radioclinique); la recherche de
déformations de l’anneau pelvien génératrices de cals
vicieux hautement invalidants chez la femme jeune pour
les grossesses futures ; la recherche d’hématome et de
lésion viscérale.
Les traumatismes uro-génitaux sont associés aux ruptures
de l’arc antérieur avec cisaillement du plancher pelvien.
L’embrochage vésical par une esquille osseuse est anecdotique alors qu’une déchirure, voire une section de l’urètre
sont fréquentes chez l’homme.
Les lésions directes des vaisseaux iliaques ou de l’hypogastrique par cisaillement ou par perforation osseuse sont
en fait assez rares. Une hémostase en urgence ou un geste d’embolisation de l’artère fessière ou du tronc de l’hypogastrique sont alors nécessaires. Parfois la stabilisation en
urgence par un fixateur externe permet, à elle seule, de
stabiliser l’hémorragie.
Les fractures du cotyle (3)
Lors des chocs postérieurs du bassin, les forces traumatiques
sont transmises à la tête fémorale qui se comporte comme “enclume” ; dans les impacts antérieurs transmis à
travers le col fémoral, la tête se comporte comme “butoir”.
Le siège des lésions dépend alors du degré d’abduction
et de flexion de la hanche au moment de l’impact (fractures postérieures), ou de son degré de rotation externe
(fractures antérieures).
a
b
Quatre types de fractures constituent plus de 75 % des
fractures du cotyle (paroi postérieure 27 %, transverse
9 %, associées entre elles 20 % ; colonne antérieure 5%,
colonne postérieure 4 %, associées entre elles 20 %).
Fracture de la paroi postérieure
En raison de leur mécanisme de survenue, elles sont souvent secondaires à une luxation fémorale postérieure
(Fig. 3-2). La constatation d’une fracture de la paroi postérieure doit faire penser à une luxation spontanément
réduite. Le trait de fracture est sagittal oblique alors que
tous les autres repères sont intacts. La découverte d’une
tête fémorale luxée ou excentrée doit faire rechercher une
zone d’impaction ou un fragment incarcéré (Fig. 3- 3).
Fracture de la colonne postérieure
Les luxations postérieures de la tête fémorale y sont fréquentes ainsi que les risques de lésion du nerf sciatique.
Le trait de fracture frontal court généralement de la région
de la grande échancrure sciatique vers la partie postérieure de l’arrière fond du cotyle pour finir sur la branche
ischiopubienne. La colonne postérieure est déplacée en
arrière et en rotation interne.
Fracture de la paroi antérieure
Comme les fractures de la colonne antérieure, cette lésion
résulte de forces latérales appliquées sur le grand trochanter. Le trait naît au niveau du sourcil cotyloïdien antérieur et se termine sur la partie externe de la branche iliopubienne. Le trait est en général comminutif et emporte
la partie antérieure du toit. Souvent, cette fracture est
associée à un volet de surface quadrilatère refoulé en
dedans et en arrière, alors que la paroi antérieure se déplace en avant et en dedans.
c
Fig 3-1: Fracture comminutive du toit du cotyle gauche.
a : 3/4 obturateur
b : TDM du cotyle, coupe axiale
c: Reconstruction frontale; absence d’impaction osseuse de la
tête fémorale. Présence d’un petit corps étranger intra-articulaire inférieur.
28
Traumatismes du membre inférieur
a
b
a
b
Fig 3-2 : Luxation postérieure
de la tête fémorale associée à
une fracture de la paroi postérieure du cotyle.
a) Radiographie du bassin de
face ; aspect raccourci et rotation du col fémoral faisant
évoquer la luxation
b) TDM du cotyle. Coupe axiale transverse millimétrique qui
confirme la luxation postérieure de la tête fémorale.
Fracture de la paroi postérieure. Hémarthrose avec
niveau liquide.
c
Fig 3-3: Contrôle radiographique après réduction d’une luxation postérieure de la tête fémorale
a : Radiographie du bassin de face qui montre la fracture déplacement de la paroi postérieure qui se projette en arrière de la tête
fémorale
b: Coupe axiale TDM; le fragment de la paroi postérieure du cotyle est intra articulaire
c : Reconstruction sagittale qui visualise la zone d’arrachement
sur le cotyle et la position du fragment intra-articulaire.
Fracture de la colonne antérieure
Les fractures associées
Le plus souvent, elle est associée à une fracture de la colonne postérieure ou une fracture transversale. L’intégrité de
la branche ischiopubienne permet d’éliminer une fracture de la paroi antérieure. Le trait a une orientation frontale. Il descend et coupe le toit (Fig. 3-1) sur son secteur
antérieur, l’arrière-fond et l’échancrure ischiopubienne.
Il existe parfois un refend dans l’arrière-fond aboutissant
à un large volet endopelvien. Cette fracture se caractérise essentiellement par son déplacement en rotation externe avec enroulement vers le haut et en avant.
Elles associent au moins deux des formes élémentaires
déjà décrites et divisent l’os iliaque en plus de deux fragments : fracture transversale plus fracture de la paroi postérieure; fracture des deux colonnes ; fracture en T qui
peut être assimilée à une fracture transversale avec un
pied vertical qui interrompt l’arrière-fond du cotyle et la
branche ischiopubienne ; fracture de la paroi ou colonne
antérieure plus hémitransversale postérieure; fracture des
colonnes plus paroi postérieure.
Que faire?
Fracture transversale
Son trait divise l’os iliaque en deux segments: un segment
supérieur, iliaque, rattaché au sacrum et donc stable, et un
segment inférieur, ischiopubien, instable. Ce plan de clivage passe toujours par le centre de la tête fémorale qui
peut venir se luxer en dedans (luxation centrale). La
recherche d’une lésion des articulations sacro-iliaques doit
être systématique ; en effet, cette fracture transversale
interrompt l’anneau pelvien en un seul point et la disjonction (même minime) de la sacro-iliaque est constante et réalise le second point de rupture.
L’arrière-fond du cotyle est difficilement exploré en radiographie standard; le scanner est la technique de choix pour
évaluer les fragments osseux et leur déplacement, les impactions, les diastasis, les fragments intra-articulaires; il sera
au mieux effectué après traction. Les complications précoces
sont relativement rares (compression du nerf sciatique) (4).
À long terme, la coxarthrose est en règle générale la
conséquence d’une incongruence articulaire persistante.
Le devenir de la tête fémorale est pratiquement fixé au
moment du traumatisme et quelle que soit la qualité de
la réduction chirurgicale, la nécrose peut apparaître.
29
Les luxations de hanche (5)
Elles ne posent en principe pas de difficulté diagnostique
sur les 4 clichés standard systématiquement réalisés. Elles
doivent être réduites en urgence avant l’exploration TDM,
notamment en raison du risque de paralysie du nerf sciatique.
Les fractures parcellaires
La douleur est au premier plan souvent sans impotence
fonctionnelle majeure (marche possible). Le bilan radiologique doit être guidé par la clinique qu’il s’agisse d’un
arrachement tubérositaire, d’une fracture parcellaire de
l’aile iliaque ou du cadre obturateur chez le sujet âgé. Les
traits horizontaux du sacrum peuvent être isolés et sont
bien vus sur les radiographies de profil.
Les fractures d’un seul point de l’anneau pelvien, dites
élémentaires, sont rares, et ne doivent être considérées
comme telles qu’après avoir éliminé une autre interruption de l’anneau, si besoin par TDM.
face selon la classification de Garden (Type 1 : en coxa
valga ; type 2 : sans déplacement ; type 3 : en varus accroché; type 4 : tête totalement libre) ou en confrontant les
deux incidences. Les fractures cervico ou pertrochantériennes simples sont stables, tandis que les fractures inter
ou sous-trochantériennes, pertrochantériennes complexes
ou trochantéro-diaphysaires sont instables. Le risque de
nécrose du fragment céphalique est d’autant plus important que le déplacement est marqué (Garden 3 et 4).
Rarement les fractures engre nées sont de diagnostic plus
difficile sur les clichés standard et c’est la discordance radioclinique qui nécessite la réalisation d’un scanner.
Diaphyse fémorale
Elles présentent un risque hémorragique important. Le
bilan radiologique doit être effectué après traction. Il doit
comporter deux incidences orthogonales et visualiser les
articulations sus et sous-jacentes.
Traumatisme du genou (7)
Fractures du fémur
Les fractures de l’extrémité inférieure du fémur
Extrémité supérieure du fémur (6)
Elles surviennent essentiellement chez les sujets âgés, de
sexe féminin, à l’occasion d’une simple chute (fragilité
osseuse par ostéoporose), rarement chez les sujets jeunes
lors d’un violent traumatisme (accident de la voie publique).
Le bilan radiographique standard est dans la majorité des
cas suffisant au diagnostic associant un bassin de face et
une hanche de face et de profil (profil chirurgical d’Arcelin).
Le trait peut être sous-capital, transcervical (le plus fréquent) ou basicervical. Le déplacement est apprécié de
a
b
On peut distinguer les fractures supracondyliennes métaphysaires, des fractures condyliennes épiphysaires (8). Le
diagnostic radiographique des fractures unicondyliennes
est parfois difficile. Elles nécessitent une ostéosynthèse
solide pour éviter raideur, désaxation ou arthrose.
Les fractures de la patella
Elles sont consécutives à un choc direct. Les fractures transversales (comme les ruptures du tendon quadricipital ou
du tendon rotulien) interrompent l’appareil extenseur,
elles sont de diagnostic évident sur le profil. Les fractures
sagittales sont moins évidentes sur le cliché de face.
c
Fig 3-4: TDM du genou qui permet une bonne approche morphologique de l’enfoncement d’une fracture du plateau tibial latéral
a : coupe axiale,
b : reconstruction coronale,
c : 3D vue postérieure.
30
Traumatismes du membre inférieur
Fracture des plateaux tibiaux (9)
Ce sont des fractures fréquentes qui ont un pronostic fonctionnel articulaire grave (fig. 3-4) et peuvent compromettre
la déambulation et la station debout. Ces fractures sont
secondaires à des mécanismes indirects de compression
axiale ou latérale. L’ensemble de ces lésions s’accompagne
très fréquemment de lésions ligamentaires. La fracture spinotubérositaire médiale avec comminution du massif spinal est l’équivalent d’une désinsertion osseuse du ligament
croisé antérieur. Un niveau hémato-lipidique sur le profil
de genou à rayon horizontal, dans le cul de sac sous-quadricipital, signe la fracture articulaire. Le bilan anatomique
précis passe souvent par la réalisation d’une TDM (analyse des fragments et de leur déplacement, de l’importance
du tassement associé).
tibial évoque une lésion ligamentaire associée. (Fracture
de Second) (10).
Les traumatismes de la cheville (11)
Les fractures malléolaires
On distingue les fractures sus-ligamentaires par abduction ou par rotation dans lesquelles le ligament tibio-fibulaire est toujours rompu, des fractures sous-ligamentaires
par adduction dans lesquelles le ligament reste intact. La
rotation entraîne des fractures interligamentaires.
Les clichés de face, profil et 3/4 interne et externe suffisent à faire le diagnostic. Le traitement est, en principe, chirurgical précoce pour permette la réduction parfaite.
Luxations du genou
Elles sont rares. Les radiographies standard suffisent à
montrer le sens du déplacement. Il faudra surtout s’attacher à rechercher une complication vasculaire (lésion intimale) par un Doppler ou une artériographie même si les
pouls réapparaissent.
Les entorses du genou et les lésions méniscales
Elles sont fréquentes. En cas de doute clinique, l’exploration radiologique retrouvera l’absence de fracture. Le
bilan des lésions ménisco-ligamentaires sera effectué par
l’IRM dans un second temps, en dehors du contexte
d’urgence. L’encoche du condyle externe, secondaire à
un tassement ostéochondral, doit faire évoquer une lésion
du croisé antérieur. Un arrachement latéral d’un plateau
a
Fractures du pilon tibial
Elles correspondent à un mécanisme de séparation ou
d’enfoncement. Toutes ces fractures sont marginales
(antérieures, postérieures ou bi-marginales), et presque
toutes comminutives, d’exploration standard difficile. Le
degré d’urgence est directement lié à l’amplitude du déplacement ; il est nécessaire de rétablir l’anatomie de la pince malléolaire.
Entorses de cheville
Elles concernent dans 95 % des cas le ligament collatéral
latéral. Le bilan doit rechercher un arrachement de la pointe d’une malléole ou une lésion ostéochondrale du dôme
talien (fig. 3-5).
b
Fig 3-5: Douleurs mécaniques de l’arrière-pied persistantes après une immobilisation pour entorse de la cheville.
a) radiographie standard de face
b)IRM: séquence frontale T1 confirmant la fracture ostéochondrale non déplacée de la partie supéro-interne du dôme talien.
31
Traumatisme du pied
Fractures ostéochondrales
Fractures du talus (12)
Elles doivent être classées en : impactions sous chondrales,
fractures partielles non déplacées, fractures détachées
sans déplacement, fragments ostéochondraux libérés dans
l’articulation, géodes fibreuses sous-chondrales entourées de sclérose (classification de Loomer).
Le talus ou astragale est un os court et compact, dont près
de 60 % des surfaces sont cartilagineuses : en situation
intermédiaire entre la jambe et le pied, il est soumis à de
fortes contraintes. Ces fractures sont peu fréquentes; leur
gravité dépend de la présence d’une luxation de la tibiotarsienne et/ou de la sous-talienne associée avec dans ce
cas un risque majeur d’ostéonécrose secondaire. La relative rareté de ces fractures ne doit faire méconnaître le
risque d’arthrose secondaire. On distingue les fractures
totales (ex : séparations du col et du corps), avec risque de
nécrose d’un fragment, et les fractures parcellaires dans
le cadre d’une entorse.
Fractures du calcanéum (13)
Fractures les plus fréquentes du pied (60 %), elles représentent à elles seules 2 % de toutes les fractures avec une
nette prépondérance masculine ; elles peuvent être bilatérales. Ces fractures résultent habituellement d’une chute sur les talons, entraînant un cisaillement du calcanéum
sous l’action du poids du corps, transmis par le talus, et
de la résistance au sol transmise par la grosse tubérosité
calcanéenne. Elles peuvent être associées à un tassement
vertébral lombaire.
Fractures des processus postérieurs
Ce sont les plus fréquentes (Fig. 3-6) des fractures parcellaires. Elles peuvent être associées à des fractures parcellaires de la tête ou à des luxations sous astragaliennes
isolées. La fracture du tubercule postéro-latéral (fracture
de E. Cloquet-Sheherd) est à l’origine d’un syndrome du
carrefour postérieur de la cheville de diagnostic clinique et
radiologique souvent retardé.
Fractures de l’apophyse latérale du talus
Elles passent souvent inaperçues; la symptomatologie clinique se confond le plus souvent avec celle d’une entorse. Elle doit être systématiquement recherchée sur le cliché de face avec rotation médiale de 10 à 15°. C’est le
scanner en coupe coronale qui est l’examen le plus performant devant la persistance d’un syndrome du carrefour
externe du talus.
a
Le bilan radiographique standard comprend un profil et
une incidence rétrotibiale qui visualisent en particulier l’articulation sous-talienne et la tubérosité postérieure. Les fractures extra-articulaires sont rares et de bon pronostic, les
radiographies standard sont en général suffisantes. Dans
les 3/4 des cas, les fractures du calcanéum sont complexes
atteignant l’articulation sub-talienne, et mal explorées par
les clichés standard, nécessitant un bilan TDM (Fig. 3-7)
qui précise le siège et l’orientation des traits de fractures ;
le nombre et le type de fragments principaux ; le déplacement par rapport au sustentaculum tali. Cette TDM permet également l’étude du thalamus (congruence articulaire) ; des corticales ainsi que la recherche d’un trait de
refend plantaire; des parties molles (recherche d’une incarcération des tendons fibulaires) et l’analyse du sinus du
tarse (étude du ligament interosseux) (14).
b
Fig 3-6: TDM de l’arrière- pied pour douleur à l’appui après un accident de moto.
a : Coupe axiale; fracture de l’apophyse postérieure du talus
b : Reconstruction sagittale; meilleure visualisation de la fracture
c : Coupe axiale du médio-pied; association à une fracture non déplacée de l’apophyse tibiale de
l’os naviculaire
32
c
Traumatismes du membre inférieur
a
b
c
Fig 3-7: Fracture du calcanéum chez un patient victime d’une chute de 3 mètres sur les talons.
a : radiographie de profil de l’arrière- pied; fracture comminutive du calcanéum avec diminution de l’angle de Boelher
b : TDM, reconstruction coronale après une acquisition hélicale; fracture articulaire postéro-externe du calcanéum avec enfoncement du fragment externe
c: TDM, reconstruction sagittale.
Fractures thalamiques
Luxations tibio-tarsiennes et sous-taliennes
Secondaires le plus souvent à une chute verticale par
double mécanisme de cisaillement de la grande apophyse et de compression axiale du thalamus, Duparc les classe en cinq types anatomopathologiques de gravité croissante, (en fonction du nombre de fragments), bien corrélés
au pronostic fonctionnel.
Elles représentent 15 % de la pathologie du talus et 1 %
de toutes les luxations. Elles sont rarement isolées, le plus
souvent associées à une fracture du talus ou du calcanéum avec incongruence talo-calcanéenne. Le risque de
nécrose cutanée nécessite une réduction rapide.
Fractures du bec de la grande apophyse du calcanéum
Traumatismes de l’avant pied (15)
Ce sont des fractures articulaires qui menacent la congruence de l’articulation calcanéo-cuboïdienne ; elles peuvent
être sources d’arthrose secondaire et de douleurs chroniques, s’il persiste une incongruence articulaire.
Luxations tarso-métatarsiennes de l’articulation de Lisfranc (16)
Fractures du sustentaculum tali
Elles sont souvent associées à une lésion du ligament collatéral médial. Elles posent le problème de l’avenir de l’articulation sub-talienne antérieure.
Les fractures extra-articulaires
Ce sont des fractures parcellaires extrathalamiques intéressant de façon prépondérante la grosse tubérosité du
calcanéum. Elles consolident en général sous traitement
orthopédique.
Fracture de l’os naviculaire
On distingue trois types de fractures.
Les avulsions corticales, siègent sur la face dorsale et
représentent 50 % des lésions du scaphoïde.
Les fractures du corps du scaphoïde (Fig.3-7); les fractures totales à trait horizontal avec énucléation du fragment supérieur présentent un risque de nécrose important.
Les fractures du tubercule interne, en regard de l’insertion du tendon tibial postérieur. Cette fracture peut poser
des problèmes de diagnostic différentiel avec un os scaphoïde accessoire présent chez 10 % de la population et
bilatéral chez 66 % des sujets.
Ce sont les luxations du pied les plus fréquentes, liées à un
traumatisme en flexion plantaire forcée associée à une
rotation. Elles sont volontiers associées à des fractures
telles que base du 2e métatarsien, 1er cunéiforme ou cuboïde. Le bilan radiographique comporte des clichés de face,
profil et 3/4 de l’avant pied.
Groulier et Pinaud ont proposé une classification simple:
Luxation totale ou homolatérale : tous les métatarsiens
sont déplacés dans la même direction ; Luxation totale
divergente: déplacement médial du premier métatarsien
(colonne) et latéral des quatre métatarsiens latéraux (palette); luxation partielle (déplacement isolé d’un ou de deux
métatarsiens par rapport à l’ensemble). Ces fractures peuvent passer inaperçues dans un contexte de polytraumatisé. Elles nécessitent une réduction anatomique parfaite
(à ciel fermé ou sanglante) car le risque d’arthrose secondaire est grand. En cas de comminution importante, une
arthrodèse d’emblée peut être proposée.
Fractures des métatarsiens
Elles doivent être recherchées sur les clichés de face et de
3/4 de l’avant pied, en particulier les fractures arrachement de la base du 5e métatarsien dont le fragment peut
être attiré à distance par le tendon du court fibulaire et
nécessiter un traitement chirurgical (17).
33
Les traumatismes des muscles et des
tendons (18)
Les traumatismes musculaires touchent essentiellement
les sportifs lors de l’accélération brutale ou à l’occasion d’un
effort inadapté. L’échographie est l’examen de référence qui montre une désorganisation localisée des fibres
musculaires associée à une suffusion liquidienne contre
les fascias et les aponévroses dès le deuxième jour d’évolution. Elle peut être négative dans les deux premiers jours
en raison de l’hyper échogénicité de l’hématome au stade initial. Elle apprécie le volume de l’hématome et le
degré de gravité de la lésion musculaire.
Le stade 0 est une simple contracture. Le stade 1 correspond à une élongation avec atteinte de quelques fibres
musculaires. Le stade 2 est un claquage avec lésion touchant moins de la moitié de l’épaisseur du muscle ; les
ruptures partielles sont mal visibles (hypoéchogénicité
du muscle normal) et il faut rechercher l’interruption des
cloisons conjonctivo-adipeuses échogènes interfasciculaires qui sont rompues au même niveau que les fibres.
Le stade 3 réalise une rupture complète avec possible
rétraction musculaire. L’aspect en boule du segment rompu au sein d’une collection séro-hématique constitue
l’image classique en “battant de cloche”. La rupture complète est confirmée par l’épreuve dynamique qui reproduit sur l’écran les déformations visibles à l’inspection.
L’IRM sera réservée au doute clinique ou échographique
pour faire un bilan très précis des lésions et de leur stade
d’évolution cicatricielle ou pour éliminer un processus
tumoral sous-jacent.
Fig 3-8 : Artériographie sélective de l’artère fémorale superficielle après traumatisme
jambier par arme de chasse et ischémie subaiguë du pied :
Interruption des trois troncs jambiers. L’artère poplitée sous articulaire apparaît régulière non lésée. Interruption de l’artère tibiale antérieure dès son origine. Le tronc tibiopéronier est opacifié mais il est très irrégulier, porteur de lésions intimales. Revascularisation
des axes jambiers en aval du foyer de fracture par un réseau collatéral. Le patient sera
traité par pontage court poplitéo-fibulaire.
a
b
Fig 3-9: Traumatisme du bassin lors d’un accident de voiture
a : TDM au cours d’une injection intraveineuse de produit de contraste ; fuite de produit de contraste en flaque, témoin d’un saignement
actif par lésion de l’artère iliaque interne en avant d’une fracture sagittale du sacrum.
b: Artériographie sélective de l’artère iliaque interne en vue d’une embolisation : visualisation d’un saignement actif en regard des branches présacrées.
34
Traumatismes du membre inférieur
Les traumatismes artériels (19)
La gravité des lésions vasculaires traumatiques est plus
souvent liée à des lésions artérielles qu’à des lésions veineuses. Ces lésions artérielles sont à l’origine de phénomènes ischémiques ou hémorragiques graves.
En salle d’urgence, les signes d’ischémie distale ou
d’hémorragie doivent être explorés, en premier lieu, par
l’échographie-Doppler qui peut mettre en évidence la
persistance d’une vascularisation distale non appréciable
cliniquement ou un hématome. L’artériographie est nécessaire au bilan exact des lésions (Fig. 3-8 et 9), elle montre
le type de lésion (section totale, rupture incomplète respectant l’adventice, le réseau résiduel, l’existence éventuelle d’une fistule artério-veineuse). Elle peut participer
à l’hémostase par embolisation. Si une lésion artérielle est
suspectée les clichés standard seront toujours réalisés.
En cas de lésion ostéo-articulaire ouverte avec signe
d’ischémie, après exploration chirurgicale, l’artériographie sera réalisée dans un second temps pour vérifier la
réparation des lésions artérielles. En cas de lésion ostéoarticulaire fermée, avec signe d’ischémie, on doit évoquer une compression ou une rupture artérielle si les lésions
ostéo-articulaires sont déplacées. Le Doppler vérifiera la
levée de l’ischémie après la réduction orthopédique; ce
n’est qu’en l’absence d’efficacité du traitement orthopédique que l’artériographie est indiquée pour rechercher,
soit une lésion artérielle proprement dite, soit une compression par l’hématome. Devant une ischémie distale
avec plaie des parties molles, sans lésion ostéo-articulaire (lésion par agent vulnérant ou balle), l’exploration de
la plaie vasculaire est en règle peropératoire. L’artériographie ne sera envisagée que chez un patient hémodynamiquement stable et quelquefois indiquée en pré-opératoire en cas de doute clinique sur une lésion artérielle.
Conclusion
lement utile pour apprécier le réalignement des fragments
osseux, la persistance de fragments intra-articulaires et le
positionnement correct du matériel d’ostéosynthèse.
L’existence de complications extra-osseuses intervient
en premier lieu dans la prise en charge en urgence. Les
complications vasculaires, qu’il s’agisse d’une ischémie
distale par plaie ou spasme artériel, ou d’un syndrome des
loges en rapport avec l’hématome et l’œdème post-traumatique, doivent conditionner le geste initial. De simples
phénomènes compressifs peuvent rétrocéder après réduction du foyer fracturaire. Une aponévrotomie de décharge est parfois nécessaire en urgence.
Les complications nerveuses doivent être systématiquement recherchées ; elles sont orientées par le siège de
la fracture ; une atteinte du nerf radial concerne notamment une fracture du tiers moyen de la diaphyse humérale (10 à 20 % des cas).
Les complications cutanées résultent le plus souvent de
fracture par choc direct, l’atteinte allant de la dermabrasion à la perte de substance cutanée (classification de
J. Cauchoix et J. Duparc : type 1, ouverture cutanée limitée ; type II, plaie contuse avec décollement sous-cutané,
type III, perte de substance cutanée).
Bibliographie
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5. Hougaard K, Lindequist S, Nielsen LB. Computerised
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Joint Surg (Br) 1987 ; 69 : 556-557
Au total, l’exploration radiographique standard est le plus
souvent suffisante pour localiser un foyer de fracture diaphysaire, en préciser le type et apprécier son déplacement.
Des coupes tomodensitométriques complémentaires
avec reformatage 2D voire 3D doivent être réalisées lors
de fractures articulaires : plateaux tibiaux, arrière pied.
Elles analysent les différents fragments articulaires et leurs
déplacements, la congruence articulaire ; elles précisent
la présence d’éventuelles esquilles osseuses libres en situation intra-articulaire. En post-opératoire, la TDM est éga-
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